Étiquette : 1972


  • H.D. (Hilda Doolittle) | [The golden apples of the Hesperides]



    HD 2
    Image, G.AdC







    [THE GOLDEN APPLES OF THE HESPERIDES]




    The golden apples of the Hesperides,
    the brushed-bloom of the pollen
    on the wing of ravishing butterfly or plundering bee;

    the gold of evanescence or the gold
    of heavy-weighted treasure,
    which will out-weigh the other?

    grandam, great Grande Dame,
    we will go on together ,
    and find the way to hyacinths by a river,

    where a harp-note sounded
    and a moment later —
    grandam, great Grande Dame, He is here with us,

    in notes ascending and descending from his lyre,
    your Child, my Child and Helios’ Child, no other,
    to lure us on, on, on, Euphorion, Espérance.



    Hilda Doolittle, Winter Love, 25, in Hermetic Definition, New Directions Publishing; 1st edition (January 17, 1972).






    Hermetic Definition.PNG 2







    [DES POMMES DORÉES DES HESPÉRIDES]




    Des pommes dorées des Hespérides,
    du duveté-velours du pollen
    sur l’aile du papillon ravissant ou de l’abeille butineuse ;

    de l’or d’évanescence ou de l’or
    du trésor pesant,
    lequel pèsera plus que l’autre ?

    grandame, grande ‘Grande Dame’,
    nous allons continuer ensemble,
    et trouver le chemin des jacinthes près d’une rivière,

    où une note de harpe a retenti
    et un moment après —
    grandame, grande ‘Grande Dame’, Il est ici avec nous,

    dans les notes montant et descendant de sa lyre,
    votre Enfant, mon Enfant et l’Enfant d’Hélios, nul autre,
    pour nous emporter, porter, porter, Euphorion, ‘Espérance’.



    H.D. (Hilda Doolittle), Amour d’hiver (Espérance) (3 janvier-15 avril 1959), 25, in Amour d’Hiver, Ypςilon. éditeur, 2017, pp. 65-66. Traduction Étienne Dobenesque.






    HD, Amour d'hiver






    H.D. (HILDA DOOLITTLE)


    HildaDoolittle
    Source



    ■ H.D.
    sur Terres de femmes

    At Baia
    Tribute to the Angels [40] (+ traduction en français de Bernard Hoepffner)
    18 avril 1958 | L’inculpation d’Ezra Pound est levée (Journal [Fin du tourment] d’H.D)
    20 mai 1958 | Journal (+ d’autres extraits du Journal [Fin du tourment] d’H.D.)
    un poème extrait de Trilogy d’H.D. : The Walls Do Not Fall [4] (+ traduction en français de Jean-Paul Auxeméry | traduction en français de Bernard Hoepffner)
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    un poème extrait de Trilogy d’H.D. : The Walls Do Not Fall [I] (+ traduction en français de Bernard Hoepffner)





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  • Gérard Chaliand | [Les rennes blancs courent]



    [LES RENNES BLANCS COURENT]




    Les rennes blancs courent au bord de la mer boréale
    et je pêche la baleine et le phoque.
    L’étoile polaire est au sommet de ma tente.
    Mes oiseaux sauvages emportent leurs cris blessés.
    Mes chasses n’ont plus que des veines mortes
    et mes couteaux se brisent au fil du temps.
    J’ai la mort au bord du regard
    sur ta tombe, un soleil et une lune contre les ténèbres.
    Ma carène glisse dans le jour gris.



    Gérard Chaliand, Feu nomade, 4 [Chambelland, 1972], in Feu nomade et autres poèmes, Éditions Gallimard, Collection Poésie/Gallimard, 2016, page 70. Préface de Claude Bugelin, Postface d’André Velter.






