Catégorie : Anthologie poétique « Poésie d’un jour »


  • Cécile Guivarch | [Écrire ses yeux]



    Kees Van Dongen 2
    Kees van Dongen (1877 – 1968),
    Symphonie bleue, vers 1920-1929
    Huile sur toile, 4,7 x 26,6 cm.
    Source








    [ÉCRIRE SES YEUX]





    Écrire ses yeux pour retrouver leur couleur
    ni un bleu de ciel ni un bleu de mer

    ni la jacinthe ni même l’iris
    ni le bleuet ni la menthe glaciale

    une certaine transparence
    dans laquelle se perdre
    pour quelle histoire


    *


    sa transparence d’eau
    (devenue invisible)




    Cécile Guivarch, Cent ans au printemps, Les Lieux-Dits éditions, Cahiers du Loup bleu, 2021, s.f.






    Cécile Guivarch  Cent ans au printemps 3





    CÉCILE GUIVARCH


    Cécile Guivarch portrait
    Ph. : Michel Durigneux
    Source





    ■ Cécile Guivarch
    sur Terres de femmes


    Cent ans au printemps (lecture d’AP)
    Cent ans au printemps (lecture de Philippe Leuckx)
    [c’est tout pour aujourd’hui] (extrait de c’est tout pour aujourd’hui)
    Cécile Guivarch, mots et mémoire en double (chronique de Marie-Hélène Prouteau)
    Sans Abuelo Petite (lecture d’Isabelle Lévesque)
    [Je ne sais pas si tu es encore jeune](extrait de Sans Abuelo Petite)
    [J’ai marché sur les morts]
    Renée, en elle (lecture d’AP)
    [des hommes tressaillent](extrait de S’il existe des fleurs)
    Vous êtes mes aïeux (lecture de Gérard Cartier)
    → (dans l’anthologie Terres de femmes)
    [ma grand-mère avait beaucoup de clés]




    ■ Voir aussi ▼


    le site terre à ciel | poésie d’aujourd’hui





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  • Erri De Luca | Due voci


    DUE VOCI





    Dicono : siete sud. No, veniamo dal parallelo grande,
    dall’ equatore centro della terra.

    La pelle annerita dalla più dritta luce,
    ci stacchiamo dalla metà del mondo, non dal sud.

    A spinta di calcagno sul tappeto di vento del Sahara,
    salone di bellezza della notte, tutte le stelle appese.

    L’acqua sopra una spalla, il fagotto sull’altro
    mantello, camicia e libro di preghiere.

    Il cielo è dritto, un cammino segnato,
    più breve della terra saliscendi.

    A sera ricuciamo il cuoio dei sandali col filo di budello
    e l’ago d’osso, ogni arnese ha valore, ma di più il coltello.

    Signore del mondo ci hai fatto miserabili e padroni
    delle tue immensità, ci hai dato pure un nome per chiamarti.





    Erri De Luca  Solo andata 2







    DEUX VOIX





    On dit : vous êtes le Sud. Non, nous venons du grand parallèle,
    de l’équateur centre de la terre.

    La peau noircie par la plus directe lumière,
    nous nous détachons de la moitié du monde, non pas du Sud.

    Par poussée de talon sur le tapis de vent du Sahara,
    salon de beauté de la nuit, toutes les étoiles en suspens.

    L’eau sur une épaule, le baluchon sur l’autre,
    manteau, chemise et livre de prières.

    Le ciel est droit, un chemin tracé,
    plus court que la terre vallonnée.

    Le soir nous recousons le cuir de nos sandales avec du fil de boyau
    et une aiguille en os, chaque outil a une valeur, mais le couteau plus encore.

    Seigneur du monde, tu nous as faits misérables et maîtres
    de tes immensités, tu nous as même donné un nom pour t’appeler.




    Erri De Luca, Aller simple [Solo andata, Giangiacomo Feltrinelli Editore, Milano, 2005], édition bilingue, éditions Gallimard, Collection Du monde entier, 2012, pp. 16-17 ; Collection Poésie/Gallimard, 2021, pp. 18-19. Poèmes traduits de l’italien par Danièle Valin.





