Étiquette : Collection Poésie XXI


  • Bernard Grasset | [J’ai soif encore]


    La terre et le ciel  Une énigme entre nos mains 3
    Photocollage, G.AdC








    [J’AI SOIF ENCORE]




    J’ai soif encore
    Du haut pays de lumière.
    L’ancre, le vaisseau,
    Les rochers et la mer,
    Trouver le chant nouveau.
    La terre et le ciel,
    Une énigme entre nos mains.
    En creusant la vigne des mots
    Devenir un homme nouveau.



    […]



    Chant du désert
    Et de la promesse,
    En blanc et bleu
    Tu demeures.
    Copeaux des jours,
    Songe et silence,
    Brun charpentier
    Au pas fidèle.
    Lampe et lucarne,
    D’âge en âge,
    Intérieure vérité,
    Regard qui écoute.



    […]



    Au temps du désert
    Luit une lampe.
    Sycomore et figuier,
    Promesse de vie.
    Lac légendaire,
    Porte de l’étranger.
    Des ombres s’approchent,
    Paroles et dialogue.
    Tu graves dans le cœur.




    Bernard Grasset, Brise (2006-2008), Jacques André éditeur, Collection Poésie XXI N° 62, 2020, pp. 34, 37, 41.






    Bernard Grasset  Brise 2





    BERNARD GRASSET


    Bernard_grasset_2019 NB
    Source




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site de Jacques André éditeur)
    une fiche bio-bibliographique sur Bernard Grasset
    → (sur Terre à ciel)
    une page sur Bernard Grasset
    → (sur Recours au Poème)
    une lecture de Brise de Bernard Grasset, par Ghislaine Lejard
    → (sur le site À la littérature de Pierre Campion)
    une lecture de Brise de Bernard Grasset, par Marie-Hélène Prouteau
    → (sur La Pierre et le Sel)
    un entretien de Bernard Grasset avec Pierre Kobel





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  • Marilyne Bertoncini, La Noyée d’Onagawa

    par Angèle Paoli

    Marilyne Bertoncini, La Noyée d’Onagawa
    Jacques André éditeur, collection Poésie XXI N° 58,
    2020. Préface de Xavier Bordes.



    Lecture d’Angèle Paoli


    L’AMOUR PLUS FORT QUE LA MORT ?





    Le petit port de pêche d’Onagawa porte secrètement en lui, dans l’arrondi d’une voyelle, les eaux furibondes qui l’ont anéanti. Les eaux d’Onagawa. Onagawa celait pourtant en elle les promesses du printemps même si les derniers signes de l’hiver hésitaient encore à se dissoudre dans les brumes.

    Les signes avant-coureurs de la féerie printanière couvent. Le chant d’Onagawa rythme le premier poème. On pourrait se laisser prendre par la beauté de ces images évocatrices du Japon traditionnel si le titre du recueil de Marilyne Bertoncini – La Noyée d’Onagawa – ne venait faire obstacle à l’apparente sérénité de ces images millénaires. Dès la deuxième page de titre (celle qui précède la page d’incipit), l’éventuelle ambiguïté est levée, la poète annonçant qu’il s’agit là d’une « rêverie poétique inspirée d’une dépêche de l’AFP. »

    Le réel va donc faire irruption. Comment la poète va-t-elle parvenir à concilier ce que tout oppose ? Sous le beau chant initial d’Onagawa va poindre La Catastrophe. Parmi les milliers de morts emportés par le tsunami, Marilyne Bertoncini exhume l’ombre de Yuko. L’inconnue d’hier rassemble dans sa silhouette fugace tous les noyés d’Onagawa. Elle devient la figure mythique de la tragédie. La roue vient de tourner. Les prémices du printemps sont brutalement englouties sous les coups de butoir du séisme. Un séisme d’une telle violence qu’il déclenche le même jour la catastrophe nucléaire de Fukushima. Le monstre Océan en furie avale tout sur son passage.