    Gérard Chaliand, Feu nomade







    ■ Voir aussi ▼

    → (sur La Cause littéraire)
    entretien avec Gérard Chaliand : « La poésie nomade »
    → (sur le site de la revue Possibles de Pierre Perrin)
    une recension de Feu nomade (12 novembre 2016)





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  • Jerome Rothenberg | Conversations en maya



    CONVERSATIONS EN MAYA




    Je vais t’apporter quelque chose,
    j’ai envie de parler le maya comme ceci.
    Quand j’aurai fini, je traduirai en espagnol
    et en anglais.
    Pour faire tout cela, tu dois écrire chaque vers sur le papier,
    exactement comme je suis en train de te le dire.
    Je vais parler avec toi de choses qui sont grandes.
    Je vais parler avec toi de choses qui sont petites.
    Il y a des choses étranges ;
    il y a des choses normales.
    Peut-être est-il possible de mettre une petite histoire sur le papier comme ceci,
    voilà qui est bien.
    Ou s’il n’est pas possible d’extraire une petite histoire, voilà qui est bien aussi.
    Ainsi en sera-t-il.
    Peut-être devras-tu écrire vingt pages pour une seule chose ;
    il te faudra le faire.
    Et de même, si tu dois écrire une seule page sur quelque chose,
    je te l’apporterai aussi.
    Je veux t’apporter beaucoup de choses en maya.
    J’ai envie de voir comment sortent les mots.
    J’ai envie d’apprendre comment fonctionnent les mots.
    J’ai envie de comprendre comment on les envoie partout dans le monde.



    Jerome Rothenberg, Secouer la citrouille, poésies traditionnelles des Indiens d’Amérique du Nord (Shaking the Pumpkin, Traditional Poetry of the Indian North Americas, première édition en 1972 par Doubleday Anchor. Réédition en 2014 par SHP Archive Editions), Presses Universitaires de Rouen et du Havre (PURH), Collection « To », 2015, page 188. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Anne Talvaz, avec la collaboration de Christophe Lamiot Enos.






    Jerome Rothenberg, Secouer la citrouille







    JEROME ROTHENBERG


    Rothenberg-1
    Source



    ■ Jerome Rothenberg
    sur Terres de femmes

    Ancestral scenes (IV)
    Poèmes des carnets du castor
    Visées : Kunapipi



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des Presses universitaires de Rouen et du Havre)
    la fiche de l’éditeur sur Secouer la citrouille
    → (sur lelitteraire.com)
    Jerome Rothenberg, Journal seneca & Secouer la citrouille, par Jean-Paul Gavard-Perret
    → (sur Poetry Foundation)
    une bio-bibliographie (en anglais) de Jerome Rothenberg





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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • 2 février 1972 | Mort de Natalie Clifford Barney

    Éphéméride culturelle à rebours




    Le 2 février 1972 meurt à Paris Natalie Clifford Barney. Femme de lettres américaine, poète, séduisante séductrice, amante des femmes les plus en vue de la Belle Époque dont elle défraye les chroniques, Natalie Barney est aussi l’amie des grandes plumes de son temps. Gertrude Stein, Gabriele D’Annunzio, Max Jacob, Paul Léautaud, André Rouveyre, André Gide… figurent parmi les « affinités électives » de l’« Amazone », pseudonyme sous lequel l’essayiste Rémy de Gourmont, l’un des fondateurs du Mercure de France (1889), l’immortalisa dans ses Lettres à l’Amazone. Dans le kaléidoscope de portraits de son temps qu’est Traits et portraits (1963), Natalie Barney propose, « en guise de préface » à son ouvrage, son propre portrait d’auteur.






    EXTRAIT de TRAITS ET PORTRAITS [EN GUISE DE PRÉFACE]




    N. appartient à une catégorie d’êtres dont l’espèce deviendra peut-être moins rare lorsque le vieux couple terrestre, définitivement discrédité, permettra à chacun de garder ou de retrouver son entité.

    À ce moment de l’évolution humaine, il n’y aura plus de « mariages », mais seulement des associations de la tendresse et de la passion. Des antennes infiniment plus délicates mèneront le jeu des affinités. Ces allées et ces venues remueront de l’espace.

    L’arrêt dans la fidélité, ce point mort de l’union, sera remplacé par un perpétuel devenir.

