Étiquette : 2018


  • Odile Massé | [Il fait chaud]




    [IL FAIT CHAUD]




    Il fait chaud.

    Contre les marches où il n’y a plus d’ombre, près des graviers éclatants de blancheur, les insectes crissent et rampent. Je transpire. Je ne bouge pas. Je respire à petits coups l’air brûlant qui déchire mes poumons, j’écoute les oiseaux.

    Je les laisse approcher.

    Je pense à l’hiver, aux corneilles qui craillent et corbinent par centaines à la tombée du jour, au bois qui craque dans les grands arbres, aux appels affolés des étourneaux qui peuplent les branches sombres. Le parc est immense. Les gens marchent à pas pressés en remontant leur col, quelques enfants se roulent dans les tas de feuilles sèches (pour ma part, je préfère m’y coucher à l’automne, quand elles sont encore souples, odorantes, accueillantes au poids de mon corps qui s’apaise dans leur bruissement d’ailes répandues), il y a près du zoo tous les âpres fumets des fauves que j’évite d’approcher tant ils ressemblent à ceux du chenil, et dans les allées je marche sans bruit. Je m’assieds sur un banc, réchauffe mes doigts gourds dans le fond de mes poches, j’écoute les oiseaux. J’oublie le sang, la maison, les rires d’elle avec ses bêtes, j’oublie comme il fait sombre dans la boutique et comme j’ai envie, souvent, de poser mes mains sur le tissu frémissant de sa jupe, j’oublie les frôlements que j’ai osés dans le couloir, l’escalier, l’encadrement d’une porte, mon ventre glissant le long de ses hanches et tentant de s’y attarder, se frottant et pressant contre son corps, l’odeur de ses cheveux, de sa peau que je regardais transpirer près de moi, mes doigts soudain touchant sa taille ou s’enfonçant entre nous dans l’épaisseur de sa poitrine, et les fourmillements dans mes jambes tandis qu’ainsi je m’appuyais et pesais contre elle qui se dégageait— tout s’éloigne, ma chair se calme, je m’allonge dans le froid crissant, j’écoute les oiseaux dont les cris transpercent l’air et ma tête, j’attends. J’attends qu’enfin piaulent et pépient les petits dans les buissons, j’attends d’être envahi par les roucoulements, les gloussements, les gazouillis des oiseaux revenus, d’entendre dans leurs cages brailler les paons et jaser les perroquets, d’écouter près du bassin le cancanement des cygnes et sous les toits le gémissement des tourterelles, plus forts que tous les grognements des chiens et qui me fait oublier les crocs et les langues chaudes des bêtes, dans la touffeur qui s’étend — j’attends, couché sur mon banc, de retrouver l’émoi joyeux de tout cela qui siffle, caquette, turlute, babille, trisse et jacte, et chuchète, appelle, flûte, chante, trille, pleure, s’empare de l’espace, vole, gratte, bat des ailes et creuse avec son bec, change, bouge, sautille, pique dans le vide, s’évade, plonge, frôle les feuillages, se repose et flotte contre l’air et me regarde de profil, toujours, avec son œil fixe et vaguement méprisant.

    J’attends les soirs d’été, les crépuscules interminables où le ciel verdissant monte entre les toits de tuiles, où je m’assieds comme aujourd’hui près du calvaire, au-dessus de la ville.

    Là, tout s’apaise.

    L’air devient fluide, les martinets y tracent leurs envols ; j’écoute les bruissements des vents du soir. Je touche les pierres encore chaudes de la chaleur du jour, je m’évade loin de la maison où mastiquent les chiens en cadence, où elle mâche bouche ouverte et m’attend sans impatience, sachant qu’avec la nuit, comme les femmes aux lèvres rouges montent dans l’ombre autour de moi, je m’enfuirai vers la maison pour cacher ma tête entre ses bras.




    Odile Massé, L’Envol du guetteur, L’Atelier contemporain, François-Marie Deyrolle éditeur, 2018, pp. 78-79-80. Dessins de Christine Sefolosha. Lecture de Claude Louis-Combet.






    Odile Massé  L’Envol du guetteur  Éditions L'Atelier contemporain





    ODILE  MASSÉ


    Odile Massé
    Source




    ■ Odile Massé
    sur Terres de femmes

    Sortir du trou (extrait)




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de la mél, Maison des écrivain et de la littérature)
    une notice bio-bibliographique sur Odile Massé
    → (sur le site des éditions L’Atelier contemporain)
    la fiche de l’éditeur sur L’Envol du guetteur d’Odile Massé





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  • Fernando Pessoa | [Ce soir l’orage a roulé]



    [CE SOIR L’ORAGE A ROULÉ]




    Ce soir l’orage a roulé,
    Tombant sur des versants du ciel
    Comme un énorme bloc de pierre…

    Comme si quelqu’un du haut d’une fenêtre
    Secouait une nappe,
    Et que les miettes tombant toutes ensemble,
    Faisaient un certain bruit dans leur chute ;
    La pluie crépitait par terre
    Obscurcissant les chemins…

    Tandis que les éclairs ébranlaient l’espace
    Et secouaient l’air
    Comme une grande tête qui dirait non,
    Je ne sais pas pourquoi — je n’avais pas peur —
    Je me suis mis à prier sainte Barbe
    Comme si j’étais la vieille tante de quelqu’un…

    Mais c’est qu’à prier sainte Barbe
    Je me suis senti encore plus simple
    Que je ne pensais l’être…
    Je me sentais familial et casanier
    Ayant passé ma vie
    À écouter tranquillement ma bouilloire ;
    Au côté de parents plus âgés que moi
    Comme si c’était pour moi une façon de fleurir…

    Je me sentais quelqu’un qui pouvait croire en sainte Barbe…
    Ah, pouvoir croire en sainte Barbe !

    (Qui croit en sainte Barbe,
    Pensera que c’est quelqu’un de visible
    Sinon que peut-il penser d’elle ?)

    (Quel artifice ! Que savent
    Les fleurs, les arbres et les troupeaux
    De sainte Barbe ?… Une branche d’arbre,
    Si elle pensait, ne pourrait jamais
    Construire ni des saints ni des anges…
    Elle pourrait penser que le Soleil
    Éclaire et que le tonnerre
    Est un vacarme soudain
    Qui naît avec la lumière.
    Ah, comme les hommes les plus simples
    Paraissent malades, confus et stupides
    Face à la lumineuse simplicité
    Et à la force d’exister
    Des arbres et des plantes !)

    Et moi, pensant à tout cela,
    Je me retrouvais moins heureux une fois de plus…
    Sombre, mélancolique et malade
    Comme un jour où l’orage a menacé
    Sans jamais venir, même la nuit tombée…


    mars 1914




    Fernando Pessoa, Le Gardeur de troupeaux, IV, poème d’Alberto Caeiro, avec des variantes inédites, Éditions Unes, 2018, s.f. Nouvelle traduction du portugais par Jean-Louis Giovannoni, Rémy Hourcade et Fabienne Vallin.