    La poète s’attache à reconstituer le fil des événements, mettant en relief les faits et les moments les plus marquants. Un récit prend forme dans une temporalité anéantie, laquelle fait passer de la vie à la mort en un temps foudroyant ; la rêverie de la poète réunit temps et espace stratifiés pour l’éternité dans une même coquille. Un rapide retour en arrière sur elle-même lui permet de se remémorer ce que fut pour elle cette journée-là. Quels en furent les jalons depuis le jour naissant jusqu’à la fin du jour ? Son œil de photographe/cinéaste s’arrête sur les lignes, opère un cadrage sur les formes. Au « triangle des grues dans leur vol printanier » d’Onagawa répondent « les grues avant la gare » qui « engloutissent/le ciel » de Villefranche. À cet autre vers concernant Onagawa – « et l’attente rose des pétales fleurissait les nuages » – répond en simultané « une petite chaîne de nuages gris-bleu à l’horizon d’où suinte l’ocre-rose du matin ». Des correspondances très fines s’établissent d’un bout du monde à l’autre. On pourrait relever bien d’autres exemples qui se font écho aux extrémités du globe. Bruits et rumeurs, couleurs et lumière, oiseaux et flore… Le regard clairvoyant de la poète s’attache aux moindres détails qui habitent l’instant. Le temps s’écoule sur la Côte d’Azur et porte en lui les signes d’un obstacle. « Les barres d’immeubles », et tout ce qui alentour contribue à engloutir le ciel, sont-ils la marque insoupçonnée de ce qui se produit au même instant de l’autre côté de l’océan ?

    Si je m’attarde autant sur ce poème (qui met en évidence une concomitance temporelle – le temps de la poète et celui de la « noyée d’Onagawa »), c’est que cette réflexion sur le temps se coule à merveille dans ma propre sensibilité. Elle me renvoie notamment au très beau roman de Laurent Mauvignier Autour du monde. Même si le traitement diffère – mais aussi l’écriture –, je ne peux m’empêcher de me poser à nouveau la question du « où étions-nous ce jour-là ? » « Que faisions-nous ? » Mais aussi : « Comment rendre compte de cette concomitance ? Comment la dire ? Et quelle nécessité y a-t-il à la dire ? ».

    Sans nul doute, la poète a été durement ébranlée par le récit de cette tragédie. Traumatisée peut-être. D’où la nécessité pour elle de s’approprier celle-ci par l’écriture. D’accueillir dans son cimetière intérieur Yuko et ses semblables. De l’intérioriser. En réintégrant les étapes du récit qui la constituent. Car il y a un récit dans cette « rêverie poétique ». Un récit qui s’appuie sur des faits inexorables.

    Ainsi La Catastrophe d’Onagawa s’inscrit-elle dans une réalité géographique dénommée avec soin : « un petit port de pêche sur la côte orientale /du Japon – préfecture de Miyagi… ». Elle s’inscrit aussi dans une temporalité précise. « C’était un vendredi, ce onze mars 2011… ». En un moment chronométriquement identifié : « 14h46 minutes 23 secondes. » Plus loin est indiquée nommément la force du « séisme d’intensité neuf point un sur l’échelle de Richter ». Vient aussi l’ultime message que Yuko adresse à son mari depuis son téléphone portable. Message de terreur devant la mort qui arrive au galop et qui tient en deux mots : « Tsunami énorme ». Un portable « relique » qui parvient à son mari trois ans après le raz-de-marée ; « une moderne/bouteille à la mer », rescapée du naufrage. Tout ce qui subsiste de Yuko dont l’histoire est comme le dernier témoignage de tant d’autres disparitions anonymes, englouties et anéanties sans laisser de traces autres que celles de décombres mêlés aux décombres. Dans son avidité monstrueuse, la mer tentaculaire a tout arraché sur son passage, elle a fusionné les éléments, les a broyés et malaxés pour en faire une pâte immonde. Plus rien n’a de forme. Tout est sens dessus dessous. Le chaos règne en maitre :

    « plus rien ne distingue

    fluide vivant ou minéral ».

    De ce bouleversement de « noire Apocalypse », la poète rend compte, qui imagine « les blêmes corps des noyés de pleine terre », « à la dérive dans l’eau froide ». Trois ans plus tard persistent les visions d’un broiement qui a dissipé les frontières du réel, créant un gigantesque fatras de terre d’épaves de ciment.