    En attendant cette réussite de tout l’être, les « troisièmes » peinent entre ces deux extrêmes : « N’être ni seul, ni ensemble. »

    De ne jamais réussir à former un couple, ils portent cependant une très réelle angoisse : de leur état d’isolé, d’intermédiaire. Ayant assez de traits en commun avec « leurs semblables qui ne sont pas leurs pareils » pour se retrouver en eux, mais pas assez pour s’identifier, s’y perdre, y demeurer.

    Pour rassurer sur N., cette troisième qui n’a rien de fictif, qu’on sache qu’à tout autre point de vue, elle est plus qu’humaine.

    Mais le couple sera toujours son ennemi, autant celui dont elle fait partie que celui dont elle est exclue – car l’ennemi, n’est-ce pas celui qui nous est nécessaire et qui nous est contraire ?

    Cet impair, ce singulier, travaille à la destruction du couple, et le couple à la destruction de l’impair, du singulier.

    Cette troisième ne cherche pas un complément, un conjoint, mais un semblable — un « compagnon d’amour » — une variété de son espèce, variable à l’infini — depuis l’homosexuelle la plus invétérée jusqu’à l’ange — cette paire d’ailes !

    Ce qu’elle veut, en attendant les joies célestes, ce sont ces joies qui leur ressemblent à s’y méprendre. Francis de Miomandre disait de celle que Robert de Montesquiou traitait d’ « invertie triomphante » : « C’est par la joie qu’elle rentre dans la communion humaine, elle qui paraissait sur tous les autres plans lui échapper. Elle était faite pour cela, pour ces exaltations souveraines… Ce rêve, parfois, très rarement, se réalise dans une circonstance exceptionnelle, dans une sorte de moment de feu dont l’ardeur dissout les scories de nos insuffisances. »

    Épicurienne aux sens hypertrophiés, et douée pour cette qualité de joie qui ne peut éviter le martyre, elle souffre à l’écart avec rage et patience.

    Étonnée, meurtrie et refoulée toujours de la même façon. Imaginative, confiante, les ruses et les mobiles lui échappent quand, trop passionnément prêtée à autrui, elle devient incapable de l’observer avec profit. Sincère jusqu’au sadisme, tendre, subtile et fervente avec pudeur, disciplinée et polie jusqu’à la lâcheté, personne ne l’a jamais vue souffrir, personne ne l’a jamais plainte ni secourue.

    D’ailleurs, qui s’approcherait à un tel moment aurait vite emporté une pelletée de sarcasmes et une impression de cynisme plutôt que de chagrin.

    Car les larmes se cristallisent en diamants d’ironie pour taillader qui ose s’apitoyer.

    La troisième ne s’arrête guère pour se regarder souffrir : s’il y a un miroir, c’est toujours pour y contempler les autres. […]



    Natalie Barney, « Portrait de l’auteur par l’auteur en guise de préface » in Traits et portraits, Mercure de France, 2002, pp. 9-10-11.







    NATALIE CLIFFORD BARNEY


    Nataliecliffordbarney
    Source



    ■ Natalie Clifford Barney
    sur Terres de femmes

    Apophtegmes de l’Amazone
    C’était, je me rappelle…
    « T’écrire des poèmes ! »
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    le Portrait de Natalie Clifford Barney
    3 février 1874 | Naissance de Gertrude Stein (extrait de Traits et portraits de Natalie Barney)
    3 novembre 1910 | Remy de Gourmont, « Lettre intime » à l’Amazone



    ■ Voir aussi ▼

    → un article sur
    Le Temple de l’Amitié où vécut pendant 60 ans Nathalie Clifford Barney





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  • 21 mai 1926 | Naissance de Robert Creeley

    Éphéméride culturelle à rebours




    Le 21 mai 1926 naît à Arlington dans le Massachusetts Robert Creeley (mort des suites d’une pneumonie à Odessa, Texas, le 30 mars 2005).

