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  • 8 février 2008 | Friederike Mayröcker, Scardanelli

    « Poésie d’un jour

    Éphéméride culturelle à rebours



    SUR LE COBENZL



    ce petit coin de terre où l’hydrant peint
    en bleu : clapote tandis que les cimes des chênes
    vers le Cobenzl : gravissant le sentier forestier presque plat bordé
    d’enclos à chevaux où aussi ânesses et chèvres
    rouges puis gagnant le rondeau belvédère où le regard vagabonde
    des hauteurs obscures aux vallées éclatantes : uni mur-
    mure du fleuve entre leurs bras, plus tard
    la part sombre de la forêt où PARENTES voix de miel d’oiseaux
    jusqu’au sentier où les humides (phalliques) racines
    tandis que du ravin terriblement surgi à
    droite les bêtes dociles : brebis laineuses remontaient comme
    si des ailes leur étaient poussées — ah cette urgence de saisir ta
    main pour ne pas devoir céder au besoin
    de me précipiter dans l’abîme (à celui dépourvu de fleurs)
    lorsque l’œil malade le gauche se mit à larmoyer : le cil
    1 pure fontaine battante 1 ondée de larmes les lachrymae,
    John Dowland

    8.2.08



    Friederike Mayröcker, Scardanelli [Suhrkamp Verlag, Berlin, 2012], Atelier de l’agneau éditeur, Collection transfert, 2017, page 22. Traduit de l’allemand (Autriche) par Lucie Taïeb. Postface de Marcel Beyer.






    Scardanelli 2





    FRIEDERIKE MAYRÖCKER


    Friederike Mayrocker
    Source




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur En attendant Nadeau)
    Dans les jardins étrangers (lecture de Scardanelli de Friederike Mayröcker par Mireille Gansel)
    → (sur aller aux essentiels)
    d’autres extraits de Scardanelli



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  • Doina Ioanid, Le Collier de cailloux





    LE COLLIER DE CAILLOUX
    (extraits)




    Je ne veux pas être un bâtisseur obèse. Je ne veux pas m’adapter au rythme des grandes villes, ni escalader des gratte-ciels, et surtout pas être la femme du jour en polaroïds. Peut-être que je ne sais pas encore très bien ce que je veux. Mais parfois, lorsque je retiens mon souffle pour entendre le tien, il me semble que tout devient limpide et aussi frais que le linge qui sèche sur la corde, dehors, dans le froid.



    […]



    J’ai frotté ma peau avec des aiguilles de pin, avec de l’écorce et de la sciure, puis avec de la terre meuble et du sable. J’ai frotté ma peau jusqu’au sang, pour me défaire de tout ce que j’ai appris jusqu’à présent. Ainsi, je pourrai savoir ce que je désire vraiment, car cette motte de chair ensanglantée ne peut mentir. Ni le hurlement sous la pluie acide.



    […]



    J’ai un collier de petits cailloux. Je les ai ramassés dans les gares, sur les routes asphaltées au ballast, dans les carrières abandonnées, dans mes chaussures, dans les fontaines de nouvelles terrasses, dans les cabas des copains. Tard dans la nuit, je mets le collier autour de mon cou et je me faufile dans les rues. Pliée sous son poids, presque cassée en deux, je tinte tout le temps, leurrant les renards dans les vitrines des magasins.



    […]



    Finalement, tout me trahit, ma peau, ma mémoire et mon pull turquoise déjà avachi. Je vis dans l’ombre du mur, de la gouttière, sans journal, sans projet, sans destination précise. Je vis au fil des jours qui passent.



    Doina Ioanid, Le Collier de cailloux, poèmes du passage [Poeme de trecere, Editura Vinea, Bucureşti, 2005], Atelier de l’agneau, Collection transfert, 2017, pp. 14, 16, 19, 25. Traduit du roumain par Jan H. Mysjkin avec l’œil complice de Monica Salvan. Préfacé par Carmen Muşat.







    Doina Ioanid  Le Collier de cailloux





    DOINA IOANID


    Doina Ioanid
    Ph. Jan H. Mysjkin



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site d’Atelier de l’agneau éditeur)
    la fiche de l’éditeur sur Le Collier de cailloux





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