Catégorie : Anthologie poétique « Poésie d’un jour »


  • Henri Michaux | La Ralentie




    On a perdu le secret des hommes.
    Ph., G.AdC






    LA RALENTIE

    (Extrait)




        Ralentie, on tâte le pouls des choses ; on y ronfle ; on a tout le temps ; tranquillement, toute la vie. On gobe les sons, on les gobe tranquillement, toute la vie. On vit dans son soulier. On y fait le ménage. On n’a plus besoin de se serrer. On a tout le temps. On déguste. On rit dans son poing. On ne croit plus qu’on sait. On n’a plus besoin de compter. On est heureuse en buvant ; on est heureuse en ne buvant pas. On fait la perle. On est, on a le temps. On est la ralentie. On est sortie des courants d’air. On a le sourire du sabot. On n’est plus fatiguée. On n’est plus touchée. On a des genoux au bout des pieds. On n’a plus honte sous la cloche. On a vendu ses monts. On a posé son œuf, on a posé ses nerfs.
        Quelqu’un dit. Quelqu’un n’est plus fatigué. Quelqu’un n’écoute plus. Quelqu’un n’a plus besoin d’aide. Quelqu’un n’est plus tendu. Quelqu’un n’attend plus. L’un crie. L’autre obstacle. Quelqu’un roule, dort, coud, est-ce toi Lorellou?

        Ne peut plus, n’a plus part à rien, quelqu’un.

        Quelque chose contraint quelqu’un.

        Soleil, ou lune, ou forêts, ou bien troupeaux, foules ou villes, quelqu’un n’aime pas ses compagnons de voyages. N’a pas choisi, ne reconnaît pas, ne goûte pas.

        Princesse de marée basse a rendu ses griffes ; n’a plus le courage de comprendre ; n’a plus le cœur à avoir raison.

        …Ne résiste plus. Les poutres tremblent et c’est vous. Le ciel est noir et c’est vous. Le verre casse et c’est vous.

        On a perdu le secret des hommes.

        Ils jouent la pièce « en étranger ». Un page dit « Beh » et un mouton lui présente un plateau. Fatigue ! Fatigue ! Froid partout !

        Oh ! Fagots de mes douze ans, où crépitez-vous maintenant ?


    Henri Michaux, La Ralentie in Plume précédé de Lointain intérieur, Éditions Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1998, pp. 573-574.



    HENRI MICHAUX


    Henri Michaux
    Source




    ■ Henri Michaux
    sur Terres de femmes

    24 mai 1899 | Naissance de Henri Michaux
    28 décembre 1927 | Henri Michaux embarque pour l’Équateur
    Mes Propriétés (extrait)
    3 juin 1937 | Première exposition Michaux (article sur la peinture de Henri Michaux)
    12 février 1965 | Rétrospective Henri Michaux
    19 octobre 1984 | Mort de Henri Michaux






    Retour au répertoire du numéro de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Vladimir Maïakovski | Maïakovski au ciel




    MA-AKOVSKI AU CIEL
    Image, G.AdC






    MAÏAKOVSKI AU CIEL

    (Extrait)



    Stop !

    Je dépose sur un nuage
    la charge
    de mes affaires
    et de mon corps fatigué.
    Endroit propice où je n’étais jamais venu avant.

    J’examine les lieux.
    ainsi
    ce poli bien léché,
    c’est donc cela le ciel que l’on nous vante.

    Nous verrons, nous verrons !

    Ça étincelle,
    ça scintille,
    ça brille
    et
    cela bruit —
    un nuage
    ou bien
    des esprits
    qui glissent sans bruit.

    « Si une belle jure un amour fidèle… »

    Ici,
    au firmament du ciel,
    entendre la musique de Verdi ?
    Par le jour d’un nuage,
    je jette un œil —
    les anges chantent.
    Les anges vivent dignes,
    fort dignes.

    L’un d’eux se détache
    et rompt aimablement
    son silence somnolent :
    « Alors,
    Vladimir Vladimirovitch,
    l’infini vous plaît-il ? »
    Et moi de répondre aussi aimablement :
    « Charmant, cet infini.
    C’est un ravissement ! »



    Vladimir Maïakovski, À pleine voix, Anthologie poétique 1915-1930, Éditions Gallimard, Collection Poésie, 2005, pp. 130-131-132. Préface de Claude Frioux. Traduction de Christian David.





