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  • Carnets de marche. 16

       



    CARNET N.16

    16.

         Elle glisse, glisse entre les immeubles de verre jusqu’à l’infini du ciel. Arrimée sur sa planche de vitre biseautée à sa taille, elle file, file dans le vent qui lui caresse la joue au passage. Elle descend, descend à travers la ville blanche. Elle ne sait si elle pourra refaire la route en sens inverse. Pour le moment, grisée, elle se laisse emporter par la vitesse. Au détour d’un virage, elle aperçoit la patte miniature d’un animal. Un éléphant grandeur nature qui l’observe de son regard liquide, embué de lumière. Elle frôle un grand lion ténébreux qui lui cède le passage puis rejoint la silhouette de ses enfants, elle, minuscule et lui, immense. Elle se retourne et lui fait signe. Ils vont à la plage, de ce côté-ci de la mer. Elle a beau faire, elle ne peut les rejoindre. Le sentier lui échappe et le temps a déjà changé. D’énormes vagues battent le rivage. La petite crique, à l’abri des regards indiscrets, conviendrait mieux à son attente. Elle glisse, glisse comme le petit bonhomme de « Jean Mineur publicités » sur son ruban filmique.

         Tu t’es réveillée tard ce matin, au-delà de dix heures. Il te faut une heure pour te préparer. Il est trop tard pour te lancer dans ta marche matinale. Tu as juste le temps de porter le pain sec aux ânes, en prenant garde de tailler des quignons pour chacun d’eux. Avec quelle violence ils se battent, donnent chacun des coups de croupe à l’autre pour l’empêcher de s’emparer du croûton ! Un troisième survient qui fait de même et c’est la guerre. Les trois sont au bord du précipice, le muret risque à tout moment de s’effondrer. Toi, tu regardes impuissante les étapes d’un drame dont te voilà responsable !

         Douceur de l’air ce matin. Étrange calme après la tempête d’hier. Des vents à couper le souffle, des gouffres blancs d’écume jusqu’à l’extrême horizon. Tu penses qu’il y a quelque chose de surréel à être ici, dans ce lieu de ton enfance, décor de pierre et de mer. Dans quinze jours, c’est Noël. Pourquoi es-tu là et non plus là-haut, dans les brumes où tu as vécu si longtemps ? Le marché couvert illuminé regorge de victuailles. Ici, tu as juste ta petite épicerie de village. Tu regardes avec tristesse les sapins de la supérette, blêmes de neige artificielle. Des visages surgissent, qui ont fait partie de ta vie. Tu peux les faire revenir à ta mémoire n’importe quand, tu peux imaginer le sourire de la crémière, ou la gouaille féroce du poissonnier ; tu peux les regarder vivre et travailler, comme si rien n’avait changé. Eux ne savent plus où tu es. Tu es partie sans laisser de trace. Tu t’es portée disparue.

         Installée devant la flambée de fin de matinée, tu écoutes Riccardo Cocciante. C’est la musique qu’il a choisie pour toi. Et toi, tu pleures, et tes larmes coulent en gros grains, en gros sanglots irrépressibles sur tes joues. Tu te sens broyée de nostalgie. Le manque de l’Italie se creuse en toi, te prend à l’improviste, te submerge. Tout un pan de ta vie noyé, emporté dans l’abîme. Tu iras, tu iras au printemps. Il le faut !

         Être ici, cela te renvoie à tout ce que tu as perdu. Tu sais pourtant que tout ce qui faisait ta vie n’était plus depuis longtemps, bien avant que le choix de l’exil eût été fait. Le passé refait surface par nappes mauves semblables à celles de la mer d’aujourd’hui. Les accents déchirants de la musique de Cocciante te lacèrent le cœur. Un cœur de midinette qui pleure sur elle, sur la vie qu’elle a laissée, sur la part d’elle-même qui n’est plus. Abandonnée où ? Depuis quand et pour combien de temps encore ? Elle ne sait plus. Elle se perd. Elle se sent traversée de méandres aux issues introuvables. Promis à quels ailleurs ?

         Le grand vent d’hier est tombé, la violence des rafales qui balayaient la mer s’est estompée. Le mugissement sourd de l’étendue noire s’est apaisé. Étrange cette sensation qu’elle a du rapprochement de la mer, de sa montée, de son inquiétante proximité, chaque fois qu’elle s’enfle et se gonfle. Les étoiles perçantes à travers les grandes embardées de nuages exaltants. Tu envies leur fluctuance, leur extravagance, leur ubiquité inconsolable. Leur force tranquille et décidée que rien n’entrave ni n’arrête. Tu penses à tous les exils. Et au tien, bien moindre que celui de tant d’autres. Sèche tes larmes. Il n’y a vraiment pas de quoi gémir.

