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  • Laure Adler/Isabelle Eshraghi, femmes hors du voile

    Laure Adler/Isabelle Eshraghi, femmes hors du voile

    Laure Adler/Isabelle Eshraghi, femmes hors du voile,
    Editions du Chêne, septembre 2008.




    Femmes_hors_du_voile




    HIER, JE NE CONNAISSAIS PAS ISABELLE ESHRAGHI

        Hier, je ne connaissais pas Isabelle Eshraghi. Je l’ai rencontrée dans mon village au cœur de cet été. Ensemble, sur les rochers cap-corsins de la marine de Scala, à mille lieues des femmes voilées du monde de l’islam, nous avons parlé. Et beaucoup parlé de son livre. Femmes hors du voile. Un livre de photographies accompagné d’une monographie de Laure Adler.

        Née à Ispahan d’une mère française et d’un père iranien, Isabelle vit à Paris. Elle a longuement évoqué pour moi son métier de photojournaliste, ses voyages en Afrique et au Moyen-Orient, les reportages réalisés depuis dix ans pour l’agence Vu. En pays afghan, iranien, marocain, égyptien, koweitien. Au Qatar, en Arabie Saoudite, au Niger, au Pakistan… J’entends encore Isabelle me parler de toutes ces femmes dont elle a précieusement gardé, sélectionné et organisé les photos prises au cours de ces dix dernières années. Femmes au travail, ― dans les écoles, dans les champs, dans les bureaux, dans les gymnases, dans les salles de conseils et de réunions ―, femmes photographiées à l’intérieur de leur maison, dans les lieux publics, parcs et plages, dans les camps de réfugiés, dans les dispensaires médicaux et dans les ateliers de couture, se mirant dans un miroir de fortune ou assistant aux défilés de mode Azzarro et Christian Lacroix, femmes rieuses et enjouées, femmes aux regards meurtris par les conflits, les voilà rassemblées dans un album magnifique, qui vient de voir le jour aux éditions du Chêne.

        Organisé par thèmes, huit en tout, l’ouvrage se compose de huit chapitres. Présentés par un texte introductif de Laure Adler.

        Dès le premier abord, avant même d’ouvrir le livre, le regard de la lectrice que je suis est happé par le regard autre qui me fixe. Un magnifique regard de braise, doux et tendre, illuminé par une peau blanche et souligné par des cils de soie. Celui de la jeune koweitienne photographiée par Isabelle en avril 2000. Le reste du visage, que j’imagine sublime, disparaît sous le voile noir. Je m’interroge. Que vais-je découvrir de ces femmes qui se sont laissé photographier ? Que vais-je apprendre que je ne sache déjà ? Les regards croisés d’Isabelle Eshraghi et de Laure Adler vont-ils parvenir à bousculer en moi les idées reçues ?

        Noire, la couleur dominante de la première de couverture de la jaquette. Au point qu’elle voile, estompe, absorbe les lettres qui composent le mot « femmes » du titre (blanches, tout en bas-de casse et en caractères bâton), à l’emplacement même de la bouche. Quant à la seconde moitié du titre, le complément qui caractérise ces femmes, elle est écrite en rouge. Hors du voile/Rouge sang. Le combat des femmes de l’islam pour leur libération « hors du voile » passe-t-il aujourd’hui encore, par la violence ? L’exemple le plus récent, cité par Laure Adler, l’assassinat de Benazir Bhutto au Pakistan, en décembre 2007, semble l’attester.

        Quant au nom des deux femmes auteures de cet ouvrage, il s’inscrit ― en capitales et tout en blanc ― à hauteur du nez de la femme voilée. Deux femmes donc qui avancent à visage découvert, deux femmes dont le combat et l’engagement se lisent implicitement, dès la couverture, dans le choix typographique effectué par Nancy Dorking, la directrice artistique, puis, explicitement, par la tonalité incitative des propos de Laure Adler et des photos d’Isabelle Eshraghi.

