Étiquette : 2017


  • Claribel Alegría | Ultimo umbral



    ULTIMO UMBRAL



    Un paso más
    dos o tres quizá
    un mirar hacia atrás
    el vértigo
    el abismo
    y cruzar el umbral
    que me lleve hacia ti.






    DERNIER SEUIL



    Encore un pas
    deux ou trois peut-être
    un regard en arrière
    le vertige
    l’abîme
    puis franchir le seuil
    qui me conduira jusqu’à toi.




    Claribel Alegría, Saudade, Éditions L’atinoir, Collection L’atinair, Poésie bilingue hispano-américaine, Marseille, 2017, page 73. Traduction de Michelle Dospital. Préface de Claire Pailler.






    Claribel alegria  Saudade
    Annonce BnF






    CLARIBEL ALEGRÍA


    Claribel Alegria 3
    Source



    NOTE d’AP : la poète Claribel Alegría est décédée le 25 janvier dernier à Managua (Nicaragua) à l’âge de 93 ans. Elle venait de recevoir (à Madrid, en novembre dernier) le prestigieux Prix de Poésie ibéro-américain Reina Sofía. L’édition bilingue de Saudade est disponible en librairie depuis le 12 janvier 2018.




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur poets.org)
    une notice bio-bibliographique (en anglais) sur Claribel Alegría
    → (sur le site du Washington Post)
    une notice nécrologique (2018, January 31) sur Claribel Alegría



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  • Laura Tirandaz | [Sillons des dunes sillons des cous des femmes]



    Sillons
    Source






    [SILLONS DES DUNES SILLONS DES COUS DES FEMMES]



    Sillons des dunes sillons des cous des femmes l’une frotte sa paume graisse la peau et le sillon se perd dans l’épaule cachée ce n’est pas tout à fait l’été

    Un homme allongé dans les rochers noirs il attend il est encore dans sa nuit odorante et pourtant la lumière tire les rideaux la roche est découverte et restent ses pieds rouges crevassés sales les ongles jaunes striés sur le sable ils dépassent

    En haut de l’escalier certains écrasent le pied sur le bitume dans l’attente empressée la valse des pissotières l’un entre l’autre sort léger la jambe agile





    […]





    Près du port dans les étals du vide-grenier on voit des camées profils de femmes au nez aigu front dégagé boucles emprisonnées par la morsure d’un peigne comme je les aime ces femmes baignant dans un liquide corail nimbées d’un ovale majestueux pas le rond des vulgaires pièces de monnaie mais l’ovale des portraits qu’on garde tressautant près du cœur quand la course vous coupe le souffle et qu’il faut tenir le pendentif pour ne pas l’avoir claquant au menton ravi d’une promenade sautant par-dessus l’épaule

    L’un somnole déjà une fois le stand monté dans une chaise en toile imprimée de fleurs des tropiques hibiscus ou autres pétales flamboyants il croise ses bras et réchauffe ses mains à ses aisselles le nez dans son col comme un oiseau s’endort debout deux sourcils noirs et blancs surmontent ses yeux et semblent leur tenir chaud l’un se soulève pour laisser à l’œil tout le soin d’observer l’homme qui s’avance vers les corbeilles d’osier qui s’amoncellent sur le devant du stand tournées et retournées par des mains qui hésitent il met la main à la poche atteint de démangeaisons en laissant aller son regard au ciel à gauche et laisse quelques pièces dans une des corbeilles le sourcil s’abaisse en signe d’apaisement hiberne enfin

    Cling




    Laura Tirandaz, Sillons, Æncrages & Co, Collection Voix de chants, 2017, s.f. Linogravures de Judith Bordas.






    Laura Tirandaz  Sillons






    LAURA  TIRANDAZ


    Laura Tirandaz
    Source




    ■ Laura Tirandaz
    sur Terres de femmes

    Guayasamín (extrait de Signer les souvenirs)
    Signer les souvenirs (lecture de Philippe Leuckx)



    ■ Voir aussi ▼

    le blog de Laura Tirandaz
    → (sur le site des éditions Æncrages & Co)
    la fiche de l’éditeur sur Sillons
    → (sur lelitteraire.com)
    une lecture de Sillons par Jean-Paul Gavard-Perret
    le site de Judith Bordas



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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Christiane Veschambre | [Cela s’est passé lundi]



    [CELA S’EST PASSÉ LUNDI]



    (J’ai toujours gardé la petite boîte ovale en métal, avec une anse, où ma mère déposait le déjeuner de mon père avant que l’usine n’ouvre une cantine).

    Il mange et rouvre le carnet. Il écrit la suite du poème de la boîte d’allumettes, quelque chose dans les mots prend discrètement feu, secrètement.

    Le soir il rentre chez lui, dans sa petite maison, redresse en passant la boîte à lettres trop inclinée. Il y retrouve sa femme, elle est belle, elle a les cheveux noirs et la peau blanche, elle repeint, décore, tout dans la maison en noir et blanc. Aujourd’hui elle a orné les rideaux blancs de la fenêtre de cercles noirs de différentes tailles. Elle lui demande si ça lui plaît, il dit que oui.

