Étiquette : 2010


  • Fabio Pusterla | Corps d’étoiles




    CORPO STELLARE




    Mi segui con un pensiero, sei un pensiero
    che non devo nemmeno pensare, come un brivido
    mi strini piano la pelle, muovi gli occhi
    verso un punto chiaro di luce. Sei un ricordo
    perduto e luminoso, sei il mio sogno
    senza sogno e senza ricordi, la porta che chiude
    e apre sulla corrente di un fiume impetuoso. Sei una cosa
    che nessuna parola può dire e che in ogni parola
    risuona come l’eco di un lento respiro, sei il mio vento
    di foglie e primavere, la voce che chiama
    da un punto che non so e riconosco che è mio.
    Sei l’ululato di un lupo, la voce del cervo
    vivo e ferito a morte. Il mio corpo stellare.




    Fabio Pusterla, Corpo stellare, Marcos y Marcos, Collana Gli Alianti, 178, Milano, 2010, pagina 106.






    Corpo-stellare-cop







    CORPS D’ÉTOILES




    Tu me suis comme une pensée, tu es une pensée
    que je ne dois même pas penser, comme un frisson
    tu me roussis doucement la peau, bouges les yeux
    vers un point clair de lumière. Tu es une chose
    qu’aucun mot ne peut dire et qui dans chaque parole
    résonne comme l’écho d’une respiration lente, tu es
    mon vent de feuilles et de printemps, la voix qui appelle
    d’un lieu inconnu que je reconnais et qui est mien.
    Tu es le hurlement d’un loup, la voix du cerf
    vivant et blessé à mort. Mon corps d’étoiles.




    Fabio Pusterla, Pierre après pierre, anthologie de poèmes, édition bilingue, éditions MétisPresses, Genève, 2017, page 85. Traduit de l’italien par Mathilde Vischer.






    Fabio Pusterla  Pierre après pierre






    FABIO PUSTERLA


    Fabio Pusterla
    Source




    ■ Fabio Pusterla
    sur Terres de femmes

    Arte della fuga
    Au-delà des vagues
    Caparìca
    Due rive
    Entre-deux
    Esquisse en poudre de gypse, 6
    La fugitive
    Une vieille (+ bio-bibliographie)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de culturactif.ch)
    une notice bio-bibliographique sur Fabio Pusterla







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  • Lionel Ray | Navigation interstellaire




    NAVIGATION INTERSTELLAIRE




    une bougie allumée au fond de la mémoire     comme un œil ouvert    la maison des solitudes    la servitude des saisons        il sombra dans un futur fabuleux       aspiré par la nuit aventureuse la constellation d’Hercule     ou d’autres alvéoles            cherchant une planète habitable un chiffre simple centaines de mille millions de milliards le noyau de l’extrême l’inaltérable la rédemption l’apogée de l’être mercuriel ou neptunien     ô tant de naissances inapaisées ces générations frénétiques
                     et le mystère entier d’une présence invisible entre la chevelure de Bérénice                 et Véga de la Lyre il voyagea          il avait rencontré toute la boue du temps il revint par matin tiède     c’était en avril     jusqu’au pied du lit étroit de l’après-sommeil



    Lionel Ray, « Variabilité » in Entre nuit et soleil, poèmes, Éditions Gallimard, Collection Blanche, 2010, page 60.






    Lionel Ray, Entre nuit et soleil





    LIONEL RAY


    Ray Kobel
    Lionel Ray au festival Voix Vives
    de Méditerranée en Méditerranée (Sète)
    le 27 juillet 2010
    Ph. : Pierre Kobel
    Source





    ■ Lionel Ray
    sur Terres de femmes

    Résurrection (poème extrait de Souvenirs de la maison du Temps)
    Tu cherches la lettre perdue (poème extrait de Syllabes de sable)
    [Tu serais un arbre calme] (autre poème extrait de Syllabes de sable)
    Viatique



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site du Printemps des poètes)
    une fiche bio-bibliographique sur Lionel Ray
    → (sur le site de Poésie/première)
    une page sur Lionel Ray
    → (sur La Pierre et le Sel)
    « Lionel Ray, poète lyrique à trois têtes », une contribution de Jean Gédéon





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  • Rita R. Florit | [Strazio il mio verso]

    « Poésie d’un jour

    choisie par Silvia Guzzi



    Ecorche mon vers en mille ruisseaux  je me dissous
    Ph., G.AdC








    [STRAZIO IL MIO VERSO]




    Strazio il mio verso
    in mille rivoli mi squaglio
    non so che gemere e tacere
    immergermi e affiorare
    e soffocare l’ombra che m’assale
    stringere e catturare
    e in te cadere
    ricado amore senza cuore
    all’esatto centro del mio cuore.