        Dans le chapitre d’ouverture intitulé « Le feu des yeux », Laure Adler écrit :

    « Voir. Être vue.
    Pourquoi faire disparaître le visage ? »


        Laure Adler se tourne vers Emmanuel Lévinas qui voyait dans le visage « le lieu d’une ouverture infinie de l’éthique » ; et, bien avant lui, vers Ibn Arabi qui « voyait le signe de Dieu dans le miracle surgi de la face humaine ».

        Et la journaliste de conclure :

    « Les femmes d’islam sont loin d’avoir abandonné le combat.
    Le feu des yeux subsiste. »


        Quel que soit leur pays d’origine, quel que soit le domaine dans lequel elles travaillent, les femmes que nous montre Isabelle Eshraghi sont en pleine (r)évolution. Femmes voilées et femmes hors voile se côtoient, se fréquentent, partagent les mêmes universités, les mêmes parcs, les mêmes plages, les mêmes cafés à narghilé. Les étudiantes ou enseignantes en jeans et tee-shirt à manches courtes, bras nus et cheveux lâchés sur les épaules à la mode occidentale, sont assises sur les mêmes bancs que leurs congénères voilées de blanc et occupent les mêmes salles de classe que les fillettes aux cheveux drapés dans un foulard de couleur.

        Comble de l’antithèse que cette photo prise en juillet 2002 sur la plage de Babolsar en Iran ! Trois jeunes femmes, visages éclatants et espiègles, entièrement vêtues de noir, long manteau traditionnel et foulard, arborent des lunettes noires dernier cri, symbole de libération. « Depuis la révolution islamique de 1979, des interdits ont été levés, comme celui de porter des lunettes noires, qui est resté en vigueur jusqu’en 1994 », précise la légende (p. 225). De même, la longue tenue noire (qui voisine dans les boutiques à la mode de Téhéran, avec les créations des stylistes les plus renommées) n’empêche nullement les ongles vernis de rouge vif ― pieds et mains ―, et les lèvres fardées. Peut-être ces détails extérieurs de la toilette féminine sont-ils des signes avant-coureurs d’autres révolutions à venir. Mais comment ne pas s’interroger devant la photo de cette jeune fille installée sur son pédalo, portant un bob de marin au-dessus de son voile noir ? Comment ne pas s’insurger de la voir ainsi couverte ― élégant trench-coat écru sur pantalon noir ― alors que de jeunes garçons s’ébrouent, à côté d’elle, épaules et cuisses nues ? Quant aux baigneuses d’Askarabad, sur les bords de la mer Caspienne, elles batifolent dans l’eau avec robes et foulards. En Iran, seuls les enfants ― des deux sexes ― et les hommes ont le droit de se baigner en maillot de bain. Les hommes de l’islam sont-ils si peu adultes et si peu maîtres de leurs pulsions qu’ils ne peuvent porter le regard sur une femme autrement que si elle est enserrée de la tête au pied dans ses voiles ?

        Dans ce chapitre (« Échappées belles »), Laure Adler, citant en exemple les revendications d’Amina Wadud, Fatima Mernissi mais aussi d’hommes tels que Youssef Seddik, Abdelwahab Medeb, Malik Chebel, incite les femmes d’Orient à repenser leur rapport à la religion sans pour autant que cette question mette en péril « leur fidélité à la foi » : « « se réapproprier » l’islam pour mieux le surinvestir. » Pour cela, « les femmes doivent investir toutes les scènes où se dit la lettre sainte et s’emparer, à leur manière, de l’islam. » Faire reculer les inégalités entre femmes et hommes passe par la libération du voile, symbole d’inégalité.