    Il dit oui avec sérieux. Il dit oui à cette vivante. Plus tard, il sort avec le chien bouledogue. Il va au café, il laisse le chien devant après lui avoir dit de s’asseoir et de l’attendre, il boit une bière au comptoir, parle un peu avec le vieux barman noir, écoute les habitués, regarde les photos que le barman choisit d’accrocher au mur.

    Cela s’est passé lundi.



    Christiane Veschambre, Ils dorment, L’Antichambre du Préau, 2017, pp. 10-11. Gouache de Jacques Le Scanff.






    Christiane Veschambre  Ils dorment






    CHRISTIANE VESCHAMBRE


    Christiane Veschambre 2
    Ph. Olivier Roller
    Source





    ■ Christiane Veschambre
    sur Terres de femmes


    Basse langue (lecture d’AP)
    dit la femme dit l’enfant (lecture d’AP)
    [Nous sommes à l’intérieur du temps] (extrait de dit la femme dit l’enfant)
    Écrire Un caractère (lecture d’AP)
    [Écrire n’a pas d’objet] (extrait d’Écrire Un caractère)
    Une Hôtesse minuscule (extrait de Basse langue)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site de la mél, Maison des écrivains et de la littérature)
    une fiche bio-bibliographique sur Christiane Veschambre
    → (sur En attendant Nadeau)
    un entretien avec Christiane Veschambre, par Gérard Noiret



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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Florence Noël, L’Étrangère

    par Angèle Paoli

    Florence Noël, L’Étrangère,
    Bleu d’encre Éditions, 5500 Dinant (Belgique), 2017.
    Dessins de Sylvie Durbec.



    Lecture d’ Angèle Paoli



    EN ATTENDANT « LE VENT SEC/DES RÉDEMPTIONS »



    Elle est « L’Étrangère », si étrange être de poésie. Est-ce elle, est-ce une autre ? Elle, c’est Florence Noël, poète. L’autre, c’est L’Étrangère. Celle qui n’existe que dans les « entailles » où elle trouve asile. L’autre, c’est la poète.

    Les poèmes, que Florence Noël voudrait « secs », ne le sont pas vraiment, du moins pas tout à fait. Tout au plus sont-ils menus, économes en mots, friands de brièveté. C’est sa manière à « elle » d’exister, sans excès ni débordements, sans lyrisme incongru. Pour ne pas « inexister », « elle » écrit, et pour écrire, « elle » se cherche des points d’étayage, des encrages amis. Elle, Florence Noël. Les poètes qu’elle convoque ont pour nom Emily Dickinson, Geneviève d’Hoop, José Saramago. Et d’autres encore. Ils ont aussi pour nom Marc Claude et Sylvie. C’est à eux qu’est dédié ce recueil : L’Étrangère. Il y a aussi des morts anonymes à ses côtés, en une proximité singulière :

    « parfois

    je séjourne comme

    les morts

    la tête obstinément fixée vers un ciel

    alors animé

    d’astres vertigineux

    d’autres fois

    je m’essaye à rester debout »

    Ainsi sommes-nous invités à accompagner la poète dans son univers. Et l’on sent bien qu’il faut peser ses mots. En dire trop ne peut convenir. Mieux vaut opter pour la brièveté tout en s’offrant quelques gambades, comme le suggèrent les dessins de Sylvie Durbec qui ponctuent le recueil de leur fantaisie. Légèreté, drôlerie, humour. De quoi jouer les funambules entre les mots, entre ces « riens qui la rendaient/partout/étrangère ». Se glisser à son tour dans la faille entrouverte sur « la liturgie des malheurs ».

    L’Étrangère (ou son double poète) a une écriture étrange. Je ne suis pas sûre d’en cerner toutes les subtilités, toutes les nuances, tant celle-ci surprend. Ce que je pressens, c’est la souffrance, la douleur. Mais de quoi souffre-t-elle ? Du manque d’amour ou du trop d’amour ? Ou du trop d’imperfection dans l’amour ?

    « je vous écris

    d’entre les lèvres d’une blessure », confie-t-elle.

    Ailleurs, elle s’interroge :

    « — comment aimer

    sans l’aune de la perte — »

    Et la poète de poursuivre, dans le même poème :

    « si j’y vais

    ce ne sera pas sans

    ce sac épais

    d’os et de larmes

    ma boiterie les sanglots longs

    et ce regard perdu

    que tu m’offris un jour

    en guise d’alliance »

    On le voit, on croise au passage d’autres amis, notamment Jacob et sa « boiterie », héritage du combat nocturne avec l’Ange et signe de l’Alliance avec Dieu ; un Jacob laïcisé cependant en guise d’amant ; Verlaine aussi, et les « sanglots longs » de la « Chanson d’automne » ; ainsi que le compositeur et interprète israélien Asaf Avidan : My tunnels are long and dark these days. Le tragique est au cœur et la poète oscille entre mélancolie et tonalités plus austères.

