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  • Marcel Migozzi | Comment savoir si ton visage te ressemble ?

    «  Poésie d’un jour  »





               Comment savoir si ton visage te ressemble
                Bronze d’Aristide Maillol
                      Action enchaînée, 1918
                     
    Ph., G.AdC






                COMMENT SAVOIR SI TON VISAGE TE RESSEMBLE ?



                Comment savoir si ton visage te ressemble ?

                La ressemblance aurait de toi
                Plusieurs visages ?




                Quand  tes   paupières  font l’extérieur du  bleu   de
                nuit,   facile,   ton visage est aussi le mien.

                Alors  rien  de  moins  connu que  ta  bouche,  dans
                ses nouvelles créations de peau nue, s’approchant,
                penchée,    jusqu’à   l’oblation   de   ma   chair   à   ta
                bouche.

                Mais à la fin,   après la traversée des cernes   succes-
                sifs,   quand on  y arrivera  très  seul,  presque   sans
                corps,  et   silencieux, j’espère  que  ton  visage  sera
                dans le mien de si peu de chair, et le comblera.



                Marcel Migozzi, À qui le corps ?, Tarabuste Éditeur, 2006, page 83.






    MARCEL MIGOZZI


    Marcel migozzi




    ■ Marcel Migozzi
    sur Terres de femmes

    Des heures froides (lecture d’AP)
    [Depuis trois jours vieillir est dépassé] (poème extrait de Des heures froides)
    je dis ce que je vois
    [Quand tu plonges ton visage] (poème extrait de Des jours, en s’en allant)
    [Voici que maintenant…] (poème extrait de Vers les fermes, ça fume encore)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de la mél, Maison des écrivains et de la littérature)
    une fiche bio-bibliographique sur Marcel Migozzi
    → (sur le site du cipM)
    une fiche bio-bibliographique sur Marcel Migozzi
    → (sur Poètes au potager)
    une page Marcel Migozzi
    → (dans La Gazette du Basilic, 6)
    un entretien d’Alain Freixe avec Marcel Migozzi



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  • Samira Negrouche | Il se peut



    Il se peut.  que le fleuve ne lave rien de la m-moire
    Ph., G.AdC






    IL SE PEUT

    Pour JMJ,                                                    



    Il se peut que le ciel se porte
    sans rides ni ratures
    et que tu crois tout, encore possible
    dans le recommencement

    Ou que ce nuage qui moutonne
    par-delà la montagne
    bouscule les ombres qui se succèdent
    derrière une vitre embuée

    Il se peut que le monde soit vaste
    et que tu écrives sur ses déserts
    une rencontre qui n’attend pas
    que revienne la crue

    Ou que le fleuve ne lave rien
    de la mémoire, des étoiles et du doute
    ou que la mer ne soit finalement
    qu’une autoroute trop peuplée

    Il se peut encore
    que tout recommence
    dans le possible
    avec tes rides et tes ratures
    rejaillir un être neuf


                                     Alger, le 12 septembre 2009


    Samira Negrouche
    D.R. Texte inédit
    Samira Negrouche pour Terres de femmes





    SAMIRA NEGROUCHE


    Portrait de Samira  Negrouche
    Image, G.AdC





    ■ Samira Negrouche
    sur Terres de femmes

    [Des sillons se creusent](extrait du Jazz des oliviers)
    [J’aborde la plus haute rive](extrait de Quai 2 | 1)
    Tes vagues (+ notice bio-bibliographique)
    Six arbres de fortune autour de ma baignoire (lecture d’AP)
    [Tu ne te résignes pas] (extrait de Six arbres de fortune autour de ma baignoire)



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Artpoésie)
    une sélection de poèmes extraits du recueil À l’ombre de Grenade
    → (sur Transcript)
    Samira Negrouche: Café sans sucre
    → (sur Réseau scientifique Terra)
    Correspondance de Samira Negrouche & Nicole Caligaris (novembre 2007-janvier 2008)
    → (sur YouTube)
    Samira Negrouche – Portrait d’une poétesse (Voix de la Méditerranée, Lodève, juillet 2011. Réalisation de Sonia Viel. Propos recueillis par Thierry Renard)



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  • Jean-Pierre Ferrini, Le Pays de Pavese

    Jean-Pierre Ferrini, Le Pays de Pavese,
    Gallimard, Collection L’un et l’autre
    dirigée par J.-B. Pontalis, 2009.