    VLADIMIR MAÏAKOVSKI


    Maïakovski
    Source



    ■ Vladimir Maïakovski
    sur Terres de femmes

    Impossible



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Terres de femmes)
    18 septembre 1921 | Marina Tsvétaïeva (À Maïakovski)






    Retour au répertoire du mois de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Jean de La Ville de Mirmont, L’Horizon chimérique




               Je_me_suis_embarqu-_sur_un_vaisseau_qui_danse
                Source






                                     L’HORIZON CHIMÉRIQUE


                                                      (extraits)



                                                            V


    Vaisseaux, nous vous aurons aimés en pure perte ;
    Le dernier de vous tous est parti sur la mer.
    Le couchant emporta tant de voiles ouvertes
    Que ce port et mon cœur sont à jamais déserts.

    La mer vous a rendus à votre destinée,
    Au-delà du rivage où s’arrêtent nos pas.
    Nous ne pouvions garder vos âmes enchaînées ;
    Il vous faut des lointains que je ne connais pas

    Je suis de ceux dont les désirs sont sur la terre.
    Le souffle qui vous grise emplit mon cœur d’effroi,
    Mais votre appel, au fond des soirs, me désespère,
    Car j’ai de grands départs inassouvis en moi.






                                                         XI


    Diane, Séléné, lune de beau métal,
    Qui reflètes vers nous, par ta face déserte,
    Dans l’immortel ennui du calme sidéral,
    Le regret d’un soleil dont nous nous pleurons la perte,

        O lune, je t’en veux de ta limpidité
    Injurieuse au trouble vain des pauvres âmes,
    Et mon cœur, toujours las et toujours agité,
    Aspire vers la paix de ta nocturne flamme.






                                                       XIII


    La Mer est infinie et mes rêves sont fous.
    La mer chante au soleil en battant les falaises
    Et mes rêves légers ne se sentent plus d’aise
    De danser sur la mer comme des oiseaux soûls.

    Le vaste mouvement des vagues les emporte,
    La brise les agite et les roule en ses plis ;
    Jouant dans le sillage, ils feront une escorte
    Aux vaisseaux que mon cœur dans leur fuite a suivis.

    Ivres d’air et de sel et brûlés par l’écume
    De la mer qui console et qui lave des pleurs
    Ils connaîtront le large et sa bonne amertume ;
    Les goélands perdus les prendront pour des leurs.






                                                        XIV


    Je me suis embarqué sur un vaisseau qui danse
    Et roule bord sur bord et tangue et se balance.
    Mes pieds ont oublié la terre et ses chemins ;
    Les vagues souples m’ont appris d’autres cadences
    Plus belles que le rythme las des chants humains.

    À vivre parmi vous, hélas ! avais-je une âme ?
    Mes frères, j’ai souffert sur tous vos continents.
    Je ne veux que la mer, je ne veux que le vent
    Pour me bercer, comme un enfant, au creux des lames.

    Hors du port qui n’est plus qu’une image effacée,
    Les larmes du départ ne brûlent plus mes yeux.
    Je ne me souviens pas de mes derniers adieux…
    O ma peine, ma peine, où vous ai-je laissée?

    [Voilà ! Je suis parti plus loin que les Antilles,
    Vers des pays nouveaux, lumineux et subtils.
    Je n’emporte avec moi, pour toute pacotille,
    Que mon cœur… Mais les sauvages, en voudront-ils ?]*




    Jean de La Ville de Mirmont, L’Horizon chimérique, suivi de Les Dimanches de Jean Dézert et Contes, Bernard Grasset, Les Cahiers Rouges, 2008, pp. 27, 33, 35 et 36.



    ____________________________________
    * Note d’AP : cette dernière strophe n’a pas été retenue par Gabriel Fauré dans son cycle de mélodies L’Horizon chimérique (1921). Elle l’a été par Julien Clerc dans sa chanson « L’Horizon chimérique » (album Si j’étais elle).