    « L’Étrangère » voudrait faire d’elle un « poème possible ». Elle hante les morts et les fréquente. Sa poésie est vertigineuse car insaisissable, intraduisible avec les mots courants, les pensées ordinaires. Ses mots sont si simples, pourtant ! Mais ils disent un ailleurs inconnaissable, qu’elle seule semble pouvoir aborder. Le poème emprunte cependant, parfois, des phrases entendues dans la conversation courante, mais celles-ci n’en deviennent que plus singulières. D’autres fois, la poète évoque de lointaines comptines d’enfance. Ce que l’on peut dire, c’est que cette poésie se dérobe. Ses mots bercent en même temps qu’ils raniment d’anciennes blessures qui ne demandent qu’à affleurer. Une grande tristesse respire entre les pages, qui résistent, un peu rêches, un peu grenues au toucher. À l’identique des mots qui s’ébrouent pour confier au poème à la fois la blessure et cette soif d’absolu (qui en est peut-être l’une des composantes primordiales).

    Je feuillette à nouveau le recueil pour saisir les inflexions d’une voix, et voici ce qui s’offre à moi :

    « l’inflexion d’une main

    inconnue

    exécutant la danse

    qu’un rêve nous

    offrit »

    Plus loin, cette découverte interrogative incroyable d’où surgit le plaisir paradoxal :

    « c’est un peu fou d’inexister

    avec tant de ferveur

    de densité rêveuse

    ça doit être cela, ce sourire

    parfois »

    Le sourire, c’est celui du chat du Cheshire.

    Dans ce recueil, ce qui prédomine, c’est l’image de l’envers. La chute dans le vide, la catabase, tête première, mais aussi l’enroulement de l’écuyère ou de la trapéziste. Tant de mystère dans la poésie de L’Étrangère, tant de poésie indicible qui se déroule, encercle, enlève, enlove, ailleurs, au-delà, dans un univers qui n’existe peut-être que dans les rêves ou dans l’imaginaire poétique. Car elle est bien étrange celle qui se définit ainsi :

    « elle est une farce

    une anomalie »

    et qui plus loin écrit :

    « elle n’écrit que dans

    l’insondable tristesse

    ou l’insondable joie

    là ce qui n’a Nom

    réside

    amoureusement »

    Faut-il voir un zeugma entre « ce qui n’a nom » et ce qui tient à l’imprononçable ? Le Nom de Yahweh ? Tenter de donner une réponse transparente serait contraire à la vision et à la démarche de la poète, et à celle de la dessinatrice. Il faut donc se résoudre à suivre la ligne de la poète sans vouloir apporter de réponse tranchée :

    « et vous cherchiez encore

    quel sens

    lire par là »

    L’essentiel n’est-il pas de suivre les gués qui s’offrent en cours de chemin et de faire halte ? De prendre le temps de la méditation avant de poursuivre ?

    « dans l’écriture

    des choses brèves lui viennent

    inaugurant des ponts

    tendus entre embrasements

    et néants

    ces passerelles

    continuent à se balancer

    à l’aplomb des gouffres

    où mystères et indicible

    se disputent

    les dents des morts »

    En attendant « le vent sec/des rédemptions ». Ou peut-être cet « appel » qui ouvre sur l’espoir :

    « il reste des mots pour

    communier à l’allégresse »

    Riche d’échos auxquels nos esprits cartésiens sont devenus trop souvent insensibles, la poésie de L’Étrangère est une poésie troublante et exigeante. Imprégnée de spiritualité, de délicatesse et de douceur. Lente et extrême. Une poésie inspirée, une poésie des contrées hautes. Une anabase.



    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli






    Florence Noël  L'Etrangère  Bleu d'encre Editions  2017 4






    FLORENCE NOËL


    Florence Noël 3





    ■ Florence Noël
    sur Terres de femmes


    un entretien avec Florence Noël
    Sarabande (extrait de Branche d’acacia brassée par le vent)
    [parler de soi] (poème extrait de L’Étrangère)
    Initiation au crépuscule
    Solombre (lecture d’AP)
    [tu dis c’est l’heure jaune] (extrait de Solombre)
    [Donnez-nous des pierres] (Vases communicants)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    autant revivre en mon jardin






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  • Françoise Lison-Leroy, Le Temps tarmac

    par Philippe Leuckx

    Françoise Lison-Leroy, Le Temps tarmac,
    Rougerie éditeur, 87330 Mortemart, 2017.



    Lecture de Philippe Leuckx



    [JE REFERAI LE VOYAGE]




    Douzième livre de poèmes publié chez Rougerie par l’écrivain hainuyer (à côté d’une quarantaine d’autres édités par Luce Wilquin, L’Arbre à paroles, Esperluète, Tétras Lyre, La Bartavelle, Les Pierres, Cahiers Froissart, Unimuse, etc.) depuis Lieux tressoirs, ce Temps tarmac, constitué de sept sections, mesure combien il est tragique d’être aujourd’hui migrant. Les titres des parties disent assez la situation « barbelée », le statut « toujours un fugitif » de ces êtres bousculés d’une « rive » à l’autre de la vie.

    On sent, dans ces brefs poèmes, la pulsation, l’effroi, la peur, l’inconcevable « course en haleine », l’attente lente, longue d’un avenir jamais ouvert, clôturé de part en part.

    Que reste-t-il à « mâcher » quand tout a été pris ? Quand tout a été tenté en vain ?

    Il en a fallu des sentiers, des grilles, des sables à traverser pour en arriver là… et buter de nouveau contre de nouveaux remparts de sauvegarde.