    Pavese
    Image, G.AdC







    « J’AI CHERCHÉ L’AUTRE ET J’AI TROUVÉ MOI-MÊME » (Cesare Pavese)



         « La meilleure façon de découvrir son propre pays est de fréquenter des terres exotiques ».

         Attribuée à Cesare Pavese, cette affirmation prend sa véritable dimension au fur et à mesure que se précise la relation que Jean-Pierre Ferrini, auteur du Pays de Pavese, entretient avec l’œuvre du grand écrivain italien. Avec sa vie.
         C’est que Jean-Pierre Ferrini, investi de la double tension qui l’habite, celle qui le pousse à retourner dans le pays de ses origines et celle qui le conduit sur les pas de Pavese, découvre peu à peu, au contact de ces deux réalités différentes, que son pays de Luino se dérobe et que son vrai pays est bien celui de Pavese. « Les terres exotiques » de Ferrini, c’est dans l’œuvre de Pavese qu’elles se trouvent. Et le pays de Pavese, c’est dans le mythe qu’il réside. Non pas un « mythe identifiable », mais « le mythe que chacun porte en lui, dans son flanc. » Pour Pavese, le mythe repose sur le souvenir, la « seconde fois du souvenir ». « Foyer d’images obsessionnelles », la mythologie personnelle de Pavese repose sur un passé immémorial qui puise ses racines dans l’enfance.


         À mi-chemin entre autobiographie et essai, ni tout à fait l’un ni tout à fait l’autre, Le Pays de Pavese est une œuvre-miroir de l’âme de Ferrini, faite d’entrelacements de paysages et de réflexions dont le lecteur hésite par moments à savoir à qui les attribuer. À Ferrini ou à Pavese ?
         Au commencement, il y a les lieux de l’enfance du père, ceux qui ont marqué durablement sa mémoire. Jean-Pierre Ferrini tente de s’en approcher et de s’en approprier les événements marquants. C’est en Italie du nord, du côté de Luino, au bord du lac Majeur. C’est du côté de l’histoire, « durant l’hiver 1944, au moment de la République italienne de Salò, à quelques lacs de distance. » Il y a aussi la rencontre réelle, plusieurs fois réitérée à l’occasion de séjours à Luino. Avec les noms égrenés quotidiennement par le haut-parleur de l’embarcadère. Maccagno, Cannobio, Cannero, Porto Valtravaglia, Laveno, Intra, Baveno, Isola Bella… Mais les noms de pays ne sont porteurs d’aucun souvenir qui soit propre au narrateur, d’aucune existence précise, d’aucune véritable épaisseur. Le lieu des origines échappe et c’est ailleurs qu’il faut le chercher, ailleurs que dans les généalogies ou chez les habitants d’aujourd’hui. Dans le même temps, c’est ailleurs que dans les biographies qu’il faut chercher le pays de Pavese. C’est au cœur de l’œuvre de Pavese, au milieu des collines qui en dessinent les paysages fondateurs, parmi les noms des personnages qui habitent les Langhe que le narrateur du Pays de Pavese trouve un écho profond à sa propre histoire et à son projet d’écriture. Ferrini connaît tous les textes de Pavese. Mais jamais il ne se lasse de les revisiter. Avec précision et émotion. Le Métier de vivre, Dialogues avec Leucò, Travailler fatigue. Et bien sûr, les grands récits mythiques. Par chez toi, Vacance d’août, Avant que le coq chante, La Lune et les feux… Jusqu’à s’en approprier les moindres résonances. Car si Ferrini est à Luino, ce n’est plus pour retrouver son passé ; c’est parce qu’il écrit un livre sur Cesare Pavese.