    Fernando Pessoa  Le Gardeur de troupeaux




    FERNANDO PESSOA




    Vignette Pessoa
    Vignette de Almada Negreiros
    (D.R. éditions Unes)





    ■ Fernando Pessoa
    sur Terres de femmes

    [Hommes de barre !] (extrait d’Ode maritime)
    Sous un ciel bas et sombre
    Ulysse
    13 juin 1888 | Naissance de Fernando Pessoa
    13 juin 1930
    14 septembre 1931
    29 janvier 1932
    11 juin 1932
    26 mars 1934 | Fernando Pessoa, Les Îles Fortunées



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions Unes)
    la fiche de l’éditeur sur la nouvelle traduction du Gardeur de troupeaux de Fernando Pessoa





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  • Jean-François Mathé | [J’aurais voulu dire | et je n’ai pas dit]



    [J’AURAIS VOULU DIRE | ET JE N’AI PAS DIT]




    J’aurais voulu dire
    et je n’ai pas dit.

    Il y a du sable dans le temps
    qui retarde mes mots
    comme celui des flancs de dune
    retarde les pas.

    Cette nuit d’hiver,
    c’est encore du silence
    que tu auras à traverser
    pour me retrouver.

    Et je ne sais pas si le ciel,
    tombé d’entre les étoiles sur la maison,
    m’a laissé un peu de leur lumière
    pour te guider.




    Jean-François Mathé, Prendre et perdre, éditions Rougerie, 2018, page 45.






    Jean-François Mathé  Prendre et perdre




    JEAN-FRANCOIS MATHÉ


    JF-Mathe
    Source




    ■ Jean-François Mathé
    sur Terres de femmes

    Vu, vécu, approuvé. (lecture d’AP)
    [J’ai demandé à l’horizon] (extrait de Vu, vécu, approuvé.)
    Prendre et perdre (lecture de Marie-Hélène Prouteau)
    [Il aurait mieux valu] (extrait de Retenu par ce qui s’en va)
    Retenu par ce qui s’en va (lecture d’Isabelle Lévesque)
    [Je me défais des songes] (extrait du Temps par moments)
    [Ce qui a le moins pesé] (extrait de La Vie atteinte)
    [Le paysage né de la dernière pluie] (autre extrait de La Vie atteinte)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de la mél, Maison des écrivains et de la littérature)
    une fiche bio-bibliographique sur Jean-François Mathé
    → (sur Recours au Poème)
    un entretien de Gwen Garnier-Duguy avec Jean-François Mathé





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  • Sylvie Fabre G. | Lettre des neiges éternelles




    LETTRE DES NEIGES ÉTERNELLES





    À Valérie Rouzeau





    Quand je me deux dans ton pays, je sens très bien qu’il est aussi un peu à tous, même si La poésie c’est pas donné à tout le monde, toi tu nous l’offres et nous embarques à la rencontre de nos visages traversiers, de leurs paroles muettes, sonores comme l’esprit et la matière. Va où la vie, qui va qui vient, on ne sait d’où, on ne sait où, sauf que la mort l’accompagne dans la mémoire de la terre et la danse de la langue. Dessus dessous de ta voix occupée à chercher la direction et le sens au rythme syncopé de la marche, mots et mains jouant sur tes pages. En un seul corps, plusieurs cœurs et leur tempo, tu fais entendre le rossignol de l’amour et les canons de la douleur.

    Selon l’état qui t’étreint, selon les ères et la saison, tu te meus et t’émeus, et on avance à tes côtés, montée, descente et remontée, tu parcours des années-lumière pour t’arrêter quelques secondes dans un poème. On y sent la poussière d’étoiles qui nous constitue, toute la nuit qui nous emporte lustres après lustres, feu, silence et mystère dans la création et le passage du vivant. Ton écriture n’oublie ni le poids des choses, ni la dignité des êtres, ni le pourquoi qu’on ne peut dire et qui si fort hante nos mots. Dans tes livres on ressent tous les possibles et mal possibles bonheurs des jours, toutes les catastrophes, annoncées ou pas. Il y a aussi qui les traverse cette toute petite fille, l’espérance, elle tient par la main la beauté de l’univers, la fidélité des bêtes et attend des hommes la bonté, contrée étrange où tout se tait, comme te l’a soufflé un poète.

    Il est quelle heure, je suis heureuse, il y a un arbre / La guerre, le nucléaire, il y a un arbre / Un arbre, un arbre, voyageur impeccable… À l’instant du souvenir, de la contemplation et de l’écriture, le monde et le temps féroces s’oublient, reste l’ouverture de qui aime et voudrait être aimée. Tu remercies ainsi l’ami perçu au doux fond du ciel, il te ressemble car lui aussi, par gros temps, le nombre des cumulus, la force contraire des vents bien souvent le font ployer ou reculer mais non rompre sous la menace.

    Chutes de moral ou de vers : tu erres au centre des cités énormes, dans leurs rues aux cris d’éclopés, où les mendiants, les sans-logis, les mal ou pas du tout payés n’arrêtent guère les urbains pressés vers les entreprises, les commerces, puis les transports. On y entend les discours de haine, les paroles du mépris qui attaquent en toi la vie. Le vert rouille sur l’impassibilité de la pierre ou dans la violence de l’hiver. Poète et femme, femme et poète, tu es étourdie de tant d’injustices et de mochetés. Menu flocon parmi les autres qui n’en peuvent mais, d’empathies en chamboulements, Neige rien que tes vers pauvres pour témoigner, parce que tu n’es bonne qu’à ça et pas fichue d’interrompre en toi la rumeur silencieuse de la plainte ou de la révolte.

    Le monde, sa ritournelle, ses ténèbres et son néant, pratique avec toi le télescopage et le broyage. Un pied dans la vie et l’autre dans la mort, grand écart avec compactage du réel, des joies et des déchirures. L’enfance a tous les âges, elle ferraille en nous, jeunes et vieux. Elle mène aussi la course contre le perdu. Un visage naît, brille puis disparaît et c’est si dur. A l’azur blessé / de plus jamais plus, les absents règnent, père mort ou amant parti, le chagrin en toi trouve sa place avec la mélancolie et tu sens ta solitude jusqu’aux ailes de ton nez. On cherche à jamais les cœurs dans les bouquets, anémones enchantées des ciels.

    Mais voilà qu’un jour encore tu t’extasies devant le chat et la fleur parfaite, ou pour le prince qu’on sort et l’enfant, merveilles de tes poèmes passés, présents et à venir. Ton cœur à toi, et le nôtre, n’ont-ils pas des veines pour la sève et des baumes pour la blessure ? Au cimetière tu trouves la paix, une forme de sérénité, dans tes rêves les mains toujours bonnes de l’aïeule et dans un train très auroral le petit gars solitaire aux yeux bleus qui partage les biscuits Lu de ton paquet puis s’endort, dans la simplicité d’exister là où la vie et l’autre vie sont sempiternellement humaines.




    Sylvie Fabre G., « La Vie réinventée (Lettres) » in La Maison sans vitres, éditions La passe du vent, 2018, pp. 82-83-84. Postface d’Angèle Paoli.






    Sylvie Fabre G.  La Maison sans vitres 2





    SYLVIE FABRE G.


    Sylvie Fabre G.





