H.D. (Hilda Doolittle), The Walls Do Not Fall [4]

«  Poésie d’un jour  »




Portrait de Hilda Doolittle
Image, G.AdC






THE WALLS DO NOT FALL [4]



There is a spell, for instance,
in every sea-shell:

continuous, the seathrust
is powerless against coral,

bone stone marble
hewn from within by that craftsman,

the shell-fish:
oyster, clam, mollusc

is master-mason planning
the stone marvel:

yet that flabby, amorphous hermit
within, like the planet

senses the finite,
it limits its orbit

of being, its house,
temple, fane, shrine:

it unlocks the portals
at stated intervals:

prompted by hunger,
it opens to the tide-flow:

but infinity? no,
of nothing-too-much:

I sense my own limit,
my shell-jaws snap shut

at invasion of the limitless,
ocean-weight; infinite water

can not crack me, egg in egg-shell;
closed in, complete, immortal

full-circle, I know the pull
of the tide, the lull

as well as the moon;
the octopus-darkness

is powerless against
her cold immortality;

so I in my own way know
that the whale

can not digest me:
be firm in your own small, static, limited

orbit and the shark-jaws
of outer circumstances

will spit you forth:
be indigestible, hard, ungiving

so that, living within,
you beget, self-out-of-self,

selfless,
that pearl-of-great-price.




H.D., The Walls Do Not Fall, Oxford University Press, London, 1944, in H.D., Trilogy, Oxford University Press, London, 1973 ; New Directions Paperbook, New York, 1998, pp. 8-9.






TrilogyLES MURS NE CROULENT PAS [4] [Traduction d’Auxeméry]



Il existe, par exemple, une formule
en chaque coquillage :

la mer pousse, continuelle,
et ne peut rien contre corail,

os, pierre, marbre
taraudés du dedans par cet artisan,

l’hôte de la coque :
huître, palourde, mollusque,

c’est un maître-maçon qui façonne
la merveille de pierre :

oui, cet ermite amorphe, flasque
là-dedans, comme la planète

pressent le fini,
il limite l’orbite

de son être, sa maison,
temple, sanctuaire, lieu saint :

il délivre les portails
à intervalles fixes :

tiraillé par la faim,
il s’ouvre au flux de la marée :

mais l’infini ? non,
de rien-de-trop :

je ressens ma propre limite,
les mâchoires de ma coque claquent

et refusent l’invasion du sans-limite,
le poids de l’océan ; l’infinité de l’eau

ne peut me briser, moi œuf dans ma coquille ;
cercle clos, immortel, complète

plénitude, je sais la force
de la marée, et la bonace

tout autant que la lune ;
le poulpe et son obscurité

sont sans pouvoir contre
sa froide immortalité ;

de même moi à ma façon, je sais
que la baleine

ne peut me digérer :
tiens bon dans ton orbite limitée, statique,

toute petite, et les mâchoires de requin
de ce qui dehors t’entoure

te recracheront :
sois indigeste, dur, sans cœur,

et ainsi vivant en dedans,
engendre-toi, toi-même de toi-même,

et sans toi,
cette perle-de-grand-prix.




H.D. (Hilda Doolittle), Les murs ne croulent pas, in Siècle 21, n° 14, Printemps-Été 2009, Dossier H.D., pp. 92-93. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Auxeméry.






Sa froide immortalité
Ph., G.AdC







LES MURS NE TOMBENT PAS [4] [Traduction de Bernard Hoepffner]



Il y a un charme, par exemple,
dans chaque coquillage :

continue, la poussée marine
n’a aucune prise sur le corail,

os, pierre, marbre
taillés du dedans par cet artisan,

le coquillage :
huître, palourde, mollusque

est maître-maçon concevant
la merveille de pierre :

pourtant cet ermite flasque, amorphe
en dedans, comme la planète

ressent le fini,
il limite l’orbite

de son être, sa maison,
temple, fanum, lieu saint :

il déverrouille les portails
à intervalles fixes :

poussé par la faim,
il s’ouvre au flot de la marée :

mais l’infinité ? Non,
de rien-de-trop :

je sens ma propre limite,
mes dents de nacre se referment

devant l’invasion du poids
illimité de l’océan ; l’eau infinie

ne peut me briser, œuf en coquille ;
cercle fermé, complet,

immortel, je connais la force brutale
de la marée, de l’étale

tout autant que la lune ;
L’obscurité de pieuvre

est impuissante devant
sa froide immortalité ;

ainsi je sais à ma façon
que la baleine

ne peut me digérer :
sois ferme dans ta petite orbite statique,

limitée, et les dents de requin
des circonstances externes

te recracheront:
sois indigeste, dure, résistante,

pour que, vivant au-dedans,
tu engendres, soi-hors-du-soi,

altruiste,
cette perle-de-grand-prix.




H.D. (Hilda Doolittle), Les murs ne tombent pas in Trilogie, José Corti, Série américaine, 2011, pp. 13-14. Traduit par Bernard Hoepffner.






La mer bis pour HD
Ph., G.AdC






H.D. (HILDA DOOLITTLE)


HildaDoolittle
Source



■ H.D.
sur Terres de femmes

At Baia
[The golden apples of the Hesperides] (extrait de Hermetic Definition)
Tribute to the Angels [40] (+ traduction en français de Bernard Hoepffner)
20 mai 1958 | Journal [Fin du tourment] de H.D.
18 avril 1958 | L’inculpation d’Ezra Pound est levée (+ d’autres extraits du Journal [Fin du tourment] d’H.D.)
→ (dans la galerie Visages de femmes)
un autre poème extrait de Trilogy d’H.D. : The Walls Do Not Fall [I] (+ traduction en français de Bernard Hoepffner)


■ Voir aussi ▼

→ (sur Les Carnets d’Eucharis de Nathalie Riera)
H.D. (Hilda Doolittle)
→ (sur books.google.fr)
de très larges extraits de Trilogy
→ (sur le site de L’Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique)
H.D. (Hilda Doolittle) à la lumière d’Ezra Pound. Communication de Georges Thines (9 septembre 2000)
→ (sur Pennsound)
H.D. lisant Helen in Egypt (37min 52′)






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Commentaires

  1. Avatar de nathalie riera
    nathalie riera

    Chère Angèle,
    très difficile de trouver des livres de H.D.
    Aux éditions de la Différence, ils sont épuisés, excepté « Hélène en Egypte »…

  2. Avatar de Angèle
    Angèle

    Oui, je sais, Nathalie. La collection Orphée n’existe plus. Mais tu peux encore trouver Le Jardin près de la mer en livre d’occasion. Sinon, Dis-moi de vivre, un madrigal (Bid Me to Live), aux éditions Des Femmes (1987).
    Bonne journée à toi,
    A.

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