         Pour écrire un livre sur Pavese, pour ne pas céder à la facilité factice de la biographie, il faut quitter là sa propre histoire afin d’aller au devant d’une histoire bien antérieure qui a à voir avec le mythe. Il faut aller au-delà des contrées de Luino et même de Santo Stefano Belbo, lieu de naissance de Pavese où se trouve le « centre d’études pavésiennes ». Il faut aller au-delà encore, jusque dans cette Amérique dont Pavese s’est approprié les grands romanciers. L’Amérique où l’écrivain ne s’est jamais rendu et qu’il décrit, pourtant, dans La Lune et les feux. Il faut, comme le « narrateur orphelin » qui revient du bout du monde, tenir son pays à distance pour pouvoir en parler et pour pouvoir le vivre de l’intérieur. C’est du côté de l’infans que ce pays se trouve, du côté des « images primordiales qui ont sédimenté notre mémoire, déterminant ensuite toutes les autres images ». Entrer dans le pays de Pavese, dans son œuvre, c’est aussi plonger « à pleines mains dans la langue de Virgile et de Dante ». Car l’œuvre géorgique de Pavese trouve sa mythologie dans la réalité, et dans le classique, le rustique. Semblable à Dante qui se laisse guider aux Enfers par Virgile, semblable au narrateur de La Lune et les feux qui se laisse guider par Nuto ― le compagnon d’enfance et la mémoire du pays ―, le narrateur du Pays de Pavese se laisse guider par Pavese lui-même.
         De sorte que la lecture du Pays de Pavese est une constante relecture de l’œuvre pavésienne. L’une et l’autre ― lecture et relecture ― s’accompagnent, se relaient, se distancient, se dédoublent, se retrouvent. Dans un constant chassé-croisé d’interrogations, d’analyses, d’interprétations, démultipliées. Y compris dans la descente jusqu’au cœur des mots, au cœur même de la langue et de ses résonances. Pavese/Paese ; Langhe/Lingua ; Macchia/Macula ; Via/Vita… À chaque mot son histoire, ses visages, ses paysages, ses vibrations. Au-delà, rendus aux récits de Pavese, les mots-images en dessinent tout le mystère. Ils jalonnent, avec une cadence et « une monotonie singulière », le « chemin de l’âme » qui mène à Pavese. À son pays. Un pays ouvert sur toutes ses mélancolies.


    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli






    CESARE PAVESE


    Cesare_pavese_1



    ■ Cesare Pavese
    sur Terres de femmes

    9 septembre 1908 | Naissance de Cesare Pavese
    Cesare Pavese dans la collection Quarto (note de lecture d’AP)
    L’Idole et autres récits (note de lecture d’AP)
    Lavorare stanca (+ courte notice bio-bibliographique)
    1er novembre 1935 | Cesare Pavese, Le Métier de vivre
    Semplicità
    Tu as un sang, une haleine





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  • Florence Noël | autant revivre en mon jardin



    D avalanche en avalanche de lumi-re
    Ph., G.AdC






    AUTANT REVIVRE EN MON JARDIN



    autant revivre en mon jardin


    qu’il faille des ombres
    comme regain pour le désir
    et l’enfant mené au large pour y croire

    c’est certain


    qu’elles fassent pleuvoir sur nous
    toutes sortes de pétales enflammés
    puis leur nuance innocente car pâle
    au matin d’un cerisier du japon

    autant revivre en mon jardin


    que tant de mains roulent leur crasse
    avides de matière avides de vêts d’or
    sous nos yeux crucifiés, nos yeux si pauvres
    dans le choix


    que parfois nos corps
    dans leur course aux aguets
    soient précédés d’une lumière
    distincte mais reliée
    fuyant nos lèvres
    honteuses presque de nos pas de vieille suie

    aveu fait foi


    mais quoi alors quoi
    alors ?
    n’y a-t-il de l’espoir en présence
    si brève
    qu’on peut désemparer ?

    ou c’est ainsi et faibles
    ― si beaux en vérité ―
    que nous nous dépolissons
    d’avalanche en avalanche
    de lumière




    Florence Noël
    D.R. Texte inédit
    Florence Noël pour Terres de femmes






    FLORENCE NOËL


    Florence Noel




    ■ Florence Noël
    sur Terres de femmes

    Initiation au crépuscule
    [parler de soi] (poème extrait de L’Étrangère)
    L’Étrangère (lecture d’AP)
    Solombre (lecture d’AP)
    [tu dis c’est l’heure jaune] (extrait de Solombre)
    [Donnez-nous des pierres] (Vases communicants)



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  • 20 novembre 1989 | Mort de Leonardo Sciascia

    Éphéméride culturelle à rebours



        Il y a vingt-trois ans, le 20 novembre 1989, mourait à Palerme l’écrivain sicilien Leonardo Sciascia.







    Sciascia 2
    Source







        Né à Racalmuto, dans la province d’Agrigente, le 8 janvier 1921, Leonardo Sciascia est apparenté (tout comme Andrea Camilleri) à la famille de Pirandello. Il connaît très jeune une attirance pour l’écriture. Instituteur de métier, Sciascia est l’auteur de nombreux récits qui ont pour théâtre la Sicile, son histoire mouvementée, ses mœurs, ses violences. Les Paroisses de Regalpetra (1956), Oncles de Sicile (1958), Le Jour de la chouette (1961), Le Conseil d’Égypte (1963), À chacun son dû (1966), Le Contexte (1971), Todo modo (1974), Candido (1977).

