Catégorie : Anthologie poétique « Poésie d’un jour »


  • Eugenio Montale | Nel Sonno

    «  Poésie d’un jour  »



    Le choc de la vie
    Ph., G.AdC







    NEL SONNO



    Il canto delle strigi, quando un’iride
    con intermessi palpiti si stinge,
    i gemiti e i sospiri
    di gioventù, l’errore che recinge
    le tempie e il vago orror dei cedri smossi
    dall’urto della notte – tutto questo
    può ritornarmi, traboccar dai fossi,
    rompere dai condotti, farmi desto
    alla tua voce. Punge il sonno d’una
    giga crudele, l’avversario chiude
    la celata sul viso. Entra la luna
    d’amaranto nei chiusi occhi, è una nube
    che gonfia ; e quando il sonno la trasporta
    più in fondo, è ancora sangue oltre la morte.






    SOMMEIL



    Le cri des effraies, lorsqu’un arc-en-ciel
    avec des clignements pâlit,
    les gémissements, les soupirs
    de jeunesse, l’erreur qui enserre
    les tempes et la confuse horreur des cèdres ébranlés
    par le choc de la nuit – tout cela
    me peut revenir, déborder des fossés,
    jaillir des conduites, m’éveiller
    à ta voix. Poignant, le son d’une
    gigue* cruelle, l’adversaire boucle
    la visière sur sa face. Pénètre la lune
    d’amarante dans mes yeux clos, c’est un nuage,
    il enfle ; et quand le sommeil l’emporte
    en moi toujours plus loin, il est encore sang au-delà de la mort.




    Eugenio Montale, Poésies III, La bufera e altro (1940-1957), La tourmente et autres poèmes, éditions Gallimard, Collection Poésie du monde entier, 1966, pp. 14-15. Edition bilingue. Traduit de l’italien par Patrice Angelini avec le concours de Louise Herlin, Gennie Luccioni et Armand Robin.



    ________________________
    * Note du traducteur : la gigue n’est pas seulement une danse, c’est aussi, dans l’italien et le français du Moyen Âge, une sorte de viole, et son étymologie se trouve dans l’allemand Geige : aussi ne peut-elle être que « cruelle ».






    Bufera 2





    EUGENIO MONTALE


    Montale 2





    ■ Eugenio Montale
    sur Terres de femmes


    Da un lago svizzero (autre poème extrait de La bufera e altro)
    12 octobre 1896 | Naissance d’Eugenio Montale
    17 janvier 1977 | Cahier de poésie d’Eugenio Montale
    Corno inglese (poème extrait d’Ossi di seppia)
    Quel che resta (Se resta)[extrait de Quaderno di quattro anni]
    12 septembre 1981 | Mort d’Eugenio Montale



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur un site italien dédié à Eugenio Montale)
    Nombreux articles sur Eugenio Montale
    → (sur le site de l’INA)
    un entretien d’Eugenio Montale avec Pierre André Boutang





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  • Gabrielle Althen | Sans titre

    «  Poésie d’un jour  »




    Lvasement_de_la_personne
    D.R. Ph. angèlepaoli





    SANS TITRE                                                                                         



                                                      Souffre de ton angoisse comme d’une fable
                                                      Et sois tendre avec le superbe ennui

                                                      Ossip Mandelstam




    S’est posé sur le tapis au milieu de la chambre
    Le temps rond comme une pomme
    L’étoile avait perdu son fard
    Et nous très nus au moment du baiser
    Malgré notre désir d’applaudir
    Nous étions immobiles tous deux
    Ce temps de craie nous faisant face
    Présent sans bras
    La grosse pomme posée sur le tapis
    Sans entrelacs le temps
    La craie à remuer !
    – L’évasement de la personne


    Gabrielle Althen, in Corps, τhαumα, Revue de philosophie et poésie, La Compagnie des Argonautes, 2e trimestre 2008, page 158.