        Né à Bordeaux le 2 décembre 1886, Jean de La Ville de Mirmont a été tué sur le front, à Verneuil-Courtonne (Aisne), le 28 novembre 1914. Il était âgé de vingt-sept ans. Son œuvre, fort brève, se compose d’une nouvelle, Les Dimanches de Jean Dézert, publiée en 1914, de Huit contes, publiés en 1929. Également publiés à titre posthume, les poèmes de L’Horizon chimérique doivent à Charles Baudelaire, inspiration et musicalité. Mis en musique par Gabriel Fauré, créé le 13 mai 1922 à la Société Nationale par le baryton Charles Panzéra (accompagné au piano par Magdeleine Panzéra-Baillot), L’Horizon chimérique (cycle de mélodies pour voix et piano, op. 118) est un des plus beaux fleurons de la mélodie française.

        « Outre son sujet romantique particulièrement attachant », ce cycle est un « chef-d’œuvre d’écriture tout en ne recourant à aucune structure repérable (thèmes mélodiques ou rythmiques, périodicités diverses ou forme). Le langage est continu et abolit le découpage poétique, l’harmonie stable (fréquence harmonique faible), la déclamation uniforme. La cohérence est assurée par l’évolution des moyens musicaux à travers les 4 mélodies : évolution du motif pianistique de plus en plus lent et accentué, agrandissement progressif des intervalles vocaux jusqu’à l’octave finale. » (Marie-Claire Beltrando-Patier)




    ■ Voir/écouter aussi ▼

    → (sur YouTube)
    le cycle L’Horizon chimérique de Gabriel Fauré interprété par Gérard Souzay (baryton) et Jacqueline Bonneau (piano)


    ■ Gabriel Fauré
    sur Terres de femmes

    4 novembre 1924 | Mort de Gabriel Fauré (Les Berceaux + extrait de L’Obvie et l’Obtus de Roland Barthes sur la Mélodie française)






    Retour au répertoire du numéro de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Rose Ausländer | Augenblickslicht



    Je mange je bois et prends l-horloge - t-moin
    Ph., G.AdC






    AUGENBLICKSCLICHT



    Wie komme ich
    über mich hinweg

    Mein Schatten
    steht mir im Weg
    ich muß über ihn
    hinwegspringen

    ins Augenblickslicht
    das mich erschafft

    Ich esse trinke
    mache die Uhr zum Zeugen
    einer gefesselten Reise
    um die Welt






    INSTANT DE LUMIÈRE



    Comment aller
    par-delà moi-même

    Mon ombre
    me fait obstacle
    je dois sauter
    par-dessus

    dans cet instant de lumière
    qui me crée

    Je mange je bois
    et prends l’horloge à témoin
    d’un voyage entravé
    autour du monde



    Rose Ausländer, Kreisen/Cercles, Æncrages & Co, Collection Voix de chants, 2005 ; rééd. avril 2010, s.f [pp. 22-23]. Traduit de l’allemand et présenté par Dominique Venard. Images de Marfa Indoukaeva.




    ______________
    Note d’AP : sur le site de l’éditeur, il est possible de feuilleter les premières pages de ce recueil.






    Kreisen 2






    ROSE AUSLÄNDER


    Rose Ausländer
    Source



    ■ Rose Ausländer
    sur Terres de femmes

    Après le Carnaval
    L’île dérive
    Janvier (extrait de Pays maternel)
    Während ich Atem hole



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Esprits Nomades)
    la page consacrée à Rose Ausländer
    → (sur Lyrikline)
    plusieurs poèmes dits (en allemand) par Rose Ausländer
    → (sur Recours au poème)
    une note de lecture de Pascale Trück sur les deux recueils de Rose Ausländer publiés par Æncrages & Co






    Retour au répertoire du numéro de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Rosanna Warren | Travel



    La vitre ext-rieure porte un id-ogramme de givre 2
    Ph., G.AdC






    TRAVEL


    43,000 feet below us
    New England is a dun, scuffed, moulting carpet
    with here and there a nick of light, as from broken glass.

    Clouds trail across it like strands of grandmotherly hair.
    With grave and steadfast shudders
    we lunge through massive air.
    We are flying south.

    The inner Plexiglas windowpane,
    chill to my fingertip, chill to my cheek,
    has been incised by a human hand with zigzag and long cedilla.
    The outer pane bears an ideograph of frost
    resembling, now an intricate map of suburban roads and driveways,
    now a star.
                       On the wing, the paint
    blisters in gunmetal eczema.