         En 1961 sort en librairie Le Jour de la chouette (Il giorno della civetta), roman le plus populaire de Sciascia. Ce récit, apparenté au roman policier a été inspiré à Leonardo Sciascia par l’assassinat du syndicaliste communiste Miraglia par la Mafia, au village de Sciacca. Le plus ancien souvenir de la Mafia remonte, pour Leonardo Sciascia, « aux grands procès décidés par le préfet Mori, en 1927-28-29, contre le phénomène mafieux qui sévissait alors en Sicile. » Dans Le Jour de la chouette, l’écrivain s’intéresse à ce qui pousse quelqu’un à être mafioso. « C’est le sens de mon livre », déclare-t-il, « et tout compte fait, je crois que c’est un bon livre, même si je le déteste. »







    EXTRAIT DU JOUR DE LA CHOUETTE


        ― Donc, proféra le brigadier avec une douceur paternelle, ce matin, comme d’habitude, tu es venu vendre tes beignets ici : au premier autobus pour Palerme, comma d’habitude.
        ― J’ai ma patente, dit le marchand.
        ― Je sais, dit le brigadier en levant les yeux vers le ciel pour implorer de lui la patience. Je sais. Je ne m’occupe pas de la patente. Je ne veux savoir qu’une chose ; tu vas me la dire et je te laisse tout de suite repartir vendre tes beignets aux enfants. Qui a tiré ?
        ― Pourquoi ? demanda le marchand de beignets d’un air aussi intéressé que surpris. On a tiré ?
        ― Oui. A six heures trente. Du coin de la via Cavour. Deux coups de chevrotines « a lupara », soit d’un calibre douze, soit d’un fusil à canons sciés… Aucun de ceux qui étaient dans l’autobus n’a rien vu. J’ai eu un travail de chien pour savoir qui était dans l’autobus ; quand je suis arrivé, tout le monde s’était envolé… Un homme qui vend des beignets s’est souvenu ― mais seulement au bout de deux heures ― qu’il avait vu au coin de la via Cavour et de la place Garibaldi quelque chose comme un sac de charbon ; il a même promis à sainte Fara un boisseau de pois chiches parce que c’est un miracle, se dit-il, que, rapproché comme il l’était du point visé, les balles ne l’aient pas atteint. Le receveur n’a même pas vu le sac de charbon. Les voyageurs, ceux qui étaient assis à droite, disent que les vitres semblaient avoir été dépolies tant elles étaient embuées… Oui, c’était le président d’une société de construction ; une petite coopérative ; il semblerait qu’il n’ait jamais pris d’adjudication pour une somme supérieure à vingt millions. Des petits lotissements pour maisons ouvrières, des tout-à-l’égout, des voies de communications intérieures… Salvatore Colasberna : Co-la-sber-na. Il était maçon, il n’y a que dix ans qu’il a créé cette coopérative avec ses deux frères et quatre ou cinq autres maçons du pays. C’était lui qui dirigeait les travaux, bien qu’il eût à leur tête, pour la forme, un géomètre-arpenteur, et c’était aussi lui l’administrateur… Ça marchait comme ça pouvait. Ses associés et lui se contentaient d’un petit bénéfice, comme des salariés… Non, il ne semble pas qu’ils aient fait de ces travaux qui se liquéfient à la première pluie… j’ai vu une ferme toute neuve défoncée comme une boîte de carton parce qu’une vache s’était frottée contre… Non… c’était l’entreprise Smiroldo qui l’avait construite ; une grande entreprise de constructions ; une ferme défoncée par une vache… Colasberna, à ce qu’on m’a dit, faisait des choses solides ; et, réellement, nous avons ici la via Madonna di Fatima, qui a été faite par son entreprise ; avec tous les camions qui y passent, elle ne s’est pas affaissée d’un centimètre ; alors qu’il y a d’autres rues, faites par des entreprises plus importantes, qui font le dos de chameau au bout d’un an… S’il avait quelque chose sur son casier ? Oui. En dix-neuf cent quarante… c’est ça, quarante, le 3 novembre dix-neuf cent-quarante… il voyageait en autobus, on dirait que les autobus lui portaient malheur, on parlait de la guerre que nous avions déclarée à la Grèce, quelqu’un disait : « Nous l’avalerons en quinze jours » il voulait dire : la Grèce, alors Colasberna fait ! « C’est donc un œuf ? » Il y avait un milicien sur l’autobus ; le milicien l’a dénoncé… Comment ?… Je vous demande pardon, mais vous me demandez s’il avait quelque chose sur son casier ; moi, les papiers en main, je vous réponds : oui… C’est bon, ça ne compte pas, il n’avait pas d’antécédents judiciaires… Fasciste, moi ? Mais quand je vois les faisceaux, je fais les cornes… Oui, chef, à vos ordres.
        Le brigadier reposa le téléphone sur sa fourche avec une délicatesse trahissant l’exaspération. « Ce type-là a été dans le maquis, dit-il. Il ne me manquait plus que ça, d’avoir un supérieur qui vient du maquis. »