    GABRIELLE ALTHEN



    ■ Gabrielle Althen
    sur Terres de femmes

    La Cavalière indemne (note de lecture d’AP)
    Corps à corps (poème extrait de Soleil patient)
    L’isole (extrait de La Cavalière indemne)
    Soleil patient (lecture de Matthieu Gosztola)
    Soleil patient (note de lecture d’Isabelle Lévesque)
    Vie saxifrage (extrait)
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    un autre poème extrait de Vie saxifrage
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Une fois le gris devenu l’autre versant du bleu



    ■ Voir aussi ▼


    → (dans la Poéthèque du site du Printemps des poètes)
    une fiche bio-bibliographique sur Gabrielle Althen
    → (sur le site de la mél, Maison des écrivains et de la littérature)
    <une fiche bio-bibliographique sur Gabrielle Althen
    → (sur Terres de femmes)
    Les Bruits dans l’eau, un recueil inédit d’Isabelle Raviolo





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  • Fabio Scotto | China sull’acqua… (traductions croisées)

    «  Poésie d’un jour  »


    Mondine_orientale_3
    Source






    CHINA SULL’ACQUA


    China sull’acqua
    la mondina orientale
    immersa nel fango
    estrae dal torbido
    i chicchi saporiti
    lumache o lombrichi
    Mentre dietro si stende
    un sentiero infinito
    fin dove l’occhio si perde
    e lascia il corpo all’acqua
    il campo alle termiti
    il cielo alle sue stelle




    Traductions croisées/Crossed translations





    PENCHÉE SUR L’EAU


    Échine penchée sur l’eau
    la repiqueuse orientale
    pataugeant dans la fange
    tire de l’eau trouble
    les grains savoureux du riz
    des limaces ou des lombrics
    Pendant que derrière elle fuit
    à perte de vue
    un sentier infini
    qui laisse à l’eau le corps
    le champ aux termites
    le ciel à ses étoiles

    Traduction d’Eric Brogniet





    BENT OVER WATER


    Back bent over the water
    the woman of the paddy-fields
    is immersed in mud,
    drags-up from cloudy pools
    tasty grains
    snails or worms
    While behind her a road
    extends infinitely
    to where the eye loses itself
    leaving the body to water
    the countryside to termites
    the sky to its stars

    Traduction de Fiona Sampson





    BENT OVER WATER


    Bent over water
    the girl in the paddy field
    drowned in mud
    is weeding the gunk
    for tasty grains
    snails and earthworms
    Meanwhile, behind her, an infinite
    path stretches out
    just to where sight gets lost
    leaving her body to the water
    the field to its termites
    the sky to its stars

    Traduction de Martin Harrison





    BENT OVER WATER


    Bent backed over eastern water
    the gleaner trudges
    through deep ooze
    draws ruffled pools
    sharp-flavoured rice-beads
    slugs, invertebrates
    While behind her extends
    a road so long the eye
    is lost at the vanishing point
    leaving the body in the water
    the field to the termites
    the sky to its stars

    Traduction de George Szyrtes





    BENT OVER WATER


    Sliding toward the tide, she,
    the exotic stinger stuck in mud
    pulls the disturbed current
    the flavourful seeds
    earthworms or slugs
    Hanging behind them an infinite
    Path folds out
    till lost by the eye
    and leaves the body to float
    the fields to termites
    the sky to its stars

    Traduction de David Applefield




    PENCHÉE SUR L’EAU


    Penchée sur l’eau
    la repiqueuse orientale
    plongée dans la boue
    dégage de l’eau trouble
    les grains savoureux
    limaces ou lombrics
    Pendant que derrière elle
    se déploie un sentier infini
    à la fin duquel l’œil se perd
    et laisse son corps à l’eau
    le champ aux termites
    le ciel à ses étoiles

    Traduction de Carole David


    Fabio Scotto, in La Traductière, Revue franco-anglaise de poésie et art visuel, N° 26, juin 2008, pp. 192-193.





    Traductire_2





    INCLINADA SOBRE EL AGUA


    El espinazo inclinado sobre el agua
    la sembradora oriental
    chapotea en el fango
    saca del agua turbia
    los sabrosos granos de arroz
    babosas o lombrices
    Mientras que detrás de ella huye
    hasta perderse de vista
    un sendero infinito
    que deja al agua el cuerpo
    el campo a las termitas
    el cielo a sus estrellas.