    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli

       

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  • Ludovic Degroote, Un petit viol, Un autre petit viol,

    par Sylvie Fabre G.

    Chroniques de femmes – EDITO

    Note de lecture de Sylvie Fabre G.

    Ludovic Degroote, Un petit viol, Un autre petit viol,
    Éditions Champ Vallon, 2009



    Un petit viol 2






    RETISSER LA TRAME DÉCHIRÉE



    Nous n’en finissons pas d’inventer une langue qui puisse parler ce que nous taisons le plus, une langue qui enlace parole et silence en un nouvel espace-temps. Et l’écriture poétique seule lui donnerait sa forme, sa force et sa vérité, suggère Ludovic Degroote dans son dernier livre Un petit viol, Un autre petit viol, en rendant audible à soi-même et aux autres l’imprononçable. Audible mais pas forcément intelligible car l’âme humaine demeure ce mystère où l’homme se perd. À vouloir comprendre, faire entendre le mal, saisir sa cause ou sa conséquence, le mettre en mots pour l’éclairer et partager la douleur, on s’aperçoit avec l’auteur qu’on entre dans « la spirale du texte comme de la vie qui se rapproche sans jamais rien pouvoir toucher ».

    Rose des tombes le corps adulte, lieu d’incertitude, de dépossession et de mémoire que l’enfance semble définitivement habiter surtout lorsque celle-ci s’est abîmée physiquement et moralement dans une expérience traumatisante qui a fait s’arrêter le cours de la vie. Après le petit viol, « reste à vivre mort… ce qui permet aujourd’hui d’essayer d’écrire ça » écrit l’auteur. L’intimité fracassée, le corps de l’adolescent instrumentalisé par un ami de la famille, l’amour dans la séparation, le sexe défiguré « mon salaud, tu bandes, dit l’homme sur le canapé, la bouche c’est comme un vagin, tu verras… », l’être entier bascule puis s’immobilise dans l’instant. Mais le temps continue et, trente cinq ans après, la blessure est toujours là, la honte de la jouissance, l’autodénigrement et la culpabilité aussi « j’ai quand même toujours été petit » murmure comme en s’excusant la voix du texte. Le désespoir, la peur et la révolte n’ont trouvé nul exutoire. Et l’on entend, au présent de l’indicatif toujours, la parole perdue de l’enfant en l’adulte qui ironise sur lui-même, sur les autres, et qui, dans son désarroi, met en accusation le monde familial et bourgeois qui n’a pas su voir, sentir, deviner, entendre la plainte muette, qui l’a laissé seul, livré à l’homme pervers : « Sûr que les autres devaient savoir mais se taisaient par crainte des remous ». Des couillus, le surnom ambigu, tout en minuscules comme l’ensemble du récit sans ponctuation signe, dans sa répétition et la continuité, une sidération. Effroi de la contrainte exercée sur l’adolescent de quatorze ans désormais sans moi, sans sexualité à découvrir, sans âge : « ce serait plus simple que tu sois mort, dit la voix qui parle, mélancolie sans fin ».

    L’auteur est conscient que cette Confession, ― et on ne peut s’empêcher de penser à Saint-Augustin et à Rousseau dans cette tentative de cerner la place du bourreau et de la victime et le poids de la responsabilité morale ― ne le sauve de rien. Le livre fini, refermé, l’absence de remède persiste : « Le petit Ludovic attend (toujours) ses parents à la cave ». L’écriture permet juste de poser les questions, de retrouver la capacité de réfléchir à ce qui vous a été volé : votre corps, espace mental. La construction du récit en tête-bêche témoigne du vécu de l’enfermement qui n’a jamais pu être rompu et la langue elle-même s’inscrit dans cette clôture. Pour Un petit viol, Ludovic Degroote commence par jouer de l’ordre chronologique pour mieux montrer le dérèglement de la vie « Il y a du temps qui passe et du temps qui s’arrête, nous sommes jonglés » puis pour Un autre petit viol, de l’ordre alphabétique, ultime tentative, fol espoir de retisser peut-être lettre après lettre, de A à Z, la trame déchirée de la vie et de sa parole.

    Car la voix qui parle dans Un petit viol et Un autre petit viol, ne peut habiter l’écriture que par effraction, elle en accepte l’errance, refait les comptes par les contes, ― Chaperon rouge ou Barbe bleue sont appelés à l’aide ―, refuse la vengeance ou la jalousie voleuses d’énergie, délimite la zone de non-droit, prévoit l’indignation du bien-pensant et la difficulté d’une morale mais, se heurtant toujours aux mêmes interrogations sans réponses sûres, elle finit par offrir au lecteur le seul don d’incertitude. Sa dernière injonction « sauvons le silence » sonne comme un avertissement et renvoie le lecteur à la lumière de sa nuit.