    Leonardo Sciascia, Le Jour de la chouette [Il giorno della civetta, 1961], Éditions Garnier-Flammarion, 1986, pp. 38-39-40-41. Traduit de l’italien par Juliette Bertrand.

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  • Maria Maïlat | Recommencement




    Torikian 5
    Marc Torikian, Portrait, 2000
    Mine de plomb, 20 x 20 cm
    Source






    RECOMMENCEMENT


    au peintre Marc Torikian



    À  la tombée de la nuit,
    le héron cendré s’enfuit.

    La trace de ton agonie sans mots
    perce le toit du grenier, là-haut.

    La petite haine en ligne de mire
    chasse la légèreté et les fous rires.

    Peintre sans maison dans les ténèbres :
    ici, on a cassé tes pinceaux et vertèbres.

    Ailleurs, le verbe recommence.
    Peut-être. Je le pense.

    Ici, la grisaille fait racines.
                                                   L’œil ne se voit pas.
                                                   L’oreille s’écoute.
    Ailleurs, tu sèmes et humes
    L’herbe berceuse de brumes.

    La douleur de l’enfance-escargot
    repousse le rouge derrière les fagots.

    Le fils qui se réveille ailleurs que dans le livre
    chante les syllabes de tes couleurs libres.



                                                    (Semur-en-Auxois, 2009)



    Maria Maïlat
    D.R. Texte inédit Maria Maïlat pour Terres de femmes






    MARIA MAÏLAT

    Maria_malat
    Ph. D.R.



    ■ Maria Maïlat
    sur Terres de femmes

    [Écrire à l’aube]
    Klothô (lecture d’AP)
    [Klothô] (extrait)
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    le Portrait de Mariat Maïlat



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    le blog de Maria Maïlat
    le site de Marc Torikian
    → (sur Dailymotion)
    un entretien de Maria Maïlat



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  • Isabelle Raviolo | Ô mère



    OPERA DE  PEKIN -  MERVEILLE IMPAIRE - ARCHITECTE PAUL ANDREU

    National Centre For The Performing Arts
    (Opéra de Pékin), Beijing, Chine
    Paul Andreu Architecte, associé à ADPi et BIAD
    Ph., G.AdC






    Ô MÈRE



    Ô mère – ta partition
    Gravée sous la pierre
    Yin – note abolie

    Sur la feuille
    Une calligraphie sang –
    Ta signature –          NON

    (j’ose pourtant –
    Dire – ce gros mot)
    Yang – son dard          j’ai

    Contre toi –
    Retourné – la pierre
    goûté le sel –       ô

    Merveille impaire –




    Isabelle Raviolo
    D.R. Texte inédit Isabelle Raviolo
    pour Terres de femmes






    ISABELLE RAVIOLO


    Portrait d isabelle raviolo
    Image, G.AdC



    ■ Isabelle Raviolo
    sur Terres de femmes

    Isabelle Raviolo, Les Bruits dans l’eau
    Corniglia
    Isabelle Raviolo, Soleils noirs



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  • anthologie poétique Terres de femmes