    Traduction en espagnol de Myriam Montoya
    (traduction inédite)
    D.R. Texte Myriam Montoya/L’Oreille du Loup
    pour Terres de femmes






    ■ Fabio Scotto
    sur Terres de femmes


    A Riva | Sur cette rive (note de lecture)
    Regard sombre (extrait de A riva | Sur cette rive)
    Le Corps du sable (note de lecture)
    Je t’embrasse les yeux fermés (poème issu du recueil Le Corps du sable)
    Ces paroles échangées (poème issu du recueil L’intoccabile)
    [Il volto avvolto dalle fiamme s’abbruna] (poème issu du recueil La nudità del vestito)
    Tra le vene del mondo (extrait de La Grecia è morta e altre poesie)
    La Peau de l’eau (lecture de Sylvie Fabre G.)
    Venezia — San Giorgio-Angelo (extrait de La Peau de l’eau)
    “Musée Thyssen Bornemisza Madrid”, Jacob Isaacksz Van Ruisdael
    Musée Thyssen-Bornemisza, Madrid (onze « poèmes peints » traduits par Angèle Paoli)



    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site de l’écrivain Claude Ber)
    un dossier Fabio Scotto (dimanche 27 février 2011)





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  • Claude Ber | Je dis mer

    «  Poésie d’un jour  »



    Je_te_donne_mer_tu_me_donnes_bahr
    Ph., G.AdC







    JE DIS MER


    Découpe 16


    Je dis mer. La mer dit bahr. Elle dit sama ciel bahr mer. Et tangue. Entre deux bleus. Entre deux langues. Ici où la rime se nomme océan. Bahr, cette mer étrangère avec son sourcil de vague tâtant la terre de son œil. Scrutant l’entier de la terre de cet œil qui avance. Puis rétracte sa pupille. Se retire dans son cœur de mer. Et bat mer bahr mer bahr. Puis revient à grands ourlets de lèvres blanches. Se plisse. Enfle. Roule enroule à terre entre ses dents d’écume successive. Bahr, elle se nomme bahr. Et moi je ne suis plus moi mais ana. Ana sous ce ciel où la nuit tombe comme une main qui se retourne. Et ma main se retourne avec lui. Yed main sama ciel. Main double à deux mers et à deux mains. Je te donne mer, tu me donnes bahr. Donne-moi un mot cela seulement qui se donne sans se perdre. Et nous aurons chacun deux mots en main. Deux mains en mot. La mer comme une main et les mains aussi libres et larges que la mer. Main bahr yed mer.



    Claude Ber, La mort n’est jamais comme, Ed. Via Valeriano-Léo Scheer, 2003 ; rééd. éditions de l’Amandier, 2006, page 54. Rééd. éditions Bruno Doucey, Collection Soleil noir, 2019. Prix international de la poésie francophone Ivan Goll 2004.






    Claude Ber  La-mort-n’est-jamais-comme




    CLAUDE BER


    Claude-BER  ©-Adrienne-Arth NB
    Ph.© Adrienne Arth
    Source




    ■ Claude Ber
    sur Terres de femmes


    Épître Langue Louve (note de lecture d’AP)
    Il y a des choses que non (note de lecture d’AP)
    In memoriam (extrait d’Épître Langue Louve)
    La mort n’est jamais comme (note de lecture d’AP)
    Les mots, le vent, les herbes racontent (extrait de Mues)
    Sinon la transparence (extrait du recueil Sinon la transparence)
    [Toujours la langue veut dire] (extrait du recueil Il y a des choses que non)
    Vues de vaches (note de lecture d’AP)
    Claude Ber, Pierre Dubrunquez, L’Inachevé de soi (note de lecture)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    le miel à la bouche




    ■ Voir aussi ▼


    le site de l’écrivain Claude Ber





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  • Federico García Lorca | La nonne gitane

    «  Poésie d’un jour  »