    Sylvie Fabre G.
    D.R. Texte Sylvie Fabre G.






    ■ Ludovic Degroote
    sur Terres de femmes


    [Autour figé, amorti, sans attente] (extrait de La Digue)
    Am Timan, Tchad (extrait de ligne 4)
    [j’aimerais faire quelque chose de tout ça] (extrait de josé tomás)
    josé tomás (lecture d’AP)
    Monologue (Sotto voce de Jean-Louis Giovannoni)
    [chacun nous vivons avec des polyphonies intérieures] (extrait de Monologue)
    un peu plus au bord
    zambèze (lecture d’AP)
    3 ciels d’ici
    Christine Delbecq | Ludovic Degroote, ChaosCarton




    ■ Sylvie Fabre G.
    sur Terres de femmes


    Dans l’attente d’un prolongement qui se meurt (note de lecture sur Corps subtil)
    Sylvie Fabre G. par Sylvie Fabre G. (auto-anthologie poétique comprenant plusieurs extraits de L’Approche infinie)
    L’Approche infinie (article)
    Celle qui n’était pas à sa fenêtre (extrait issu du recueil Le Génie des rencontres)
    Maison en quête d’orient (poème issu du recueil Les Yeux levés)
    Quelque chose, quelqu’un
    Trouver le mot (poème issu du recueil L’Autre Lumière)
    le Portrait de Sylvie Fabre G. dans la Galerie Visages de femmes (+ poème issu du recueil L’Approche infinie)
    → (dans les Chroniques de femmes)
    L’Amourier | Le Jardin de l’éditeur par Sylvie Fabre G.
    → (dans les Chroniques de femmes)
    Anne Slacik par Sylvie Fabre G. : Anne, la sourcière




    ■ Autres lectures de Sylvie Fabre G.
    sur Terres de femmes


    Caroline Boidé, Les Impurs
    Jean-Pierre Chambon, Le Petit Livre amer
    Patricia Cottron-Daubigné, Visage roman
    Pierre Dhainaut, Après
    Alain Freixe, Vers les riveraines
    Luce Guilbaud, Demain l’instant du large
    Emmanuel Merle, Ici en exil
    Emmanuel Merle & Thierry Renard, La Chance d’un autre jour, Conversation
    Angèle Paoli, Lauzes
    Pierre Péju, Enfance obscure
    Pierre Péju, L’État du ciel
    Pierre Péju, L’Œil de la nuit
    Didier Pobel, Un beau soir l’avenir
    Erwann Rougé, Passerelle, Carnet de mer
    Fabio Scotto, La Peau de l’eau
    Roselyne Sibille, Entre les braises
    Une terre commune, deux voyages (Tourbe d’Emmanuel Merle et La Pierre à 3 visages de François Rannou)





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  • Antoine Emaz | La poésie ?

    «  Poésie d’un jour  »




    Tour
    La poésie résiste à l’enfermement ; elle est ce qui passe
    à travers les barres, les grilles
    Ph., G.AdC






    LA POÉSIE




    La poésie ? Un pur travail de langue, une défaite de la pensée, le développement d’une exclamation, une adhésion au monde, une tour d’ivoire, un cœur frappé, un jeu intertextuel, une production sous contrainte… La poésie peut être tout cela, tour à tour, avec plus ou moins de ceci ou de cela selon chaque poète, chaque poème. « Art poétique nuisible à la poésie, dangereux en tout cas pour elle. Nous savons trop bien ce que nous devrions faire » (Jaccottet). La poésie résiste à l’enfermement ; elle est ce qui passe à travers les barres, les grilles. « Le sens ce n’est pas ce que cela veut dire, c’est ce vers quoi ça va ― qui est la raison d’être d’accumuler des livres sans doute, pour que le mouvement reste vif ― on ne sait pas » (B. Noël). La poésie, c’est l’air, le souffle qui passe dans la carcasse des mots morts du poème, et bruit encore un peu, ou sifflote ou chantonne. Rien de plus que de l’air qui passe dans les tuyaux des mots, de l’air frais qui touche. Partant de là, on peut également considérer des démarches qui visent à faire chanter, ou déchanter, ou enchanter… La question est bien moins celle du but à atteindre que celle des moyens : rapports au réel et à la langue, implication de toute la personne (y compris sa mémoire personnelle et culturelle), clarté de la nécessité du poème à travers ses choix d’écriture… Pour autant qu’il y ait « choix », ce que je ne crois guère ; il serait plus juste de dire que nécessité fait choix. On ne peut demander à un poète que d’écrire aussi loin qu’il le peut dans l’espace qu’il s’est taillé dans la langue commune. Ce faisant, il est tout à fait possible qu’il dépasse notre capacité d’écoute, ou même d’entente ; cela n’invalide pas la tentative, si celle-ci était mue par autre chose qu’une pure vanité d’auteur. « Il faut aller jusqu’au bout, même pour ne pas vaincre » (Reverdy).