             Anthologie poetique tdf bis
             Ph., G.AdC




             • 1. Cristina Crisci | Spring
             • 2. Sylvie Saliceti | La danse de Sakuntala
             • 3. Béatrice Bonhomme-Villani | Un lacis de sang et d’ombre
             • 4. Nelly Roffé | Argia
             • 5. Marta Grundwald | je te montrerai comment je traverse la rue
             • 6. Jos Roy | Lui – … Elle –
             • 7. Marielle Anselmo | Les îles
             • 8. Valérie Brantôme | Il sognatore
             • 9. Sylvie Fabre G. | L’au-dehors
             • 10. Marie-Ange Sebasti | Ils étaient partis
             • 11. Isabelle Raviolo | Ô mère
             ▪ 12. Maria Maïlat | Recommencement
             ▪ 13. Florence Noël | autant revivre en mon jardin
             ▪ 14. Samira Negrouche | Il se peut
             ▪ 15. Ophélie Jaësan | Une branche de bois vert
             ▪ 16. Myriam Montoya | J’irai encore
             ▪ 17. Joëlle Gardes | Hôpital
             ▪ 18. Brigitte Gyr | au plus gris du corps
             ▪ 19. Déborah Heissler | loin
             ▪ 20. Nathalie Riera | page aphone
             ▪ 21. France Burghelle Rey | Lumière du poème
             ▪ 22. Rodica Draghincescu | EX(o)ilium
             ▪ 23. Mireille Fargier-Caruso | On a vingt ans
             ▪ 24. Valérie Rouzeau | Dans le vent d’hiver
             ▪ 25. Edith Azam | IL RESTERA MON SIGNE
             ▪ 26. Béatrice Libert | Attente
             ▪ 27. Béatrice Machet | Un autre jour… la vie
             ▪ 28. Sylvie Durbec | Pour García Lorca, te quiero verde
             ▪ 29. Elisa Biagini | Da una crepa
             ▪ 30. Cécile Oumhani | Manhattan redux
             ▪ 31. Ghyslaine Leloup | Ils ont tenté de broyer mon esprit
             ▪ 32. Roselyne Sibille | Le souffle des mondes
             ▪ 33. Hélène Sanguinetti | La vieille femme regarde en bas
             ▪ 34. Myriam Eck | Aridité
             ▪ 35. Rachida Madani | Près de moi
             ▪ 36. Tamirace Fakhoury | Passage
             ▪ 37. Josyane De Jesus-Bergey | On ne parle plus du loup
             ▪ 38. Rita R. Florit | Varchi del rosso
             ▪ 39. Cristina Castello | Bajamar
             ▪ 40. Jackie Plaetevoet | Ras de la terre
             ▪ 41. Mercedes Roffé | Les Lanternes flottantes
             ▪ 42. Agnès Schnell | Présences
             ▪ 43. Antonella Anedda | Salva con nome
             ▪ 44. Vivian Lofiego | Elle portait une blessure au front
             ▪ 45. Marie-Florence Ehret | L’or des jours
             ▪ 46. Linda Maria Baros | Nœuds de voies ferrées
             ▪ 47. Julieta Guerreiro | De l’air dans les petites boîtes
             ▪ 48. Claudine Bohi | si ce n’est pas trembler
             ▪ 49. Geneviève Vidal-de Guillebon | Vie donner/nommer
             ▪ 50. Lucetta Frisa | Toccata settima
             ▪ 51. Vénus Khoury-Ghata | Les cheveux rouges de la mère
             ▪ 52. Françoise Donadieu | L’âme des femmes
             ▪ 53. Ariane Dreyfus | SAMI
             ▪ 54. Carole Darricarrère | Ulysse (Joyce remixed)
             ▪ 55. Angèle Paoli | Chtoniennes (lamentu)
             ▪ 56. Fabienne Courtade | [Sans titre]
             ▪ 57. Marianghjula Antonetti-Orsoni | E Lavandare
             ▪ 58. Luce Guilbaud | Le corps penche