    ■ Sylvie Fabre G.
    sur Terres de femmes


    Piero, l’arbre (autre extrait de La Maison sans vitres)
    Retournement du chant [hommage à Maurice Benhamou] (autre extrait de La Maison sans vitres)
    Le rêveur d’espace [hommage à Claude Margat] (autre extrait de La Maison sans vitres)
    [À l’orée] (poème issu du recueil L’Intouchable)
    L’Approche infinie (note de lecture d’AP)
    Sylvie Fabre G. par Sylvie Fabre G. (auto-anthologie poétique comprenant plusieurs extraits de L’Approche infinie)
    [C’est un matin doux et amer](poème issu du recueil L’Autre Lumière)
    Trouver le mot (autre poème issu du recueil L’Autre Lumière)
    Dans l’attente d’un prolongement qui se meurt (note de lecture d’AP sur Corps subtil)
    Corps subtil (poème issu du recueil Corps subtil)
    La demande profonde
    Frère humain (note de lecture d’AP)
    Frère humain (note de lecture d’Isabelle Raviolo)
    [La pensée va, et vient à ce qui revient] (poème issu du recueil Frère humain)
    Celle qui n’était pas à sa fenêtre (extrait issu du recueil Le Génie des rencontres)
    L’Intouchable (note de lecture d’Isabelle Raviolo)
    Pays perdu d’avance (note de lecture d’AP)
    Quelque chose, quelqu’un (note de lecture d’AP)
    Tombées des lèvres (note de lecture d’AP)
    Tombées des lèvres (note de lecture d’Isabelle Raviolo)
    [Plus forte que la forêt] (poème issu du recueil Tombées des lèvres)
    [Bien sûr le chant s’apaise dans le soir] (poème issu du recueil La Vie secrète)
    Maison en quête d’orient (poème issu du recueil Les Yeux levés)
    Caroline Boidé, Les Impurs, par Sylvie Fabre G.
    Jean-Pierre Chambon, Le Petit Livre amer, par Sylvie Fabre G.
    Jean-Pierre Chambon, Tout venant, par Sylvie Fabre G.
    Jean-Pierre Chambon | Michaël Glück, Une motte de terre par Sylvie Fabre G.
    Patricia Cottron-Daubigné, Visage roman, par Sylvie Fabre G.
    Pierre Dhainaut, Après, par Sylvie Fabre G.
    Alain Freixe, Vers les riveraines, par Sylvie Fabre G.
    Emmanuel Merle, Ici en exil, par Sylvie Fabre G.
    Emmanuel Merle & Thierry Renard, La Chance d’un autre jour, Conversation (lecture de Sylvie Fabre G.)
    Angèle Paoli, Lauzes, par Sylvie Fabre G.
    Pierre Péju, Enfance obscure, par Sylvie Fabre G.
    Pierre Péju, L’État du ciel, par Sylvie Fabre G.
    Pierre Péju, L’Œil de la nuit, par Sylvie Fabre G.
    Fabrice Rebeyrolle, un peintre gardien du feu, par Sylvie Fabre G.
    Erwann Rougé, Passerelle, Carnet de mer, par Sylvie Fabre G.
    Roselyne Sibille, Entre les braises, par Sylvie Fabre G.
    Jean-Marie de Crozals & Sylvie Fabre G. | [La montagne bascule]
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    L’au-dehors
    → (dans les Chroniques de femmes)
    L’Amourier | Le Jardin de l’éditeur par Sylvie Fabre G.
    → (dans les Chroniques de femmes)
    Anne Slacik par Sylvie Fabre G. : Anne, la sourcière
    → (dans les Chroniques de femmes)
    Ludovic Degroote | Retisser la trame déchirée, par Sylvie Fabre G.
    → (dans les Chroniques de femmes)
    Une terre commune, deux voyages
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    le Portrait de Sylvie Fabre G. (+ poème issu du recueil L’Approche infinie)



    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions La passe du vent)
    la fiche de l’éditeur sur La Maison sans vitres de Sylvie Fabre G.






    VALÉRIE ROUZEAU

    Valérie Rouzeau- photo Michel Durigneux
    D.R. Ph. Michel Durigneux
    Source




    ■ Valérie Rouzeau
    sur Terres de femmes

    [J’aime aller dans la rue avec en tête un chant] (extrait de Sens averse)
    une fiche bio-bibliographique sur Valérie Rouzeau
    À me bercer (extrait de Va où)
    Nous nous serions perdus (poème de jeunesse)
    Oie rêve à l’azur (note de lecture d’AP sur Apothicaria)
    25 décembre | Valérie Rouzeau, Quand je me deux
    Quand je passerai
    Vrouz (lecture de Tristan Hordé)
    [Tout s’écaille] (extrait de Vrouz)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Dans le vent d’hiver
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    le portrait de Valérie Rouzeau (+ un extrait de Va où)






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  • Marc Alyn, Le temps est un faucon qui plonge

    par Angèle Paoli

    Marc Alyn, Le temps est un faucon qui plonge,
    éditions Pierre-Guillaume de Roux, 2018.



    Lecture d’Angèle Paoli


    DU FAUCON QUI PLONGE AU VOL DE L’ÉPERVIER : L’AMOUR LA POÉSIE




    Le temps est un faucon qui plonge. Par le rythme des images qu’elle convoque, cette étonnante définition du temps pourrait être à elle seule le vers d’un poème. Avec l’auxiliaire « être », son présent éternel comme point de jonction d’univers dissemblables, lesquels se rejoignent soudain dans la magie de correspondances imprévues. Cet octosyllabe éminemment lyrique fait à mes yeux écho à un vers incandescent, tiré du recueil Le Livre des amants (Marc Alyn, 1988) :

    « Désir, faucon royal en flammes sur mon poing… ».

    Or, il ne s’agit nullement ici d’un vers mais du titre du dernier ouvrage de Marc Alyn. Sous-titré Mémoires. Le poète annonce par là sa volonté d’accomplir un voyage à rebrousse temps. D’habiter un espace mémoriel, le temps de remettre ses pas en des lieux disparus qui ont pourtant façonné une vie. L’entreprise du poète est donc de reparcourir la longue « trajectoire terrestre » qui fut la sienne depuis les origines, depuis les enfances rémoises jusqu’à aujourd’hui. Né à Reims le 18 mars 1937, Marc Alyn offre à ses lecteurs un récit autobiographique fascinant qui vient compléter les Mémoires provisoires de 2002. Une manière pour le poète de surmonter l’oubli et d’accéder, par l’écriture revisitant le passé, à l’intemporel. Le livre se lit d’une traite, qui foisonne de mille anecdotes, brille de l’éclat de mille pépites. Et draine sur son passage les grandes voix du siècle, rencontrées, croisées, aimées, fréquentées, tout au long des années. Une galerie de portraits vivants prend place parmi les événements de la vie de Marc Alyn, qui accorde autant d’importance aux amis qu’à lui-même. Écrivains poètes artistes éditeurs sont légion et foisonnent sous la plume alerte du poète. François Mauriac / Pierre Seghers / Srečko Kosovel / André de Richaud / Pierre Emmanuel / Pierre-André Benoît / René Char / Mario Prassinos / Jean Carrière / Roger Caillois / Lawrence Durrell / André Pieyre de Mandiargues / le calligraphe chinois T’ang Haywen… et, parmi tant et tant d’amis encore, une femme, LA Femme : Nohad Salameh.