    « Un camion vient

    un autre

    c’est la loi du dimanche

    Je n’ai pas de levier

    pour déborder la tôle »

    « Je n’ai pas froid

    pas la migraine

    ni droits

    ni faim

    rien qu’une part du paysage

    celle qui m’entre par les yeux »

    La langue de Françoise Lison-Leroy, tissée de vers courts, d’épithètes reconnaissables (« bec et ongles / nous creusons la tanière / le charnier tapageur »), serre en versets ou en proses courtes au phrasé coupé court lui aussi, la tension brusque imposée :

    « Une épave, deux lagunes, le feu mobile des goélands. Un œil et presque l’autre : la lutte me tient en bruine et en vaillance. Si quelqu’un vient, je tire du cil toute barrière. Si quelqu’un manque, je mendie son éveil. »

    Le temps, prisonnier du « tarmac » (quoique ce terme réducteur — selon Le Petit Robert : « Dans un aérodrome, partie réservée à la circulation et au stationnement des avions » — n’embrasse pas toutes les dimensions de traversée, de fugue, d’escarpement franchis par les migrants), boucle le voyage :

    « Et je referai le voyage

    vers le pays meurtri

    Les vagues rouleront à l’envers

    et les nuages

    auront cessé le guet

    Là-bas aussi

    la vie bat fort

    comme une poche

    d’air et d’urgence »

    Un livre qui furète en notre conscience et alerte chez nous et ailleurs. Alain Souchon, dès les années 1990, le disait très fort dans C’est déjà ça :

    « Je sais bien que rue d’Belleville

    rien n’est fait pour moi »

    ou

    « Soudan, mon Soudan,

    pour un air démocratique,

    on t’casse les dents ».

    D’aucuns ne semblent pas avoir compris la leçon. Françoise Lison-Leroy nous l’assène de ses vers coupants.



    Philippe Leuckx
    pour Terres de femmes
    D.R. Texte Philippe Leuckx






    Francoise Lison-Leroy  Le Temps tarmac







    FRANÇOISE LISON-LEROY


    Lisonleroyfrancoise
    Source




    ■ Voir aussi ▼

    le site de Françoise Lison-Leroy
    → (sur Le Carnet et les Instants)
    une lecture du Temps tarmac par Daniel Laroche





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  • Ronny Someck | Beaucoup de don Quichotte



    BEAUCOUP DE DON QUICHOTTE



    Beaucoup de don Quichotte sont en moi.
    Le premier voit de ses propres yeux les doigts d’un second
    dessiner la tête d’une femme
    sur un mur sorti de l’imagination.
    Quand il imagine un cheval, c’est un âne qu’il reçoit,
    au lieu du messie un battement d’ailes
    de moulins à vent.
    Le vent astique les toits des maisons,
    la parole coupe le vent.
    Le vent claque les volets de la fenêtre où se mire Dulcinée.
    Le sang de don Quichotte la dirige
    sur les lèvres de don Quichotte :
    elle enlève sa robe et s’évanouit
    comme un baiser.




    Ronny Someck, Le Piano ardent, Éditions Bruno Doucey, Collection Soleil noir, 2017, page 51. Traduit de l’hébreu par Michel Eckhard Elial.






    Ronny Someck  Le Piano ardent






    RONNY SOMECK


    Ronny_someck
    Source




    ■ Ronny Sonneck
    sur Terres de femmes

    Le Piano ardent (lecture de Marie-Hélène Prouteau)




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions Bruno Doucey)
    la fiche de l’éditeur sur Le Piano ardent
    → (sur le site agonia.net)
    un entretien avec Ronny Someck





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  • Bernard Chambaz | Ressac



    RESSAC




    I

    Image de neige
    sous de sombres et splendides marronniers
    vent de force 3
    classicisme
    Crier :
    Tout est trop tard


    II

    L’incohérence
    le tour de France à bicyclette
    le rire l’effroi l’azur Raymond Queneau


    III

    Ostie Verkhoiansk Tombouctou
    Nous sommes là :
    Comme une grue (jaune) remonte
    Des ossements de lune
    Enfouis plus dessous que la mer


    IV

    Dehors on entendait le couchant
    je t’aime
    hasard naufrage &
    le plus grand poème par-dessus bord
    jeté





    Bernard Chambaz, « Rumeur », & le plus grand poème par-dessus bord jeté, Seghers éd., Collection Poésie dirigée par Mathieu Bénézet et Bernard Delvaille, 1983, pp. 60-61, in Yves di Manno & Isabelle Garron, Un nouveau monde, Poésies en France. 1960-2010, Un passage anthologique, Éditions Flammarion, Collection Mille & une pages, 2017, pp. 897-898.






    Chambaz 2




    BERNARD  CHAMBAZ


    Bernard-chambaz





    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Encres vagabondes)
    un entretien avec Bernard Chambaz (propos recueillis par Brigitte Aubonnet, mai 2015)





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  • Denise Desautels, D’où surgit parfois un bras d’horizon

    par Angèle Paoli

    Denise Desautels, D’où surgit parfois un bras d’horizon,
    Inventaires 2012-2016,
    Éditions du Noroît, Collection Poésie, 2017.