    Antoine Emaz, Lichen, encore, Éditions Rehauts, 2009, pp. 92-93.





    ANTOINE EMAZ


    Emaz Portrait
    D.R. Ph. Dominique Houyet




    ■ Antoine Emaz
    sur Terres de femmes

    Cambouis
    Je travaille et je vois, après
    « Le faiseur »
    Un lieu, loin, ici (poème extrait de Personne)
    Plaie, XV
    Poème des dunes
    Poème-lettre
    Soirs






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  • Carnets de marche. 15

       



    CARNET N.15

    15.

         Le vent de la nuit est tombé. Le désir la prend d’aller marcher sur la route côté ombre. De reprendre le fil de son écriture. L’air est vif et pur. Elle marche d’un bon pas. Le premier feu de talus l’attend juste dans la première ligne droite.

         Elle pense à la question du « elle », abordée l’autre jour avec Sol. Ce « elle » qui la dépersonnalise. C’est ce que lui dit Sol. Cette distanciation, toujours, qui l’empêche d’assumer son « moi ». Elle, elle hésite. Le « je » qui se met sans cesse en avant, ça la contrarie. Elle le trouve trop exclusif, trop égocentré. Elle lui préférerait le « tu », qui ouvre le dialogue avec cette autre part d’elle-même, instaure le va-et vient entre une forme de regard et une autre, un angle de vue et un autre.

         Cette manie qu’ils ont de faire des feux le long des talus. Et ces pans entiers de verdure qui peu à peu finissent en branchages calcinés, renversés dans le vallon !

         Elle pense à son « moi dévitalisé », à cette mémoire du jour qui s’enfuit sans laisser de trace. Elle entre dans le soleil. La caresse douce dans son dos. Ses pensées fuient, sans laisser de signe tangible de leur passage. Elle voudrait les retenir, un peu, pas toutes, seulement certaines. Pourquoi au juste ? Elle ne sait pas.

         Elle croise le pêcheur sur sa vespa, une grande brassée de bruyère posée devant lui.

         Tu t’interroges jour après jour sur la vie étrange des gens d’ici. Rituels auxquels tu n’as pas accès, dont le sens t’échappe. Et ces petits buissons têtus, chaque jour plus hauts, plus touffus. Tu viens de comprendre que ce sont les buissons d’asphodèles. Les touffes neuves émergent autour des tiges anciennes. Les ferlucci desséchés ploient sous le vent. Une odeur de charogne persiste encore autour de la chênaie. Toute trace d’oiseau a pourtant disparu. Les choses ainsi surgissent, puis disparaissent sans que l’on comprenne pourquoi.

         Tu envies à ton amie ce souffle, cette inspiration qui l’habite et l’enlève vers un au-delà des mots, inaccessible. Elle porte en elle d’autres forces vitales qui la font s’extasier vers cette « autre lumière ». Hanging Rock (Australie) étire son dôme grêlé de cratères. Partie dans le soleil, partie dans l’ombre. Un oiseau lance son pépiement. Rythme binaire, syncopé 2/2 ; 2/2 ; 2/2… Tiens, il a changé de côté. Il t’a contournée sans que tu t’en aperçoives.

         Tu croises l’inconnue de Barrettali, dans sa Toyota décapotable. Le friselis léger de la mer, bleu turquoise ce matin. Tu frissonnes comme si tu mettais un pied dans l’eau. Elle doit vraiment avoir fraîchi. Les premières maisons de Barrettali dans un triangle de lumière douce. L’enclos est toujours fermé. Tu ne dis plus où tu vas, dans quelle direction ni jusqu’où. Ainsi tu te réappropries l’espace et, avec lui, le temps, son compagnon indissociable. Ici, l’espace anéantit le temps. Provisoirement. L’heure tourne et tu ne t’en aperçois pas. Les sonnailles timides des chèvres, en contrebas. Un petit avion pointe son museau bruyant au-dessus de la Punta. Une nappe onctueuse de nuages mauves étire ses filaments. La mer en un instant est devenue violine, le temps de grimper vérifier si l’enclos est ouvert ou fermé et de redescendre. Des flammèches plus claires s’épanouissent en gerbes dans le ciel. Le petit sac à gri-gri duvet cra-cra oscille, suspendu à la clé de fa d’une liane. Le cliquetis des sonnailles se rapproche. Elles ne sont plus loin maintenant. Une tache mouvante bouge dans la lumière. Le troupeau est là, tapi à l’affût dans les feuillages, disséminé de part et d’autre de la route. Les chèvres t’observent, intriguées, immobiles, figées presque. Un grand bouc brun surgit des hauteurs, derrière un arbousier. Une petite courtaude te fixe de son air incrédule. Elle te rappelle quelqu’un, mais qui ? Les buissons tremblent, secoués ici et là par les mâchoires qui tirent sur les branches. Une autre descend, qui s’agrippe aux bruyères. Le maquis crépite.