    Au sein de ce chaos un homme attend. Qui espère retrouver le corps de Yuko. C’est Yasuo. Il s’est lancé dans une quête éperdue. Il espère retrouver sa femme au fond des eaux glacées d’Onagawa. C’est là qu’il la cherche, « évanescente comme / le blanc fantôme d’Oyuki », parmi les enchevêtrements des algues et « les carcasses rouillées d’improbables vestiges », fouillant et écumant les fonds marins d’Onagawa. Obstination insensée que celle de l’époux ? Peut-être. Mais Yuko, avant d’être emportée du toit où elle s’était réfugiée, s’était écriée : « je veux rentrer chez nous ». Et Yasuo, nouvel Orphée, n’a de cesse que de soustraire la « noyée » de son « enfer marin ». L’amour plus fort que la mort ? C’est ce que laisse entrevoir le très émouvant recueil de Marilyne Bertoncini.



    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli






    Marilyne Bertoncini  La Noyée d'Onagawa





    MARILYNE   BERTONCINI


    Marilyne Bertoncini
    Source




    ■ Marilyne Bertoncini
    sur Terres de femmes


    [Je l’imagine] (extrait de La Noyée d’Onagawa)
    À l’ombre du mûrier (extrait de L’Anneau de Chillida)
    La Dernière Œuvre de Phidias (lecture d’AP)
    [Ici… Là] (extrait de La Dernière Œuvre de Phidias)
    Labyrinthe des nuits (lecture d’AP)
    Mémoire vive des replis (lecture de Sophie Brassart)
    [En nageant jusqu’au bout de ton rêve] (extrait de Mémoire vive des replis)
    Sable (extrait)



    ■ Voir aussi ▼


    → (sur Recours au poème)
    une fiche bio-bibliographique sur Marilyne Bertoncini
    → (sur le site de la mél [Maison des écrivains et de la littérature])
    une fiche bio-bibliographique sur Marilyne Bertoncini
    Minotaur/a, le blog de Marilyne Bertoncini






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  • Marilyne Bertoncini | [Je l’imagine]



    [JE L’IMAGINE]




    Je l’imagine, infime signe noir
    sur la page de l’océan refermée
    sur les naufrages, les blêmes corps des noyés de pleine terre
    arrachés jusqu’à dix kilomètres de la côte,
    flottant entre deux eaux,
    entre les bancs argentés ondulant dans les zébrures sombres
    des courants
    comme pétales au vent,
    écartant la chevelure fluorescente des méduses,
    caressant les rideaux d’algues sur les restes d’étranges épaves
    où rampent des étoiles,
    frôlant d’improbables poissons aux yeux vitreux
    dans les cavernes
    de ciment brisé
    et le flanc de colline des étraves couchées
    où nidifie la pierre arborescente des coraux,
    cerisiers inversés

    à la dérive dans l’eau froide,
    avec l’espoir en fil d’Ariane.




    Marilyne Bertoncini, La Noyée d’Onagawa, Jacques André éditeur, collection Poésie XXI N° 58, 2020, page 30. Préface de Xavier Bordes.






    Marilyne Bertoncini  La Noyée d'Onagawa





    MARILYNE   BERTONCINI


    Marilyne Bertoncini
    Source




    ■ Marilyne Bertoncini
    sur Terres de femmes


    La Noyée d’Onagawa (lecture d’AP)
    À l’ombre du mûrier (extrait de L’Anneau de Chillida)
    La Dernière Œuvre de Phidias (lecture d’AP)
    [Ici… Là] (extrait de La Dernière Œuvre de Phidias)
    Labyrinthe des nuits (lecture d’AP)
    Mémoire vive des replis (lecture de Sophie Brassart)
    [En nageant jusqu’au bout de ton rêve] (extrait de Mémoire vive des replis)
    Sable (extrait)