             ▪ 59. Sophie Loizeau | le bain de diane
             ▪ 60. Béatrice Brérot | De l’autre côté
             ▪ 61. Claude Ber | le miel à la bouche
             ▪ 62. Élisabeth Chabuel | Le Moment
             ▪ 63. Maura Del Serra | olla kalà
             ▪ 64. Danielle Fournier | Pas de mots dans les mots
             ▪ 65. Angela Marinescu | de ce couteau se déverse le métal
             ▪ 66. Claudine Bertrand | La nomade
             ▪ 67. Marie-Thérèse Peyrin | Marche forcée
             ▪ 68. Judith Chavanne | L’enfant était à venir
             ▪ 69. Françoise Clédat | Je vis une histoire d’amour
             ▪ 70. Anne-Lise Blanchard | Elle est à marée
             ▪ 71. Michèle Dujardin | Naissance
             ▪ 72. Marie-Claire Bancquart | En Angleterre
             ▪ 73. Gabrielle Althen | Une fois le gris devenu l’autre versant du bleu
             ▪ 74. Magda Cârneci | Culte postmoderne
             ▪ 75. Sabine Peglion | Malhabile
             ▪ 76. Sandra Moussempès | Une histoire naturelle
             ▪ 77. Sabine Huyhn | Là où elle naît
             ▪ 78. Laure Cambau | Sans pourquoi
             ▪ 79. Aurélia Lassaque | Lo temps s’es perdut
             ▪ 80. Fanny Gondran | Là
             ▪ 81. Stella Vinitchi Radulescu | femme bleue    Magritte le dit
             ▪ 82. Marie Étienne | Ce qui reste
             ▪ 83. Mahdia Benguesmia | Aujourd’hui c’est blanc
             ▪ 84. Catherine Weinzaepflen | la terre est ronde
             ▪ 85. Denise Le Dantec | Où quand
             ▪ 86. Cécile A Holdban | [Je ne tuerai point]
             ▪ 87. Marilyse Leroux | [Tu ouvres une brèche]
             ▪ 88. Muriel Stuckel | La poésie échappée
             ▪ 89. Marie-Christine Masset | Rêve
             ▪ 90. Bernadette Engel-Roux | [Les taupes sont de fines émietteuses]
             ▪ 91. Brigitte Broc | Parfois
             ▪ 92. Christine Bonduelle | [sans titre]
             ▪ 93. Sonia Moretti | Metti mi à u provu
             ▪ 94. Lydia Padellec | La mère
             ▪ 95. Martine Cros | Burned in/out
             ▪ 96. Isabelle Lévesque | Territoire
             ▪ 97. Marie Ginet | Plus vaste que nous
             ▪ 98. Eva-Maria Berg | zeichensprache
             ▪ 99. Chantal Danjou | Figures libres
             ▪ 100. Laurence Bouvet | Ce vers quoi
             ▪ 101. Violaine Forest | [Je reste au jardin]
             ▪ 102. Colette Nys-Mazure | [Triptyque]
             ▪ 103. Geneviève Bertrand | [L’araignée règne sur l’enfance]
             ▪ 104. Isabelle Pellegrini | [Pour ne pas perdre la pluie]
             ▪ 105. Paulina Mikol Spiechowicz | De cristal et d’autres minéraux
             ▪ 106. Cécile Guivarch | [ma grand-mère avait beaucoup de clés]
             ▪ 107. Marianne Costa | [Huwa]
             ▪ 108. Isabelle Bancel | Blanc
             ▪ 109. Martine – Gabrielle Konorski [Vissée à la plante des pieds]
             ▪ 110. Sylvie Nève | Ode à Oum Kalthoum
             ▪ 111. Anne Marguerite Milleliri | Jaune
             ▪ 112. Ève de Laudec | De tous ces mots
             ▪ 113. Laurine Rousselet | [illisibilité afflux soulèvement]
             ▪ 114. Silvia Bre | [È da lontano che viene]
             ▪ 115. Márcia Marques-Rambourg | de cette césure de cette ligne
             ▪ 116. Albertine Benedetto | Baltique



