Étiquette : Czernovitz


  • Ilana Shmueli | Incline-toi sur tes morts



    NEIGE DICH ZU DEINEN TOTEN



    Neige dich zu deinen Toten
    sie hören
    sie schauen
    sie leben dir zu

    sprechen dir zu
    kaum noch vernehmbar

    Weißt du noch?






    BOW DOWN TO YOUR DEAD



    Bow down to your head
    they hear
    they are watching
    they live toward you

    speak toward you
    Barely perceptible

    Do you remember ?




    Ilana Shmueli, Nie wieder laufen gegen den Wind, in Zwischen dem Jetzt und dem Jetzt [Rimbaud Verlag, 2007], Toward Babel, Poems and a Memoir, The Sheep Meadow Press, Rhinebeck, NY, 2013, pp. 128-129. Translated by Susan H. Gillespie.








    Shmueli_gedichte







    INCLINE-TOI SUR TES MORTS



    Incline-toi sur tes morts
    ils écoutent
    ils regardent
    ils te vivent

    te parlent
    à peine audibles encore

    le sais-tu encore ?




    Ilana Shmueli in Poèmes de Czernovitz, Douze poètes juifs de langue allemande traduits de l’allemand et présentés par François Mathieu, Éditions Laurence Teper, Collection Bruits du temps, 2008, page 198.





    ■ Ilana Shmueli
    sur Terres de femmes

    [Écoute et regarde]
    Éjouissement dans la neige fraîche (+ notice bio-bibliographique)Jeudi 11 décembre 1969 | Lettre de Paul Celan à Ilana Shmueli
    Jeudi 11 décembre 1969 | Lettre de Paul Celan à Ilana Shmueli



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Lyrikline)
    plusieurs poèmes d’Ilana Shmueli (dont le poème ci-dessus) dits par l’auteure
    → (sur Agonia.net)
    un entretien d’Ilana Shmueli avec Marlena Braester (Source : revue Continuum, Revue des écrivains israéliens de langue française, N°. 6, « Hommage à Paul Celan »)
    → (sur Wikipedia.de)
    une notice sur Ilana Shmueli
    → (sur Ritesinstitutes.org)
    un entretien (en allemand) avec Ilana Shmueli au lendemain de la remise du Prix Theodor Kramer (2009)





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  • Ilana Shmueli | Éjouissement dans la neige fraîche




    De petits doigts brun vert dans l--corce rugueuse
    Ph., G.AdC





    TOLLEN IM NEUSCHNEE



    blendendes Weiß wie nie wieder
    und wie’s frostig im Kindermund schmilzt

    Flieder von damals
    und der Duft verborgener Veilchen

    Gras frisch gemäht
    glühende Sonne

    das Träumen im Nussbaum
    kleine grün-braune Finger auf rauher Rinde

    das alles — läßt sich’s noch schreiben?

    es zieht
    es zieht die gute Hand meiner Schwester
    die Hand
    die so früh wieder losließ




    Ilana Shmueli in Ein Kind aus guter Familie. Czernowitz 1924-1944, Rimbaud Verlag, Aachen, 2006.







    Shmueli 4






    WRESTLING IN FRESH SNOW



    blinding white as never again
    and the way it melts in a child’s mouth

    lilacs from those days
    the scent of hidden violets

    fresh-mown grass
    burning sunshine

    dreams in the walnut tree
    small green-brown fingers on rough bark

    all that — may we name it

    it tugs
    it tugs at the hand of my sister
    thet let go so early




    Ilana Shmueli, Let me walk across meadows, in Toward Babel, Poems and a Memoir, The Sheep Meadow Press, Rhinebeck, NY, 2013, p. 61. Translated by Susan H. Gillespie.






    ÉJOUISSEMENT DANS LA NEIGE FRAÎCHE



    blanc aveuglant comme jamais plus
    et comme gel il fond dans la bouche de l’enfant

    lilas de jadis
    et le parfum de la violette secrète

    gazon fraîchement tondu
    soleil brûlant

    le rêve dans le noisetier
    de petits doigts brun vert dans l’écorce rugueuse

    tout cela — peut-on le nommer encore ?

    il tire
    il tire la bonne main de ma sœur
    la main
    qui si tôt a lâché




    Ilana Shmueli in Poèmes de Czernovitz, Douze poètes juifs de langue allemande traduits de l’allemand et présentés par François Mathieu, Éditions Laurence Teper, 2008, page 193.