    Erri De Luca  Aller simple





    Erri De Luca  Aller simple  Collection Poésie Gallimard



    ERRI DE LUCA


    Erri De Luca  portrait





    ■ Erri De Luca
    sur Terres de femmes


    Le plus et le moins (lecture de Martine Konorski)
    Considero valore (poème issu du recueil Œuvre sur l’eau)
    Qui a étendu ses bras au large (autre poème issu du recueil Œuvre sur l’eau)
    Volti (autre poème issu du recueil Œuvre sur l’eau)
    Piero della Francesca (poème issu du recueil L’Ospite incallito)
    Statua di Caino (autre poème issu du recueil L’Ospite incallito)
    Première heure (lecture d’AP)
    Le Tort du soldat (extrait)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur Paysages écrits)
    une lecture d’Aller simple d’Erri De Luca par Marie-Hélène Prouteau
    le site de la fondation Erri De Luca (en italien)





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  • Lambert Schlechter | [J’ai deux fois l’âge maintenant]


    Under the tree
    Lysiane Schlechter, under the tree
    in Mais le merle n’a aucun message, éditions Phi, 2020, page 101.








    [J’AI DEUX FOIS L’ÂGE MAINTENANT]





    J’ai deux fois l’âge maintenant
    de celle qui fut mon épouse

    n’est-il pas temps de dire
    enfin que c’est assez

    mais je clopine & lambine toujours
    respire dans le bonheur de respirer

    exultant exalté, ivre de vivre
    comblé par la tendresse de mes enfants

    je reste, mon amour, je reste encore un peu



    sinistré passager clandestin
    dans la cale du vaisseau fantôme

    toutes voiles dehors sous la bourrasque
    dans les louches tiédeurs du Gulf Stream

    les dauphins en oublient leurs pitreries
    et les requins redeviennent bigots

    empoignant la bouée de sauvetage
    je m’exerce en discours indirect

    disant je dis que je dis que je dis




    Lambert Schlechter, Mais le merle n’a aucun message, 99 neuvains, VIe série, éditions Phi, 2020, page 100. Dessins de Lysiane Schlechter.






    Lambert Schlechter  Mais le merle n'a aucun message 2





    LAMBERT SCHLECHTER


    Lambert Schlechter portrait NB
    Source




    ■ Lambert Schlechter
    sur Terres de femmes


    [liste des choses arrivées…] (extrait d’Agonie Patagonie)
    Inévitables bifurcations (lecture d’AP)
    3 mars 1994 | Lambert Schlechter | [cahier mou brouillon]
    4 décembre 2008 | Lambert Schlechter, Les Parasols de Jaurès
    [on ne sait plus où se réfugier] (extrait de L’Envers de tous les endroits)
    [trop de murs] (extrait de Milliards de manières de mourir)
    [Je ne sais pas ce qu’elle devient] (extrait de Monsieur Pinget saisit le râteau et traverse le potager)
    [Sans agrafe ni trombone] (extrait d’Une mite sous la semelle du Titien)




    ■ Voir aussi ▼


    → (dans le dictionnaire des auteurs luxembourgeois du site du Centre national de littérature du Luxembourg)
    une fiche bio-bibliographique sur Lambert Schlechter
    Le Murmure du monde, le blog de Lambert Schlechter





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  • Samantha Barendson | [ Il y a un poème qui meurt à Scoudouc]


    [IL Y A UN POÈME QUI MEURT À SCOUDOUC]





    Il y a un poème
    qui meurt à Scoudouc




    Au fond de ma valise
    une carte postale ancienne
    de la ville de Moncton
    une odeur de passé
    un parfum de soupente
    le papier a jauni
    le timbre s’est décollé
    l’encre bleue est devenue violette
    et l’on devine à peine
    les quelques mots écrits

    Un siècle, dix ans
    et dix-sept jours après
    me voici sur Main Street
    pardon pour le retard




    Et cette phrase
    redondante
    qui tourne dans ma tête

    Tu m’aimes-tu ?