    Une vie entière habitée par la poésie et par l’écriture. Derrière l’autobiographie, ce sont bien les « Mémoires » d’une traversée du siècle qu’il nous est donné de lire. Peut-être en écho aux Mémoires intérieurs de François Mauriac.

    Il faut remonter très loin dans l’univers familial de Marc Alyn pour assister au surgissement de la poésie dans son espace mental. D’emblée, la poésie s’impose à lui comme le lieu unique où vivre :

    « J’avais découvert en mon for intérieur, sans oser en parler à quiconque, une substance vivante, fulgurante et nourricière : la poésie. »

    Conscient d’appartenir à une espèce en voie d’extinction, le jeune garçon, dans une ardeur qui ne faiblira pas, prend « la décision de devenir poète à temps complet ». Et ce pour le restant de [ses] jours.

    « J’entrai en élégie comme d’autres au monastère ; un palais m’accueillait — la langue française — dont il conviendrait de forcer les tiroirs secrets. » Et le poète d’ajouter, non sans humour : « Bien entendu, il convenait de faire vœu de pauvreté — mais non point, à mon grand soulagement, de chasteté ! ».

    Pareille révélation, à un âge si précoce, ne devait pas le quitter. Elle allait accompagner le poète tout au long de son existence, prenant racine dans une jeunesse impatiente, fiévreuse, rebelle et révoltée, désargentée, livrée tout à la fois à l’incompréhension de soi et des autres et aux incandescences de l’« inspiration ». Le jeune garçon se construit ainsi, à la « Marge », dans la solitude et dans le retrait, naviguant le plus souvent vers des « Orients sorciers », propices aux fugues imaginaires. Ainsi, dès son plus jeune âge, le poète met-il en pratique un « art de vivre à l’envers ».

    « J’habitais le suspens, l’entre-temps, le blanc entre les mots. »

    Quant à l’initiation à la fête charnelle, elle a lieu quelques années plus tard, lors d’un premier séjour à l’étranger, à Lindau, en Allemagne. Découverte auditive que celle du sexe, « authentique nerf de la guerre ».

    Sexe et poésie cheminent désormais de concert, formant les deux versants d’une même fièvre. « Eros et logos l’un l’autre s’engendrant. »

    Délaissant soudain les romans fleuves qui faisaient les délices de la prime jeunesse, le jeune Alyn se consacre à la seule aventure qui vaille – « celle de l’image à l’état naissant. » C’est le temps des années rimbaldiennes, ouvertes dans le premier chapitre des « mémoires » — « Le baptême du feu » — sur un vers des Illuminations d’Arthur Rimbaud :

    « Une cloche de feu dans les nuages. »

    Rimbaud, retrouvé un peu plus loin dans cette confrontation de Marc Alyn avec le prince des poètes :

    « Rimbaud des bois, l’allumeur de rêves, m’accueillait à l’orée de ses jardins de palmes cernés de fleurs carnivores, en compagnie de Nerval et de Baudelaire… ».

    Bien avant, en amont, surplombe une tout autre figure, héritage de la passion maternelle pour un héros romanesque de son temps. Cette figure tutélaire, devenue inéluctable dans l’histoire familiale, est celle de « Fantômas », création du romancier Marcel Allain. Dont se délecte Élise, la mère de Marc, alors enceinte de son rejeton.

    « Fils de Fantômas ? Quelle généalogie pour un poète ! L’imaginaire constituerait mes terres domaniales, et le poème la plus sûre des planques : mon château intérieur protégé par les loups. »

    D’Allain à Alyn, il n’y a pas de différence, à l’oreille du moins, et c’est à Claude, frère ainé de Marc et talentueux metteur en scène, que le cadet doit son nom de baptême en poésie. Ainsi naît « le jeune poète Marc Alyn », laissant derrière lui les habits originels d’Alain Marc Fécherolle.

    « Écrivain-né » — ainsi l’affirmait son entourage — « il ne me restait plus qu’à naître », écrit Marc Alyn.

    Ce qu’il fit tambour battant dès 1954. Et ce jusqu’en 1958, date d’interruption involontaire due à la guerre d’Algérie. Mais, déjà, de solides amitiés et soutiens permettent au jeune homme de s’initier à la publication. Celle « microscopique » d’une première plaquette, Le Chemin de la parole, bientôt suivie d’une autre, Demain l’amour. Puis vient la publication très remarquée du recueil Le Temps des autres, couronné du prix Max Jacob le 18 mars 1957, le jour même des vingt ans de Marc Alyn. Une consécration précoce orchestrée par « les monstres sacrés » qui composent alors le jury : Paulhan, Cocteau, Salmon, Supervielle, Mac Orlan.

    Parmi les liens d’amitié qui ont présidé à l’avènement du poète, citons Jean Bouhier, fondateur de l’École de Rochefort ; Jean Breton, fondateur de la revue Les Hommes sans épaules ; le poète André Laude ; René Caqueret, « artisan épris de poésie » ; le poète picard Pierre Garnier, avec qui Marc Alyn signe — conjointement à Jean Bouhier — Défense de la poésie, manifeste en réaction contre « la poésie nationale » d’Aragon ; Bruno Durocher, « poète polonais rescapé des camps de la mort » et fondateur des éditions Caractères ; Pierre Seghers, éditeur du recueil Le Temps des autres.

    De retour à Paris, après deux ans d’absence, Marc Alyn se lie d’amitié avec François Mauriac. Leur première rencontre datant de janvier 1960. François Mauriac vient de publier ses Mémoires intérieurs, « chef-d’œuvre de l’autobiographie spirituelle où le lyrisme circule comme sang dans les veines et dont la lecture m’avait inspiré l’idée d’étudier le poète caché derrière le prix Nobel. » Cette idée prend forme avec l’écriture d’un essai sur l’œuvre lyrique de Mauriac publié chez Seghers, dans la collection « Poètes d’aujourd’hui ».

    La relation d’amitié de Marc Alyn avec François Mauriac s’inscrit dans le cercle magique des « affinités électives ». Le journaliste « fin-de-siècle » reconnaît dans le jeune homme talentueux qu’est Marc Alyn, un poète de même race. Et donc, tout comme lui, « fin-de-siècle », en dépit de sa jeunesse. Le jeune poète poussera la complicité intellectuelle et poétique jusque dans ses extrêmes. Une même opération, à des années de distance, pour un même cancer. Celui du larynx, dont les deux hommes de lettres sortiront avec une signature identique, « légendaire » : celle de « la voix blessée ». Étrange coïncidence. Une fatalité qui survient en 1991 et entraîne Marc Alyn vers le naufrage. Pourtant, après l’ablation de la corde vocale touchée par le cancer et la trachéotomie qui s’ensuivit, le poète écrit :

    « Cette voix autre, qui m’était concédée comme une aumône, ressuscitait en moi, me semblait-il, le timbre blessé de François Mauriac. Fréquemment, je me répétais intérieurement les mots de l’acte de grâce du Livre des morts :

    L’usage de mon larynx m’a été rendu par le dieu. »

    De l’époque parisienne des « années Mauriac », Marc Alyn garde le souvenir aigu des échauffourées dont le grand journaliste était le point de mire. Il « faisait partie de cette génération de poètes que la « vague de rêves » surréaliste avait balayée d’une ruée impitoyable… L’effroi de Mauriac se conçoit aisément face à ce jeu de massacre qui (de Francis Jammes à Anna de Noailles) dégommait une à une ses idoles. »

    Fin-de-siècle ou pas, Marc Alyn poursuit continûment sa trajectoire de poète lyrique. Reconnu par ses pairs.