    Rita R. Florit, Passo nel fuoco, Edizioni d’If, Napoli, 2010, pagina 20.







    [J’ÉCORCHE MON VERS]




    J’écorche mon vers
    en mille ruisseaux je me dissous
    je ne sais plus que gémir en silence
    plonger et affleurer
    et étouffer l’ombre qui m’assaille
    enserrer et capturer
    et en toi tomber
    je retombe ô amour sans cœur
    à l’exact centre de mon cœur.




    Traduit de l’italien par Silvia Guzzi







    PASSO NEL FUOCO(2)





    RITA R. FLORIT


    Rita Regina Florit




    ■ Rita R. Florit
    sur Terres de femmes

    Passo nel fuoco (note de lecture d’AP)
    D’effimero oblio
    I giorni accatoni
    Imus (extrait de Nyctalopia)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Varchi del rosso
    → (dans la galerie Visages de femmes de Terres de femmes)
    le Portrait de Rita R. Florit (+ un extrait de Lezioni inevitabili)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Imperfetta Ellisse)
    d’autres poèmes de Rita R. Florit





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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Nimrod | Des « paroles plus précieuses que l’or »

    Chroniques de femmes – EDITO

    Chronique d’Angèle Paoli




    Nimrod-02
    Ph. D.R. Olivier Roller
    Source







    DES « PAROLES PLUS PRÉCIEUSES QUE L’OR »



    « Partir, partir d’ici, encore et toujours ». Un jour Nimrod est parti. Il est parti, se conformant en cela aux propos de Franz Kafka, cité par l’écrivain tchadien en hors-texte de L’Or des rivières (Actes Sud, 2010), sur la toute dernière page de l’ouvrage, juste après l’excipit :

    « — Je n’en sais rien, répondis-je, je pars, je pars d’ici, c’est tout. Partir d’ici, encore et toujours, c’est pour moi le seul moyen d’atteindre mon but. »

    Il est donc parti. Il a quitté son Tchad natal. Il a quitté ses demeures de pisé et les rives abondantes du Chari. Il est parti à plusieurs reprises, puis, un jour, il est revenu chez les siens. Il est revenu pour feuilleter à nouveau « l’étendue aqueuse du fleuve » en même temps que les souvenirs liés à jamais à la mémoire absente du père, cet « homme abstrait » qui a laissé en héritage au jeune homme son amour du livre et de la chose écrite. Il est revenu pour retrouver sa mère, « sa déesse d’Ifé », à qui il voue un amour sans limites. Pour se rendre, conformément au désir de la veuve, sur la tombe lointaine du père, enseveli aux confins du Soudan, et poser une stèle à la mémoire du défunt, assassiné par les révolutionnaires du désert. Il a voyagé vers d’autres cieux, emportant avec lui les trésors de son enfance. Ses jeux, son passé de légende, ses amis, ses premières amours. Il s’est exilé de sa mère, parce qu’elle lui a appris la liberté. Le plus précieux des cadeaux. Mais toujours survient vers le soir la voix de celle qui a inventé pour lui son pays afin de lui donner sa voix.

    « Le soir, mes pas me portent vers la maison de ma mère. Je prononce ce mot avec révérence. Il appartient au registre du sacré ou à l’effusion toute personnelle du poète qui, à défaut d’avoir fait fortune, a trouvé dans la métaphore une richesse capable de supplanter, ne serait-ce que pour un quart d’heure, une opulence que rien ni personne ne saurait lui ravir. »

    Et, quelques pages plus loin, toujours imprégné du même rituel, Nimrod écrit :

    « Quand le crépuscule s’annonce, je rends visite à ma mère. C’est tout ce que l’exilé que je suis peut accomplir au cours de ses brefs séjours […]. Je veux être seul avec ma mère, seul avec le crépuscule. J’ai rendez-vous avec deux sortes de sacré : ma mère, les vêpres. » (in « Les rêves de ma mère », L’Or des rivières)

    Ainsi Nimrod a-t-il quitté un jour la terre des origines, pour aller vivre ailleurs. Un ailleurs de terres brumeuses où, semblablement aux rives du Chari, les eaux du ciel se fondent aux eaux de la terre dans le tremblé toujours renouvelé de la lumière. Or, à la fascination qu’exercent sur lui ces terres imbibées d’eau vient s’ajouter le trouble suscité par la découverte des maisons de torchis, si caractéristiques de sa terre d’accueil, la Picardie :

    « Cette identité d’argile qui me bouleversait tant, le mur sablé que mes craies de couleur rayaient à la moindre tentative de dessin étaient donc la mère universelle des hommes. »

    Cette découverte suffit à apaiser un temps la nostalgie des murs d’enfance, dont on retrouve trace dans certains poèmes de Babel, Babylone (Obsidiane, 2010). Ainsi du poème 8 de la section II des « Murs » :

    « Qui me redonnera l’odeur de la maison d’enfance

    Ses murs maculés de mes peintures naïves

    Cette feinte fraîcheur cette réelle présence

    Quand la pénombre devient une amie de haut lignage »

    Si le mur a autant d’importance dans la vie de Nimrod, c’est qu’il a à voir avec le ciel et, partant, avec la mère. Et avec ses maisons.