    Samantha Barendson, Tu m’aimes-tu ?, éditions Le chat polaire, 2019, pp. 88-90.






    Samantha Barendson  Tu m'aimes-tu  Couverture





    SAMANTHA BARENDSON


    Samantha Barendson portrait





    ■ Samantha Barendson
    sur Terres de femmes


    Le Citronnier (lecture d’AP)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions Le chat polaire)
    la fiche de l’éditeur sur Tu m’aimes-tu ? de Samantha Barendson
    le site de Samantha Barendson
    → (sur Recours au poème)
    une page sur Samantha Barendson
    → (dans la Poéthèque du site du Printemps des poètes)
    une fiche bio-bibliographique sur Samantha Barendson





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  • Michel Orcel | L’Infini


    L’INFINI





    Toujours j’aimai ce petit col sauvage
    Et cette haie qui, presque tout autour,
    Prive les yeux du lointain horizon.
    Mais, assis là, contemplant, des espaces
    Sans nulle fin, sans terme, de surhumains
    Silences, une quiétude si profonde,
    Je m’invente en l’esprit, où peu s’en faut
    Que le cœur ne prenne peur. Et comme j’ois
    Le vent bruire parmi les feuilles, cet
    Infini silence-là et cette voix,
    Je les compare, et me vient l’éternel
    Et les mortes saisons, et la présente,
    Vivante, et sa rumeur. Ainsi, dans cette
    Immensité s’égare ma pensée,
    Et naufrager m’est doux sur cette mer.




    Michel Orcel, « Deux Idylles de Leopardi », L’Anti-Faust suivi d’un Sonnet et de deux Idylles de Leopardi, éditions Obsidiane, 2020, page 27 [en librairie le 16 avril 2021].






    Orcel 2




    MICHEL ORCEL


    Michel Orcel
    Source




    ■ Voir aussi ▼


    le site officiel de Michel Orcel




    ■ Voir encore ▼


    → (sur Terres de femmes) Torquato Tasso | Di nettare amoroso (traduction de Michel Orcel)





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  • Stéphane Juranics, Silence du temps


    SILENCE DU TEMPS  guidu
    Ph., G.AdC







    SILENCE DU TEMPS
    (extrait)






    et si l’on se demande parfois
    à quoi cela sert de parler
    lorsqu’innommable
    la violence de l’Histoire
    s’impacte dans les corps
    et dans les âmes
    c’est là justement
    qu’il faut noter
    ce qu’on n’ose prononcer

    la guerre des ombres
    l’exode des visages

    1915 Mouch
    jour après jour
    ces longues files effarées
    un peuple entier
    cherchant dans les montagnes
    une frêle dernière chance
    interminable chemin
    dans le désert
    où se grave son épitaphe

    1944 Céreste
    Roger Bernard gisant
    dans l’ombre d’un mûrier
    tournesol du maquis
    fauché avant l’heure
    coquelicot du Luberon
    enlevé à sa terre
    ses pétales jonchant la route
    gouttes de sang d’un partisan
    tombé pour nous

    1956 Budapest
    les chars faisant taire
    une révolution sans mots d’ordre
    sauf celui pour chacun
    de fourbir sa voix
    milliers d’antithèses
    ardentes à s’écrire
    versant l’acide
    de leur encre rebelle
    sur l’empierrante injonction
    des dogmes

    1991 Bagdad
    une nation interrompue
    par l’inintelligence des bombes
    au nom du prix du pétrole
    civilisation hébétée
    d’un tel contresens
    dunes d’adjectifs
    inhumés vifs
    sous l’impuissance verbale
    de la puissance du feu

    2002 Ramallah
    ce poids de ruines
    sur les paupières
    l’ombre arrachée
    aux forêts d’oliviers
    journalier l’héroïsme des lèvres
    sourdes au fracas des tanks
    qui rend sourd
    entre les barbelés
    perçant les tympans du ciel