    À la mort de son père en 1930, l’enfant est élevé par sa mère et par sa sœur à Acton. En 1943, il entre à Harvard pour y faire ses études mais il abandonne ses études l’année suivante pour s’engager dans l’American Field Service. Ce qui l’amène jusqu’en Inde où il devient ambulancier, et dans le Sud-Est asiatique. De retour aux États-Unis, il entreprend une correspondance avec William Carlos Williams puis entre en relation avec Charles Olson. Ces deux rencontres majeures mettent Creeley sur la voie de la littérature et de l’écriture poétique.

    Tout au long des années 1950-1960, Creeley s’implique dans le groupe expérimental du Black Mountain College (Caroline du Nord) qui rassemble, sous la direction de Charles Olson, poètes, écrivains et artistes novateurs. Tels Merce Cunningham, John Cage, Willem De Kooning, Robert Motherwell et Robert Rauschenberg. Creeley crée la Black Mountain Review dont il sera le coordinateur éditorial jusqu’à la disparition de la revue, en 1957. Tournant définitivement le dos aux formes versifiées traditionnelles, Olson et Creeley optent pour le « projective verse » et pour la « composition by field »/« composition par champ ». Ainsi, dans l’essai intitulé Projective Verse (1950), Creeley développe-t-il l’idée qui lui tient à cœur : « la forme n’est qu’une extension du contenu » (« Form is nothing more than the extension of content », lettre à Charles Olson, 5 juin 1950, in George Butterick (ed.), The Complete Correspondence, vol. I, Santa Barbara, Black Sparrow Press, 1980, pp. 78-79).

    Après son divorce d’avec Ann MacKinnon, Creeley retourne quelque temps au Black Mountain avant de s’installer provisoirement à San Francisco où il assiste à l’explosion du « San Francisco Poetry Renaissance ». C’est là qu’il rencontre les écrivains de la Beat Generation, dont Allen Ginsberg et Jack Kerouac.

    En 1960, Robert Creeley reçoit le Prix Levinson pour sa poésie. À Albuquerque (Nouveau-Mexique) où il s’installe, Creeley publie en 1962 For Love : Poems 1950-1960. Dédié à sa seconde femme Bobbie Louise Hall, ce recueil, qui rassemble dix années d’écriture, porte à la fois la trace de l’influence de William Carlos Williams et de celle du jazz. Cet opus est le premier d’une longue série de recueils, dont Words (1965 et 1967), The Finger (1968), Pieces (1968), Later (1979), Mirrors (1983), So There: Poems 1976-1983 (1984), Memory Gardens (1986), Windows (1990), Echoes (1994), Life & Death (1998), Just in Time: Poems 1984-1994 (2001). Publications consacrées en 1999 par le Bollingen Prize of Poetry.

    Ses poésies complètes ont été rassemblées dans The Collected Poems of Robert Creeley 1945-1975 (University of California Press, 1982) et dans The Collected Poems of Robert Creeley 1975-2005 (University of California Press, 2006 ; reed. 2008).

    En 1963, Creeley a publié The Island – dédié à Charles Olson –, unique roman dans l’abondante production de Creeley. L’action se déroule à Majorque et retrace l’histoire de la relation de Creeley avec Ann MacKinnon.






    R.B.Kitaj, For Love (Creeley), 1966, lithograph
    Ronald Brooks Kitaj (1932–2007),
    For Love (Creeley), 1966
    Lithographie, 58,42 x 40,64 cm
    Source







    L’INSULAIRE – CHAPITRE V (Extrait)



    Le chemin grimpait au-dessus des terrasses, se continuait en pente raide, passait devant des troupeaux de chèvres, de moutons, appartenant aux dernières petites fermes en bordure du village. Puis les arbres firent leur apparition, des pins rabougris qui poussaient parmi la rocaille. La famille déboucha enfin sur une petite clairière, derrière une falaise qui tombait à pic. Au pied d’un rocher, ils trouvèrent une petite source ; on avait pratiqué une entaille afin de recueillir l’eau dans une sorte de cuvette. On avait également taillé de petits renfoncements pour y poser des pots de fleurs et diverses choses. On disait que la fontaine remontait à l’époque où les marins grecs faisaient la navette le long de cette côte depuis Marseille. En regardant au loin, on ne voyait que les arbres qui descendaient en pente abrupte, des cimes de pins qui s’étageaient jusqu’à la mer, s’étendant à perte de vue sur trois côtés.