    « Le ciel me bat froid, le ciel mon amadou. En lui se tient la maison de ma mère, toute verticale, comme des larmes en suspens, comme le suspens lui-même pris à son jeu.

    Un jeu grandiose et fatal. J’y séjourne, et c’est peu dire qu’il convient à mon instinct de fuite. » (Babel, Babylone, 13)

    Mais le mur est aussi cette page où s’inscrit la vie des anciens, une page ouverte pour dire la vieillesse qui vient, pour accueillir le passage des saisons et du temps, et renouer les liens qui unissent les hommes aux dieux absents. Le poète est là, nouvel aède qui, intercédant par ses mots, établit une continuité sans rupture entre les hommes d’Afrique et ceux de Grèce :

    « J’inaugure le discours nouveau, d’Homère à Ogotemmêli, du vide divin à la plénitude qui chambre les termitières. »

    Depuis qu’il est parti, depuis qu’il a laissé derrière lui sa terre d’Afrique, il revient avec des livres. Des essais — Tombeau de Léopold Sédar Senghor — ; des romans — Le Bal des princes ; Rosa Parks — ; des recueils de poèmes — Pierre, poussière ; Passage à l’infini ; Babel, Babylone — ; un recueil de récits : L’Or des rivières. Autant de passerelles lancées au-dessus du Chari entre l’Afrique et l’Europe. N’est-ce pas en cela que Nimrod a atteint son but ?

    Partir pour revenir. Exil là-bas. Exil ici. Et accepter de n’être plus ni tout à fait d’ici ni tout à fait d’ailleurs. Accepter de chaque retour qu’il soit marqué par d’autres incertitudes, d’autres errances, d’autres déceptions.

    « À celui qui revient, le milieu réserve bien des surprises. D’abord, il y a l’évidence : la lumière crue rend abrupt l’horizon ; l’azur paraît bétonné… », lit-on dans l’incipit du récit « Que sont mes amis devenus ? » (L’Or des rivières)

    Ainsi de la petite ville natale de Chagoua, que l’enfant aimait tant, et qui ne lui inspire désormais que révolte. Devenue « ville poubelle », la « nouvelle Babel » est désormais vouée à la laideur.

    « La laideur est notre pain quotidien, la laideur est du plastique noir, tapis de corbeaux, cortège de corneilles, carcasses de freux sur l’éternité des jours. »

    Habité par le désespoir, le poète consacre à sa ville natale, dans Babel, Babylone, un long poème intitulé « Peine capitale », écho de « l’étranger capital » de L’Or des rivières. Martelé par l’anaphore (« Désespérément elle se traîne ») et par ses variantes (« Désespérément je me traîne »), le poème alterne entre poésie — jusqu’au lyrisme incantatoire : « Ô multitude océane ! Qui nous dénombrera ? » — et prose (le prosimètre peut-être ?) ; entre présent, passé et parfois futur.

    « Autrefois, le soir, on était à l’abri dans un foyer blagueur. Aujourd’hui, passé sept heures, on ne peut plus rêver d’abri : l’hospitalité a déserté les demeures en mode majeur. »

    Et plus loin :

    « Je dirai un jour prochain la haute magie des maisons de terre

    Je dirai leur climat

    Je dirai leur douceur de rosée

    Je dirai la grande rosace

    Et sa fraîcheur termitière

    Je dirai la région divine en elles… »

    À chaque retour, la mère est là, qu’il faut redécouvrir et réapprivoiser, qui met le jeune adulte face à la souffrance qu’il a engendrée en elle de le voir s’éloigner à jamais. Pêle-mêle, la vieille femme au visage creusé des scarifications de sa race – « de style baguirmien » – lui reproche sa différence, ses départs, son épouse française qu’elle ne connaîtra pas, son absence au moment de la mort du père.

    Pasteur luthérien, Daniel est toujours plongé dans la Bible et ne rapporte de ses missions qu’un poisson et son livre de messe. Daniel, ce sont les virées sur le Chari, les heures passées à dériver sur le fleuve parmi les roseaux. Silence et nature. Lumière jouant sur les flots. « Mon père rêve, sa main au bout du filet qui dérive comme une jauge. »

    C’est de son père que l’enfant tient son prénom biblique de Nimrod. Ainsi s’inscrit-il dans la lignée des patriarches. Petit-fils de Noé et fils de Cham, « grand chasseur devant l’Éternel », Nimrod est lui-même fondateur de la tribu des Chamites et le fondateur de Babylone. Pour autant, la Babylone qu’évoque Nimrod est loin d’être une ville idyllique :

    « Sur les portes de Babel, j’ai gravé ma faim. Le poème

    Est un enfant qui rêve ; c’est la grâce nourrie au lait.