    ■ Voir aussi ▼


    → (sur Recours au poème)
    une fiche bio-bibliographique sur Marilyne Bertoncini
    → (sur le site de la mél [Maison des écrivains et de la littérature])
    une fiche bio-bibliographique sur Marilyne Bertoncini
    Minotaur/a, le blog de Marilyne Bertoncini






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  • Josyane De Jesus-Bergey | [Encore un peu]



    Jentre dans les couleurs
    « j’entre dans les couleurs
    comme l’enfant
    à son premier rêve »
    Aquatinte, G.AdC








    [ENCORE UN PEU]





    Encore un peu
    donne-moi ce qui fait oublier
    la soif
    j’entre dans les couleurs
    comme l’enfant
    à son premier rêve.

    Tu me dis que l’espace
    est toujours à briser.

    Qui ose la douleur ?





    J’apprends à éteindre
    le son de tes pas
    nomade
    je suis absente
    de ce temps.

    Peut-être qu’au dernier moment
    j’écrirais pour là-bas.





    Le temps
    n’a plus la langue qui
    te marque
    nous et la pierre
    nous
    sans la lumière.

    Un vol de rapaces
    comme le visage du ciel
    sans ce murmure des fontaines
    où chantent les oiseaux.





    Josyane De Jesus-Bergey, La Déconstruction du vide, Jacques André éditeur, Collection Poésie XXI, 2019, pp. 48-50. Préface de Max Alhau.





    Josyane De Jesus-Bergey  La Déconstruction du vide





    JOSYANE DE JESUS-BERGEY


    Josyane De Jesus-Bergey
    Source




    ■ Josyane De Jesus-Bergey
    sur Terres de femmes

    Les Amulettes
    [Plaies de la terre] (poème extrait de Rien d’autre)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    On ne parle plus du loup



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site du Printemps des poètes)
    la fiche de la Poéthèque consacrée à Josyane De Jesus-Bergey





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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Jean Poncet | Sormiou



    SORMIOU




    Cendres tièdes encore
    sur le chemin bleu

    Tout au bout
    à l’aplomb du roc
    le ressac
    bat la chamade

    Pour la première et l’ultime fois

    Pluie grise
    du souvenir

    flotte dans l’air
    puis
    s’en va

    spirales inéluctables

    à la rencontre des
    posidonies



    Jean Poncet, « Marseille, une vie », Des lieux et des hommes, in Lumière du silence, précédé de Des lieux et des hommes, Jacques André éditeur, Collection Poésie XXI, 2013, page 19.






    Jean Poncet  Lumière du silence





    JEAN PONCET


    Jean Poncet
    Source




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de la revue Texture)
    une lecture de Lumière du silence par Max Alhau





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  • Jacques Lovichi | [la femme qui n’est pas dans ma maison]



    [LA FEMME QUI N’EST PAS DANS MA MAISON]



    1. La femme qui
    n’est pas
    dans ma maison
    pour y bourdonner comme ruche
    celle dont je n’entends
    jamais
    sonner le pas
    galet que retourne la vague
    est absence
    comme la mer
    veillant aux frontières du vide

    elle est la femme
    qui
    n’est pas
    au monde.




    2. Celle qui m’eût aimé
    peut-être
    et qui peut-être m’eût haï
    a oublié de naître
    un jour
    et c’est un vide à ma fenêtre
    un silence pour mon retour
    une absence
    comme l’amour

    elle est
    la femme qui n’est pas
    au monde.




    3. Celle que j’attendis
    en vain
    aux seins lourds
    à la croupe ronde
    et dont parfois je rêve encor
    à la fois
    brune    rousse    blonde
    avec bientôt des fils d’argent
    celle qui
    contre moi
    s’endort
    sans laisser de trace sur ma couche
    est absence
    comme la mort

    elle est la femme qui n’est pas au monde.



    Jacques Lovichi, « LAMERLAMOURLAMORT chanson », in Mythologies de haute mer et autres textes, Jacques André éditeur, Collection Poésie XXI n° 40, 2017, pp. 43-44-45.






