Kiki Dimoula | La pierre périphrase

« Poésie d’un jour


Η ΠΕΡΙΦΡΑΣΤΙΚΗ ΠΕΤΡΑ



Mίλα.
Πες κάτι, οτιδήποτε.
Μόνο μη στέκεις σαν ατσάλινη απουσία.
Διάλεξε έστω κάποια λέξη,
που να σε δένει πιο σφιχτά
με την αοριστία.
Πες:
«άδικα»,
«δέντρο»,
«γυμνό».
Πες:
«θα δούμε»,
«αστάθμητο»,
«βάρος».
Υπάρχουν τόσες λέξεις που ονειρεύονται
μια σύντομη, άδετη, ζωή με τη φωνή σου.

Μίλα.
Έχουμε τόση θάλασσα μπροστά μας.
Εκεί που τελειώνουμε εμείς
αρχίζει η θάλασσα.
Πες κάτι.
Πες «κύμα», που δεν στέκεται.
Πες «βάρκα», που βουλιάζει
αν την παραφορτώσεις με προθέσεις.
Πες «στιγμή»,
που φωνάζει βοήθεια ότι πνίγεται,
μην τη σώζεις,
πες
«δεν άκουσα».

Μίλα.
Οι λέξεις έχουν έχθρες μεταξύ τους,
έχουν τους ανταγωνισμούς:
αν κάποια απ’ αυτές σε αιχμαλωτίσει,
σ’ ελευθερώνει άλλη.
Τράβα μία λέξη απ’ τη νύχτα στην τύχη.
Ολόκληρη νύχτα στην τύχη
Μη λες «ολόκληρη»,
πες «ελάχιστη»,
που σ’ αφήνει να φύγεις.
Ελάχιστη
αίσθηση,
λύπη
ολόκληρη
δική μου .
Ολόκληρη νύχτα.

Μίλα.
Πες «αστέρι», που σβήνει.
Δεν λιγοστεύει η σιωπή με μια λέξη.
Πες «πέτρα»,
που είναι άσπαστη λέξη.
Έτσι, ίσα ίσα,
να βάλω έναν τίτλο
σ’ αυτή τη βόλτα την παραθαλάσσια.




Κική Δημουλά, Από τη συλλογή, Το Λίγο του κόσμου, εκδόσεις Νεφέλη, Ἀθήνα, 1971, in Ποιήματα, Ίκαρος, Ἀθήνα, 2005.





Kiki Dimoula poiemata







LA PIERRE PÉRIPHRASE



Parle.
Dis quelque chose, n’importe quoi.
Mais ne reste pas là comme une absence en acier.
Choisis ne serait-ce qu’un mot,
qui te liera plus étroitement
à l’indéfini.
Dis :
« en vain »,
« arbre »,
« nu ».
Dis :
« on verra »,
« impondérable »,
« poids ».
Il y a tant de mots qui rêvent
d’une vie brève, sans liens, avec ta voix.

Parle.
Nous avons tant de mer devant nous.
Là où nous finissons
la mer commence.
Dis quelque chose.
Dis « vague », qui ne tient pas debout.
Dis « barque », qui coule
quand trop chargée d’intentions.
Dis « instant »,
qui crie à l’aide car il se noie,
ne le sauve pas,
dis
« rien entendu ».

Parle.
Les mots se détestent les uns les autres,
ils se font concurrence :
quand l’un d’entre eux t’enferme,
un autre te libère.
Tire un mot hors de la nuit
au hasard.
Une nuit entière au hasard.
Ne dis pas « entière »,
Dis « infime »,
qui te laisse fuir.
Infime
sensation,
tristesse
entière
qui m’appartient.
Nuit entière.

Parle.
Dis « étoile », qui s’éteint.
Un mot ne réduit pas le silence.
Dis « pierre »,
mot incassable.
Comme ça, simplement
pour mettre un titre
à cette balade au bord de mer.




Kiki Dimoula, Le Peu du monde [Το Λίγο του κόσμου, Ἀθήνα, 1971] in Le Peu du monde suivi de Je te salue Jamais, éditions Gallimard, Collection Poésie/Gallimard, 2010, pp. 99-100. Traduit du grec par Michel Volkovitch.





Kiki Dimoula  Le Peu du monde





KIKI DIMOULA (1931-2020)


Kiki_dimoula-2
Source





■ Kiki Dimoula
sur Terres de femmes


Autoconservation (extrait du Peu du monde)
Temps allongé (extrait de Mon dernier corps)




■ Voir | écouter aussi ▼


→ (sur le site de Michel Volkovitch)
d’autres poèmes de Kiki Dimoula
→ (sur Poetry International)
dix poèmes de Kiki Dimoula
→ (sur Lumière des jours, le blog de Jacques Ancet)
un article de Jacques Ancet (« Tristesse de fond ») sur la poésie de Kiki Dimoula
→ (sur YouTube)
Kiki Dimoula lisant Φωτογραφία 1948. Pour lire la traduction cliquer ICI
→ (sur le site du Σπουδαστήριο Νέου Ελληνισμού/Center for Neo-Hellenic Studies)
trois poèmes de Kiki Dimoula (dont Ο πληθυντικός αριθμός) dits par elle-même
→ (sur YouTube)
Ο πληθυντικός αριθμός, de Kiki Dimoula, dit et interprété par Τάνια Τσανακλίδου. Pour lire la traduction, cliquer ICI
→ (sur books.google.fr)
Anthologie de Kiki Dimoula, par Eurydice Trichon-Milsani






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