         Tu voudrais bien continuer ta route. Tu reprends le rythme de ta marche. Les cabrettes s’éclipsent aussitôt et se faufilent entre les branches. Elles soulèvent en cavalant des odeurs de champignons et de musc. Barrettali étire ses hameaux dans la pleine lumière. L’écrin vert émeraude de la marine dans le déploiement des cloches de midi.

         Les ondes vives sont silencieuses aujourd’hui.

    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli

       

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  • Zéno Bianu | Du plus loin…

    «  Poésie d’un jour  »



    un devenu-ciel anéanti
    Ph., G.AdC







    DU PLUS LOIN…



    du plus loin des voix éteintes
    les étoiles à nu
    blanches de langues


    en amont du sans-fin
    qui creuse les tempes


    un devenu-ciel anéanti
    comme on agrippe sa naissance




    Zéno Bianu, Fatigue de la lumière, Granit, 1991, page 13.






    ZÉNO BIANU


    Zeno Bianu
    Source




    ■ Zéno Bianu
    sur Terres de femmes


    Credo (extrait d’Infiniment proche)
    Bleu Haïku (extrait de Petit éloge du bleu)
    Miroir de tous les doubles (extrait de Satori Express)
    Zéno Bianu | Yves Buin | [Musique antérieure de l’origine océane] (extrait de Santana de toutes les étoiles)





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  • Carnets de marche. 14

       



    CARNET N.14

    14.

         Elle s’est levée aux aurores. Elle n’arrive pas à distinguer la couleur du ciel, mais elle croit qu’il va faire beau. Elle se prépare à recevoir le vétérinaire qui va vacciner Lupinu. Il arrive à huit heures précises. Il est très sympathique. Il reviendra le mois prochain pour faire un rappel. Il en profitera pour enlever les « petites couilles » du garçon. Elle, elle les aime bien et elle trouve ça cruel. C’est ça ou risquer de le voir se faire avaler tout cru par des plus forts que lui. Et puis, lui dit-il, « elle peut toujours commander des couillettes en plastique, comme ça se fait aux États-Unis ». Après le départ du vétérinaire, elle se dépêche. Elle a mille choses à faire, dont le gratin pour midi.

         À la poste, elle rencontre « Monsieur le maire ». Elle lui parle de leurs problèmes de liaison ADSL. Ça le contrarie beaucoup. C’est promis, il va s’en occuper sur-le-champ et faire intervenir une personne compétente. Elle monte ensuite à l’épicerie. Pas de boucherie en vue. Mais le bûcheron-berger est là, barbu, jovial. Est-ce lui qui fait la pluie et le beau temps dans le village ? Elle se pose la question, le croit un moment, puis plus du tout.

         Il fait un temps vraiment sublime. L’envie lui prend d’essayer le sentier qui descend sur Abro. Elle se dit qu’elle a le temps. Elle prend le sentier derrière les pâtures, passe devant un enclos à vaches, puis un autre à ânes. Elle longe la bergerie de sa cousine. Le sentier continue dans la chênaie. Le golfe de Saint-Florent est baigné d’un halo de lumière douce qui donne aux découpes de la côte un air irréel. Elle longe les chenils. Il y a bien là une cinquantaine de chiens, tenus enfermés pour les battues. Ils jappent et hurlent, et saluent son passage en sautant le long des grillages. Elle frémit en pensant qu’ils pourraient être lancés à sa poursuite. Les Chasses du comte Tzarof. Et ne faire d’elle qu’une bouchée. Elle passe au large sans broncher. Peu à peu, le calme revient. Le maquis est superbe, le sentier muletier encore assez large. Progressivement, il devient plus caillouteux, moins aisé. Elle n’est jamais venue jusque là, mais ne regrette pas son escapade dans ce décor incroyablement beau. Les lieux, déserts en apparence, semblent habités d’une vie secrète qui lui est totalement inconnue. Une fourgonnette 4L est arrêtée au bout du chemin muletier qui se change en sentier à chèvres. Elle hasarde un coup d’œil à l’intérieur de la fourgonnette. Elle est vide. Elle ne se sent pas très rassurée. Quelqu’un doit monter la garde quelque part dans les feuillus. Elle se dit qu’elle est une cible visible.