    Lovichi  Mythologiees de haute mer 2
    JACQUES LOVICHI



    Lovichi Portrait 2





    ■ Jacques Lovichi
    sur Terres de femmes

    Mort du Sultan des Asphodèles (+ une notice bio-bibliographique)
    Mourir dans l’île (lamentu)




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de Jacques André éditeur)
    la notice de l’éditeur sur Mythologies de haute mer




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  • Marilyne Bertoncini | [Ici… Là]




    [ICI… LÀ]




    Ici
    tout en bas de la falaise
    le noir granit creuse une vasque si profonde qu’à
    marée basse on y entre
    à mi-corps

    Entre deux roches se cachent les tourteaux
    aux carapaces vernissées
    de transparentes chevrettes
    les mouvantes anémones
    et la fine dentelle des laminaires
    sur l’écran de l’eau

    Flottants comme ces algues entre deux profondeurs
    tendant leurs rets doux et luisants dont la main ne saisit
    que fuite coulissante

    les lieux m’échappent






    […]






    sur l’étroite avancée rocheuse
    ignorant la guipure d’écume au pied
    de la falaise
    et le point où la mer à l’horizon
    se coupe
    il est le centre d’une sphère
    où sa pensée
    se perd
    dans des scintillements d’azur cuisant
    comme le cri des sternes

    Phidias ! Phidias !

    L’enfant marche comme l’on danse
    dans la poussière du chemin
    que soulève
    son talon…



    Marilyne Bertoncini, La Dernière Œuvre de Phidias suivi de Invention de l’absence, version augmentée, Jacques André Éditeur, Collection Poésie XXI, 2017, pages 19 et 26.







    Bertoncini Phidias





    MARILYNE  BERTONCINI


    Bertoncini
    Source




    ■ Marilyne Bertoncini
    sur Terres de femmes

    À l’ombre du mûrier (extrait de L’Anneau de Chillida)
    La Dernière Œuvre de Phidias (lecture d’AP)
    Labyrinthe des nuits (lecture d’AP)
    Mémoire vive des replis (lecture de Sophie Brassart)
    [En nageant jusqu’au bout de ton rêve] (extrait de Mémoire vive des replis)
    La Noyée d’Onagawa (lecture d’AP)
    [Je l’imagine] (extrait de La Noyée d’Onagawa)
    Sable (extrait)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Recours au poème)
    plusieurs pages sur Marilyne Bertoncini
    Minotaur/a, le blog de Marilyne Bertoncini





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  • Stéphan Causse | [mes lèvres balbutient]




    Livre brulé
    « mémoire de cendres »
    Bernard Aubertin, Tableau feu, livre brûlé
    © galerie Jean Brolly
    Source








    [MES LÈVRES BALBUTIENT]





    mes lèvres balbutient une langue irrégulière
    comme si les pierres
    des vieux murs écroulés désignaient
    le verbe que nous avons perdu

    notre voix dans les veines
    ce maigre vitrail
    où la lumière vient
    où le silence veut




    j’ai beaucoup lu
    et je ne me souviens de rien

    mémoire de cendres

    chaque livre a sa mélodie
    d’oubli
    ma vie est faite de ce silence




    Stéphan Causse, Caresser la mer, Jacques André éditeur, Collection Poésie XXI, 2016, pp. 30-31.







    STÉPHAN CAUSSE


    Stéphan Causse
    Ph. : Vincent Decorde
    Source





    ■ Stéphan Causse
    sur Terres de femmes


    À deux pas dans le silence (lecture d’AP)
    [Les lieux où je vous emmène] (extrait d’À deux pas dans le silence)
    [Petite mer] (extrait de Boire le temps)
    Cévenne Séranne




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site de Jacques André éditeur)
    une notice bio-bibliographique sur Stéphan Causse





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  • Geneviève Vidal | Loger Lumière