    Unbolted, my heart
    is a missile
    heading, in every sense, in the wrong direction.




    Rosanna Warren, Departure, W. Norton & Company, New York, 2003, page 85.







    VOYAGE


    13 000 mètres plus bas
    la Nouvelle Angleterre est un tapis beige et terne, usé, râpé
    avec une entaille de lumière par endroits, reflet de verre cassé.

    Les nuages s’étirent en travers comme une longue traîne de cheveux blancs.
    Secoués à intervalles réguliers par de grands frissons,
    on avance par à-coups dans l’épaisse masse d’air.
    On vole vers le sud.

    Le hublot en plexiglas,
    qui glace le bout de mes doigts, glace ma joue,
    est strié de zigzags et d’une longue cédille, petite incise humaine.
    La vitre extérieure porte un idéogramme de givre
    qui fait penser tantôt à une carte de routes de banlieues et d’autoroutes emmêlées,
    tantôt à une étoile.
                                     Sur l’aile, la peinture
    métallisée a des cloques d’eczéma.

    Déverrouillé, mon cœur
    est un missile
    lancé, en tous sens, dans la mauvaise direction.



    Traduction inédite d’Aude Pivin





    ROSANNA WARREN


    Rwarren
    Ph. © Mark Richards
    Source



    BIOGRAPHIE, par Aude Pivin


        Rosanna Warren est une poète américaine dont l’œuvre est amplement reconnue aux États-Unis, mais encore inédite en France. Elle est née à Fairfield (Connecticut) le 27 juillet 1953. Ses parents, Eleanor Clark et Robert Penn Warren, tous deux écrivains, lui ont permis d’accéder très jeune à la poésie. Elle a fait des études supérieures de peinture à l’université de Yale et de lettres à l’université Johns Hopkins. Depuis les années 1980, elle est professeure de littérature américaine et étrangère à l’université de Boston. Elle a publié quatre recueils de poèmes aux États-Unis : Snow Day (1981), Each Leaf Shines Separate (1984), Stained Glass (1993) et Departure (2003) et a reçu de nombreux prix dont le Lamont Poetry Prize de l’Academy of American Poets pour son recueil Stained Glass, le Prix de poésie Witter Bynner de l’Académie américaine des Arts et des Lettres ou encore le Award of Merit in Poetry de l’Académie américaine des Arts et Lettres en 2004.



    BIBLIOGRAPHIE SÉLECTIVE


    Snow Day, Palaemon Press, 1981
    Each Leaf Shines Separate, W. W. Norton & Company, 1984
    Stained Glass, W. W. Norton & Company, 1993
    Suppliant Women, Euripides, Oxford University Press, 1995 (Traduction)
    Departure, W. Norton & Company, 2003
    Fables of the Self, W. W. Norton & Company, 2008 (Essai)
    Ghost in a Red Hat, W. W. Norton & Company, 2011



    ■ Traductions en français ▼

    → Dans la revue Pleine Marge, n° 39, juin 2004, par Aude Pivin
    → Dans la revue Jardins, n°1, décembre 2009, par Aude Pivin
    → Dans la revue Dans la lune (revue de Valérie Rouzeau), n° 20, janvier 2011, par Aude Pivin
    → Dans la revue internet Remue.net, 17 janvier 2011, par Aude Pivin
    De notre vivant, traduit de l’américain par Aude Pivin, gravures de Peter H. Begley, Æncrages & Co, 2019




    ■ Rosanna Warren
    sur Terres de femmes

    Scat



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Poetry Foundation)
    le poème “Mediterranean” dit par Rosanna Warren




    Retour au répertoire du numéro de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • France Burghelle Rey | Trop



    Ta force vive avec ta voix qui l-emporte sur ton vol
    Ph., G.AdC






    TROP



    Trop    à la limite
    de déborder

    ta force
    vive

    avec ta voix
    qui l’emporte sur ton vol

    seul je sais
    te supplier

    pour qu’enfin
    tu te poses




    France Burghelle Rey, Le Bûcher du phénix, Encres vives, Collection Encres blanches n° 431, octobre 2010, page 5.