         Elle décide pourtant de continuer sa route. Ce sentier exerce sur elle une vraie fascination. Des balises indiquent le chemin principal. Mais de nombreux sentiers annexes s’entrecroisent, apparemment entretenus. La vue sur le golfe est superbe. La mer d’un bleu éclatant. Et il fait chaud. Il fait très chaud. Elle transpire et enlève sa polaire. Elle aurait dû prendre de l’eau. Par moments, elle se retourne pour voir si personne ne la suit. En apparence, il n’y a pas âme qui vive. Sauf un feulement étrange d’animal, un râle de mort qu’elle ne parvient pas à identifier. Elle essaie d’accélérer le pas car la mer est encore loin. Combien de temps encore la sépare de la route ? Le sentier n’en finit plus. Elle regarde sa montre. Il est presque onze heures. Déjà une heure qu’elle a quitté le village. Il faudrait peut-être qu’elle prévienne quelqu’un de l’endroit où elle se trouve. Avec la coupure de courant aujourd’hui et les travaux sur les lignes téléphoniques, elle n’a pas grand chance de joindre qui que ce soit. Elle redouble d’attention, regarde où et comment elle pose les pieds sur les marches usées du sentier et sur les cailloux qui l’encombrent. Elle finit par apercevoir, un peu en contrebas, la maisonnette du berger, bercée par son palmier. Elle est soulagée. La route n’est plus très loin. Malgré tout, elle n’y est pas encore. Elle continue de marcher dans les éboulis.

         Elle entend un moteur. La route est là, à deux pas. Elle débouche plus haut que l’endroit prévu. Tant mieux, elle aura moins de chemin à faire. Combien de temps encore la sépare du clocher ? Elle regarde sa montre. Il faudrait qu’à midi elle soit sur la place. Elle accélère le pas. Elle est fière d’elle et heureuse. Elle tourne le dos au golfe et fixe maintenant le Cap, sévère mais ensoleillé. Elle est au-dessus de la marine de Cannelle. Les toits de Marinca sont après le virage. Le clocher fait bientôt son apparition. Elle sera dans les temps à la maison. Nul ne saura rien de sa balade. Elle a passé deux heures « extraordinaires ». Elle tombe de fatigue et de sommeil. Elle se sent bien.

    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli

       

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  • William Cliff | Cape Cod, 7

    «  Poésie d’un jour  »



                   Naufrage
                   Source






    We soon met one of these wreckers            
    with a bleached and weather-beaten face.            
    It was like an old sail endowed with            
    life, ―a hanging cliff of weather-beaten            
    flesh.            




                   Thoreau dit qu’il a longtemps cheminé
                   dans le Nauset au long des longues plages
                   et voyant souvent le sable encombré
                   de bateaux déchirés par les naufrages
                   certains humains solitaires et sauvages
                   vêtus d’affreux manteaux tout rapiécés
                   erraient dit-il pour ce bois ramasser
                   et s’en servir aux baraques et aux barques
                   ce Cap n’ayant pas d’arbres grands assez
                   l’homme est ainsi à l’homme un loup rapace


    William Cliff, « Cape Cod », America, Éditions Gallimard, Collection blanche, 1983, page 95.





    ______________________________________
    Note d’AP : Cape Cod est un ensemble de dix dizains de décasyllabes (strophes carrées) à la fin du recueil America.




    WILLIAM  CLIFF



    William Cliff 3
    Ph. © Jean Jauniaux





    ■ William Cliff
    sur Terres de femmes


    Lahore, 7 (extrait d’En Orient)
    New York (extrait d’Amour perdu)
    [Réquiem pour l’enfance] (extrait de Matières fermées)
    Au printemps (extrait du Temps)
    30 mai 2003 | William Cliff, Le Pain Quotidien
    10 novembre 2003 | William Cliff, Le Pain Quotidien




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur Terres de femmes)
    12 juillet 1817 | Naissance de Henry David Thoreau





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  • Carnets de marche. 13

       



    CARNET N.13

    13.

         La contrariété du jour. Fermeture de la boucherie. La vie difficile. Elle prend la route à la Leccia. Marcher pour oublier. Le vent violent d’hier est tombé. Le ciel est presque uniformément gris. Mais le fond de l’air est doux. Le râle sourd de la mer rythme sa marche. Elle s’efforce de couler ses pas dans le roulement de la houle. Elle repense à ce qui se dit au village : « Quand un animal les dérange, ils le pendent ! Dans le meilleur des cas, ils lui flanquent une balle dans le crâne ! » Elle ne peut plus voir une corde se balancer à un arbre sans frémir. Il y en a tout au long de la route. Elle se dit qu’un chien a dû finir au bout de la bleue, qui pendouille, vide, au bout d’une branche. La montagne ronde d’Hanging Rock (Australie) a des allures inquiétantes aujourd’hui. Les tonalités gris-bleu du ciel et de la mer. Un oiseau mort, plumé sur la route. Nid de mouches grouillant dans la chair convulsée. Une forte odeur de charogne se répand alentour. Plumes éparpillées tout au long des talus. Plumes de pigeon, grises et noires. Un semis de duvets plus fins, le long du talus. Un tas indistinct signale le lieu du forfait. Petit théâtre de la cruauté ordinaire. Elle passe devant l’enclos à chèvres, toujours obstinément fermé. Le brûlis gagne du terrain. Dévastation. Elle se sent impuissante face à la loi invisible d’ici.

