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  • Rubén Darío | Melancolía


    MELANCOLÍA


    A Domingo Bolívar





    Hermano, tú que tienes la luz, dime la mía.
    Soy como un ciego. Voy sin rumbo y ando a tientas.
    Voy bajo tempestades y tormentas,
    ciego de sueño y loco de armonía.

    Ése es mi mal. Soñar. La poesía
    es la camisa férrea de mil puntas cruentas
    que llevo sobre el alma. Las espinas sangrientas
    dejan caer las gotas de mi melancolía.

    Y así voy, ciego y loco, por este mundo amargo;
    a veces me parece que el camino es muy largo,
    y a veces que es muy corto…

    Y en este titubeo de aliento y agonía,
    cargo lleno de penas lo que apenas soporto.
    ¿No oyes caer las gotas de mi melancolía?




    Rubén Darío, Cantos de vida y esperanza, Tipografía de Revista de Archivos, Bibliotecas y Museos, Madrid, 1905. Reed. Collection Penguin Clásicos, 2015.





    Ruben Dario  Cantos-de-vida-y-esperanza







    MÉLANCOLIE


    À Domingo Bolívar





    Frère, toi qui possèdes la lumière, dis-moi la mienne.
    Je suis comme un aveugle. Je vais sans but et je marche à tâtons.
    Je vais sous les tempêtes et les orages
    Aveugle de rêves et fou d’harmonie.

    Voici mon mal. Rêver. La poésie
    Est la camisole ferrée aux mille pointes sanguinaires
    Que je porte en mon âme. Les épines sanglantes
    Laissent tomber des gouttes de ma mélancolie.

    Ainsi je vais, aveugle et fou, par ce monde amer ;
    Parfois le chemin me semble interminable,
    Et parfois si court…

    Et dans ce vacillement entre courage et agonie,
    Je porte le fardeau de peines que je supporte à peine.
    N’entends-tu pas tomber mes gouttes de mélancolie ?




    Rubén Darío, Chants de vie et d’espérance, XXV, in Azul [1888-1890], suivi d’un choix de textes, José Corti, Collection Ibériques, 2012, page 249. Traduit de l’espagnol (Nicaragua) par Jean-Luc Lacarrière.





    Rubén Dario Corti





    RUBÉN DARÍO


    Rubén Dario Guidu
    Image, G.AdC





    ■ Rubén Darío
    sur Terres de femmes


    Walt Whitman (poème extrait d’Azul)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions José Corti)
    une fiche de Philippe Ollé-Laprune sur Rubén Darío





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  • Roberto Juarroz | [L’écho disponible qu’est la vie]



    Un écho déambulatoire
    Ph., G.AdC






    [EL ECO DISPONIBLE QUE ES LA VIDA]



    El eco disponible que es la vida
    necesita localizar su fuente,
    encontrar la vibración original,
    el espacio sonoro
    anterior al primer movimiento
    y la sombra sonora
    que proyectó la primera palabra.

    A menos que la fuente del sonido
    no esté al comienzo del tiempo,
    sino al final, al cierre
    de esta cruel transparencia.

    La vida no sería entonces otra cosa
    que una corriente al revés,
    un eco ambulatorio
    separado o quizás expulsado
    hacia atrás de su fuente,
    un eco que siempre retrocede.

    O más todavía :
    un eco sin un sonido como origen,
    un eco siempre disponible,
    la fatal repeticíon de un sonido inexistente.






    [L’ÉCHO DISPONIBLE QU’EST LA VIE]



    L’écho disponible qu’est la vie
    a besoin de localiser sa source,
    de trouver la vibration originelle,
    l’espace sonore
    antérieur au premier mouvement
    et à l’ombre sonore
    qui lança le premier mot.

    À moins que la source du son
    ne soit pas au commencement du temps,
    mais à la fin, à la fermeture
    de cette cruelle transparence.

    Alors la vie ne serait rien d’autre
    qu’un courant inversé,
    un écho déambulatoire
    séparé ou peut-être expulsé
    vers l’arrière de sa source,
    un écho qui recule toujours.

    Ou plus encore :
    un écho sans un son pour origine,
    un écho toujours disponible,
    la fatale répétition d’un son inexistant.




    Roberto Juarroz, Dixième poésie verticale (25), Éditions José Corti, Collection Ibériques, 2012, pp. 84-85-86-87. Édition bilingue. Traduction de François-Michel Durazzo.




    NOTE d’AP : ce recueil (un des derniers recueils de Roberto Juarroz demeurés inédits en français) sera disponible en librairie à compter du 22 novembre 2012.





    Ci-dessous une traduction en corse (sartenais), par François-Michel Durazzo, de ce poème de Roberto Juarroz :



    U ribombu dispunebuli chì hè a vita
    hà u bisognu di sapè duva iddu hè u so ochju,
    di buscà si u fremu iniziali,
    u spaziu sunoru
    di prima à a prima mossa
    è l’ombra sunora
    chì lampò a prima parolla.

    A menu chì l’ochju di u sonu
    un si ni stia micca à u nascia di u tempu,
    ma à a fini, à a chjusura
    di quidda trasparenza spiitata.

    Tandu a vita ùn saria altra
    chì un corsu à drumbasciu,
    un ribombu aderra
    spiccatu o soca cacciatu
    à daretu di u so ochju,
    un ribombu chì sempri rinculighja.

    O meddu dinò:
    un ribombu senza sonu com’è iniziu,
    un ribombu sempri dispunebuli,
    a ripitizioni fatali di un sonu chì ùn asisti micca.




    Trauction inédite de François-Michel Durazzo
    pour Terres de femmes.





    ■ Roberto Juarroz
    sur Terres de femmes

    [Au jour le plus beau] (poème extrait de Quinzième poésie verticale)





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