    LA NONNE GITANE Les_sept_oiseaux_du_prisme



    Silence de chaux et de myrte.
    Mauves dans les herbes fines
    Sur une toile jaune paille
    la nonne brode des giroflées.
    Volent dans le lustre gris
    les sept oiseaux du prisme.
    Tel un ours panse en avant
    loin de là grogne l’église.
    Comme elle brode ! Quelle grâce !
    Sur la toile jaune paille
    elle aimerait bien broder
    des fleurs à sa fantaisie.
    Quel tournesol ! Quel magnolia
    de faveurs et de clinquant !
    Quels safrans et quelles lunes
    sur la nappe de l’autel !
    Cinq oranges en compote
    cuisent dans l’office proche :
    ce sont les plaies du Christ
    cueillies près d’Almeria.
    Dans le regard de la nonne
    galopent deux cavaliers.
    Une rumeur dernière et sourde
    lui décolle la chemise,
    la vue des monts et des nuées
    dans les lointains arides
    fait qu’alors son cœur se brise,
    son cœur de sucre et de verveine.
    oh, quelle plaine escarpée
    sous l’éclat de vingt soleils !
    Quelles rivières soulevées
    entrevoit sa fantaisie !
    Mais à ses fleurs elle s’applique
    tandis que debout dans la brise
    l’éclat du jour joue aux échecs
    par les fentes de la jalousie.



    Federico García Lorca, Romancero gitan, Seghers, Collection Poètes d’aujourd’hui, 1973, pp. 135-136. Traduction d’Armand Guibert.







    À José Moreno Villa


    LA MONJA GITANAQuels_safrans_et_quelles_lunes




    Silencio de cal y mirto.
    Malvas en las hierbas finas.
    La monja borda alhelíes
    sobre una tela pajiza.
    Vuelan en la araña gris,
    siete pájaros del prisma.
    La iglesia gruñe a lo lejos
    como un oso panza arriba.
    ¡ Qué bien borda ! ¡ Con qué gracia !
    Sobre la tela pajiza,
    ella quisiera bordar
    flores de su fantasía.
    ¡ Qué girasol ! ¡ Qué magnolia
    de lentejuelas y cintas !
    ¡ Qué azafranes y qué lunas,
    en el mantel de la misa !
    Cinco toronjas se endulzan
    en la cercana cocina.
    Las cinco llagas de Cristo
    cortadas en Almería.
    Por los ojos de la monja
    galopan dos caballistas.
    Un rumor último y sordo
    le despega la camisa,
    y al mirar nubes y montes
    en las yertas lejanías,
    se quiebra su corazón
    de azúcar y yerbaluisa.
    ¡ Oh!, qué llanura empinada
    con veinte soles arriba.
    ¡ Qué ríos puestos de pie
    vislumbra su fantasía !
    Pero sigue con sus flores,
    mientras que de pie, en la brisa,
    la luz juega el ajedrez
    alto de la celosía.





    FEDERICO GARCÍA LORCA


    Lorca_par_aguijarro
    Source



    ■ Federico García Lorca
    sur Terres de femmes

    Croix (poème extrait de Suites)





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  • 17 juillet 1944 | Élisabeth Chabuel, 7 44

    Éphéméride culturelle à rebours

    «  Poésie d’un jour
     »



    Chabuel





    Samedi 17 juillet


    J’entends l’histoire
    La mère l’enfant
    Épargnés
    Les parents les amis
    Le père
    Ordre de les épargner
    Uniforme caparaçon à ses hommes
    Dans langue à eux Vocifère Deux syllabes Deux
    Les épargner Ordre
    Et aussitôt abaissent leurs canons
    Eux et filent doux
    Les épargner Ordre Et disparaître
    Mais dilapident leurs possessions
    Brisent l’abri La porte
    La table Renversent Tout Sens dessus dessous
    Souillent la citerne Plus D’eau
    À grands bruits Parlent
    S’esclaffent dans langue à eux
    Puis ce qui reste Trois fois rien De victuailles
    Et emportent avec eux le jambon
    Uniforme caparaçon parti Et ses hommes
    La vie reprend dans bois buvard
    Cris Et chants Froissements d’aile Et pieds furtifs
    La mère l’enfant
    Épargnés
    Les parents les amis
    Le père
    Se taisent
    Ne pleurent pas Ne rient pas Ne s’étreignent pas
    Se regardent d’un air gauche L’œil vide
    Prostrés La mère l’enfant
    Les parents les amis
    Le père
    On se tait On ne sait plus rien Se dire
    Rien se parler Se dire Un mot
    Courage
    Se dire : Pas pour aujourd’hui !
    En rire : Pas pour aujourd’hui !
    Se dire : Que je me pince pour y croire ! Non
    Comme si le cercle ouvert
    Fil rompu
    Et plus de début
    Pour repartir
    De début Pour repartir
    Encore
    Encore
    La mère l’enfant
    Les parents les amis
    Le père


    Élisabeth Chabuel, 7 44, K édition, 2008, pp. 30-31.