    Ils firent un petit feu à côté de la fontaine et John réussit à installer une sorte de grille avec des pierres afin que les enfants puissent y faire réchauffer leurs hot-dogs à l’aide de baguettes de bois vert qu’il avait également taillées. On étala de la moutarde et du ketchup sur les petits pains coupés en deux. Il y avait un sac pour les détritus. Les enfants mangèrent avec plaisir, burent de l’eau à la source, puis ils entreprirent d’explorer les alentours. Ils disparurent bientôt entre les arbres.

    C’est le moment, pensa John. Je t’aime, Joan, dit-il. C’était après le dîner, vendredi soir, la semaine de travail terminée. Elle venait de les nourrir tous avec son propre assentiment. Ils n’étaient pas des Grecs.

    Joan était contente que ce fût réussi. Ils regardèrent ensemble la petite source et pensèrent aux hommes qui auraient pu la faire. Probablement un paysan du coin. Les Grecs et les Maures qui avaient sans doute vécu ici n’étaient que des figures livresques. Mais la mer pouvait en être l’image. Au loin, là-bas, c’était possible et probable.

    Comme ça, dit-elle, en tressant une couronne de fleurs hâtivement cueillies qu’elle posa dans ses cheveux. Comme ceci. Une déesse. Elle ôta la couronne et la posa près de la fontaine, dans l’un des renfoncements.

    N’es-tu pas heureux, dit-elle. N’est-ce pas un endroit ravissant.

    Elle venait d’accomplir un rituel. Par une sorte d’approximation grotesque, elle avait disposé son corps dans une attitude de sacrifice. Bien, bien.

    Vu sous un autre angle, c’était le triomphe de la féminité américaine. Comment se trouverait-elle autrement dans un endroit pareil, avec des hot-dogs, des enfants et un mari terne, symbole d’une virilité rabougrie, qui la regardait, tassé sur lui-même en clignant des yeux à la lumière du soleil couchant. Les enfants étaient perdus dans la forêt. Le retour les attendait sur un chemin difficile, rocailleux, non familier.

    Quel est l’instant où survient l’amour, le lieu, par quel moyen, quel chemin, affirme-t-il soudain sa présence. L’autel de la déesse au milieu des bois.

    En effet, pensa-t-il, c’est un endroit ravissant. Répète. Un endroit ravissant. C’est un endroit ravissant. […]



    Robert Creeley, L’Insulaire [The Island, 1963], Éditions Gallimard, Collection Du monde entier, 1972, pp. 55-56-57. Traduit de l’anglais par Céline Zins.





    ROBERT CREELEY


    Robert Creeley
    Source



    ■ Robert Creeley
    sur Terres de femmes

    The Return | Intervals
    Words



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    le site de Robert Creeley
    → (sur Poetry Foundation)
    une bio-bibliographie (en anglais) de Robert Creeley
    → (sur PoemHunter.com)
    un grand nombre de poèmes (en anglais) de Robert Creeley
    → (sur PennSound)
    un grand nombre de poèmes de Robert Creeley dits par lui-même
    → (sur Culture, le magazine culturel de l’Université de Liège)
    un article (en français) de Gérald Purnelle sur Robert Creeley





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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • George Oppen | Animula



    Fernand leger le grand remorqueur 1923  Musée National FERNAND LEGER à BIOT
    Fernand Léger (1881-1955), Le Grand Remorqueur, 1923
    Huile sur toile, 125 x 190,6 cm
    Biot, Musée national Fernand-Léger,
    Donation de Nadia Léger et de Georges Bauquier en 1969







    ANIMULA



    animula blandula vagula


    Chance and chance and thereby starlit
    All that was to be to thought
    Yes
    Comes down the road       Air of the waterfronts        black air