    Il est ville en Babel, Babel en ville. J’entends siffler

    Les balles au-dessus de mes oreilles […]

    Ville vouée aux fantômes, ville vouée à l’aplomb du temps ;

    Ville dévouée aux chiens, un sanglot pourfend mon âme. »

    Et la poésie ? Elle irrigue d’un même esprit et d’un même élan les récits de L’Or des rivières et les poèmes de Babel, Babylone. Omniprésente, elle est consubstantielle au poète Nimrod. C’est en elle sans doute que puise la petite phrase que Nimrod a retenue de son père : « Jette ici tes filets ». Le poète a jeté ses filets loin des maisons de sa mère ; loin du cimetière où est enseveli son père. Il a gardé de lui son attachement pour l’exil et son goût pour les mots, transmués en poésie.

    « Et il me dit, le père limpide : “Jette-là tes filets !”

    L’onde s’irise, l’eau s’étoile, et mon père, levant les bras, multiplie le pain. Ce fut le bonheur au siècle dernier. »

    De ce bonheur, le poète a gardé la nostalgie. « Ma nostalgie remonte à mon enfance : elle a la couleur de ma peau, elle est ma peau. »

    C’est sans doute dans ce « lointain intérieur », qui participe de la lenteur du fleuve et de son silence, que le poète s’immerge pour faire surgir une poésie qui surprend par l’immensité de sa sagesse et par son envoûtante originalité.

    « C’est l’énigme du livre qui s’illustre, c’est la présence à soi des mondes en nous pareils aux châteaux, semblables aux poèmes. Je les aime comme on aime les sources. J’y vais boire des paroles plus précieuses que l’or. »

    C’est dans ces « paroles plus précieuses que l’or » que Nimrod a jeté ses filets. Pour le plus grand bonheur des lecteurs pêcheurs de perles. Pour mon bonheur.



    Angèle Paoli
    D.R. Texte Angèle Paoli





    NIMROD


    Nimrod 2






    ■ Nimrod
    sur Terres de femmes


    L’enfant n’est pas mort (lecture d’AP)
    Gens de brume (lecture d’AP)
    [J’ai aimé ma mère] (poème extrait de Sur les berges du Chari, district nord de la beauté)
    [je suis la dernière figure de l’homme] (poème extrait de Babel, Babylone)
    L’herbe (poème extrait d’En Saison)
    Sous les étoiles
    Sur les berges du Chari (lecture d’AP)
    [Tu poseras ton faix] (poème extrait de J’aurais un royaume en bois flottés)
    Le roman s’achève (poème extrait de Petit Éloge de la lumière Nature)
    Le Temps liquide (lecture d’AP)
    En remontant le Lac Tchad (extrait du Temps liquide)
    La Traversée de Montparnasse (lecture d’AP)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions Obsidiane)
    une page sur Babel, Babylone
    → (sur Mediapart)
    une note de lecture de Bernard Demandre sur Babel, Babylone
    → (sur La Pierre et le Sel)
    Nimrod, un retour au pays natal
    → (sur e-littérature.net)
    une fiche bio-bibliographique et de nombreux articles d’Alice Granger sur les ouvrages de Nimrod
    → (sur Recours au poème)
    une page sur Nimrod (+ plusieurs poèmes)
    → (sur le site de la Mél, Maison des écrivains et de la littérature)
    une notice bio-bibliographique sur Nimrod



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  • Nuno Júdice | Lisboaxaca




    LISBOAXACA


    para a Karla e o André



    Entre velho e novo mundo,
    por entre as nuvens de um desejo de viagem
    e as ondas que nos fazem ficar,
    a primavera fez o dia em que se ouviram
    as palavras mais secretas,
    as palavras que só se lêem
    nos dicionários do coração,
    com os significados que um riso pode abrir
    com a chave dos planaltos,
    feita dos sonhos que olhos
    descobrem no infinito dos oceanos.

    E quando se cruzam os barcos
    do velho e do novo mundo,
    levando a raiz do sol nascente
    e o milho das luas mais luminosas,
    dois olhares tambén se cruzaram,
    um perguntando pelo outro, como
    se a resposta não estivesse dada
    no dicionário do coração,
    no significado de um riso,
    na chave que os olhos fizeram rodar
    abrindo o caminho desta viagem comun.