    ____________________________________
    NOTE D’AP : ma rencontre avec Élisabeth Chabuel, au Marché de la poésie 2008, est pur hasard. C’est par Cécile (Cécile Clozel) et Katherine (Katherine Flament) que j’ai fait la connaissance d’Élisabeth. Je ne connaissais pas Élisabeth. Elle partageait avec Cécile une petite table, perdue entre deux rangées de stands. J’ai reconnu Cécile (Elle est debout sur mes paupières), j’ai reconnu Katherine ― K édition. Le passé m’a sauté au visage. Toute une époque a refait subitement surface. Avec Cécile et Katherine, il y avait Élisabeth. Et, devant cette jeune femme souriante et sereine, un livre énigmatique, posé en pile sur la table. J’ai commencé à feuilleter 7 44 et à le lire. Élisabeth m’a présenté son poème. Un poème qui raconte la « survie de L’enfant, La mère, Le père, Les parents, Les amis, pendant une guerre ». Une performance d’écriture, réalisée en juillet 2004 pour la librairie Mosaïque à Die. Pour commémorer les événements de juillet 1944, dans le Vercors.

        Autre particularité : Élisabeth est traductrice. La littérature albanaise est son domaine. Elle a déjà traduit cinq romans, dont trois de Besnik Mustafaj (Actes Sud et Albin Michel), et deux recueils de poésie : l’un de Preç Zogaj (Terre sans continent, L’Esprit des Péninsules, 1995), l’autre de Din Mehmeti, poète albanais du Kosovo (Il est temps, Buchet-Chastel, Collection Poésie, 2006).






    ÉLISABETH  CHABUEL


    Chabuel portrait
    Source





    ■ Élisabeth Chabuel
    sur Terres de femmes

    Et ils sont (extrait)
    Intime violence
    [on ne pense pas au présent] (extrait des Passagers)
    Veilleur (note de lecture d’AP)
    Je (extrait du Veilleur)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Le Moment






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  • patti smith | wilderness

    «  Poésie d’un jour  »


    Patti_smith_why_not_productions_2
    Crédit photo Why Not Productions/Cinéma du Panthéon
    Source





    WILDERNESS


    Do animals make a human cry
    when their loved one staggers
    fowled dragged down
    the blue veined river

    Does the female wail
    miming the wolf of suffering
    do lilies trumpet the pup
    plucked for skin and skein

    Do animals cry like humans
    as I having lost you
    yowled flagged curled
    in a ball

    This is how
    we beat the icy field
    shoeless and empty handed
    hardly human at all

    Negotiating a wilderness
    we have yet to know
    this is where time stops
    and we have none to go





    ANIMAUX SAUVAGES


    Est-ce que les animaux crient comme les humains
    quand leurs êtres aimés chancellent
    pris au piège emportés par l’aval
    de la rivière aux veines bleues

    Est-ce que la femelle hurle
    mimant le loup dans la douleur
    est-ce que les lys trompettent le chiot
    qu’on écorche dans l’écheveau de sa chair

    Est-ce que les animaux crient comme les humains
    comme t’ayant perdu
    j’ai hurlé j’ai flanché
    m’enroulant sur moi-même

    Car c’est ainsi
    que nous cognons le glacier
    pieds nus mains vides
    humains à peine

    Négociant une sauvagerie
    qui nous reste à apprendre
    là où s’est arrêté le temps
    là où il nous manque pour avancer


    Patti Smith, Présages d’innocence, Christian Bourgois éditeur, 2007, pp. 96-97. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Jacques Darras.