    Il en est de même dans le milieu du sport où Irakiennes et Iraniennes semblent très performantes. Basketteuses, parapentistes, pilotes de rallye, escrimeuses, championnes de tir ou de gymnastique…, les femmes sont sur tous les fronts, partout dans les gymnases, sur les pistes et les terrains. Mais elles doivent, aujourd’hui encore, revêtir leur foulard en présence de spectateurs masculins ou d’une photographe. Contrecoup des agressions et des régressions imposées par la révolution islamiste de Khomeiny. Montrer en mouvement le corps de ces championnes du monde, c’est leur rendre la visibilité dont elles ont besoin. C’est leur donner une chance supplémentaire de poursuivre la révolution silencieuse qu’elles ont entreprise.

        Dans le monde rural ou dans les pays décimés par la guerre, les femmes travaillent voilées. Mais leurs préoccupations vont bien au-delà de celle du port du voile. Survivre, nourrir leurs enfants, leur dispenser les soins élémentaires, se soigner. Ce sont là questions cruciales, quotidiennement. Aidées par les ONG, ces femmes sans ressources surmontent, tant bien que mal, les épreuves. Mais le problème de la contraception et des mariages non consentis reste l’obstacle majeur à l’évolution vers la libération des femmes. Dans le chapitre intitulé « Maternelles », Laure Adler souligne que « la contraception est connue des médecins arabes depuis le IXe siècle ». Le drame est que cette pratique est en contradiction avec la politique nataliste de l’islam. Tout le mérite revient donc aujourd’hui aux organisations humanitaires et aux Médecins du Monde qui œuvrent pour que ces femmes et leurs enfants retrouvent « leurs repères les plus élémentaires ». Peut-être alors, lorsque la question brûlante de la survie sera dépassée, pourront-elles s’interroger sur leur libération. Qui passe par l’alphabétisation, l’instruction, le travail hors de la maison. Et l’engagement dans tous les lieux de vie et d’activités occupés jusqu’alors par les hommes.

        Parmi toutes les questions posées, la plus préoccupante reste celle du mariage, fondement de la société traditionnelle. Les photos de cérémonies ― fiançailles et mariages ― réunies dans le chapitre intitulé « En amour » ne contribuent pas à modifier l’idée que je me fais du sort réservé aux femmes à l’intérieur de cette institution. Les visages des mariées, de Kaboul, de Téhéran ou du village de Zaran, en Egypte sont loin de respirer le bonheur. Certes les mariées sont belles, mais elles sont tristes, figées sous le masque de beauté qui leur a été imposé. La légende de l’une de ces photos me confirme dans mes appréhensions:

        « Cérémonie des fiançailles de Farazneh et d’Hashil. Il l’a choisie en regardant une vidéo. Elle ne le connaît pas. Kaboul, Afghanistan, juin 2002. »

        Comment ne pas trembler en lisant ces mots ? Comment se départir de la vision occidentale qui voit dans le mariage arrangé la chronique d’une mort annoncée ! Ainsi de cette jeune Pakistanaise, mariée une première fois à l’âge de 14 ans, divorcée à la suite des violences que lui a infligées son mari et remariée avec un homme qui l’aime en dépit des marques indélébiles de brûlures qui la défigurent ! Fort heureusement, d’autres photos prises sur le vif de couples amoureux viennent corriger sensiblement cette vision unilatérale du mariage associé à la violence.

        Porteuses de drames et d’espoirs, les 150 photos d’Isabelle Eshraghi racontent chacune une histoire particulière. Par-delà les frontières qui séparent ces femmes, par-delà les conflits religieux qui les réunissent sous la bannière unique de l’islam, les visages qui viennent à nous à travers le regard d’Isabelle sont des visages de femmes qui ont aussi à nous apprendre ce que nous sommes.
    Les textes de Laure Adler, soutenus par une solide bibliographie, apportent les compléments historico-religieux indispensables à l’analyse du contexte dans lequel ces femmes vivent.

        Par leur réflexion et leur travail, Isabelle Eshraghi et Laure Adler œuvrent ensemble à une meilleure compréhension des femmes prisonnières du carcan de l’islam d’aujourd’hui. Et participent ― mots et photos conjugués ensemble ― à leur émancipation silencieuse. Un très beau témoignage à deux voix, courageux et émouvant.