    Nuno Júdice, Guia de Conceitos Básicos, Publicações Dom Quixote, Lisboa, 2010, p. 110.







    Nuno Judice, Guia de Conceitos Basicos







    LISBOAXACA


    pour Karla et André



    Entre l’ancien et le nouveau monde,
    entre les nuages d’un désir de voyage
    et les ondes qui nous font rester,
    le printemps fit le jour où s’entendirent
    les mots les plus secrets,
    les mots qui se lisent seulement
    dans les dictionnaires du cœur,
    avec les significations qu’un rire peut ouvrir
    avec la clef des hauts plateaux,
    faite des rêves que les yeux
    découvrent dans l’infini des océans.

    Et quand se sont croisées les barques
    de l’ancien et du nouveau monde,
    portant la racine du soleil naissant
    et le maïs des lunes plus lumineuses,
    deux regards aussi se sont croisés,
    l’un questionnant l’autre, comme
    si la réponse n’était pas donnée
    dans le dictionnaire du cœur,
    dans la signification d’un rire,
    dans la clef que les yeux firent tourner
    ouvrant le chemin de ce voyage commun.



    Nuno Júdice, Manuel de notions essentielles, Atelier La Feugraie, 2015, page 83. Traduit du portugais par Béatrice Bonneville et Yves Humann.






    Nuno 11





    NUNO JÚDICE


    Nuno_judice1
    Source




    ■ Nuno Júdice
    sur Terres de femmes

    Désir (poème extrait de Geometria Variável)
    Deus (poème extrait de Meditação sobre Ruínas)
    Semiología (poème extrait de o movimento do mundo)
    Un thé dans la véranda (poème extrait de Naviguer à vue)



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur BiblioMonde)
    une notice bio-bibliographique sur Nuno Júdice
    → (sur La Pierre et le Sel)
    une page sur Nuno Júdice
    → (sur lepetitjournal.com )
    un portrait de Nuno Júdice
    → (sur le site de la Fondation Calouste Gulbenkian)
    une bio-bibliographie (en portugais) de Nuno Júdice
    → (sur Lyrikline)
    plusieurs poèmes de Nuno Júdice dits par l’auteur
    → (sur Recours au Poème)
    cinq poèmes de Nuno Júdice traduits du portugais par Béatrice Bonneville et Yves Humann



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  • Ewa Lipska | Nature morte [Martwa Natura]





    Ewa Lipska








    NATURE MORTE [MARTWA NATURA]




    La nature morte commence à se gâter.
    Les vis des iris rouillent. Des fruits
    de Chardin Courbet Cézanne
    émane une odeur écœurante.
    La toile perd la vue.
    Dans un verre la pierre du vin.
    Noirceur insupportable.

    Visions prophétiques
    des dictateurs de la mode :
    Advient l’époque des éclairs.
    Le cor d’harmonie soufflera
    plantes batraciens terrestres et mammifères.

    Le temps se fera de plus en plus rare.
    De plus en plus court. De moins en moins.

    Alors sors de ton sac notre amour.
    Et dépêche-toi. Le lambeau d’ultramarine
    annonce que nous arriverons juste à temps pour le rire.



    Ewa Lipska, Rumeur [Pogłos, Wydawnictwo Literackie, Kraków, 2010], suivi de Chère Madame Schubert, Éditions LansKine, 2015, page 26. Traduit du polonais par Isabelle Macor.







    Rumeur 2





    EWA LIPSKA


    Ewa Lipska Portrait





    ■ Ewa Lipska
    sur Terres de femmes

    La mémoire [Pamięć] (extrait de L’Amour, chère Madame Schubert… [Miłość, droga pani Schubert…])
    Vertige amoureux [Zakochanie] (extrait de Lecteur d’empreintes digitales [Czytnik Linii Papilarnych])



    ■ Voir aussi ▼

    le site personnel d’Ewa Lipska
    → (sur le site de la mél, Maison des écrivains et de la littérature)
    une fiche bio-bibliographique sur Isabelle Macor-Filarska
    le site personnel d’Isabelle Macor-Filarska



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  • Nimrod | [je suis la dernière figure de l’homme]



    Car des bondieuseries occupent nos têtes
    Ph., G.AdC





    [JE SUIS LA DERNIÈRE FIGURE DE L’HOMME]




    Je dirai un jour prochain la haute magie des maisons de terre
    Je dirai leur charme naturel
    Je dirai leur climat
    Je dirai leur douceur de rosée
    Je dirai la grande rosace
    Et sa fraîcheur termitière
    Je dirai la région divine en elles

    ni poux

    ni belles

    ni poubelles

    ne vicient

    l’air

    du bon dieu

    Car des bondieuseries occupent nos têtes
    Mais le paysage n’en a cure
    Il n’est même pas païen
    Il n’est même pas chrétien
    Et pas même musulman
    Il est infini à la mesure
    De l’amour qui nous consume