    En 1961, Pierre Seghers lui confie une mission d’importance. Se rendre en Slovénie afin de collecter sur place nombre de poèmes et de les rassembler en vue de constituer une anthologie. Enthousiasmé par ce projet, Marc Alyn se met en chemin, découvre un pays qu’il reçoit « comme un poème : élégie de neige ou épique œillet rouge ». Un enchantement. Qu’enrichissent encore les rencontres, les amitiés nouvelles et le travail. Sensible à « la musique de la phrase slovène », Marc Alyn n’en est pas moins confronté « à la difficulté souvent insurmontable de marier les syntaxes dans l’espoir d’aboutir — non à une imitation servile et vaine — mais à un nouveau poème gardant trace de ses origines. » Deux anthologies paraissent (l’une en 1962 et l’autre en 1971), qui révèlent au public français les grandes voix de Slovénie : Franz Prešeren, Oton Župančič, Matej Bor, Aloïs Grandnik… Mais, surtout, la voix de Srečko Kosovel, considéré par Marc Alyn « comme l’un des grands visionnaires européens ». Le poète français consacrera au « météore slovène » (mort à l’âge de vingt-deux ans) un essai paru en 1965 dans la collection « Poètes d’aujourd’hui ». De Slovénie, Marc Alyn poursuit son voyage jusqu’en Croatie, moissonnant tout ensemble poèmes et paysages. L’Orient intérieur prend forme, qui gisait jusque-là sous les strates de la mémoire d’enfance. De découvertes en éblouissements, le périple revêt peu à peu un caractère métaphysique que le poète n’aura de cesse d’explorer. La fascination éprouvée en Bosnie face aux stèles de la nécropole bogomile de Radimlja annonce les fulgurances de Byblos et de Baalbek.

    Huit années séparent encore Marc Alyn de sa rencontre avec le Liban. Années au cours desquelles le poète se détache de Paris et s’installe, avec son épouse Jacqueline Hamel, dans la ville natale de Jean Racine : Uzès. Vingt-trois ans de vie dans « la vieille bâtisse » gardoise. De 1964 à 1987. Une vie animée par les visites permanentes des amis, par les expositions organisées autour du calligraphe T’ang Haywen, par les lectures publiques et les débats, sans compter le travail d’écrivain auquel ne cesse de se livrer le poète campagnard. Publication chez Flammarion d’un roman Le Déplacement (1964), auto-défini par Marc Alyn comme « aussi peu public que possible : l’écriture, opération magique, technique d’envoûtement, essai de transmutation incantatoire  » ; animation au Figaro littéraire de la rubrique « poésie » ; publication d’essais (Kosovel, Nerval…) et, en 1966, fondation de la collection Poésie/Flammarion, qu’il dirige jusqu’en 1972.

    « J’avais suggéré à Henri Flammarion la création d’une collection de poésie contemporaine destinée à faire contrepoids, de façon symbolique, à l’image de moins en moins littéraire de sa maison. »

    Soutenu par Étienne Lalou, nouveau directeur littéraire de la grande maison de la rue Racine, Marc Alyn se lance avec enthousiasme dans l’aventure qui va le conduire à révéler au public des poètes aussi différents que Bernard Noël, Andrée Chedid, Lorand Gaspar, Gisèle Prassinos, Norge, Luc Bérimont, Pierre Dalle Nogare et le poète syrien Kamal Ibrahim… Dont certains, sous l’égide de Marc Alyn, seront honorés par des prix de renom.

    Ainsi Lorand Gaspar se voit-il récompensé par le prix Apollinaire pour Le Quatrième État de la matière ; Bernard Noël reçoit le prix Antonin-Artaud pour La Face du silence ; Pierre Dalle Nogare le prix Apollinaire pour son recueil Corps imaginaire.

    Les moments que je tiens pour les plus intimes et les plus chaleureux sont sans doute ceux que Marc Alyn passe en compagnie de son ami Jean Carrière que le succès du Prix Goncourt, obtenu en 1972 pour L’Épervier de Maheux, « avait précipité hors du cercle magique » qui était jusqu’alors le sien.

    « Qu’était devenu son rire ? Quelque chose de noir et de poisseux lui collait à la peau. Je ne songeais pas sans nostalgie aux soirées chaleureuses de Domessargues et à la nuit sur le Causse en compagnie de Frédéric-Jacques Temple au cours de laquelle un feu d’artifice avait illuminé le ciel au-dessus de notre campement de nomades. Il [Jean Carrière] continuait certes d’écrire avec talent, mais la grande vague semblait retombée. »

    La vie continue à Uzès. Et par-delà, jusqu’aux lisières des Cévennes. Quelque part du côté d’Alès (sol natal d’André Gide) s’étend « le terroir de Pierre-André Benoît, vieil enfant dont l’œil savait discerner, dans la moindre facette du réel, le profil à double issue des anges de passages… ». « Un humaniste de la Renaissance, curieux de tout et répandant sur chaque objet leur propre lumière intérieure ». Éditeur, peintre, imprimeur, collectionneur et poète, Pierre-André Benoît « avait voué un culte au Livre, imprimant notamment le plus large ensemble d’œuvres de René Char illustrés par les artistes les plus marquants du XXe siècle, de Braque et Miró à Nicolas de Staël… ».

    Dans ces pages sur le séjour à Uzès, Marc Alyn consacre de très beaux portraits, vibrants, à ses amis. Pierre Emmanuel « séduisait par l’intensité de sa présence » ; Mario Prassinos, « l’alchimiste d’Eygalières » avait couvert sa colline des Alpilles de hiéroglyphes, faisant d’elle la « colline tatouée ». Du reste, « la grande affaire du peintre » n’est-elle pas « de transformer le vide en espace ? » Démarche qui nécessite une grande énergie. Dont l’alliée principale est celle de l’Éros. Lequel

    « se manifestait par [le] choix de techniques d’aspersion : éclaboussures, giclées d’encre à même la blancheur du papier étendu sur le sol. Et l’on eût dit que l’œuvre soumise à tant de tourments atteignait l’orgasme à travers le geste de l’artiste semant des labyrinthes : sperme noir, larmes d’astre. »

    Ailleurs, du côté de Sommières, c’est à Lawrence Durrell qu’il rend visite. C’est là, dans sa demeure « embusquée derrière une fantasmagorie d’arbres », que Larry travaille au troisième tome du Quatuor d’Alexandrie : Mountolive. Ensemble, Durrell et Marc Alyn réalisent un ouvrage qui rassemble les « entretiens » donnés sur France Culture. Publié par l’éditeur Pierre Belfond, Le Grand Suppositoire fit grand bruit. Et Durrell, invité par Bernard Pivot à Apostrophes, dut sortir de son tannière. D’autres échanges ont lieu sur France Culture, qui mettent en présence le trio Durrell-Carrière-Alyn.