    2013 Lampedusa
    l’eau qui se noie
    dans l’œil des réfugiés
    aux rêves échoués
    sur la grève
    aux noms écorchés
    sur les rochers
    leur âme restée au large
    et leurs visages
    flottant à jamais
    en surface de la mémoire

    2015 frontière hongroise
    d’heure en heure l’exil
    à travers champs
    la roue du sort voilée
    par les cahots des prés
    labourés de cohues
    innombrables sillons
    sans autres graines
    que les gouttes de sueur
    ensemençant la plaine

    et partout
    signes perceptibles des guerres
    la brisure des voix
    phrases écrasées
    sous les chenilles de l’Histoire
    les gestes nommant
    sans le dire
    la chair tuméfiée
    la tragédie du sang
    la terre enfouie
    obsidienne fichée
    dans le blanc des yeux

    ça et là
    sur la terre des chemins
    les pierres scintillant
    de rosée au soleil
    comme autant de larmes
    durcies dans l’herbe

    non
    rien de cela
    ne doit être
    passé sous silence

    […]



    Stéphane Juranics, Silence du temps, Poésie, éditions La passe du vent, 2020, pp. 23-28. Préface de Roger Dextre.






    Silence du temps




    STÉPHANE JURANICS


    S. Juranics © O. Alloyan
    Ph. © Olivia Alloyan
    Source





    ■ Voir aussi ▼


    le blog personnel de Stéphane Juranics
    → (sur le site des éditions La passe du vent)
    la fiche bio-bibliographique de l’éditeur sur Stéphane Juranics
    → (sur le site des éditions La passe du vent)
    la fiche de l’éditeur sur Silence du temps de Stéphane Juranics





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  • Ada Mondès | Orígenes | Origines


    Dans l’attente des choses inconnues Guidu
    Ph., G.AdC







    ORÍGENES





    Vengo de
    este país de sonrisas tácitas
    entre mujeres maestras de la noche
    piernas en el fuego
    que alumbraban con ojos de bruja
    en el nombre de la música de la luna llena de un
    ícono inventado
    o de los hombres fieles e infieles
    cujos hijos jugaban en lo oscuro de un techo abierto
    todas las luces allí el ruido el humo
    ladraban unos perros
    se rompía una botella de vez en cuando
    se calentaban los panes sobre las piedras de la fogata
    así pasaba la velada
    con el pelo ahumado
    las rodillas pacientes
    en la espera de las cosas desconocidas
    y todas sabían del tango
    del dolor y de la tierra
    esas heridas abiertas en el llanto
    sin quebrar el orgullo de la danza







    ORIGINES



    Je viens de
    ce pays de sourires tacites
    entre femmes maîtresses de la nuit
    les jambes dans le brasier
    qu’elles allumaient avec des yeux de sorcière
    au nom de la musique de la lune pleine d’une icône
    inventée
    ou des hommes fidèles et infidèles
    dont les enfants jouaient dans l’obscurité d’un toit
    ouvert
    toutes les lumières là-bas la fumée les bruits
    quelques chiens aboyaient
    une bouteille était brisée de temps à autre
    les pains se réchauffaient aux pierres du foyer
    la soirée passait ainsi
    l’odeur de feu dans les cheveux
    les genoux patients
    dans l’attente des choses inconnues
    et elles savaient tout du tango
    de la douleur et de la terre
    ces blessures qui s’ouvrent dans la plainte
    sans briser l’orgueil de la danse




    Ada Mondès, Le Droit à la Parole | El Derecho a la Palabra, poésie bilingue (textes translatés dans l’autre langue par l’autrice), MaelstrÖm ReEvolution, Collection Rootleg dirigée par Dante Bertoni, Bruxelles, 2020, pp. 24-25.