         Elle croise la dame à la Toyota décapotable. Qui passe et repasse toujours à la même heure, le col de son mouton relevé. Elle ignore qui elle est. Parfois, elle est accompagnée d’un homme façon cow-boy. Elle est revêche et ne desserre pas les dents.

         Elle quitte la route avec l’idée de retrouver le sentier de Ghjottani. Elle tombe à nouveau sur le panneau « piège à loups ». Il n’y a jamais eu de loups par ici. Elle sifflote à nouveau « piège à cons ». Les piani sont cultivés. Il doit y avoir un bassin quelque part. Le sentier est introuvable. Il se perd dans d’inextricables broussailles. Les alentours sont impraticables. Inutile d’insister. Elle rebrousse chemin. L’écrin vert-de-gris de la marine, balayé par des vagues longues, longues, infatigables.

         Elle lui parle de sa tristesse du jour. Le sentier introuvable, métaphore de sa vie. Elle commence par dire non, puis se ravise. Oui, c’est vrai. Elle a raison. Par moments, elle ne se sent pas dans sa vie. Elle est dans une vie qui lui a été imposée de l’extérieur. Par les circonstances dans lesquelles elle a été embarquée malgré elle. Elle croyait avoir fait un parcours sans faute. Un métier mené jusqu’au bout sans faillir. Des enfants élevés et capables de se débrouiller, de mener leur barque. Un mari avec une belle situation. De l’argent, des voyages. Et puis tout a chaviré. Elle n’a pas choisi. Elle a été « embarquée », mais elle n’ira pas au-delà de deux ans. Dans deux ans, il faudra que quelque chose change. Elle ne sait pas encore comment. Elle se promet d’y réfléchir.

         Ce soir une scène a éclaté. À propos de la coupure d’électricité du lendemain. Toute la matinée, sa mère lui a dit qu’elle allait donner son congé à l’infirmière. « Elle n’a nullement besoin d’elle ». Elle, elle lui dit qu’elle ne comprend pas pourquoi. Elle insiste. Elle de même. De fil en aiguille, le ton monte. L’exaspération aussi. Elle lui dit qu’on ne peut plus rien lui dire. C’est vrai. Elle ne supporte plus qu’elle lui parle. Pour lui dire quoi ? Pour se plaindre. De tout, de rien. Elle parle pour se parler, pour combler son vide intérieur. Elle s’ennuie. Sa solitude lui pèse. Ses angoisses de mort la minent. Le seul moyen dont elle dispose pour échapper à elle-même est d’empêcher les autres de vivre. C’est du moins ce qu’elle lui dit. Elle rajoute qu’elle ne la supporte plus, que si elle est ici, c’est pour des raisons extérieures, indépendantes de sa volonté. Qu’elle est incapable d’être heureuse. Qu’elle a vampirisé son père et qu’elle ne lui laissera pas le loisir de faire de même avec elle. « Tu verras quand tu auras mon âge ». Non, elle ne verra rien. Elle n’empêchera pas ses enfants de vivre leur vie. Et puis elle a pris son assiette. Elle est allée manger à la cuisine, seule, pour ne plus être dans le tête-à-tête. Elle rejoue la scène de Miranda dans Amarcord. Lui fait le go-between. Il est parfait gentleman, parfaitement calme et gentil avec l’une et avec l’autre.

         Après le repas, elle revient vers son ordinateur. Anne-Marie Schwarzenbach. Son papier est venu tout seul. Elle était inspirée. Elle a travaillé un bon moment. Puis elle a joué avec les textes de Sol, dont certains sont beaux. Elle s’est couchée très tard, comme beaucoup de ces derniers soirs.

    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli

       

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  • Fabio Pusterla | Arte della fuga

    «  Poésie d’un jour  »



    Laisse les noms aux nouveaux constructeurs de drapeaux.
    Ph., G.AdC






    ARTE DELLA FUGA



    Resisti a tutto, fuggi. Fallo in nome
    di niente. Lasci i nomi
    ai nuovi costruttori di bandiere.
    Dai, topolino: è ora.
    Guarda : questo è un bosco, e questa
    una lattina di carne. Questo è un fiume.
    Dal ponte vedi una città bianchissima,
    una polla di sangue raggrumato. E gli anni,
    gli anni sui loro cavalli neri. La città
    è fatta di calce e gesso, di silenzio.
    Il passo è qui, la fuga un’altra strada.