    Over the iron bollard        the doors cracked

    In the starlight things continue
    Narrative        their long instruction and the tide running
    Strong as a tug’s wake        shorelights’

    Fractured dances across rough water a music
    Who would believe it
    Not quite one’s own
    With one always the        black verse        the turn and the turn

    At the lens’ focus        the crystal pool        innavigable

    Torrent torment Eden’s
    Flooded valley              dramas

    Of dredged waters
    A wind blowing out

    And out to sea              the late the salt times cling

    In panicked
    Spirals at the hull’s side sea’s streaks floating
    Curved on the sea little pleasant soul wandering

    Frightened

    The small mid-ocean
    Moon lights the winches




    George Oppen, Seascape : Needle’s Eye [1972], in New Collected Poems [2002], New Directions Paperbook, New York, NY 10011, 2008, pp. 213-214. Edited by Michael Davidson. Preface by Eliot Weinberger.







    ANIMULA



    animula blandula vagula


    Hasard, hasard et donc lueur des étoiles
    Tout ce qui devait être pensé
    Oui
    Passe par les routes         l’air des fronts de mer         l’air noir

    Au-dessus du bollard en fer         les portes défoncées

    Sous le ciel étoilé les choses, les choses poursuivent
    Leur narration         leur longue instruction et la marée montante
    Aussi puissante que le sillage d’un remorqueur         les danses

    Fracturées des lumières de la rive sur l’eau agitée une musique
    Qui le croirait
    N’appartenant pas à soi
    Toujours avec soi le         vers noir      le tour et le tour

    Dans le viseur         le bassin de cristal         non navigable

    Le torrent tourmente la vallée
    Engloutie d’Eden         les drames

    Des eaux draguées
    Le vent qui balaie tout

    Jusqu’à la mer         tardifs les temps de sel s’accrochent

    En spirales

    Affolées au flanc de la coque les traînées de la mer flottent
    Incurvées sur la mer petite âme errante et douce

    Terrifiée

    En plein océan infime la
    Lune éclaire les treuils




    George Oppen, Marine : Chat de l’aiguille [1972], Poésie complète, Éditions José Corti, Collection Série américaine, 2011, pp. 242-243. Traduit de l’anglais par Yves di Manno.






    GEORGE OPPEN


    George Oppen, portrait
    Source



    ■ George Oppen
    sur Terres de femmes

    O Western Wind (+ notice biographique)



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Pennsound)
    Animula, dit par George Oppen [source]
    → (sur le site José Corti)
    la page consacrée à Poésie complète de George Oppen
    → (sur Mediapart)
    George Oppen, l’introuvable (note de lecture de Patrice Beray [15 novembre 2011])
    → (sur Poezibao)
    Poésie complète, de George Oppen (note de lecture de Philippe Blanchon)
    → (sur Poezibao)
    Poésie complète, de George Oppen (note de lecture de Jean-Pascal Dubost)
    → (sur poets.org)
    une page consacrée à George Oppen (+ de nombreux poèmes lus par l’auteur)
    → (sur le site de The Poetry Foundation)
    plusieurs pages sur George Oppen





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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Wisława Szymborska |
    Discours au bureau des objets trouvés



    J-ai perdu quelques d-esses entre le sud et le nord ainsi que bon nombre de dieux entre l’est et l’ouest
    Ph., G.AdC






    PRZEMÓWIENIE W BIURZE ZNALEZIONYCH RZECZY



    Straciłam kilka bogiń w drodze z południa na północ,
    a także wielu bogów w drodze ze wschodu na zachód.
    Zgasło mi raz na zawsze parę gwiazd, rozstąp się niebo.
    Zapadła mi się w morze wyspa jedna, druga.
    Nie wiem nawet dokładnie, gdzie zostawiłam pazury,
    kto chodzi w moim futrze, kto mieszka w mojej skorupie.
    Pomarło moje rodzeństwo, kiedy wypełzłam na ląd
    i tylko któraś kostka świętuje we mnie rocznicę.
    Wyskakiwałam ze skóry, trwoniłam kręgi i nogi,
    odchodziłam od zmysłów bardzo dużo razy.
    Dawno przymknęłam na to wszystko trzecie oko,
    machnęłam na to płetwą, wzruszyłam gałęziami.