    Ada Mondès  Le Droit à la parole




    ADA MONDÈS


    Ada Mondès NB
    Ph. Source



    ■ Ada Mondès
    sur Terres de femmes


    J’écris pour vaincre les silences
    [Viajar con una hamaca] (extrait de Paysages cubains avec pluie)
    Puyo | El Valle (+ une notice bio-bibliographique sur Ada Mondès)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site de MaelstrÖm ReEvolution)
    la fiche de l’éditeur sur Le Droit à la Parole | El Derecho a la Palabra
    → (sur Recours au Poème)
    une page sur Ada Mondès
    → (sur Terre à ciel)
    une sélection de textes





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  • Kimberly Blaeser | Manoominike-giizis


    Résister en dansant







    MANOOMINIKE-GIIZIS





    Ricing moon
    when poling arms groan
    like autumn winds through white pine.
    Old rhythms find the hands
    bend and pound the rice,
    rice kernels falling
    falling onto wooden ribs
    canoe bottoms filling with memories —
    new mocassins dance the rice
    huffs of spirit wind lift and carry the chaff
    blown like tired histories
    from birchbark winnowing baskets.
    Now numbered
    by pounds, seasons, or generations
    lean slivers of parched grain
    settle brown and rich
    tasting of northern lakes
    of centuries.







    MANOOMINIKE-GIIZIS



    Lune du riz*
    quand les bras poussant sur les perches gémissent
    pareils aux vents d’automne dans les pins blancs.
    Des rythmes anciens trouvent les mains,
    courbent et battent le riz,
    les grains tombent
    tombent sur des côtes en bois
    au fond des canoés qui se remplissent de souvenirs —
    des mocassins neufs dansent le riz
    les soupirs de l’esprit vent lèvent et portent la balle
    soufflée comme des histoires fatiguées
    depuis des paniers d’écorce de bouleau.
    Maintenant numérotés
    en grammes, saisons, ou générations
    de maigres éclats de grains séchés
    s’installent bruns et riches
    ayant le goût des lacs du nord
    le goût des siècles.




    Kimberly Blaeser, « Manoominike-giizis » [« II. Hunger for Balance », Copper Yearning, Holy Cow Press, Duluth, Minnesota, 2019, p. 45], in Résister en dansant | Ikwe-Niimi : Dancing Resistance, édition bilingue, éditions des Lisières, Nyons, 2020, pp. 36-37. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Béatrice Machet.



    _____________
    * Les Indiens ne divisaient pas l’année en mois mais en lunes. Le nom de chaque lune était donné en fonction d’un événement marquant se déroulant pendant cet intervalle de 28 jours.






    Résister en dansant 3




    KIMBERLY BLAESER


    Kim-blaeser-homepage
    Source




    ■ Voir aussi ▼


    le site de Kimberly Blaeser
    → (sur Terre à ciel)
    une lecture de Résister en dansant par Jean Palomba





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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Elio Pecora | Lo spessore dell’ombra

    « Poésie d’un jour
    choisie et traduite par Irène Dubœuf



    OMBRES  Pecora
    « Chaque histoire est un enchevêtrement d’innombrables histoires,
    une accumulation d’élans et de départs. »
    Ph., G.AdC








    LO SPESSORE DELL’OMBRA
    (estratto)




    «L’aria è piena di anime» avverte Pitagora. E l’anima
    è un vento che parla e la parola è corpo, gesto, cammino.
    Ogni storia è groviglio di innumerevoli storie, cumulo
    di abbrivi e di partenze. Non è perdita l’addio
    se lascia tracce nelle stanze aperte del cuore.
    Così, nel variare dei verdi, nel trasmutare dell’ora,
    lui che ha volte si teme disperso, ombra lui stesso
    d’inconsistenza, sa infine di stare nel poco che è molto,
    di seguitare abitato da quanto ancora pulsa
    e ripete un copione tutto da ampliare e da leggere meglio:
    spettacolo interminabile con diversi attori e fondali
    da cambiare di continuo. Ombre alle ombre si aggiungono,
    hanno lo stesso spessore di quelli avidi e confusi
    che vagano nel recinto brulicante dei vivi,
    ma raffrenate queste da un patto concluso.