    Ainsi va la vie du poète jusqu’à la rencontre, éblouissante et décisive, avec Nohad Salameh. Une fulgurance. Qui engendre une renaissance. 1972. Date du premier voyage de Marc Alyn au Liban. « Arche d’alliance, terre des mages et des images ». Pays du grand poète Georges Schehadé. L’avion vient d’atterrir à l’aéroport de Beyrouth. Marc Alyn tient dans les mains son dernier recueil de poésie, Infini au-delà. Qui vient de paraître aux éditions Flammarion. Parmi les notables et journalistes qui se pressent pour l’accueillir, se détache une silhouette. Celle d’« une jeune fille aux longs cheveux de jais qu’il [lui] sembla reconnaître sans l’avoir jamais vue… ».

    « Cette belle ténébreuse dont la présence illuminait sans offusquer l’ombre, c’était Nohad Salameh. Spontanément je lui offris le livre, et ce fut entre nous l’instant magnétique célébré plus tard dans une strophe de Byblos. »

    Byblos, premier volume de la trilogie Les Alphabets du Feu, paraît en 1991. Un an après le mariage de Nohad et de Marc (à Paris, en 1990). Dix-huit années se sont écoulées entre la première rencontre et le jour de célébration des noces. Années faites de séparations douloureuses et de retrouvailles éblouies, malgré la guerre, malgré les angoisses, malgré la terreur. Nohad est à Beyrouth sous les bombes. Marc divorce de sa première épouse et poursuit ses aventures littéraires en France. Infini au-delà est récompensé en 1973 par le prix Guillaume-Apollinaire. Marc quitte définitivement Uzès en 1987 et s’installe à Paris. Le 18 mars de la même année (jour de son anniversaire), il reçoit le Grand Prix de la Société des Poètes français. Puis il se rend à Beyrouth où il écrit Le Livre des amants.

    « Dans l’appartement de Nohad qui surplombait la mer et profitant des matinées où elle se rendait à son journal, je composais Le Livre des amants. Je tissais, métissais, entretissais les vocables de poèmes dont je tapais d’un doigt chaque vers sur le clavier d’une portative rouge : j’étais au bout du monde et tout au bout de moi. À l’issue de nuits qu’illuminaient les tirs, tel un gigantesque feu d’artifice, j’écoutais renaître les rumeurs de la rue, car la vie, contre toute attente, reprenait son cours : « Vitrier ! Vitrier ! »…

    « En août 1988, je voulus que Le Livre des amants, recueil écrit dans la gueule même du volcan, soit publié sur place, par défi aux forces déchaînées de la haine et de la déchéance auxquelles j’opposais l’amour la poésie. » C’est en effet dans une cave de Beyrouth, sous les bombardements, que le recueil dédié à Nohad est imprimé et voit le jour.

    En 2012, « conscient d’atteindre la croisée des chemins », Marc Alyn prend « la décision de fixer son itinéraire lyrique » et publie au Castor Astral le recueil de vers La Combustion de l’ange (avec une préface de Bernard Noël) ainsi qu’un recueil de proses : Proses de l’intérieur du poème. La totalité des aphorismes sera, elle, publiée aux éditions du Grand Tétras sous le titre Le Centre de gravité. Dans le même temps, le poète fait don de ses œuvres et collections : « au fonds Marc Alyn de la bibliothèque Carnegie de Reims allait bientôt s’ajouter une importante donation à L’Arsenal de Paris (BnF), regroupant livres d’artiste, manuscrits, correspondances et documents. »

    Et, en 2014, à Lausanne, le poète Jean-Pierre Vallotton remet à Marc Alyn le prestigieux Grand Prix de la Fondation Pierrette-Micheloud.

    L’amour la poésie ? N’est-ce pas ce que désirait le poète en herbe, à l’orée de sa vie ? Par-delà les obstacles et les souffrances, par-delà la maladie et les menaces de la mort, Marc Alyn a infléchi sa trajectoire à double entrée. L’amour la poésie. La flèche qui plongeait pour atteindre sa proie s’est incurvée tout au long d’un tracé labyrinthique. Pour dessiner un cercle parfait. « Tous les chemins sont circulaires », écrit Ibn Arabi. Empruntant cet aphorisme au poète andalou, Marc Alyn en reprend la substance dans l’incipit du chapitre intitulé « Mandiargues, Caillois, Eurydice retrouvée » et le parachève par une nouvelle métaphore où l’image du faucon inaugural du titre se substitue à celle de l’épervier :

    « L’expérience initiatique vécue à Byblos n’en finissait point d’élargir mon ciel intérieur de ses cercles concentriques pareils au vol de l’épervier. »

    Ainsi le cercle est-il tracé et accompli. Que peut désormais élargir d’autres richesses. Vécues, rêvées ou sublimées.



    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli






    Marc Alyn  Le temps est un faucon qui plonge






    MARC ALYN


    Marc-alyn





    ■ Marc Alyn
    sur Terres de femmes

    D’une voix d’aube (poème extrait des Alphabets du Feu)
    Proses de l’intérieur du poème
    [Un lézard est sorti du sépulcre du Roi] (poème extrait de La Combustion de l’ange)



    ■ Voir aussi ▼

    → (dans la Poéthèque du site du Printemps des poètes)
    une notice bio-bibliographique consacrée à Marc Alyn
    → (sur Recours au Poème)
    une lecture du Temps est un faucon qui plonge de Marc Alyn par Gwen Garnier-Duguy
    → (sur le site de la revue Texture)
    une lecture du Temps est un faucon qui plonge de Marc Alyn par Marilyse Leroux




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  • Avril 1947 | Ceija Stojka, Nous vivons cachés, Récits d’une Romni à travers le siècle

    Éphéméride culturelle à rebours



    [EN AVRIL 1947]



    En avril 1947, on a quitté nos quartiers d’hiver. On n’avait pas de but précis. On s’est simplement mis en route et on faisait pour le mieux. À partir de maintenant, les routes de campagne, les champs et les bois étaient notre maison.

    Les hommes savaient toujours où il y aurait le prochain marché aux bestiaux où ils pourraient vendre ou échanger leurs chevaux. Dans les années après la guerre, il n’y avait pas encore de tracteurs et les gens de la campagne étaient contents de pouvoir échanger ou acheter un bon cheval de trait bien costaud.

    Pendant que l’homme s’occupait des affaires, la famille attendait à la lisière d’un bois où il y avait aussi un ruisseau. Les femmes profitaient de cette journée. Elles cuisinaient, nettoyaient leurs roulottes et les préparaient tranquillement pour la suite du voyage. Si le soleil le permettait, on faisait la lessive, et les beaux duvets colorés prenaient l’air ; et s’il ne faisait pas trop froid, on lavait aussi les enfants.