    Laurence-teper






        Ci-après une autre traduction (Lyrikline, 2009) de François Mathieu du poème ci-dessus :




    FOL AMUSEMENT DANS LA NEIGE FRAÎCHE



    un blanc aveuglant comme jamais plus
    et comme il fond glacé dans la bouche des enfants

    lilas d’autrefois
    et le parfum des violettes secrètes

    herbe fraîchement tondue
    soleil brûlant

    les rêves dans le coudrier
    de petits doigts brun-verts sur l’écorce râpeuse

    tout cela – ai-je encore le droit de l’écrire ?

    tire
    tire la bonne main de ma sœur
    la main
    qui si tôt encore a lâché






    Ilana Shmueli (née Liane Schindler) est née à Czernovitz (aujourd’hui Tchernovtsy en Ukraine) le 7 mars 1924. Elle est morte à Jérusalem le 11 novembre 2011. Elle a raconté ses vingt premières années dans un ouvrage paru en 2006, Une enfant de bonne famille. Czernovitz 1924-1944 (Ein Kind aus guter Familie. Czernowitz 1924-1944, Rimbaud Verlag, Aachen), et notamment la période de guerre où (ayant échappé au “transfert” par l’occupant soviétique de plusieurs milliers d’habitants de Czernovitz vers la Sibérie), elle fréquenta Paul Antschel (Paul Celan) et Rose Ausländer, un « monde parallèle magique » où l’on étudiait Spinoza, Nietzsche, Rilke, Trakl, George, Kraus, et, avec Paul Antschel, « qui savait si excellemment le français », lisait Villon, Verlaine, Baudelaire et Rimbaud.

    Ilana Shmueli est venue tardivement à l’écriture :

    « Étrangère inquiète entre l’allemand et l’hébreu — j’ai commencé sur le tard à écrire des poèmes, en allemand et en hébreu ; des poèmes qui ont presque attendu toute une vie pour finalement prendre la parole », écrit-elle dans la préface à son unique recueil de poèmes en allemand (Zwischen dem Jetzt und dem Jetzt. Gedichte [Entre l’à-présent et l’à-présent. Poèmes]. Rimbaud Verlag, Aachen, 2007, page 5).

    « Ma rencontre avec Paul Celan m’a fait énormément comprendre sa poésie, devenue au cours des années une partie essentielle de ma pensée et de ma sensibilité. J’ai essayé de traduire quelques-uns de ses derniers poèmes en hébreu [Sag, daß Jerusalem ist. Über Paul Celan. Oktober 1969 – April 1970, * Isele, 2001 ; reed. Rimbaud Verlag, 2010]. En dépit de mes incertitudes, de mes doutes, d’une profonde appréhension, je me suis mise moi-même à écrire. Dans mon dialogue avec la poésie de Celan, son influence s’exprime souvent clairement et consciemment. En revanche, parfois, sa voix sonne fortuitement, très inconsciemment dans mon écriture. Mais mes poèmes ont suivi leur propre chemin, un étroit chemin. » (Zwischen dem Jetzt und dem Jetzt, id.). Poèmes aussi lapidaires que les derniers poèmes de Paul Celan.

    Une édition française de la Correspondance 1965-1970 Paul Celan | Ilana Shmueli (Paul Celan | Ilana Shmueli Briefwechsel, Suhrkamp Verlag KG, Frankfurt am Main, 2004, édition établie par Ilana Shmueli et Thomas Sparr) a été publiée aux éditions du Seuil (Collection La Librairie du XXIe siècle) en 2006, dans une traduction de Bertrand Badiou (avec le concours de Martin Ziegler pour la traduction des poèmes inclus dans cette correspondance). L’édition américaine de cette correspondance, établie par Norman Manea (The Sheep Meadow Press, Riverdale, NY), est disponible depuis le 15 février 2011.

    Une édition américaine des poèmes d’Ilana Shmueli (Toward Babel. Poems and a Memoir) a paru en décembre 2013 dans une traduction de Susan H. Gillespie (The Sheep Meadow Press, Rhinebeck, NY 12572).



    * Une traduction en français de cet ouvrage (dans une traduction de Martin Ziegler) a bien été annoncée en 2006 par les éditions Galaade, mais il ne semble pas que l’éditeur ait donné suite à son projet.





    Correspondance Celan Shmueli





    ■ Ilana Shmueli
    sur Terres de femmes

    [Écoute et regarde]
    Incline-toi sur tes morts
    Jeudi 11 décembre 1969 | Lettre de Paul Celan à Ilana Shmueli



    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Lyrikline)
    plusieurs poèmes d’Ilana Shmueli (dont le poème ci-dessus) dits par l’auteure
    → (sur Agonia.net)
    un entretien d’Ilana Shmueli avec Marlena Braester (Source : revue Continuum, Revue des écrivains israéliens de langue française, No. 6, « Hommage à Paul Celan »)
    → (sur Wikipedia.de)
    une notice sur Ilana Shmueli
    → (sur Ritesinstitutes.org)
    un entretien (en allemand) avec Ilana Shmueli au lendemain de la remise du Prix Theodor Kramer (2009)
    → (sur remue.net)
    32. La nuit sous les ordres du sable, un article de Jean-Marie Barnaud (30 novembre 2006) sur la Correspondance (1965-1970) de Paul Celan et Ilana Shmueli
    → (sur érudit)
    « Presque une prière muette », un article de Ginette Michaud sur la Correspondance (1965-1970) de Paul Celan et Ilana Shmueli






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