    Patti_smith
    Illustration de couverture :
    Photo © Patti Smith





        « Présages d’innocence est le premier recueil de poèmes de Patti Smith depuis plus de dix ans. Il constitue un accomplissement majeur de la part d’une artiste qui a transcrit sa vision du monde dans des hymnes puissants, des ballades et des paroles de chansons. Elle s’inscrit ainsi dans la grande tradition des troubadours, des artisans et des artistes qui font écho au monde qui les entoure par une voix unique et incantatoire. Ses influences sont aussi éclectiques que saisissantes : Blake, Rimbaud, Picasso, Arbus et John Appleseed. Et ses poèmes sonnent comme des oracles des temps modernes. » (Quatrième de couverture de Présages d’innocence)







    PATTI SMITH


    Autoportrait_patti_smith_2
    © Patti Smith


    ■ Voir aussi ▼

    → (sur YouTube)
    Patti Smith à la Fondation Cartier
    → (sur YouTube)
    Patti Smith (accompagnée au piano par sa fille Jesse) lisant des extraits de The Waves de Virginia Woolf (soirée du 28 mars 2008 à la Fondation Cartier, jour-anniversaire de la mort de Virginia Woolf)
    → (sur le site de France 2)
    Patti Smith, artiste complète, par Laure Narlian
    → le
    site de Patti Smith
    Patti Smith MySpace page



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  • Lutz Bassmann/Haïkus de prison

    «  Poésie d’un jour  »




    Hakus_de_prison




    HAÏKUS DE PRISON


    L’odeur d’oignon
    chevauche l’odeur d’urine
    bientôt la soupe du soir
    (p.9)


    Cette nuit quelqu’un a hurlé
    qu’on l’étranglait
    personne ne sait si c’est vrai
    (p.10)


    Les mouches se font rares
    le kirghize les attrape
    et les mange
    (p. 13)


    En pleine nuit il y a eu un silence
    ça a réveillé
    tout le monde
    (p. 15)


    Sur la grisaille hostile du ciel
    les barbelés dessinent
    une touche d’humanité
    (p. 19)


    Aube terreuse
    odeurs de ménagerie et de mort
    nous avançons vers l’air frais
    (p. 52)


    Ce matin le pain des paysannes
    avait un goût d’orties et de sciure
    on a encore changé de région
    (p. 53)


    En rang cinq par cinq
    le rideau noir de la forêt
    se rapproche trop vite
    (p. 68)


    Un autre mélèze qui tombe
    l’éclipse des projecteurs
    ne dure qu’un instant
    (p. 69)


    Juste avant le matin le voleur chinois
    se met à hurler
    il a cru qu’il était mort
    (p. 85)


    Lutz Bassmann, Haïkus de prison, Collection « Chaoïd », Éditions Verdier, 2008.





    Voir/écouter aussi :
    – (sur YouTube) quelques
    haïkus de prison ;
    – (sur Poezibao)
    Haïkus de prisons de Lutz Bassmann, par Tristan Hordé ;
    – le site
    Lutz Bassmann ;
    – (sur le site du Magazine littéraire)
    Le porte-voix de Volodine.



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  • Maryse Hache | pas l’inertie

    «  Poésie d’un jour  »



    Maryse_hache_2
    D.R. Ph., Estel





    pas l’inertie                                                 autre rythme

    pas se figer                                                  autre flux


    pas un temps                                              platine liquide

    d’a parte                                                       fourmillements

                                                                             picotements

    pas de jelly                                                  crispation

                                                                             mors aux dents

    vous avez été là                                        et

    vous êtes là
    ça remue                                                      bêchage

    ça circule                                                     binage

    ça vit                                                              plantage

                                                                             arrosage


    ça ruisseau                                                  taille

    ou cascade


    pas de temps                                              entre

    mort                                                              livres

                                                                            amie-i-s

    juste un temps                                          et                      

    différent                                                       jardin


                                         



                                          rien

                                          n’est

                                          à sauver

                                         





                                          tout

                                          est


                                           

                                          à vivre




    Maryse Hache, passée par ici, récit, Centre d’éthique clinique, Hôpital Cochin, 2006, pp. 72-73.






    passée par ici…

    Par… la maladie, l’hôpital, les docteurs, le bistouri, la chimiothérapie, le cancer…
    Maryse Hache est peintre, poète, philosophe et… clown.
    C’est aussi avec son nez rouge qu’elle raconte…
    Et ses mots sont si pleins de joliesse, de poésie, de décalage, de justesse qu’ils nous atteignent en plein cœur.


