Ludovic Degroote | Am Timan, Tchad

« Poésie d’un jour »



AM TIMAN, TCHAD

11N-20 E
ÉTIENNE MARCEL






Il n’y a, dit-on, qu’un début, on s’arrête, on redémarre, à l’image de la vie, quoique celle-ci ne cesse qu’une fois, parce qu’on assimile à la vie mille petits faits qui la composent, vitrail ou mosaïque auxquels vous participez de si près que vous n’en avez pas de vue d’ensemble ; voilà que nous augmentons d’importance un détail qui se dissoudra demain dans la masse

on ne part jamais que de soi-même

la vie vous emmène d’un jour blanc au désert de Libye

ou d’une cave au grenier

d’Am Timam, grenier du Tchad, à Etienne Marcel, prévôt des marchands de Paris

articulations que vous franchissez sans y penser

les yeux glissant vides contre le tunnel

au fond sait-on ce que l’on traverse sinon un moment de vie

qui vous traverse

et qui passe

le temps

d’un regard ou d’une pensée

qui vous accroche

quand un groupe de tchadiennes dans leurs tenues chamarrées

apporte à la rame sourires et gaieté la vrai vie masques

aux souvenirs des machettes.



Ludovic Degroote, Ligne 4, Le Square éditeur, Collection Carnets de lignes, 2015, pp. 14-15. Illustrations de Cédric Carré.





Ligne4




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NOTE de L’ÉDITEUR

Et si la poésie se vivait au quotidien ? En projetant le plan de métro sur une mappemonde, vous avez créé 13 voyages sidérants, 13 tours du monde différents qui racontent autant d’aventures, d’impressions, de rencontres. Chaque station du métro trouve un équivalent géographique dans le monde : la station Kléber devient La Nouvelle Orléans, la station Bonne Nouvelle devient Le Caire, la station Lourmel devient l’Ile de Pâques ! Et chaque escale est l’occasion d’une pensée, d’une esquisse, d’un songe réel. […]
Ce que nous mesurons de nos vies souterraines souvent s’avère déroutant. Voilà qu’on entre chez soi ou dans une habitude qui semble vous ramener à la maison, un détail suffit à ce que votre imagination vous emmène ailleurs, je dis votre imagination par simplification de la réalité qu’elle fabrique, car ces vies souterraines n’ont pas moins de sens que celles qu’on adopte en façade, la façade présentant moins de volume que les intérieurs.

C’est ainsi que vous prenez le métro porte de Clignancourt et que vous vous retrouvez assis non loin d’un ours blanc.






LUDOVIC DEGROOTE


Vignette ludovic degroote
Source




■ Ludovic Degroote
sur Terres de femmes

[Autour figé, amorti, sans attente] (extrait de La Digue)
[j’aimerais faire quelque chose de tout ça] (extrait de josé tomás)
josé tomás (lecture d’AP)
Monologue (Sotto voce de Jean-Louis Giovannoni)
[chacun nous vivons avec des polyphonies intérieures] (extrait de Monologue)
Retisser la trame déchirée (note de lecture de Sylvie Fabre G.)
un peu plus au bord
zambèze (lecture d’AP)
3 ciels d’ici
Christine Delbecq | Ludovic Degroote, ChaosCarton



■ Voir aussi ▼

→ (sur le site de Le Square éditeur)
la page consacrée à Ligne 4







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