    Vivre savamment
    Mourir avec le sourire
    Quelle rime triste
    J’éclaterai ma tête contre leurs bons mots
    Eux qui m’ont dépouillé de tout espoir
    De toute quête
    De toute métaphore

    La poussière l’océan les étoiles
    Ulysse Aladin Niels
    Les rivages les côtes l’horizon me sont refusés à jamais
    On ne me dira même pas Juif errant
    Ni coolie indien ni sale Chinois
    Je suis la dernière figure de l’homme
    Je suis le trépassé de Lampedusa
    Je suis le fusillé de Ceuta et de Melilla
    Je suis le naufragé de Gibraltar de Malte de Sicile
    Je suis le vendeur à la sauvette de Rome de Venise
    De New York et du Trocadéro

    Je suis la manière noire de Vienne

    Je

    suis

    la

    der

    nière

    fig

    ure

    de

    l’hom

    me



    Nimrod, “Peine Capitale” in Babel, Babylone, Obsidiane, Collection Les Solitudes, 2010, pp. 24-25-26. Prix Max-Jacob 2011.






    Nimrod, Babel, Babylone





    NIMROD


    Nimrod 2






    ■ Nimrod
    sur Terres de femmes


    Des « paroles plus précieuses que l’or » (chronique d’AP)
    L’enfant n’est pas mort (lecture d’AP)
    [J’ai aimé ma mère] (poème extrait de Sur les berges du Chari, district nord de la beauté)
    Sur les berges du Chari (lecture d’AP)
    L’herbe (poème extrait d’En Saison)
    Sous les étoiles
    [Tu poseras ton faix] (poème extrait de J’aurais un royaume en bois flottés)
    Le roman s’achève (poème extrait de Petit Éloge de la lumière Nature)
    Le Temps liquide (lecture d’AP)
    En remontant le Lac Tchad (extrait du Temps liquide)
    La Traversée de Montparnasse (lecture d’AP)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions Obsidiane)
    une page sur Babel, Babylone
    → (sur Mediapart)
    une note de lecture de Bernard Demandre sur Babel, Babylone
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    Nimrod, un retour au pays natal
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  • Herberto Helder | O Amor em Visita



    O AMOR EM VISITA (extracto)



    Dai-me uma jovem mulher com sua harpa de sombra
    e seu arbusto de sangue. Com ela
    encantarei a noite.
    Dai-me uma folha viva de erva, uma mulher.
    Seus ombros beijarei, a pedra pequena
    do sorriso de um momento.
    Mulher quase incriada, mas com a gravidade
    de dois seios, com o peso lúbrico e triste
    da boca. Seus ombros beijarei.

    Cantar? Longamente cantar,
    Uma mulher com quem beber e morrer.
    Quando fora se abrir o instinto da noite e uma ave
    o atravessar trespassada por um grito marítimo
    e o pão for invadido pelas ondas,
    seu corpo arderá mansamente sob os meus olhos palpitantes
    ele — imagem inacessível e casta de um certo pensamento
    de alegria e de impudor.
    Seu corpo arderá para mim
    sobre um lençol mordido por flores com água.

    Ah! em cada mulher existe uma morte silenciosa;
    e enquanto o dorso imagina, sob nossos dedos,
    os bordões da melodia,
    a morte sobe pelos dedos, navega o sangue,
    desfaz-se em embriaguez dentro do coração faminto.
    — Ó cabra no vento e na urze, mulher nua sob
    as mãos, mulher de ventre escarlate onde o sal põe o espírito,
    mulher de pés no branco, transportadora
    da morte e da alegria!

    Dai-me uma mulher tão nova como a resina
    e o cheiro da terra.
    Com uma flecha em meu flanco, cantarei.
    E enquanto manar de minha carne uma videira de sangue,
    cantarei seu sorriso ardendo,
    suas mamas de pura substância,
    a curva quente dos cabelos.
    Beberei sua boca, para depois cantar a morte
    e a alegria da morte.

    Dai-me um torso dobrado pela música, um ligeiro
    pescoço de planta,
    onde uma chama comece a florir o espírito.
    À tona da sua face se moverão as águas,
    dentro da sua face estará a pedra da noite.
    ― Então cantarei a exaltante alegria da morte.

    […]







    L’AMOUR EN VISITE (extrait)



    Donnez-moi une jeune femme avec sa harpe d’ombre
    et son arbuste de sang. Avec elle
    j’enchanterai la nuit.
    Donnez-moi, vivante, une feuille d’herbe, une femme.
    J’embrasserai ses épaules, la petite pierre
    du sourire d’un moment.
    Femme comme incréée, mais avec la gravité
    des deux seins, le poids lubrique et triste
    de la bouche. J’embrasserai ses épaules.

