Rachel Blau DuPlessis | Image persistante

«  Poésie d’un jour  »



Point de fuite
Ph., G.AdC







IMAGE PERSISTANTE



Il s’est avancé dans l’espace entre

lui-même

et son agonie

ce souffle par lequel

sans patrie

les eaux nacrées remontent pour se muer en boue.

Sans plan. Cette terre

n’a pas de nom.

Profond huileux
passage, plus d’élément

primitif, ni

retours ni

reculs, loin

d’obscure découverte.






Entre ténèbre et lumière

avant que le fil blanc puisse être distingué

du noir avant qu’il soit

palpable, comment les distinguer

l’un l’autre comment

la sente noire pourrait-elle être

blanche, le champ ténébreux du miroir distingué

semi-vide, comment s’échiner et ne pas S’en

trevoir ?






Champ ténébreux, blanc miroir semi-vide il y
a là un point de fuite.

Tes yeux ouverts, vers l’intérieur,
tes yeux fixent tes yeux te
fixent encore
complice, exclu.

Puits
de fuite d’un lieu sondé.

Douce
au flanc de la colline s’émiette        la faille brune
humide

en-dedans ;
mares d’eau nue         l’écume verte monte
du fond.






Parce que
cela n’avait pas de lieu
et ne pouvait monter ni choir quelle que soit
la poussée

il marche,
avançant calmement
vers quoi

excédé par l’ennui
la banalité la
paix. Le temps.



Rachel Blau DuPlessis, « Image persistante » (1986), Tabula rosa, Potes and Poets Press, 1987, traduit par Yves di Manno in 49 + 1 Nouveaux Poètes américains choisis par Emmanuel Hocquard et Claude Royet-Journoud, Un bureau sur l’Atlantique & Éditions Royaumont, 1991, pp. 79-80-81.




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Note d’AP : le texte « Image persistante » (1986) de Rachel Blau DuPlessis a été repris dans l’ouvrage d’Yves di Manno : Objets d’Amérique, José Corti, Collection Série américaine, 2009, pp. 205-213.






RACHEL BLAU DUPLESSIS

RACHEL BLAU DuPLESSIS
Source



Rachel Blau DuPlessis est née en 1941 à Brooklyn, New York.

« J’écris ce que j’ai besoin de lire. Je travaille à partir d’une poétique de critique. Il me paraît essentiel dans mon écriture, de continuer à inventer les pratiques expérimentales et novatrices du modernisme — la prose polyvocale, le collage, l’hétéroglossie, le métissage générique, la diction créolisée — tout en les imprégnant d’une éthique et d’une sincérité qui viennent des traditions objectiviste et féministe-humaniste » (id., page 314).



■ Rachel Blau DuPlessis
sur Terres de femmes

[It’s hard for me to talk about poetry] (extrait de Brouillons)



■ Voir | écouter aussi ▼

→ (sur Electronic Poetry Center)
une bio-bibliographie de Rachel Blau DuPlessis
→ (sur PennSound)
un très grand nombre d’archives sonores et vidéos






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