Martin Rueff | Et des coups de poing dans la poitrine

«  Poésie d’un jour  »



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ET DES COUPS DE POING DANS LA POITRINE



Et des coups de poing dans la poitrine
comme une locomotive
tudum                      tudum                        tudum
tudum                      tudum                        tudum

pire que l’œuvre du père,
aux innombrables détours
aux méandres duplices
aux murs aveugles
plus égarant encore
la mer aux jambages multiples
aux issues impossibles
aux lacis inextricables et mus
(innumeras errores vias)
la mer
aux lacunes immémoreuses
au front cornu
de Minotaure lourd
aux meules comme des rocs
aux rayonnages flous
aux côtes illisibles
aux mailles larges
sans retenue aucune
la mer la mer

et partout amphitrite…

ô mer mon labyrinthe

égaré le fils ténu
par nul fil tenu
mais seul
et nu
bourdonnant dans la voie sans issue
d’une langue dédale
s’enfonçait sous la pièce sans fenêtre
aux mille trièdres
s’enfonçait
s’enfonçait

pilotis de nuit dans la nuit
petit vers de mescal
dans la bouteille immense




Martin Rueff, Icare crie dans un ciel de craie, Belin, Collection L’extrême contemporain, dirigée par Michel Deguy, 2007, pp. 55-56.






Icare crie dans un ciel de craie






Martin Rueff (né en 1968), poète, traducteur, maître de conférences à l’Université de Paris-VII-Denis-Diderot, professeur à l’Université de Bologne et, depuis 2010, professeur à l’Université de Genève. Il est l’auteur du Lapidaire adolescent (Chambéry, Comp’Act, 2001), de Corda Tesa (La Luna, 36, Ascoli Pisceno, 2006), de Comme si quelque (Chambéry, Comp’Act, 2006), Icare crie dans un ciel de craie (Belin, 2008) et La Jonction (Nous, 2019).

Spécialiste de la poésie italienne, il a participé à l’édition de l’anthologie Trente ans de poésie italienne (Po&sie 109 et 110, Belin, 2004) et a co-réalisé (avec Jean-Patrice Courtois) le Dossier Poésie italienne de la revue Le Nouveau Recueil (décembre 2006-février 2007). Il a notamment traduit Profanations de Giorgio Agamben (Payot-Rivages, 2005), Si une nuit d’hiver un voyageur (Folio-Gallimard, 2015) et, dans la collection Terra d’altri qu’il dirige aux éditions Verdier, Nulle île n’est une île de Carlo Ginzburg (2005) et Ronde des convers du poète Eugenio De Signoribus (2007).

Martin Rueff a aussi participé (aux côtés de Vincent Debaene, Frédéric Keck, Marie Mauzé) à l’édition du volume Œuvres de Claude Levi-Strauss dans la Bibliothèque de la Pléiade (Gallimard, 2008) et du tome II des Œuvres de Michel Foucault (aux côtés de Frédéric Gros, Philippe Chevallier, Daniel Defert, Bernard Harcourt et Michel Senellart) dans la même Bibliothèque de la Pléiade (Gallimard, 2015).

En mai 2008, le Prix International de poésie francophone Yvan-Goll lui a été décerné pour Icare crie dans un ciel de craie, recueil qui a aussi reçu (en août 2008) le prix Henri Mondor de l’Académie française.





MARTIN RUEFF


Martin Rueff portrait
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■ Martin Rueff
sur Terres de femmes


Icare crie dans un ciel de craie (lecture d’AP)
Le jaguar aux yeux d’eau (hommage de Martin Rueff à Claude Lévi-Strauss)
Complaintes de Mare eorum (extrait de La Jonction)




■ Voir aussi ▼


→ (sur remue.net)
une note de lecture (« En marge du cri, Martin Rueff ») de Shoshana Rappaport-Jaccottet sur Icare crie dans un ciel de craie. Cette note a également été publiée dans le n° 952-953 (août-septembre 2008. Georg Büchner – Roland Barthes) de la revue Europe





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