    Chanter ? Chanter longuement.
    Une femme avec laquelle boire et mourir.
    À l’heure où s’ouvre au-dehors l’instinct de la nuit
    que traverse un oiseau transpercé par un cri maritime,
    et où les vagues envahissent le pain –
    son corps brûlera doucement sous mes yeux palpitants.
    Lui – haute et vertigineuse image d’une certaine pensée
    de joie et d’impudeur.
    Son corps brûlera pour moi
    sur un drap que mordent fleurs et eau.

    En chaque femme il y a une mort silencieuse.
    Tandis que le dos imagine, sous les doigts,
    les refrains de la mélodie,
    la mort monte par les doigts, navigue le sang,
    se répand en ivresse dans le cœur affamé…

    Donnez-moi une femme aussi jeune que la résine
    et l’odeur de la terre.
    Avec une flèche dans le flanc, je chanterai.
    Et tandis qu’une vigne de sang jaillira de ma chair,
    je chanterai son sourire ardent,
    ses mammes de pure substance,
    la courbe chaude de ses cheveux.
    Je boirai sa bouche, pour ensuite chanter la mort
    et la joie de la mort.

    Donnez-moi un torse courbé par la musique,
    un léger cou de plante,
    là où une flamme commence à fleurir l’esprit.
    Sur son visage affleurera le mouvement des eaux,
    au creux de son visage sera gravée la pierre de la nuit.
    – Alors je chanterai la joie exaltante de la mort.

    […]



    Herberto Helder, L’Amour en visite (O amor em visita, Contraponto, 1959) in Le Poème continu, 1961-2008, Gallimard, Collection Poésie, 2010, pp. 29-30. Préface de Patrick Quillier. Traduit du portugais par Magali Montagné et Max de Carvalho.






    Helder poème continu





    HERBERTO  HELDER


    Vignette Herberto Helder
    Source



    ■ Herberto Helder
    sur Terres de femmes

    [Je lève les mains]



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Esprits nomades)
    plusieurs pages consacrées à Herberto Helder


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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Blandine Longre, Clarities

    par Sabine Huynh

    Blandine Longre, Clarities,
    Black Herald Press, 2010.



    Lecture de Sabine Huynh





    Des vers d’une Sylvia Plath amoureuse placés en exergue de Clarities donnent le ton : les poèmes de ce recueil seront passionnés, passionnants, ciselés, denses et tendus, parfois angoissants aussi. Avec quelque chose d’extravagant et d’extrêmement contrôlé. Loin de n’être qu’un recueil de « mere distorted painlines », Clarities nous offre ― avec sa trentaine de poèmes en anglais vibrant dans un petit livre au format et aux couleurs très similaires aux livres de la collection City Lights Pocket Poets Series de la légendaire maison City Lights Books (rien d’étonnant à cela, dans la mesure où les éditions Black Herald Press ont aussi édité une traduction française de poèmes choisis de Gregory Corso)&nbsp― des vers intenses, fort habilement sculptés, tout en nœuds et en méandres.

    Une poésie que l’on pourrait aussi qualifier de libertine, dans la mesure où elle est totalement anticonformiste, originale, inattendue, à la langue singulière, aux mots et aux sonorités tressés serrés, se pliant aux caprices d’un esprit que l’on pourrait qualifier de baroque. À la fois très cérébrale et très physique, elle nous rappelle que nous sommes des animaux raisonnables ; une poésie difficilement catégorisable en fait, tant ses attributs sont multiples, et parfois même contradictoires – « discordant symphony of selfhood », nous dit justement Blandine Longre dans l’un des poèmes de Clarities. Ainsi, on peut lui trouver quelque chose de disturbingly wondrous (je ne puis trouver d’équivalent français exact de l’effet produit par ce syntagme), car elle est étonnante, très raffinée, et en même temps dérangeante, avec ses images brutales qui empoignent, émanant d’une poète qui, loin de craindre ce qui pourrait répugner, le fouille et l’exhibe (entrailles, blessures, os, cadavres…). Il s’agit de clarities, oui, mais de clarté crue, de lucidité jusqu’à s’en brûler les yeux (« my charred eyeballs »).