    FRANCE BURGHELLE REY


    France Burghelle Rey NB





    ■ France Burghelle Rey
    sur Terres de femmes


    Après la foudre (lecture de Philippe Leuckx)
    [qu’importe le temps] (extrait de Lieu en trois temps)
    Les Tesselles du jour (extraits)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Lumière du poème




    ■ Voir aussi ▼


    le blog de France Burghelle Rey






    Retour au répertoire du numéro de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Milo De Angelis | [A volte, sull’orlo della notte]



    Parfois- - l-or-e de la nuit- on demeure suspendus
    Ph., G.AdC





    A VOLTE, SULL’ORLO DELLA NOTTE



    A volte, sull’orlo della notte, si rimane sospesi
    e non si muore. Si rimane dentro un solo respiro,
    a lungo, nel giorno mai compiuto, si vede
    la porta spalancata da un grido. La mano feriva
    con una precisione vicina alla dolcezza. Così
    si trascorre dal primo sangue fino a qui,
    fino agli attimi che tornano a capire e restano
    imperfetti e interrogati.



    Milo De Angelis, Quell’andarsene nel buio dei cortili, Poesia, Arnoldo Mondadori Editore, Collezione Lo Specchio, 2010, pagina 9.





    PARFOIS, À L’ORÉE DE LA NUIT



    Parfois, à l’orée de la nuit, on demeure suspendus
    et l’on ne meurt pas. On reste au dedans d’un seul souffle,
    longtemps, dans le jour jamais accompli, on voit
    la porte grand ouverte par un cri. La main faisait mal
    avec une précision qui confine à la douceur. Ainsi
    l’on passe du premier sang jusqu’ici,
    jusqu’à ces instants qui reviennent à l’esprit et demeurent
    imparfaits et sans réponses.



    Traduction inédite d’Angèle Paoli





    Milo De Angelis- Quell-andarsene nel buio dei cortili- Poesia- Arnoldo Mondadori Editore





    MILO DE ANGELIS


    Milo De Angelis et Giovanna Sicari



    ■ Milo De Angelis
    sur Terres de femmes


    6 juin 1951 | Naissance de Milo De Angelis
    Mercoledì (poème extrait de Linea intera, linea spezzata)
    Il morso che ti spezza (autre poème extrait de Linea intera, linea spezzata)
    Sala Venezia (autre poème extrait de Linea intera, linea spezzata)
    [Era buio] (un autre poème extrait de Quell’andarsene nel buio dei cortili + traduction inédite de Sylvie Fabre G.)
    [Nessuno riposa] (autre poème extrait de Quell’andarsene nel buio dei cortili + traduction inédite d’AP) [Anthologie poétique TdF | Milo De Angelis, 1]
    [Mi attendono nascosti] (un autre poème extrait de Quell’andarsene nel buio dei cortili + traduction inédite d’AP)[Anthologie poétique TdF | Milo De Angelis, 2]
    [È qui] (un autre poème extrait de Quell’andarsene nel buio dei cortili + traduction inédite d’AP) [Anthologie poétique TdF | Milo De Angelis, 3]
    [Ecco l’acrobata della notte] (un autre poème extrait de Quell’andarsene nel buio dei cortili + traduction inédite d’AP) [Anthologie poétique TdF | Milo De Angelis, 4]
    [Ho saputo, amica mia…] (un autre poème extrait de Quell’andarsene nel buio dei cortili + traduction inédite d’AP) [Anthologie poétique TdF | Milo De Angelis, 5]
    L’oceano lì davanti (poème extrait de L’Océan autour de Milan)
    Milano lì davanti (poème extrait de « L’oceano intorno a Milano » in Biografia sommaria, 1999)
    [Inquadratura](poème extrait d’Incontri e agguati)
    Thème de l’adieu (traduction d’extraits par Angèle Paoli ― février 2009 + notice de Martin Rueff)
    “T.S.”, II (extrait de Somiglianze)
    Tutto era già in cammino (extraits du Thème de l’adieu, Éditions Nous)
    Thème de l’adieu (lecture de Tristan Hordé)