    Lecture d’ Angèle Paoli



    « DIS OUI NOMBREUSE À VOIX VIOLENTE »



    Je regarde ce livre, je le déplace d’un lieu à un autre, je le déplace au gré des heures. Il m’accompagne et pourtant il m’effraie. Je sais que tôt ou tard, je vais m’immerger dans les pages et peut-être m’y noyer. À l’image de cette nageuse qui, sur la première de couverture, lutte désespérément. Contre la vague submergeante. Ce que je vois me happe, je m’en détourne, de peur de. Une femme se noie, une moitié du visage dans l’eau, l’autre encore hors de l’eau. Pour combien de temps ? Son œil dilaté sectionné par la vague dit l’effroi. De même sa bouche grande ouverte sur le cri. Des bulles d’eau remontent des profondeurs, qui asphyxient la nageuse. L’eau verte l’aspire. Pourtant elle lutte. Son bras droit tente l’effort ultime. La survie. Une larme s’échappe qui tombe rejoindre les bulles. Elle pleure. Loin derrière elle, une esquisse d’horizon. Devenu inaccessible. Ce qui surprend, c’est la cigarette qui pend des lèvres, hors de la bouche. La dernière bouffée du condamné avant sa disparition finale ? Peut-être.

    L’illustration de couverture est empruntée à une toile de Dana Schutz : Swimming, Smoking, Crying (2009). Titre du recueil : D’où surgit parfois un bras d’horizon. Celui-ci est signé Denise Desautels.

    Je lis et je relis. Je passe d’un « inventaire » à l’autre — il y en a quatre en tout —. J’avance dans un univers où domine le noir. La nuit. La mort. La mort de la nageuse peinte par Dana Schutz, mais aussi celle pour qui ont été écrits, en hommage à la poète Anne Hébert, les poèmes d’« Inventaire I », rassemblés sous l’intitulé : « Une petite morte s’est couchée en travers de la porte. » « Obsédante petite morte qui se joue des pronoms. » Une manière sans doute pour Denise Desautels de se mettre à l’écoute du drame intime de l’autre, de partager la terreur qui en émane et qui renvoie à d’autres terreurs, personnelles celles-là. S’il y a une douleur que toutes les femmes peuvent comprendre et s’approprier, c’est bien celle de la perte d’un enfant. « À chacune sa petite morte rebelle », écrit Denise Desautels. Ou encore : « À chacune — vue de face — la terreur de toutes… ».

    Des drames intimes de chacune aux douleurs de toutes. Du particulier à l’universel. De l’individuel à l’« humain ». Vertige abyssal. Qui porte avec lui, dans son flot incontrôlable, ce « fracas » permanent que le mot « fait dans la tête ». Ce lot de questionnements insolubles qu’il convoie et charrie, avec les mêmes heurts, les mêmes incompréhensions. Avec cette interrogation personnelle lancinante :

    « Au seuil de soi où est-ce. Où est-on.

    Où bouge l’autre. Et jusqu’où. »

    Denise Desautels est de ces femmes qui vibrent à l’unisson de toutes les autres femmes, dans la même colère, dans le même effroi, dans la même souffrance. Dans le même parti pris féminin.

    « À chacune tous les continents

    une infinitive colère se hisse.

    S’ouvre.

    Où désobéir.

    Où partir.

    Sans mort à nos trousses. »

    Écrire, pour crier ce qui meurtrit. Ce qui enrage. Lutter contre « l’effroi de la vie » qui submerge, de la vie qui anéantit.

    Les « Inventaires » sont au nombre de quatre. Quatre inventaires, amples, diversifiés, numérotés et encadrés par deux dates : février/octobre. Deux mois butoirs, rédigés, en italiques, à la manière d’un journal. Il y a bien aussi (en sous-partie d’« Inventaires IV ») des « Inventaires des odeurs », isolés, avec leur crescendo de tragédies, nombre de morts et dates.

    En février 2012, la poète cherche l’élan. La force de se régénérer quand le manque obsède. Celui-là même qui catalyse tous les manques. Et draine toutes les absences. Tenace, le manque originel. Qui fouaille jusqu’à l’os. Quelque chose de l’enfance meurtrie refait surface « surdité et sauvagerie maternelles. »

    « Il aurait fallu […] Que se liguent tôt sur la paroi du maigre muscle de famille espoir pensée élan et langue. Que j’acquière tôt l’habitude d’être vivante. »

    Comment trouver le désir lorsqu’il faut continûment chaque matin, jour après jour, « aborder la douleur » ? La nécessaire plongée dans le gouffre côtoie l’appel au secours :

    « Viens, accompagne-moi, sauve-moi. »

    Face à l’obsédant déchirement engendré par le chaos perpétuel, et malgré les efforts entrepris pour s’en dégager, « le poème pleure ». Et « les mots ne prennent plus ». De ce terrible constat, il s’ensuit cet appel :

    « Vois vacillants mes mots par l’excès graves tordus cassés vaincus. »

    Et cet aveu :

    « Une nouvelle mort dépossède ma langue. »