    L’hiver suivant on l’a passé, Maman, son compagnon et moi, à Fischamend, en Basse Autriche, près de Vienne. Dans une grande auberge, le mari de Maman nous avait trouvé deux chambres avec une cuisine. L’appartement situé dans l’arrière-cour était très confortablement meublé, et en plus, clair. Les chevaux étaient logés dans les écuries où il y avait aussi ceux du propriétaire de l’auberge. Ils y étaient au chaud. Maman et moi, on a nettoyé notre appartement et on s’est senties chez nous.

    C’est dans cette chambre de plain-pied que j’ai trouvé un petit livre vert. C’était un roman champêtre écrit assez simplement, sur la couverture une jeune fille avec de longues tresses souriait. Il y était question du propriétaire d’un domaine et de la jeune servante. Au début c’était très difficile pour moi de le lire. Si je lisais doucement en silence, je pouvais comprendre le sens. Mais si je lisais à haute voix, je bégayais et n’y comprenais pas un mot moi-même. J’ai donc renoncé à la lecture à haute voix et me suis contentée de savoir lire tout court. A chaque minute de libre, je sortais le petit livre de ma cachette. J’aimais plus que tout lire quand j’étais seule et quand personne ne m’observait. C’était merveilleux. Je remarquais que je saisissais de mieux en mieux le sens et le contenu.

    Dans la petite chambre à un lit avec un fauteuil branlant, je laissais libre cours à mes pensées. Tout en regardant le très vieux poêle placé dans un coin de ma chambre, tant de souvenirs me traversaient la tête. Au milieu du tuyau, un anneau manquait et le soir, la lueur du feu éclairait le plafond de ma chambre. Des fois je pensais que je ne faisais que rêver tout ça. Je ne pouvais pas mettre le passé de côté comme mon livre, toujours il me rattrapait. Entre les pensées et la réalité, je me perdais pas mal. Alors je me levais et je touchais tous les objets. Je décrochais du mur la petite nature morte et je la frottais jusqu’à ce qu’elle brille.



    Ceija Stojka, Nous vivons cachés, Récits d’une Romni à travers le siècle, suivi de deux entretiens et un essai par Karin Berger, Éditions Isabelle Sauvage, Collection chaos, 2018, pp. 84-85. Traduit de l’allemand (Autriche) par Sabine Macher.






    Ceija Stojka  Nous vivons cachés 2






    CEIJA STOJKA


    Ceija Stojka 3
    Source




    ■ Ceija Stojka
    sur Terres de femmes

    15 avril 1945 | Libération du camp de Bergen-Belsen (lecture de Je rêve que je vis ? de Ceija Stojka)




    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur le site des éditions Isabelle Sauvage)
    une notice bio-bibliographique sur Ceija Stojka
    → (sur le site des éditions Isabelle Sauvage)
    la fiche de l’éditeur sur Nous vivons cachés, Récits d’une Romni à travers le siècle de Ceija Stojka
    → (sur En attendant Nadeau)
    Le manteau de Ceija Stojka, par Gabrielle Napoli
    → (sur remue.net)
    Nous vivons cachés, de Ceija Stojka
    → (sur Mediapart)
    «Nous vivons cachés», récits d’une Romni à travers le siècle: Ceija Stojka, par Jean-Claude Leroy
    → (sur France Culture)
    Un chant Tzigane – Ceija Stojka (1/4) Auschwitz est mon manteau



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  • Béatrice Libert | [Les pierres et les mots]



    [LES PIERRES ET LES MOTS]




    Les pierres et les mots remplissent notre vie
    Les unes pour la fermer les autres pour l’ouvrir

    Nous les semons devant nous
    Sans pouvoir contre le chagrin et la nuit

    Parfois certains d’entre eux
    Soulèvent notre montagne intérieure
    Remuent notre pauvre syllabaire

    Où les mots défaits se recomposent
    Où les pierres affligées se changent en sable

    Où le vent malgré sa surdité
    Ranime quelquefois un semblant de poésie





    Béatrice Libert, Battre l’immense, poèmes, Revue Nunc | Éditions de Corlevour, 2018, page 27.






    Beatrice Libert  Battre l'immense 2





    BÉATRICE LIBERT


    Beatrice Libert
    Source




    ■ Béatrice Libert
    sur Terres de femmes


    Chansonnier : arbre lyrique (extrait d’Arbracadabrants)
    [Il y a dans le vent qui passe] (extrait de L’Aura du blanc)
    Nous traversons l’abîme (+ une notice bio-bibliographique)
    [Peut-être est-ce dans l’arbre ?] (extrait d’Un arbre nous habite)
    Très souvent (extrait d’Être au monde)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Attente
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    un Portrait de Béatrice Libert (+ un extrait d’Être au monde)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions de Corlevour)
    une fiche bibliographique sur Béatrice Libert





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  • Georges Guillain | Tant que nous sommes



    [TANT QUE NOUS SOMMES]




    pour nos « amis russes », du 2e régiment spécial russe
    qui reposent à Saint-Hilaire-le-Grand




    coquelicots
    bleuets

    mais toujours
    aigremoines
    ancolies
    gouttes de sang
    molènes
    marjolaines
    lunaires
    liondents poilus
    les dames d’onze heures
    morelles douces-amères
    passerages
    centaurées
    véroniques
    résédas
    rues
    digitales
    germandrées
    gesses des prés
    lampsanes
    gratterons
    laiterons
    cardamines

    chanvres d’eau
    compagnons blancs
    compagnons rouges

    et toujours
    et toujours
    bardanes et chardons
    aconits
    achillées
    joubarbes
    belladones
    bryones
    œillets
    orpins âcres
    raiponces
    aspérules
    fumeterres

    asphodèles
    asphodèles
    asphodèles


    ……………………………..


    libérées

    d’invisible
    dans l’apostrophe minuscule
    entre les croix de


    la lumière


    ces fleurs
    qu’on ne cherche même plus à nommer


    maintenant

    qu’un peu de corde
    ou de raphia

    au mur

    retient le vent



    de les




    briser                                                         





    Georges Guillain, Un bouquet pour les morts, LD éditions / Les Découvreurs, 2018, pp. 42-45. Gravures de Marie Alloy.






    UNBOUQUET





    GEORGES GUILLAIN


    Georges Guillain  portrait





    ■ Georges Guillain
    sur Terres de femmes

    Que ce lieu pour rester (extrait d’Avec la terre, au bout)
    [Novembrer tout y revient patauger] (autre extrait d’Avec la terre, au bout)
    [Voilà que tu es devenu poreux] (autre extrait d’Avec la terre, au bout)
    [Il n’y a pas de poésie descriptive] (extrait de Compris dans le paysage)
    six août | Georges Guillain, Compris dans le paysage
    [Voilà] (extrait de Parmi tout ce qui renverse)



    ■ Voir aussi ▼

    → (dans la poéthèque du site du Printemps des Poètes)
    une fiche bio-bibliographique sur Georges Guillain





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  • Aurélie Foglia | [tic-tac de la pluie]



    [TIC-TAC DE LA PLUIE]




    tic-tac de la pluie

    qu’une cime capte

    rediffuse en boucle

    quelqu’un s’ouvre

    à sa fenêtre la part

    de poésie existante

    il fait vert

    dans la magie de n’attendre

    rien ignorant

    à quel point

    regarder grandit

    ne cherchant plus l’enchant

    ement des lignes

    se passent
    d’emphase inutile

    d’en faire plus

    pour détendre l’atmosphère



    est-ce que tu t’épanouis ?


    oui



    poussant la porte de volière





    s’a

    perçoivent en levant

    l’humble tête

    branches battant

    dans les combles

    qu’un soleil lustre

    malgré de grands

    cumulus craie

    des arbres se détachent

    d’un gris esprit smoky

    flirtant avec le noir




    la nuit porte ses fruits




    Aurélie Foglia, Grand-Monde, Éditions Corti, Domaine français, 2018, pp. 49-50.






