Ludovic Degroote | un peu plus au bord

« Poésie d’un jour »



Le temps est au travail
Photos et collage, G.AdC






un peu plus au bord (extrait)





pour tenir dans la durée je m’expulse par fragments

je me vide

demeurer plein m’est impossible

sans ce vertige insupportable du vide

nous nous défaisons de nous-mêmes

comme si cela nous permettait de devenir plus libres

nous sortons de nulle part

lorsque nous sortons de nous-mêmes

nos débris sous le bras

nous ne durons que par effraction




*




quelles que soient les circonstances on ne descend pas
plus bas que soi

dans la rue chacun se croise avec son barda

je suis pour les sociétés où on vit nu

ça ne change pas grand-chose




*




je ne sais où en sont nathan et nirina

je ne sais pas bien non plus où j’en suis moi-même

c’est difficile de tout suivre

il y a des moments où on est moins libre

à cause de toutes ces parties qui meurent en vous

le temps est au travail

la pluie vous empêche de sortir

je me souviens que nirina avait très envie de baiser
mais c’est nathan qui n’était plus chaud non qu’il n’ait
pas envie de nirina mais il a peur que ça se passe mal
derechef

moi aussi j’ai peur depuis que je suis né

mais à la place de nathan je n’hésiterais pas

en dépit que je ne connaisse pas nirina personnellement

la vie vous prive de tant de choses

et tant de choses se passent mal dans le monde

qui passe toujours moins vite




*




tous nous allons vers le manque

comme nous en venons

je déteste qu’on me remplisse malgré moi

si seulement on pouvait s’occuper de sa vie

le temps qu’elle nous prenne en charge

Ludovic Degroote, « un peu plus au bord », in Le Début des pieds, Atelier La Feugraie, 14770 Saint-Pierre-la Vieille, 2010, pp. 40-41-42-43.





LUDOVIC DEGROOTE

Vignette ludovic degroote
Source


■ Ludovic Degroote
sur Terres de femmes

[Autour figé, amorti, sans attente] (extrait de La Digue)
Am Timan, Tchad (extrait de ligne 4)
[j’aimerais faire quelque chose de tout ça] (extrait de josé tomás)
josé tomás (lecture d’AP)
Monologue (Sotto voce de Jean-Louis Giovannoni)
Retisser la trame déchirée (note de lecture de Sylvie Fabre G.)
[chacun nous vivons avec des polyphonies intérieures] (extrait de Monologue)
zambèze (lecture d’AP)
3 ciels d’ici
Christine Delbecq | Ludovic Degroote, ChaosCarton



■ Voir aussi ▼

→ (sur Exigence : Littérature)
Le Début des pieds (note de lecture de Tristan Hordé)
→ (sur remue.net)
Le Début des pieds (note de lecture de Jacques Josse)





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Commentaires

  1. Avatar de christiane
    christiane

    ça parle vrai dans une nomination intermittente et intranquille. Regard empli d’effroi ou de fatigue. Un soi entre deux mondes comme un impossible, dispersé. Comme d’étouffer en soi. Dilution… délitement. Abandon à l’essaimage. Incertitude divergente de l’inachèvement. Renoncement à être. Oubli.
    Comme un solitaire migrant vers un rien. Des paroles se froissent et s’espacent…
    Envoûtant…

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