    En octobre 2013, « l’inconsolable insomniaque » continue de ne voir que la nuit. Comment faire pour « [é]chapper au ressassement de l’obscur » ? s’interroge la poète. Comment supporter et affronter « l’immense pourquoi » ? La réponse émerge dans les mots de Louise Dupré, une réponse encourageante, consolatrice, qui dit la confiance :

    « Il y a longtemps que tu penses noir, que tu vois noir, que tu parles noir en plein soleil. La nature humaine est incurable, tu le sais depuis longtemps, tu es nombreuse en ta solitude, ce n’est pas une consolation, tout au plus un constat. Tu n’as pas fini de compter les chaises vides autour de toi et tu les observes du coin de l’œil en jurant que tu ne t’y assoiras pas. C’est debout que tu veux t’habiter, debout parmi les vivants. »

    C’est sur ces mots parégoriques, apaisants que se clôt le recueil de Denise Desautels.

    La traversée poétique du recueil se fait sur quatre années (2012-2016) et sur plusieurs épisodes. Chacun de ces « inventaires » est explicité par un sous-titre qui en donne la coloration spécifique : « la mémoire/l’oubli » ; « la résistance/la colère » ; « le désir /la douleur » ; « la vie/le vieillissement/l’apocalypse /l’art ».

    Nombreux sont les indices textuels du paratexte qui disent la violence qui malmène l’âme en perdition, et qui la conduisent vers la nuit. Ainsi des nombreuses citations, exergues (mais pas seulement), qui ponctuent les poèmes. Ils constituent à eux seuls des textes à part entière. Ils sont autant de jalons, d’appuis, de repères que Denise Desautels arrime, au fur et à mesure, tout au long de son cheminement poétique. On y croise nombre de poètes québécois, connus, mais bien d’autres poètes encore, venus d’ailleurs, Anise Koltz, Alejandra Pizarnik, Emily Dickinson, Tita Reut, Christa Wolf, Yves Bonnefoy, Rainer Maria Rilke, Fernando Pessoa… Pour n’en citer que quelques-uns. Mais les thématiques qui les réunissent dans la toile tissée par la poète, sont les mêmes. Elles reprennent en écho ce qu’énonce ou que dénonce Denise Desautels. Ainsi des textes en prose de « Pour dire nous voici » — Inventaire II, la résistance, la colère — : l’exergue emprunté à Nicole Brossard donne le ton :

    « À quoi ressemble une colère amplifiée de pluriel féminin ? »

    Et Denise Desautels de reprendre à la suite : « Dis oui nombreuse à voix violente » ou encore : « Nous seins nus pour dire non pour dire nous voici. »

    Et de clore par ces mots exaltés qui disent la révolte et l’unisson dans la révolte :

    « Nous toi tes camarades dans le même cœur menacé avec nos corps nos morts nos désordres distincts. Nous en spirale planétaires pour penser nid d’espérance. Le poids réel de notre cœur menacé ajusté à la haute résonance des livres. »

    La douleur qui habite la poète est polymorphe. Inassouvissable, elle se nourrit de sa propre monstrueuse « humanité ».

    « Ça flirte parfois avec l’insensé. Ai déjà moi-même soulevé carnage levé main poing poignard. Aurais pu aller loin loin. Grâce à cette panoplie de monstres en moi — qui fouillent partout jusqu’à la pointe des os. Émeute, mugissement. Solidaire par tous mes pores.
    C’est fou à lier ou rien du tout ou simplement humaine —
    Le suis-je encore. Avec ou sans camisole. »

    Polymorphe également, l’écriture pour dire cette douleur, pour la traquer et la cerner. Une écriture au vitriol. Pour dénoncer les vies saccagées, les os dépecés. Dense serrée, nourrie de la douleur multiple d’autrui, artistes surtout, poètes, et femmes, l’écriture de Denise Desautels est un cri. Tantôt saccadé, heurté, brisé ; tantôt fluent comme l’eau qui enserre le naufrage. Le cri est partout. Que domine d’emblée celui de Munch, entraînant à sa suite bien d’autres cris. Ceux de l’artiste belge Berlinde de B[ruyckere] et ces « arbres-corps tombés blessés pansés » ou encore ce « tas de chair » de la voix de Geneviève Blais, « ces sons de gorge mal accordée/ de gorge éraillée un bruit d’animal à l’abattoir ». Œuvres majeures avec lesquelles Denise Desautels a établi un lien indéfectible. Un apparentement :

    « On transmigre. On se rapproche du fond. C’est vacarme en nous filles et mères humaines face à l’autre océan. Doigts bras grilles — appelant on dirait. Plateforme de caresses soudain mobilisées. En attente. D’être sauvées. Ta voix cogne. Toi. Moi. Nos complots d’éclopées. Un long mur de ronces penche. Avant même notre première rencontre. La forêt ne tient plus — qui la réparera. »

    Pourtant, çà et là, parmi les décombres et l’encagement, surgissent une lueur, un éclair de tendresse.

    Ainsi, dans ces quelques vers extraits du dernier poème dédié à Hélène Monette :

    « pourtant nous veille

    rêve

    dis viens poème

    petite paix »

    Et puis, ces vers clairsemés, sans pareil, de la « faiseuse de poèmes » :

    « Il neige inconditionnellement. »

    « Vivre. Irrésistiblement vaste. »

    « Nous ne sommes pas celles que nous sommes. »

    « Je perds un monde chaque jour. »

    Et tant d’autres vers à méditer en silence, dans le silence, soulevés par la voix puissante de Denise Desautels.