    Aurélie Foglia  Grand-Monde






    __________________________________
    NOTE d’AP : Aurélia Foglia a aussi publié Hommage à Poe et Entrées en matière sous le nom d’Aurélie Loiseleur.





    AURÉLIE FOGLIA [LOISELEUR]


    Foglia
    Source




    ■ Aurélie Foglia [Loiseleur]
    sur Terres de femmes


    Comment dépeindre (lecture d’AP)
    [décrire peindre écrire dépeindre désécrire] (extrait de Comment dépeindre)
    Entrées en matière (lecture de Tristan Hordé)
    Entrées en éléments (extrait d’Entrées en matière)
    Gens de peine (lecture d’Isabelle Lévesque)
    [Gens ne s’appellent pas] (extrait de Gens de peine)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions Corti)
    la fiche de l’éditeur sur Grand-Monde





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  • Pierre Dhainaut | Isabelle Lévesque | L’origine de l’écriture | [Si léger… tu cours]




    Lévesque  L'origine de l'écriture
    Ph. Isabelle Lévesque
    in La Grande Année, page 61.







    L’ORIGINE DE L’ÉCRITURE




    Tu as fermé les yeux avant d’écrire,
    tu crois trouver le mot qui se dérobe
    en toi comme s’il pouvait apparaître,
    à lui seul attirant les autres, sur l’écran
    des paupières, jamais elles ne sont opaques,
    elles s’écartent d’elles-mêmes, et sur la page
    des signes s’agitent, s’entrecroisent :
    pour les tracer d’un doigt nu, d’un doigt d’air,
    tu n’as qu’à dessiner par courbes inlassables
    l’arbre du ciel, le mot que tu aimerais dire
    se devine, s’illumine en celui de « visage »,
    aucune nuit dans l’écho des syllabes.




    Pierre Dhainaut, « Prédelle » in Isabelle Lévesque | Pierre Dhainaut, La Grande Année, éditions L’Herbe qui tremble, 2018, page 60.







    Lévesque  Si léger
    Ph. Isabelle Lévesque
    in La Grande Année, page 86.







    [SI LÉGER… TU COURS]




    Si léger,
    dans le nom défait de la saison passée,
    tu cours.

    Plus haut porte ta course,
    l’été souffle
    sa pente couvre l’horizon orange.

    Tant de lettres et de pétales !
    Les graminées plus certaines
    énoncent l’ombre assignée.

    L’hiver reclus,
    nous jouons à découvrir avril.
    Les coquelicots touchent le ciel.




    Isabelle Lévesque, « Ici, aux Andelys » in Isabelle Lévesque | Pierre Dhainaut, La Grande Année, éditions L’Herbe qui tremble, 2018, page 87.






    Isabelle Lévesque Pierre Dhainaut  La Grande Année






    ISABELLE  LÉVESQUE


    Isabelle Lévesque
    Source




    ■ Isabelle Lévesque
    sur Terres de femmes


    Après (lecture de Sylvie Fabre G.)
    Voir de face (poème extrait d’Après)
    Isabelle Lévesque | Pierre Dhainaut, La Grande Année (lecture d’AP)
    Chemin des centaurées (lecture de Pierre Dhainaut)
    Chemin des centaurées (lecture d’AP)
    Mai | La Ronde (extrait de Chemin des centaurées)
    [Ouvre et lis entre les lignes] (poème extrait du Fil de givre)
    Le Fil de givre (lecture d’AP)
    Le Fil de givre (lecture de Jean Marc Sourdillon)
    [Oh, ce désordre de disparaître !] (extrait de Nous le temps l’oubli)
    C’est tout c’est blanc
    [Entends, c’est jour, la forme aimantée du point] (poème extrait de Ravin des Nuits que tout bouscule)
    Nous le temps l’oubli (note de lecture d’AP)
    [Oh, ce désordre de disparaître !] (poème extrait de Nous le temps l’oubli)
    [Nous vaut la force courant le vent] (poème extrait de Va-tout)
    Ossature du silence (note de lecture d’AP)
    [Peine singulière] (poème extrait d’Un peu de ciel ou de matin)
    Ravin des Nuits que tout bouscule (note de lecture d’AP)
    [Les serments] (poème extrait de Le tue braccia saranno)
    Va-tout (note de lecture de Jean-Louis Giovannoni)
    Voltige ! (note de lecture d’AP)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Territoire
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    le Portrait d’Isabelle Lévesque (+ un poème extrait de Va-tout)






    PIERRE DHAINAUT


    Pierre dhainaut profil 3






    ■ Pierre Dhainaut
    sur Terres de femmes


    Pour voix et flûte (lecture de Sabine Dewulf)
    D’abord et toujours, 4 (poème extrait de Pour voix et flûte)
    [Ce qu’est devenue la couleur] (poème extrait de Progrès d’une éclaircie)
    [Dès le seuil remercie] (poème extrait de Voix entre voix)
    Horizons, fontanelles… (poème extrait de Vocation de l’esquisse)
    [Nous étions seuls, de trop, dans nos miroirs] (poème extrait de De jour comme de nuit)
    [Ne nous en prenons pas à l’invisible] (poème extrait d’État présent du peut-être)
    [Sortir sous l’averse] (poème extrait d’Et même le versant nord)
    Ici (lecture d’Isabelle Lévesque)
    [Que respirent avant tout les mots] (poème extrait d’Ici)
    [Orage, tempête, séisme] (poème extrait de La Nuit, la nuit entière)
    [Où que tu ailles] (poème extrait de Rudiments de lumière)
    Passerelles
    Printemps dédié (poème extrait de L’Autre Nom du vent)
    Progrès d’une éclaircie suivi de Largesses de l’air (lecture d’Isabelle Lévesque)
    [Soudain la tête se redresse] (autre poème extrait de La Nuit, la nuit entière)
    Vocation de l’esquisse (lecture d’Isabelle Lévesque)
    Voix entre voix (lecture d’Isabelle Lévesque)
    Pierre Dhainaut | Caroline François-Rubino, Paysage de genèse, 10
    Pierre Dhainaut | Caroline François-Rubino | [Laissons les mots sourdre d’eux-mêmes] (autre extrait de Paysage de genèse)
    Pierre Dhainaut | Isabelle Lévesque, La Grande Année (lecture d’AP)





    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Terre à ciel)
    Sept questions d’Isabelle Lévesque à Pierre Dhainaut
    → (sur Ce qui reste)
    Pierre Dhainaut | Isabelle Lévesque, Portraits de l’air





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