    L’éthique clinique ?
    Qu’est-ce donc si ce n’est d’abord se faire l’écho de la voix de l’autre, en premier lieu celui, celle ici, qui est malade ?
    Elle nous a souvent sollicités tout au long de ces longs mois.
    Que nous a-t-elle dit ? L’avons-nous écoutée, entendue ?
    Que vit-elle ? Que veut-elle ?
    Comment nous perçoit-elle à ses côtés, dans ces moments difficiles qu’elle traverse, nous les soignants, et tous les autres qui, moins qu’elle, sont concernés par ce qui lui arrive ?


    « Ma raison d’être sur cette terre ― et il n’y a pas d’autre lieu ― n’est pas d’être en bonne santé !
    Je suis dans une sorte de désir d’être […] qui souhaite donner du sens aux situations que je vis, du sensible aux rencontres que je fais, dans lesquelles me place l’univers, lequel semble bien indifférent à ce que je suis, à ce que nous sommes […] ».

    Et la maladie met à rude épreuve ce désir d’être, ajoute-t-elle.

    Pourtant, vaillamment, en bon petit clown qui sait comment subrepticement tirer des larmes, elle prend sa plume pour mieux nous toucher et combattre cette indifférence.


    Véronique Fournier, Centre d’éthique clinique, Hôpital Cochin.





    PS d’AP : Maryse Hache est décédée le 25 octobre 2012.





    ■ Voir aussi ▼

    Semenoir, le blog de Maryse Hache
    → (sur Poezibao)
    Maryse Hache [in Fiches bio-bibliographiques]





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  • Danielle Fournier | toi

    «  Poésie d’un jour  »


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    toi, baiser. Les jours pâlissent sur les os de mes phalanges. Dans les bourrasques des lieux délaissés par le Verbe, toi, automne échevelé

    nécessaires, ces phrases phares mêlées à la sécheresse, sur ma chair, protègent le souffle de la page. Soupir. Dans le bruissement soyeux, le vent augmente le désir maintenant au large

    nous n’avions pas remarqué le ciel étrange. Ce lointain univers. Nous ne savions pas les pas devant nous, nos mains étendues dans la mer immobile. Ce soir, nous rirons, mais jamais nous ne dirons qui de notre âme ou de notre corps aura été profané

    je suis une femme. N’importe laquelle. Dans cette étreinte qui m’emporte autour de la paix, les ravages de l’âme. Je vis fragmentée



    Danielle Fournier, « II, Que ton regard se pose », Il n’y a rien d’intact dans ma chair, L’Hexagone, Collection « La voie des poètes », dirigée par Simone Sauren, Montréal, 2004, page 55.






    DANIELLE FOURNIER


    Danielle_fournier
    Source



    ■ Danielle Fournier
    sur Terres de femmes

    → (dans la galerie Visages de femmes)
    un Portrait de Danielle Fournier (+ un autre poème extrait du même recueil)
    Le chaos des flammes
    ton prénom
    Danielle Fournier | Luce Guilbaud, Iris (extrait)
    Danielle Fournier | Luce Guilbaud [Dis-moi plutôt ce qui nous réunit](autre extrait d’Iris)
    Danielle Fournier | Luce Guilbaud, Iris (note de lecture d’AP)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Pas de mots dans les mots



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur L’île, l’infocentre littéraire des écrivains québécois) une
    notice bio-bibliographique sur Danielle Fournier
    → (sur Voix d’ici, répertoire audio de la poésie québécoise)
    deux extraits du recueil Il n’y a rien d’intact dans ma chair, dits par Danielle Fournier
    → (sur remue.net)
    Rencontre avec Danielle Fournier (soirée enregistrée le 4 décembre 2012 à la Mairie du 2e arrondissement, Paris)





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