    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli







    Denise Desautels  D'où surgit parfois un bras d'horizon





    DENISE DESAUTELS


    Denise-desautels
    Ph. Rémy Boily
    Source





    ■ Denise Desautels
    sur Terres de femmes

    Pour dire nous voici (extrait de D’où surgit parfois un bras d’horizon)
    [ça dit grand] (poème extrait de L’Angle noir de la joie)
    La dernière rivière (autre poème extrait de L’Angle noir de la joie)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de Dimedia)
    une fiche sur D’où surgit parfois un bras d’horizon
    → (sur Recours au Poème)
    Denise Desautels : La Dame en noir de la poésie québécoise, par Marilyne Bertoncini
    → (sur le site de la Mél [Maison des écrivains et de la littérature])
    une fiche bio-bibliographique sur Denise Desautels
    → (sur Mediapart)
    « Denise Desautels ou la résistance à l’écriture », par Pascal Maillard





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  • Ronny Someck, Le Piano ardent

    par Marie-Hélène Prouteau

    Ronny Someck, Le Piano ardent,
    Éditions Bruno Doucey, Collection Soleil noir, 2017.
    Traduit de l’hébreu par Michel Eckhard Elial.



    Lecture de Marie-Hélène Prouteau


    Ronny Someck est un poète israélien, né en 1951 à Bagdad dans une famille juive d’Irak. Son œuvre reconnue par différents prix (Prix Yehuda-Amichaï pour la poésie hébraïque [2005], Prix de poésie Hans-Berghhuis 2006 dans le cadre du Festival international « Les Nuits de la Poésie » de Maastricht, Pays-Bas), traduite en plusieurs langues, fait de lui l’une des grandes voix de la poésie israélienne d’aujourd’hui. Il nous offre dans le recueil bilingue (hébreu et français) Le Piano ardent, une suite de soixante poèmes courts.

    Le titre est celui du quatrième poème, écrit à la mémoire du jeune pianiste Matiah Eckhard, le fils disparu (à l’âge de dix-neuf ans, en janvier 2014) de son traducteur français. Malgré cet arrière-plan douloureux, ce poème donne le ton à l’ensemble du recueil qui partout suit un chemin onirique, libératoire :

    « Éloignez les nuages

    dirigez le projecteur du soleil

    sur le moment de la rencontre entre

    les doigts de Matiah

    et les touches du clavier ardent

    en haut des marches du jardin d’Eden. »

    Ce pouvoir du rêve et de l’imaginaire d’alléger le réel se nourrit de la diversité des thèmes, tels l’enfance, celle de sa fille comme celle du poète, la paternité, la femme aimée, la culture populaire, le jazz, l’amitié.

    Ancrée dans le réel — les attentats, la guerre, le racisme pointent à l’horizon du vers, sans que le poète s’y appesantisse —, sa poésie reste pourtant infiniment ouverte au rêve, à la fantaisie, à l’humour. Ainsi, ce « Poème du bonheur » :

    « Nous sommes posés sur le gâteau

    comme des figurines de mariés

    quand le couteau tranchera

    essayons de rester sur la même tranche ».

    Il y a dans cette écriture de l’allant et de l’énergie vitale qui donnent au lecteur le plaisir de voir s’élargir le monde : on surprend le poète à écrire une lettre à Marcel Proust ou à la poétesse Léa Goldberg. Pour cadeau à sa fille, il rêve d’acheter des terres sur la Lune plutôt que dans les territoires occupés. Il fait se croiser dans ses vers Marilyn Monroe, la chanteuse Oum Kalsoum, Don Quichotte et le joueur de football Lionel Messi.

    Autant de rencontres d’apparence incongrue qui ont ce pouvoir d’abolir les murs, qu’ils soient d’espace, de temps ou de langue, si présents dans ce Moyen-Orient d’aujourd’hui. À l’image de ce traité de paix merveilleux, conclu en toute innocence par des gamins, dont la petite-fille du poète, qui jouent avec les enfants des écrivains arabes invités à un séminaire de poésie.

    Comment ne pas être frappé par l’héritage universel qui est celui du poète ? L’Orient est là avec les grands legs, ceux de la Bible, ceux de la Perse, où vient brutalement cogner le vif du présent :

    « à cause de Bagdad je suis de la tribu de ceux qui sont nés

    dans la ville des Mille et Une nuits,

    et, à cause d’une nuit d’octobre 73 je suis parfois

    suspendu à la tribu du trait d’union qui existe

    entre les mots « choc » et « bombe ».

    Familier conjointement d’autres rivages de l’imagination, Ronny Someck se décrit ainsi dans une interview : « Je suis un soldat dans l’armée de Rimbaud, un oiseau dans le ciel de Prévert, je salue René Char, mais le poète avec qui je communique par l’écriture, c’est Max Jacob ». Héritage, alliage singulièrement croisés.