    ART DE LA FUGUE



    Résiste à tout, fuis. Fais-le au nom
    de rien. Laisse les noms
    aux nouveaux constructeurs de drapeaux.
    Allez, petit : il est temps.
    Regarde : ceci est un bois, et ceci est
    une boîte de viande. Ceci est un fleuve.
    Du pont tu vois une ville parfaitement blanche,
    une source de sang grumelé. Et les années,
    les années sur leurs chevaux noirs. La ville
    est faite de chaux et de plâtre, de silence.
    Ici le passage, la fuite est un autre chemin.



    Fabio Pusterla, Une voix pour le noir, Poésies 1985-1999, Éditions d’en bas, Lausanne, 2001, pp. 62-63. Traduit de l’italien par Mathilde Vischer.*



    __________________________________________________
    * Ce poème figure dans Les Choses sans histoire de Fabio Pusterla, Éditions Empreintes, 2002, pp. 170-171. Traduit de l’italien par Mathilde Vischer.





    FABIO PUSTERLA


    Pusterla_1
    Source



    ■ Fabio Pusterla
    sur Terres de femmes

    Au-delà des vagues
    Caparìca
    Corps d’étoiles
    Due rive
    Entre-deux
    Esquisse en poudre de gypse, 6
    La fugitive
    Une vieille (+ bio-bibliographie)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de culturactif.ch)
    une bio-bibliographie très complète de Fabio Pusterla





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  • 21 août 1995 | Nicolas Pesquès, La Face nord de Juliau

    «  Poésie d’un jour  »

    L-araign-e du beau temps a -tendu sa toile
    Ph., G.AdC






    Le 21 août 1995


    L’été piétine et frappe la pente. Il sème un jaune blanc de litière, de jonchées de paille. Un foin rare, écrasé dans sa couleur, recuit sous le bétail. Des jetées d’épis concassés mettent au jour, à fleur de peau, la fibre battue de la colline. Un été de tannerie et sa vannée de soleil se répandent en épluchures sous le blanc pâle-sec d’un ciel couvert à force de chaleur.

    Les bêtes font le nécessaire, le font à la perfection.
    Et nous, qui tentons d’oublier le moins possible, altérons l’énigme par nos œuvres circulaires, douloureuses, mal réminiscentes.

    Nous partageons sans doute avec elles l’ineffaçable incrustation des moments puissants qui laissent leur empreinte dans nos mémoires. Souvenirs décisifs, repères comprimés, embolies indécorticables : ils balisent nos existences.

    L’écrasante saison, les oiseaux rares, l’amandier en papillotes vert-jaune vif avec ses clochettes de couleurs fraîches, la prairie bottelée.

    L’araignée du beau temps a étendu sa toile comme si rien que de l’imprévisible devait venir.

    Semblable au poème travaillant à tendre la main à sa famine, au butin cruel de son renouvellement, à la toupie de son complot.
    À la préparation de l’orage.


    Nicolas Pesquès, La Face nord de Juliau, trois, quatre, André Dimanche Éditeur, 2000, page 84.




    NICOLAS PESQUÈS


    Pesquès portrait
    Ph. © Jean-Marc de Samie




    ■ Nicolas Pesquès
    sur Terres de femmes


    Gilles Aillaud (extrait de Sans Peinture)
    après Privas. Nicolas Pesquès (I). « du geste une écriture », par Yves di Manno
    après Privas. Nicolas Pesquès (II). J9, Prémisses de lecture d’une « énigme intime », par Angèle Paoli
    Juliau//ascension face nord (lecture d’AP sur La Face nord de Juliau deux, trois quatre cinq, six)
    Comment recoller ce que la langue détache (extrait de La Face nord de Juliau, cinq)
    15 mai 1886 | Mort d’Emily Dickinson (+ extrait de La Face nord de Juliau, sept)
    La Face nord de Juliau, huit, neuf, dix (lecture d’AP)
    [Courir la pente] (extrait de La Face nord de Juliau, huit, neuf, dix)
    Intérieur nuit (Juliau 11)
    La Face nord de Juliau, treize à seize (lecture d’AP)
    28 février | Nicolas Pesquès, La Face nord de Juliau (onze à seize)
    21-22-23 octobre 2013 | Nicolas Pesquès, La Face nord de Juliau dix-sept, dix-huit
    La caisse claire (journal d’AP)




    ■ Voir aussi ▼


    le site de Nicolas Pesquès
    → (sur Poezibao)
    La Face nord de Juliau, six, de Nicolas Pesquès (lecture d’Angèle Paoli)
    → (sur le site de la mél [Maison des écrivains et de la littérature]) une
    fiche bio-bibliographique sur Nicolas Pesquès





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