    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli



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  • Rouges de Chine 03





    03_tu_griffonnes_110






    Tu griffonnes
    le nom
    des branches
    sur le mur

    je cherche ton ombre
    dans les ramures

                   seul me répond
                   le silence du vent
                   sur la brique muette

    absence
    du feuillage







    D.R. Photo et texte : G.AdC/angèlepaoli
    Édition et mise en pages : Yves Thomas



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  • Rouge de ChineRouges de Chine 03





    03_tu_griffonnes_110






    Tu griffonnes
    le nom
    des branches
    sur le mur

    je cherche ton ombre
    dans les ramures

                   seul me répond
                   le silence du vent
                   sur la brique muette

    absente
    du feuillage







    D.R. Photo et texte : G.AdC/angèlepaoli
    Édition et mise en pages : Yves Thomas



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  • 5 octobre 1713 | Naissance de Denis Diderot

    Éphéméride culturelle à rebours



    Il y a 301 ans, le 5 octobre 1713, naissait à Langres, sur le plateau champenois, Denis Diderot, fils de Didier Diderot, maître coutelier, et d’Angélique Vigneron.


    D’abord élève chez les jésuites de Langres, Diderot poursuit ses études à Paris où il fréquente les collèges Louis-le-Grand et Harcourt. En 1732, il est reçu maître ès-arts de l’Université de Paris. En 1735, bachelier en théologie, il se tourne vers le droit. Le 6 novembre 1743, à Saint-Pierre-aux-Bœufs, dans l’île de la Cité, il épouse clandestinement Anne-Antoinette Champion, la fille de sa lingère.

    Philosophe de renom, animateur ― avec D’Alembert ― de l’Encyclopédie, écrivain polygraphe, Diderot est notamment l’auteur de La Religieuse, seul véritable roman de Diderot, roman influencé par la manière de Richardson.

    « Sans doute échaudé par les trois mois de prison qu’il avait passés en 1749 après la publication de la Lettre sur les aveugles à l’usage de ceux qui voient, Denis Diderot ne publia pas La Religieuse de son vivant. L’édition originale ne vit le jour qu’en 1796. Si l’Église n’a jamais mis ce roman à l’Index, l’État l’a interdit par deux fois, en 1824 et en 1825. »*








    Diderot_la_religieuse_2
    Image, G.AdC







    LA RELIGIEUSE


    L’idée de ce roman, liée à un fait divers ayant défrayé la chronique, l’est aussi à des circonstances anecdotiques de salon. Les habitués du salon parisien de Mme d’Epinay s’ennuient de l’absence du marquis de Croismare. Pour persuader le « charmant marquis » de quitter ses terres normandes et de rentrer à Paris, Diderot, Grimm et quelques autres lui adressent la lettre d’une prétendue religieuse qui sollicite sa bienveillance pour l’aider à sortir du couvent où elle est tenue enfermée contre son gré. De cette « mystification » va naître le roman de Diderot.

    À l’automne 1760, Diderot qui s’est pris au jeu de cette correspondance fictive, s’attelle à la rédaction de La Religieuse. Dans une lettre adressée à Mme d’Épinay, Diderot évoque son travail d’écrivain : « Il n’est pas possible de se mettre au lit à 9 heures ; vous en conviendrez. Je fis mettre une bonne chaufferette sous mes pieds, et puis je repris ma Religieuse que je tracassai jusqu’à onze heures. À 11 heures, un petit verre de vin de malaga rouge, délicieux. […] Ensuite un bon oreiller. » Quelques semaines plus tard il confie à sa correspondante :

    « Ce n’est plus une lettre, c’est un livre. Il y aura là-dedans des choses vraies, de pathétiques, et il ne tiendrait qu’à moi qu’il y en eût de fortes. Mais je ne m’en donne pas le temps. Je laisse aller ma tête ; aussi bien ne pourrais-je guère la maîtriser. »

         Le roman se présente sous la forme d’une lettre-mémoire rédigée par la religieuse, Suzanne Simonin, qui confie son histoire au marquis de Croismare dont elle attend le secours. L’occasion pour le philosophe de se livrer ― au-delà de « l’effrayante satire des couvents » ― à une sévère critique de la société de son temps.