    Le poème a ainsi la capacité de se faire lieu d’échanges où, par les mots, se tissent des passerelles avec des poètes tels que le poète juif Bialik, le Syrien Adonis, les Palestiniens Mahmoud Darwich, Samih al-Qâssim et Mohammed Hamza Ghanayem. Il s’agit de dire, sans fioritures ni grande déclaration, ces petites choses qui créent un terreau commun entre les êtres. Là, une parole de fraternité, ici, le salut amical aux couleurs du drapeau de Palestine qui, sur un mode faussement léger, déjoue les pesanteurs du monde :

    « Allons-y, qu’ils aient enfin leur État

    et rendez le vert à la terre

    le blanc à la chemise des fêtes,

    le noir au café

    et le rouge du désir aux lèvres des jolies filles,

    venues à Ramallah pour le concours de Miss Palestine

    qui a été annulé »

    Le parti-pris de cette poésie empreinte d’humour et de générosité fait pièce à la violence, tant dans ses images d’aujourd’hui que dans celles de ce passé qu’évoque le magnifique poème « Buchenwald : Un mot s’est échappé ». Ronny Someck est le poète en situation, facétieux et curieux de tout ce qui fait l’humain, à la manière du poète Prévert qu’il admire. Celui qui se définit comme « un cow-boy de la poésie » regarde le monde, la main posée sur le revolver du poème. La fantaisie comme arme suprême.

    C’est la force d’écriture de ce poète que de nous emporter dans l’espace décalé de son imaginaire, de nous y faire découvrir un monde redevenu habitable par son insolite beauté.



    Marie-Hélène Prouteau
    D.R. Marie-Hélène Prouteau
    pour Terres de femmes







    Ronny Someck  Le Piano ardent






    RONNY SOMECK


    Ronny_someck
    Source




    ■ Ronny Sonneck
    sur Terres de femmes

    Beaucoup de don Quichotte (extrait du Piano ardent)




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions Bruno Doucey)
    la fiche de l’éditeur sur Le Piano ardent
    → (sur le site agonia.net)
    un entretien avec Ronny Someck




    ■ Autres chroniques et lectures (25) de Marie-Hélène Prouteau
    sur Terres de femmes

    Chambre d’enfant gris tristesse
    La croisière immobile
    Anne Bihan, Ton ventre est l’océan
    Jean-Claude Caër, Alaska
    Jean-Louis Coatrieux, Alejo Carpentier, De la Bretagne à Cuba
    Marie-Josée Christien, Affolement du sang
    Yves Elléouët, Dans un pays de lointaine mémoire
    Guénane, Atacama
    Luce Guilbaud ou la traversée de l’intime
    Cécile Guivarch, mots et mémoire en double
    Denis Heudré, sèmes semés
    Jacques Josse, Liscorno
    Martine-Gabrielle Konorski, Instant de Terres
    Ève de Laudec & Bruno Toffano, Ainsi font…
    Jean-François Mathé, Prendre et perdre
    Philippe Mathy, l’ombre portée de la mélancolie
    Monsieur Mandela, Poèmes réunis par Paul Dakeyo
    Daniel Morvan, Lucia Antonia, funambule
    Daniel Morvan, L’Orgue du Sonnenberg
    Yves Namur, Les Lèvres et la Soif
    Jacqueline Saint-Jean ou l’aventure d’être au monde en poésie
    Dominique Sampiero, Chante-perce
    Dominique Sampiero, Où vont les robes la nuit
    Pierre Tanguy, Ma fille au ventre rond
    Pierre Tanguy, Michel Remaud, Ici même





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  • Marilyne Bertoncini | Sable (extrait)



    SABLE
    (extrait)




    La dune mime l’océan
    les nuages y dessinent de fuyants paysages
    dont l’image s’épuise dans l’onde vagabonde
    d’un récit ineffable

    et femme Sable nage dans le ciel des centaures
    à l’envers
    où sa robe poudreuse ondoie dans les nuages

    sa bouche ouverte dans le sable
    crache la cendre des mots
    flocons arrachés au silence

    dans la mer où

    peut-être

    puis se noie ou se perd en rumeur indistincte

    Commencements




    Marilyne Bertoncini, « Sable » (extrait d’un travail inédit) in Phoenix, Cahiers littéraires internationaux, « Partage des voix », numéro 27, 2017, page 57.




    MARILYNE  BERTONCINI


    Bertoncini
    Source




    ■ Marilyne Bertoncini
    sur Terres de femmes


    À l’ombre du mûrier (extrait de L’Anneau de Chillida)
    La Dernière Œuvre de Phidias (lecture d’AP)
    [Ici… Là] (extrait de La Dernière Œuvre de Phidias)
    Labyrinthe des nuits (lecture d’AP)
    Mémoire vive des replis (lecture de Sophie Brassart)
    [En nageant jusqu’au bout de ton rêve] (extrait de Mémoire vive des replis)
    [Je l’imagine] (extrait de La Noyée d’Onagawa)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site de la mél [Maison des écrivains et de la littérature])
    une fiche bio-bibliographique sur Marilyne Bertoncini
    → (sur Recours au poème)
    plusieurs pages sur Marilyne Bertoncini
    Minotaur/a, le blog de Marilyne Bertoncini





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