    Podziało się, przepadło, na cztery wiatry rozwiało.
    Sama się sobie dziwię, jak mało ze mnie zostało:
    pojedyncza osoba w ludzkim chwilowo rodzaju,
    która tylko parasol zgubiła wczoraj w tramwaju.







    DISCORSO ALL’UFFICIO OGGETTI SMARRITI



    Ho perso qualche dea per via dal Sud al Nord,
    e anche molti dèi per via dall’Est all’Ovest.
    Mi si è spenta per sempre qualche stella, svanita.
    Mi è sprofondata nel mare un’isola e un’altra.
    Non so anche dove mai ho lasciato gli artigli,
    chi gira nella mia pelliccia, chi abita il mio guscio.
    Mi morirono i fratelli quando strisciai a riva
    e solo un ossicino festeggia in me la ricorrenza.
    Non stavo nella pelle, sprecavo vertebre e gambe,
    me ne uscivo di senno più e più volte.
    Da tempo ho chiuso su tutto ciò il mio terzo occhio,
    ci ho messo una pinna sopra, ho scrollato le fronde.

    Perduto, smarrito, ai quattro venti se n’è volato.
    Mi stupisco io stessa del poco di me che è restato:
    una persona singola per ora di genere umano,
    che ha perso solo ieri l’ombrello sul treno.



    Wisława Szymborska, Ogni caso (Wszelki Wypadek, Czytelnik, Warszawa, 1972), Libri Scheiwiller, Milano, 2009 [seconda edizione], pp. 58-59. Traduzione dal polacco a cura di Pietro Marchesani.








    DISCOURS AU BUREAU DES OBJETS TROUVÉS



    J’ai perdu quelques déesses entre le sud et le nord
    ainsi que bon nombre de dieux entre l’est et l’ouest
    Quelques étoiles s’éteignirent pour moi, le ciel m’est témoin.
    Une de mes îles, puis une autre sombra dans les abysses.
    Je ne me souviens plus où j’ai laissé mes griffes,
    qui parade dans mes poils, qui occupe ma carapace.
    Mes frères et sœurs sont morts avant d’atteindre la rive,
    un seul petit os en moi fête cet anniversaire.
    Je sortais de moi-même, dilapidais vertèbres,
    perdais mes esprits un nombre incalculable de fois.
    Depuis longtemps j’ai fermé mon troisième œil à ce propos,
    haussé les branches et passé la nageoire.

    Tout perdu, dispersé, semé aux quatre vents.
    Je m’étonne moi-même du peu de moi qui reste :
    seule et unique personne, provisoirement humaine,
    qui cherche son parapluie perdu il y a une semaine.



    Wisława Szymborska, Cas où (Wszelki wypadek, 1972), in Je ne sais quelles gens, Fayard, Collection Poésie, 1997, page 76. Traduit du polonais par Piotr Kaminski.





    WISŁAWA SZYMBORSKA


    Wislawa_Szymborska
    Source




    ■ Wisława Szymborska
    sur Terres de femmes

    Complicités avec les morts
    Mouvement (poème extrait de De la mort sans exagérer (Cent blagues [Sto pociech, 1967])
    3 octobre 1996 | Wisława Szymborska, Prix Nobel de littérature (notice bio-bibliographique)
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    le Portrait de Wisława Szymborska (+ un poème extrait de Vue avec grain de sable et un autre extrait de Dans le fleuve d’Héraclite)



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur FrancoSemailles)
    plusieurs poèmes de Wisława Szymborska
    → (sur poets.org)
    une notice bio-bibliographique (en anglais) sur Wisława Szymborska
    → (sur lyrikline blog)
    Readings to remember: Wisława Szymborska





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