    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli




    _____________________________
    * NOTE D’AP : Nicole Vulser, « La censure de La Religieuse », Le Monde, 26 août 2006. Signalons toutefois que, si l’édition originale de La Religieuse a bien paru en volume chez Buisson en 1796, La Religieuse a été publiée à Paris ― certes de manière manuscrite et confidentielle ― dans la Correspondance littéraire entre octobre 1780 et mars 1782, avant donc la mort de Diderot.







    EXTRAIT DE LA RELIGIEUSE


    J’en étais là lorsque, revenant sur ma vie passée, je songeai à faire résilier mes vœux. J’y rêvai d’abord légèrement. Seule, abandonnée, sans appui, comment réussir dans un projet si difficile, même avec les secours qui me manquaient ? Cependant cette idée me tranquillisa ; mon esprit se rassit ; je fus plus à moi ; j’évitai des peines, et je supportai plus patiemment celles qui me venaient. On remarqua ce changement, et l’on en fut étonné ; la méchanceté s’arrêta tout court, comme un ennemi lâche qui vous poursuit et à qui l’on fait face au moment où il ne s’y attend pas. Une question, monsieur, que j’aurais à vous faire, c’est pourquoi à travers toutes les idées funestes qui passent par la tête d’une religieuse désespérée, celle de mettre le feu à la maison ne lui vient point. Je ne l’ai point eue, ni d’autres non plus, quoique ce soit la chose la plus facile à exécuter : il ne s’agit, un jour de grand vent, que de porter un flambeau dans un grenier, dans un bûcher, dans un corridor. Il n’y a point de couvents brûlés ; et cependant dans ces événements les portes s’ouvrent, et sauve qui peut. Ne serait-ce pas qu’on craint le péril pour soi et pour celles qu’on aime, et qu’on dédaigne un secours qui nous est commun avec celles qu’on hait ? Cette dernière idée est bien subtile pour être vraie.

    À force de s’occuper d’une chose, on en sent la justice, et même la possibilité ; on est bien fort quand on est là. Ce fut pour moi l’affaire d’une quinzaine ; mon esprit va vite. De quoi s’agissait-il ? De dresser un mémoire et de le donner à consulter ; l’un et l’autre n’étaient pas sans danger. Depuis qu’il s’était fait une révolution dans ma tête, on m’observait avec plus d’attention que jamais ; on me suivait de l’œil ; je ne faisais pas un pas qui ne fût éclairé ; je ne disais pas un mot qu’on ne le pesât. On se rapprocha de moi, on chercha à me sonder ; on m’interrogeait, on affectait de la commisération et de l’amitié ; on revenait sur ma vie passée ; on m’accusait faiblement, on m’excusait ; on espérait une meilleure conduite, on me flattait d’un avenir plus doux ; cependant on entrait à tout moment dans ma cellule, on entrouvrait mes rideaux, et l’on se retirait. J’avais pris l’habitude de me coucher habillée ; j’en avais pris une autre, c’était celle d’écrire ma confession.

    Ces jours-là, qui sont marqués, j’allais demander de l’encre et du papier à la supérieure, qui ne m’en refusait pas. J’attendis donc le jour de la confession, et en l’attendant je rédigeais dans ma tête ce que j’avais à proposer ; c’était en abrégé tout ce que je viens de vous écrire ; seulement je m’expliquais sous des noms empruntés. Mais je fis trois étourderies : la première, de dire à la supérieure que j’aurais beaucoup de choses à écrire, et de lui demander sous ce prétexte, plus de papier qu’on n’en accorde ; la seconde de m’occuper de mon mémoire, et de laisser là ma confession ; et la troisième, n’ayant point fait de confession et n’étant point préparée à cet acte de religion, de ne demeurer au confessionnal qu’un instant. Tout cela fut remarqué ; et l’on en conclut que le papier que j’avais demandé avait été employé autrement que je ne l’avais dit. Mais s’il n’avait pas servi à ma confession, comme il était évident, quel usage en avais-je fait ?