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Lyrikline)
    Milo De Angelis disant plusieurs poèmes extraits de Tema dell’addio
    → (sur Les Carnets d’Eucharis de Nathalie Riera)
    d’autres poèmes de Milo De Angelis (extraits de L’ocean intorno a Milano traduits par Jean-Baptiste Para) et une courte notice bio-bibliographique
    → (sur YouTube)
    un portrait video de Milo De Angelis par Viviana Nicodemo






    Retour au répertoire du numéro de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs
    Retour à l’ index de la catégorie Péninsule (littérature et poésie italiennes)


    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Marie Étienne | La femme dit son premier jour



    Faut-il ainsi jouer. (1)
    Ph., G.AdC






    LA FEMME DIT SON PREMIER JOUR



    La femme dit son premier jour
                                      dans l’immobile l’apogée
                                      autre côté de l’inconnu
                                      et maintenant
                                      presque en rage
                                      tu me parles de toi
                                      des assauts sur le sol du tournoi frénétique
                                      sans l’angoisse d’avant
    Faut-il ainsi jouer ? Évidemment les mots
                                      sont trop moitié du monde
                                      sans cesse découpé
                                      faut-il ainsi tiédir
                                      l’instant de l’autre face
                                      pris au hublot dérange
    tant est doux le silence où se frottent les arbres
                                      L’être d’os
                                      soulève la nuit
                                      à la croisée où l’infini augmente
                                      l’oiseau sort
                                      fragmenté




    Marie Étienne, La Longe in Le Livre des recels, Éditions Flammarion, Collection Poésie/Flammarion, 2011, page 98.





        Le Livre des recels * réunit l’essentiel de la poésie de Marie Étienne antérieure à Anatolie — c’est-à-dire des textes composés sur une vingtaine d’années, de 1970 à 1990 environ. L’ouvrage est pourtant parfaitement original : non seulement parce qu’une partie de ces poèmes étaient demeurés inédits, mais parce qu’il propose une sorte de récit-cadre, des « scènes de la vie en prose » dans lesquelles Marie Étienne évoque sa trajectoire poétique. Ce va-et-vient constant entre l’écriture et la vie donne toute sa dimension — et sa pleine lumière — au Livre des recels.




    ______________________
    * Disponible en librairie le 19 janvier 2011. En même temps que Le Livre des recels, Marie Étienne publie deux ouvrages en prose : Haute lice et Les Yeux fermés, aux éditions José Corti.





    MARIE ÉTIENNE


    Marie Etienne
    Source


    ■ Marie Étienne
    sur Terres de femmes

    L’aigrette (extrait du recueil Le Livre des recels)
    Fragments de fresque
    Haute lice (note de lecture d’AP)
    Marie Étienne : organiser l’indicible (lecture de Patricia Godi)
    → (dans l’Anthologie poétique Terres de femmes)
    Marie Étienne | Ce qui reste
    22 novembre 2009 | Marie Étienne, Les Yeux fermés (extrait des Yeux fermés)






    Retour au répertoire du numéro de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Saint-John Perse | Pétrels, nos cils




    Diptyque photographique, G.AdC






    PÉTRELS, NOS CILS



        « …Pétrels, nos cils, au creux de la vision d’orage, épelez-vous lettre nouvelle dans les grands textes épars où fume l’indicible ?
        « Vous qui savez, rives futures, où s’inscriront nos actes, et dans quelles chairs nouvelles se lèveront nos dieux,
       « Gardez-nous un lit pur de toute défaillance, une demeure libre de toute cendre consumée… »


        « Des caps ultimes de l’exil — un homme encore dans le vent tenant conseil avec lui-même — j’élèverai une dernière fois la main.
        Demain, ce continent largué… et derrière nous encore tout ce sillage d’ans et d’heures, toute cette lie d’orages vieillissants.
        Là nous allions parmi les hommes de toute race. Et nous avions beaucoup vécu. Et nous avions beaucoup erré. Et nous lisions les peuples par nations. Et nous disions les fleuves survolés, et les plaines fuyantes, et les cités entières sur leurs disques qui nous filaient entre les doigts — grands virements de comptes et glissements sur l’aile.