    Non è uno spazio appartato, né uno stretto giardino:
    recinto di fiori, di arbusti (la tuia, il loto, l’ortensia,
    il gigantesco agrifoglio). È la sponda di un sogno
    e tocca il cuore se il battito rallenta, abbuia le pupille
    se è un altro vedere. In un tempo che esclude le ore
    di un’estate fra tante, recide il presente, accosta
    quel che sembrava perduto e lo fa chiaro e segreto,
    ancora da intendere. Non è la discesa in un Ade
    improbabile, non un viaggio nel paese dei Cimmeri.
    È inadeguato chiamare ombre queste che si appressano
    se all’ombra annettiamo il riflesso di una parvenza.
    Non sono larve, frammenti. Hanno mani, hanno piedi,
    e nomi e gesti. Abitatori di un mondo senza peso
    si rendono alla durata. Scaglie di una lacerazione
    si ritraggono all’ordito.

    Alle domande mute mute rispondono.

    Non abitano inferni vigilati da mostri
    né paradisi sorvolati da angeli pazienti:
    restano in mezzo a noi queste ombre, ci chiamano.
    Hanno lasciato le loro carni a marcire
    dentro loculi angusti o sotto strati di terra scura,
    sono uscite dai corpi vuoti, senza respiro.
    Tornano sciolte, leggere, nel rumore dei giorni,
    niente del mondo potrà mai più toccarle.
    Pare a volte di udirne la voce, ne ascolti la frase
    che ti confortò o che ti offese. A volte ne scorgi
    le mani irrequiete, il colore degli occhi.
    A volte spostano una sedia, un libro,
    un cuscino ricamato; a volte
    ti precedono in una strada affollata
    e nemmeno si voltano.
    Ferme alle porte di una città senza nome
    attendono solo che tu gli vada incontro
    per un saluto breve.



    Elio Pecora, “Lo spessora dell’ombra”, Rifrazioni, Mondadori Libri, Collezione Lo Specchio, Milano, 2018, pp. 82-84.






    Elio Pecora  Rifrazioni








    L’ÉPAISSEUR DE L’OMBRE
    (extrait)




    «L’air est rempli d’âmes » prévient Pythagore. Et l’âme
    est un vent qui parle et la parole est corps, geste, voyage.
    Chaque histoire est un enchevêtrement d’innombrables histoires, une accumulation
    d’élans et de départs. L’adieu n’est pas une perte
    s’il laisse des traces dans les chambres ouvertes du cœur.
    Ainsi, dans la fluctuation des verts, dans la transmutation de l’heure,
    celui qui parfois craint d’être dispersé, lui-même ombre
    de l’inconsistance, sait finalement qu’il réside dans le peu qui est beaucoup,
    qu’il persiste, habité par ce qui bat encore,
    et répète un scénario à développer complètement et à mieux lire :
    un interminable spectacle avec des acteurs différents et des toiles de fond
    qu’il faut sans cesse changer. Des ombres s’ajoutent aux ombres
    elles ont la même épaisseur que ceux-là mêmes qui errent
    avides et confus dans l’enceinte grouillante des vivants,
    mais limitées qu’elles sont par un pacte conclu.

    Ce n’est pas un espace à part ni un étroit jardin :
    un enclos de fleurs, d’arbustes (le thuya, le lotus, l’hortensia,
    le gigantesque houx). C’est le bord d’un songe
    qui touche le cœur quand son battement ralenti, assombrit les pupilles
    si l’on regarde autrement. Dans un temps qui exclut les heures
    d’un été parmi d’autres, coupe-court au présent, s’approche
    de ce qui semblait perdu et le rend clair et secret,
    encore à concevoir. Ce n’est pas la descente dans un Hadès
    improbable, pas plus qu’un voyage au pays des Cimmériens
    il est impropre d’appeler ombres celles qui s’approchent
    si l’on prête à l’ombre une apparence extérieure.
    Ce ne sont pas des fantômes, des fragments. Elles ont des mains, elles ont des pieds
    et des noms et des gestes, habitantes d’un monde sans poids
    elles s’en remettent à la durée. Éclats d’une déchirure
    elles se retirent dans la trame originelle.