    ………….. (à suivre)




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  • 18 novembre 1975 |

    Lettre de Jean-Jacques Pauvert à Jean Carrière

    Éphéméride culturelle à rebours


    JEAN  CARRIERE
    Image, G.AdC







    18 novembre 1975



    Cher Jean,

    Il ne m’est pas très facile de t’écrire aussi souvent que je le voudrais. À vrai dire, comme tu as pu le voir, je ne t’écris presque jamais, et c’est certainement une des choses que je regrette le plus de n’avoir pas le temps de faire. Il faudrait se donner le temps. Disons aussi qu’il n’y a pas que le temps. Ce n’est pas si simple. Il faudrait en parler.

    Tu ne t’en rends peut-être pas bien compte, mais je pense souvent à toi. Je finis par vivre un peu avec tes problèmes. Et ces problèmes, je les sens très lourds en ce moment. Mais de la même manière, je sens très fortement que tu vas en sortir. Ce n’est pas exactement ce que je voulais dire en commençant.

    De quoi s’agit-il en fait ? C’est énorme et ce n’est rien. Il s’agit d’un livre à faire. Et voilà au fond ce qu’exactement je voulais te dire : c’est qu’un livre ne se fait pas tout seul. Je crois qu’un écrivain, surtout, très précisément, un écrivain qui est où tu en es, troisième livre, Goncourt au deuxième, etc., ne peut, tout seul, qu’essayer de mettre dans son livre de plus en plus de choses, jusqu’à ce qu’à la fin il en arrive à vouloir y faire rentrer l’univers et qu’à la fin, tout éclate, comme la tête du roi qui, quand il se la fait sauter avec un cigare de dynamite, a pris enfin la dimension de l’univers. Il ne s’agit que d’un livre. Il ne s’agit que du troisième. Il y en aura un quatrième, puis bien d’autres, et ce n’est que dans bien longtemps qu’on commencera à y voir un peu plus clair.

    Plus simplement, je suis tout à fait et très résolument sûr que tu ne peux pas aboutir sans montrer de temps en temps ce que tu fais à quelqu’un (suis mon regard). Tu sais aussi bien que moi qu’il y a un moment où il faut se poser très banalement les questions de technique, de mécanique. Où il faut en revenir à la pendule de La Bruyère. Et dans ces moments-là, l’œil d’un compagnon n’est pas à négliger, même si son idée de la pendule n’est pas la tienne. C’est trop long, c’est trop court, là le fil se casse, etc. De la mécanique. De la boutique. La boutique se fait à plusieurs.

    Tu vas me dire peut-être qu’avant de se demander comment faire la pendule, il faut peut-être se demander s’il faut vraiment faire une pendule. Alors là, et surtout dans ton cas, j’ai un avis absolument catégorique : je pense que le moment de se poser la question est tout à fait dépassé. La réponse est sans contestation possible: il faut faire la pendule et la faire vite, et où en sommes-nous ? Il y a à cela toutes les raisons du monde, et tu penses bien que je ne parle pas uniquement de commerce.

    C’est au fond très bien que tu viennes à Paris. Il faudra bien qu’un jour nous abordions donc ces questions autour desquelles nous n’avons fait que tourner jusqu’ici. C’est peut-être pour cette année.

    Je t’attends et je t’embrasse.


    J.J.


    Jean-jacques_pauvert
    Source



    Jean-Jacques Pauvert, Lettre à Jean Carrière, Cahiers Jean Carrière, numéro 1, novembre 2007, Domens, 2007, pp. 190-191-192.





    JEAN CARRIÈRE



    ■ Jean Carrière
    sur Terres de femmes

    9 novembre 1972 | Prix Goncourt pour L’Épervier de Maheux



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de l’INA)
    Jean Carrière le sourcier
    → (sur Terres de femmes)
    Serge Velay, Le Palais d’été (extrait)



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  • Marie-Ange Sebasti | Ils étaient partis




    Juste retour des mots  Ils sont - quai
    Ph., G.AdC







    ILS ÉTAIENT PARTIS



    Ils étaient partis naviguer
    autour du monde
    sous d’autres yeux


    postaient distraitement quelques missives
    oblitérées d’oubli
    sur d’autres îles


    Ils s’étaient assoupis burinés
    dans les bras tendres d’escales au long cours


    Juste retour des mots



    Ils sont à quai



    Marie-Ange Sebasti
    D.R. Texte inédit
    Marie-Ange Sebasti pour Terres de femmes





    MARIE-ANGE SEBASTI


    Sebasti
    Image, G.AdC



    ■ Marie-Ange Sebasti
    sur Terres de femmes

    une fiche bio-bibliographique [BIO-BIBLIO] sur Marie-Ange Sebasti
    → une petite anthologie poétique de
    Marie-Ange Sebasti
    Cette parcelle inépuisable (note de lecture d’AP)
    [Un chemin de silence a gonflé ton chargement de mots] (extrait de Cette parcelle inépuisable)
    Demain (extrait de Marges arides)
    → « 
    Notre héritage n’est pas forteresse »
    [On voudrait partager sans parole] (extrait de La Connivence du marchand de couleurs)
    Parlemente (extrait de La Porte des lagunes)
    Plage d’encre (extrait de Haute plage)
    Quand les îles pouffent de rire (extrait de Presque une île)
    Une petite vieille en noir (extrait de Paroles pour une île)
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    le Portrait de Marie-Ange Sebasti (+ un extrait de Paroles pour une île et de Corse, dans le chalut des jours)
    → (avec Monique Pietri)
    Bastia à fleur d’eau
    → (avec Monique Pietri)
    Villes éphémères (note de lecture)
    → (avec Monique Pietri)
    Garder infatigablement les yeux ouverts (extrait de Villes éphémères)



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