        …Et comme s’inclinait l’immense courbe vers sa fin, à ce très grand tournant de l’heure vers sa rive et vers son dernier port,
        J’ai vu encore la Ville haute sous la foudre, la Ville d’orgues sous l’éclair comme ramée du pur branchage lumineux, et la double corne prophétique cherchant encore le front des foules, à fond de rues et sur les docks…
       Et de tels signes sont mémorables — comme la fourche du destin au front des bêtes fastidieuses, ou comme l’algue bifourchue sur sa rotule de pierre noire.




    Saint-John Perse, Vents suivi de Chroniques, Éditions Gallimard, Collection Poésie, 1968 ; rééd. 2003, pp. 74-75.






    VENT




    SAINT-JOHN PERSE


    ■ Saint-John Perse
    sur Terres de femmes

    31 mai 1887 | Naissance de Saint-John Perse
    Trentième anniversaire de la mort de Saint-John Perse par Joëlle Gardes
    Du Maître d’astres et de navigation
    Invocation, 3
    Me voici restitué[e] à ma rive natale
    Vents




    Retour au répertoire de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Vivian Lamarque | Poésie illégitime



    Elle a ton allure -trang-re- elle te ressemble
    Ph., G.AdC





    POESIA ILLEGITTIMA



    Quella sera ho fatto l’amore
    mentale con te
    non sono stata prudente
    dopo un po’ mi si è gonfiata la mente
    sappi che due notti fa
    con dolorose doglie
    mi è nata una poesia illegittimamente
    porterà solo il mio nome
    ma ha la tua aria straniera ti somiglia
    mentre non sospetti niente di niente
    sappi che ti è nata una figlia.




    Vivian Lamarque, Teresino, Società di Poesia & Guanda, 1981, in Poeti italiani del secondo Novecento, Volume**, Oscar Mondadori, Oscar classici moderni, 2004, pagine 934. A cura di Maurizio Cucchi e Stefano Giovanardi.







    POÉSIE ILLÉGITIME



    Ce soir où j’ai mentalement
    fait l’amour avec toi,
    je n’ai pas été prudente,
    peu après mon esprit s’est gonflé,
    sache qu’il y a deux nuits,
    dans les affres de l’accouchement
    m’est née illégitimement une poésie,
    elle portera seulement mon nom,
    mais elle a ton allure étrangère, elle te ressemble
    même si tu ne soupçonnes rien de rien,
    sache qu’une fille t’est née.




    Vivian Lamarque, Teresino, Società di Poesia & Guanda, 1981, in Trente ans de poésie italienne, n° 1, Po&sie, 1975-2004, numéro 109, Éditions Belin, 2004, page 279. Traduit par Philippe Di Meo.




    ______________
    Notule de Philippe Di Meo (ibid., page 278) : Dans Teresino, le premier recueil de vers de Vivian Lamarque (1981), une autobiographie procède d’un événement traumatique survenu à l’âge de neuf mois : une adoption de la poétesse suivie de l’abandon de sa mère naturelle. Toute l’œuvre déclinera désormais un ‘roman familial’ complexe qui a légué à la poétesse pas moins de trois noms de famille. L’expérience de l’’échange des mères’ est entamée. Le titre de ce même recueil s’il est presque une anagramme du nom de son village natal [Tesero], remet également en mémoire le trop célèbre Terezin, le camp de concentration nazi réservé aux enfants. Giovanni Raboni a écrit à son propos : « On a de quoi rester bouche bée devant la mystérieuse simplicité, l’élégance impalpable et toutefois presque féroce de ces poèmes ».




    VIVIAN LAMARQUE


    Vivian Lamarque
    Source




    ■ Vivian Lamarque
    sur Terres de femmes

    [En dot je vous apporte]



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Italian Poetry)
    une page consacrée à Vivian Lamarque
    → (sur YouTube)
    Vivian Lamarque disant le poème ci-dessus (Festival de Recanati, 9 avril 1992)
    → (sur YouTube)
    Quattro Giorni con Vivian (extrait d’un portrait vidéo de Vivian Lamarque par Silvio Soldini, 2008) [documentaire de la collection Gente di Milano]
    → (sur Lyrikline)
    Vivian Lamarque disant dix de ses poèmes






    Retour au répertoire de janvier 2011
    Retour à l’ index des auteurs
    Retour à l’ index de la catégorie Péninsule (littérature et poésie italiennes)


    » Retour Incipit de Terres de femmes