    LOGER LUMIÈRE



    Visages
    en mal de douceur

    se voudraient logis de lumière

    mais    poumons désaccordés
    disjonction des preuves

    Battement des volets
    fondent les oiseaux noirs

    ombres agrandies de leur tumulte

    Apatride ton nom    Lumière

    allant par ciels arbres vagues

    fuseau d’oiseaux blancs

    Parfois t’envahit une pourriture

    Quel signe guérira nos plaies

    Tes brisures touchent à l’intime

    Mise à nu des chairs

    Pourquoi tant d’ennemis
    affairés à te cacher

    Périclite la confiance

    Gémir      à l’unisson d’un soleil malade

    Soif que rien n’étanche hormis ta clarté

    Pertes que seul ton soleil restaure

    Tenir
    dans les tempêtes

    Patiente à te faire croître     Lumière
    arbre en majesté

    désir d’air
    vidé de son sang noir

    Crescendo
    tes yeux m’enveloppent d’un feu ample et doux
    m’emportent
    de par les sept mondes

    Decrescendo
    revenir à l’obscur au froid au fermé

    armée de lueurs



    Geneviève Vidal, « 4. Apatride ton nom », Vêtue de vent suivi de Nuit balinaise, Jacques André Éditeur, collection POÉSIE XXI, 2014, pp. 48-49.







    Geneviève Vidal, Vêtue de vent.jpg 2





    GENEVIÈVE VIDAL



    ■ Geneviève Vidal
    sur Terres de femmes

    Exil
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Vie donner/nommer



    ■ Voir aussi ▼

    le site de Geneviève Vidal
    → (dans la Poéthèque du site du Printemps des poètes)
    une fiche bio-bibliographique sur Geneviève Vidal






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  • Marie-Ange Sebasti, Cette parcelle inépuisable

    Marie-Ange Sebasti, Cette parcelle inépuisable,
    Jacques André éditeur, Collection Poésie XXI, 2013.



    Lecture d’Angèle Paoli





    Pourtant, malgré la faille, le bleu, toujours,
    « Pourtant, malgré la faille, le bleu, toujours,
    s’instaurait, me rattrapait »
    Ph., G.AdC







    EN SORTANT DE SA RÉSERVE…




    Poète sensible, qui garde au secret les sentiments qui l’habitent, Marie-Ange Sebasti se livre ici, dans les pages de Cette parcelle inépuisable, par menus lests. Et c’est d’abord la Terre, — « terre sienne » — qui inaugure, dans les contrastes d’ombre et de clarté qu’elle engendre, l’ouverture de ce nouveau recueil poétique.

    Cela commence avec le « rose chair » de l’enfance du poème inaugural. Par cette exploration d’une « parcelle inépuisable » d’où surgit l’enfant de jadis dans toute l’impulsivité de sa jeunesse. L’enfant à qui la poète d’aujourd’hui confie le pouvoir de s’emparer de l’adulte, de le secouer de son « long sommeil », de le bousculer dans ses certitudes, de le confondre avec ses souvenirs.

    Soudain l’enfant est là, dans toute sa puissance créatrice — « Il démonte les lucarnes  /  et défie les étoiles » —, présence troublante qui dérange par son inventivité.


    « Pourquoi cesser d’avoir faim  /  de sa turbulence », interroge la poète.


    Le monde de l’enfance est au cœur des poèmes, qui ramènent avec eux, dans le chalut des mots, leurs bons génies et leurs comptines. Les formules magiques ouvrent les portes des jeux mais aussi celles des petites cruautés d’enfants, celles qui excluent et tiennent à l’écart celui d’entre eux/elles qui n’a pas les clés de « colegram ».

    Dans son désir de se faire « archiviste » des gestes du passé, la poète recherche le lien qui l’unit à la petite fille qu’elle fut, afin de renouer avec elle ses pactes d’enfance. Dans son désir de se faire christophore, elle se dicte ses ordres :


    « Soulève cet enfant

    Assieds-le fermement sur tes épaules

    Rapproche-le du ciel »


    Lui confiant ainsi une part de pouvoir :


    « Il saura bien te décrire l’horizon ».


    Dès cet instant, toujours mimant les inventions de l’enfance, la poète oscille entre incertitudes, menus échecs, impatiences à vivre, recommencements et reprises. Mais toujours rebondit sur la frange d’écume et toujours se remet à ravauder les « images » sur lesquelles elle s’élance. Elle retrouve alors cette « part des anges » qui lui donne l’élan vital propre à soulever le « mortier des heures grises » et à délivrer le monde de ses emmurements.