    Le corps, vivant, souffrant, désirant, est omniprésent dans Clarities. En lutte constante contre ce qui l’a conquis, colonisé, il semble ne pas réussir à trouver de repos en dehors de l’adoration amoureuse. « Wormy cells », « blemished », « gnawed flesh », « upturned skin »… ces mots, ainsi que « horror » et « horrendous », trahissent une certaine fascination pour le monstrueux, qui est humain. De surcroît, on a le sentiment que le salut ne peut passer que par une certaine violence faite au corps, qu’elle serait l’électrochoc qui excite et ranime : « Yes, do pluck stretch outplay them at / will before / snapping them / alive ». Ça suinte, ça saigne, ça crie, dans Clarities, au cœur d’un martyre furieusement mystique, où la force a les yeux les plus sombres qui soient, les cris sont des muscles imposants, les mots sont enrobés de chair, et le temps, « improbable », est tout en convulsion, étranglé, massacré (« slaughtered days and strangled dawns / (jolting nights in between) », « slits of time like sizzling / wounds ») : l’abstrait prend toujours forme humaine dans la poésie extrêmement précise de Blandine Longre, confirmant que l’entendement découle du corps avant tout (« rien n’est dans l’intellect qui n’ait été d’abord dans la sensation », affirmait Aristote).

    Ce qui est inhumain, ce ne sont pas les difformités corporelles mais spirituelles, quand l’identité (« the soul » ici, l’âme) se dénature sous les masques et les faux-semblants, qui fragmentent l’être (« I and I »), le dépècent même, et l’empêchent d’être. On lit dans Clarities le désir de la séparation du soi des « oughts-to-be » – le soi de devoirs et d’obligations –, l’aspiration à un certain détachement, pour pouvoir se retrouver, se recomposer ; le désir de séparer le corps corrompu de l’esprit malmené aussi, pour le préserver de la mortelle vacuité (« and flesh, abyss-bound, could not reach / its coppery core », « my dried-up chard of a soul »). On retrouve là les obsessions et les peurs de Sylvia Plath.

    Malgré cela – et Blandine Longre en tisse obstinément la fougue dans Clarities – ce qui sauve, c’est bien l’amour, et ses poèmes d’amour sont à couper le souffle (et à répéter en boucle, à haute voix pour en savourer toutes les consonances), surtout le poème « Headlong », qui, par son injonction « let’s », n’est pas sans rappeler celui de John Donne, « The Good Morrow » (« Let us possess one world, each hath one, and is one »).





    HEADLONG
    (for Paul)




    Let’s dash
    to the nearest unstoppable
    move – as (in stillness) nascent
    steps expect us
    to our own everywheres:

    suburban leaps over fleeting darkscapes
    evading senses above wizened throngs
    splashed-out paces along sharpened
    meridians and riverbeds of pain –
    bone-deep
    all steering our stammering selves away

    all leading to transit chambers where

    on top of sheet-like rustlings of love
    (flaming-out, forever

    imprinted with our two-bodied ghost)
    we soar swivel and thrive

    abandoning handfuls of too-well-rehearsed emptiness
    (long fed on a misplaced non-thought)
    and letting the expanse of our souls
    sever its way through twisted
    agapic mindscapes

    – here and there.



    Sabine Huynh
    D.R. Sabine Huynh
    pour Terres de femmes






    Clarities







    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de Black Herald Press)
    la page de l’éditeur consacrée à Clarities





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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • 6 février 2008 | Jean-Paul Bota, D’après Souvenir de Mortefontaine de Jean-Baptiste Corot


    Souvenir de Mortefontaine
    © 2010 Musée du Louvre / Angèle Dequier
    Source







    Blanc de céruse comme un étang que surplombe la brume, on regarde ces eux immobiles, c’est un matin sans doute et il y a cette lumière blanche ou presque, un rien d’argent s’endort en elle que tamise le feuillage d’un arbre, et son corps est une tache d’ombre dévorant sur la gauche un arbuste frêle, sillonné de fleurs, une respiration dans l’incertitude des campagnes, une jeune femme plonge les mains dans les branches (et on devine à peine son regard), jupe façonnée au rose de garance, ce qui crée le mouvement est là, dans le feu de la couleur, parmi l’enfance et la couperose accroupie du bonnet qu’il te faut chercher où ? — jeunesses verdoyantes quand le froid se colore de rires dans les parages humides des parcs, corps bougés dans les paysages. Et la vie toujours comme un sceau rougeoyant.

    Paris, 6 février 2008




    Jean-Paul Bota, Usage des cendres, précédé de Feuillets du Midi (Chartres Lisbonne Venise), Le préau des collines, 2010, page 77.







    Jean-paul Bota, Usage des cendres






    ■ Jean-Paul Bota
    sur Terres de femmes

    La Boussole aux dires de l’éclair (lecture d’AP)
    Bacchus et Ariane (extrait de La Boussole aux dires de l’éclair)
    [Un cimetière près des forges]



    ■ Voir aussi ▼

    le site des éditions Le préau des collines
    → (sur Terres de femmes)
    22 février 1875 | Mort de Jean-Baptiste Camille Corot






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