    Aux demandes muettes, muettes elles répondent.

    Elles n’habitent pas des enfers gardés par des monstres
    ni des paradis survolés d’anges patients :
    ces ombres-là restent au milieu de nous, elles nous appellent.
    Elles ont laissé pourrir leur chair
    dans des niches funéraires ou sous des couches de terre obscure
    sont sorties des corps vides, sans respiration.
    Elles reviennent, légères, se fondent dans le bruit des jours
    plus rien de ce monde ne pourra les toucher.
    On dirait que parfois on entend leur voix, on perçoit la phrase
    qui réconforta ou offensa. Parfois on aperçoit
    leurs mains agitées, la couleur de leurs yeux.
    D’autres fois elles déplacent une chaise, un livre,
    un coussin brodé, il arrive
    qu’elles vous précèdent dans une rue emplie de monde
    et elles ne se retournent même pas.
    Immobiles aux portes d’une ville sans nom,
    elles attendent simplement que vous alliez à leur rencontre
    pour échanger un rapide bonjour.



    Traduction en français inédite d’Irène Dubœuf
    pour Terres de femmes




    ELIO PECORA


    Elio-pecora
    Source






    ■ Voir | écouter aussi ▼


    → (sur Italian Poetry)
    une notice bio-bibliographique sur Elio Pecora
    → (sur raiplay.it)
    Pino Strabioli incontra Elio Pecora, con cui parla della sua raccolta di poesie Rifrazioni (14/03/2018)





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  • Michel Diaz | [de tourbe]



    Olivia Rolde 2
    Olivia Rolde, Road movie underground
    in Michel Diaz, Offrandes Olivia Rolde,
    Thi lùu éditions, 2020, page 24.
    Source








    [DE TOURBE]




    de tourbe
    de cailloux de sable
    de racines d’écorce de sève
    de ronces d’arc-en-ciel de nuages

    de rameaux convulsifs
    de feuilles pourrissantes sous des lunes amères
    et de miroitement d’étangs éblouis de clarté
    de flexion d’âme d’agonie glaciaire

    de lichen de vase d’eaux sales
    de noces indécises et d’oiseaux de glaise
    de soleil blanc d’étoiles mortes
    de plaintes telluriques
    et de pierres vives

    de chemins traversés
    de vent et de vols de ramiers
    d’éclairs calligraphiques et de songes furtifs
    de moellons muets et de remparts aveugles

    d’échos de mer
    d’algues visqueuses
    de stridences de sauterelles
    de chants barbares et de cris d’exil

    d’appels de fond d’entrailles
    d’yeux coulés dans la chaux
    de nerfs de sang et d’os

    — être devant
    et être tout ce qui est


    comme un pauvre parmi les pauvres
    dans l’offrande du jour immense

    comme une branche est dans le feu



    Michel Diaz, « écrire, peindre », Offrandes Olivia Rolde, Thi lùu éditions, 37540 Saint-Cyr-sur-Loire, 2020, page 25. Préface de Daniel Leuwers.





    Michel Diaz Offrandes




    MICHEL DIAZ


    Michel Diaz
    Source




    ■ Michel Diaz
    sur Terres de femmes


    Comme un chemin qui s’ouvre (lecture d’AP)
    Ce qui gouverne le silence (extrait de Comme un chemin qui s’ouvre)
    clair-obscur (extrait de Lignes de crête)
    Le Verger abandonné (lecture d’AP)




    ■ Voir aussi ▼


    le site de Michel Diaz
    le site d’Olivia Rolde




    ■ Notes de lecture de Michel Diaz
    sur Terres de femmes


    Jeanne Bastide, La nuit déborde
    Alain Freixe, Contre le désert
    Françoise Oriot, À un jour de la source





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