    À travers la série des infinitifs — « Préparer  /  lancer  /  délivrer  /  libérer  /  rebâtir… » — qui sont comme les jalons de son programme d’actions poétiques, la poète s’invective avec douceur et fermeté. Parfois, au cœur de ces défis, d’autres silhouettes surgissent, qui avaient emporté avec elles, dans de lointaines expéditions, des rêves de retours victorieux. Et s’en reviennent, chargées d’images cahotantes. Dans des vers brefs, la parataxe fait surgir les étapes d’un « interminable western ». Archiviste puis calligraphe, la poète se sait impatiente à adoucir le monde. Même si sa « palette s’emporte  /  s’éloigne », l’acrobate qu’elle se dit être, « exerce ses pinceaux  /  à rattraper la joie  /  sur la ligne de fuite ». Le doute pourtant l’assaille dont elle repousse les brûlures. Aux interrogations qui se font jour, elle oppose le silence, celui-là même qui « a gonflé » son « chargement de mots ».

    Quant aux morts, la poète les nimbe d’un même optimisme que les vivants, accordant à leurs fantômes une vie propre et parfumée :


    « Bientôt ils sentiront la lavande

    des armoires bien rangées ».


    Optimiste ? Oui. Parce que profondément croyante ? Sans doute. Quoi qu’il en soit, exploratrice infatigable du temps et des blessures que celui-ci inflige, la poète se refuse à tout repli dans la douleur, à toute négation de la joie. Ainsi, confie-t-elle : « Pourtant, malgré la faille, le bleu, toujours,   / s’instaurait, me rattrapait ». Toujours en chemin, « elle monte lentement  /  en tenant bon la rampe  /  de l’escalier trop raide ». Elle progresse, décidée, « vers ce rai de lumière  /  qui patiente serein… »

    Lucide sur elle-même et sur les traits qui fondent sa personnalité, la poète évoque sa réserve — « Hier  /  en sortant de ma réserve  /  j’ai cru voir […] ». Et pour qui a le privilège de connaître un peu Marie-Ange Sebasti, cette expression polysémique fait sourire. Car sa réserve est sans nul doute son plus fidèle atout, celui qui conduit la poète sur la ligne de fuite d’un humour et d’une espièglerie qui la rendent très attachante. Ainsi surprend-elle par les façons d’oiseau qu’elle a de déplacer les images à cloche-pied. Ou à petits coups de pinceaux furtifs.

    Un humour qui fait de cet ouvrage poétique une « parcelle inépuisable » à explorer. Et à savourer. Sans réserve.



    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli







    Marie-Ange Sebasti, Cette parcelle inépuisable







    MARIE-ANGE  SEBASTI


    Sebasti
    Image, G.AdC





    ■ Marie-Ange Sebasti
    sur Terres de femmes

    [Un chemin de silence a gonflé ton chargement de mots] (extrait de Cette parcelle inépuisable)
    une fiche bio-bibliographique [BIO-BIBLIO] sur Marie-Ange Sebasti
    → une petite anthologie poétique de
    Marie-Ange Sebasti
    Demain (extrait de Marges arides)
    → « 
    Notre héritage n’est pas forteresse »
    Parlemente (extrait de La Porte des lagunes)
    Plage d’encre (extrait de Haute plage)
    Quand les îles pouffent de rire (extrait de Presque une île)
    Une petite vieille en noir (extrait de Paroles pour une île)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Ils étaient partis
    → (dans la galerie Visages de femmes)
    le Portrait de Marie-Ange Sebasti (+ un extrait de Paroles pour une île et de Corse, dans le chalut des jours)
    → (avec Monique Pietri)
    Bastia à fleur d’eau
    → (avec Monique Pietri)
    Villes éphémères (note de lecture d’AP)
    → (avec Monique Pietri)
    Garder infatigablement les yeux ouverts (extrait de Villes éphémères)



    ■ Voir aussi ▼

    le site personnel de Marie-Ange Sebasti





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