    Denis Diderot, La Religieuse, in Œuvres romanesques, Éditions Garnier Frères, 1962, pp. 271-272. Édition de Henri Bénac.





    DENIS DIDEROT


    Denis_diderot1
    Source



    ■ Denis Diderot
    sur Terres de femmes

    14 octobre 1762/Diderot, Lettre à Sophie Volland
    (+ Commentaire)

    9 septembre 1767/Denis Diderot, Lettre à Sophie Volland
    31 juillet 1784 | Mort de Denis Diderot (+ extrait des Bijoux indiscrets)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Terres de femmes)
    31 août 1811 | Mort de Louis-Antoine de Bougainville
    → (sur Terres de femmes)
    4 février 1963 | Le Neveu de Rameau au théâtre de la Michodière
    (+ extrait du Neveu de Rameau)

    → (sur Terres de femmes)
    31 mars 1966 | Interdiction du film La Religieuse de Jacques Rivette (notice + extrait de La Religieuse de Diderot)
    → (sur Terres de femmes)
    29 septembre 1981 | Création de Jacques et son maître de Milan Kundera





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  • Rouges de Chine 02





    02_voil_que_053






             Voilà que tu t’immobilises \

             toi qui files d’un trait
                            la douceur de l’automne

             et te rends
                                  fraîcheur de l’aube
             à l’autre bout du temps

             Délaisse dénoue
                                           abandonne
             ce qu’ici te retient

             laisse aux roues de la vie
             le soin de tracer
                                                    hors les murs

             les limites du jour







    D.R. Photo et texte : G.AdC/angèlepaoli
    Édition et mise en pages : Yves Thomas



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  • Rouge de ChineRouges de Chine 02





    02_voil_que_053






             Voilà que tu t’immobilises \

             toi qui files d’un trait
                            la douceur de l’automne

             et te rends
                                  fraîcheur de l’aube
             à l’autre bout du temps

             Délaisse dénoue
                                           abandonne
             ce qu’ici te retient

             laisse aux roues de la vie
             le soin de tracer
                                                    hors les murs

             les limites du jour







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  • Rouge de ChineRouges de Chine

    avant-propos






    Avant-propos



        Vieux rêves de mes enfances, la Chine ancienne a disparu.

        Au cours de son récent voyage au pays des peintres et des calligraphes, Guidu Antonietti di Cinarca a promené pour moi son regard de poète sur les murs et les lignes de l’Empire du Milieu. Davantage soucieux de quintessence que de réel, le photographe de Terres de femmes a rapporté de son séjour les Rouges de Chine.

        À l’orée de l’automne, dans le lent déroulé de ses lumières et de ses ors, le désir m’est venu d’ouvrir avec lui les pages de ce nouvel album. La mémoire de mes mots, en écho intime à ses photos.


    Angèle Paoli









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  • Rouges de Chine 01





    01_la_lumire_dici_29_2






       La lumière
                       ici
       filtre à travers les claies

       jalousies entrouvertes
       sur des temps
                       abolis

       ton visage effacé
       en arrière-saison
                       du ciel







    D.R. Photo et texte : G.AdC/angèlepaoli
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  • Rouge de ChineRouges de Chine 01





    01_la_lumire_dici_29_2






       La lumière
                       ici
       filtre à travers les claies

       jalousies entrouvertes
       sur des temps
                       abolis

       ton visage effacé
       en arrière-saison
                       du ciel







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  • Rouges de Chine





    Rouges_de_chine_premiere_de_couve_2








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