Étiquette : édition bilingue


  • Dino Campana | L’enfance naît




    L’INFANZIA NASCE…





    L’infanzia nasce da un ritorno di se stessi giacché in uno strano eco s’immobilizza e s’allontana dai giorni; anzi nasce proprio da una cosa « specchiata » con le ridenti spighe gialle e con i campanili conoscenza eterna (di poco tempo) e sempre a sapersi da un tempo infinito come a stare sempre sulla riva di un giorno.







    L’ENFANCE NAÎT…





    L’enfance naît d’un retour de soi-même lors qu’en un étrange écho elle s’immobilise et s’éloigne des jours ; même elle naît véritablement d’une chose « mirée » avec les riants épis jaunes et avec les clochers connaissance éternelle (de peu de temps) et toujours à se savoir depuis un temps infini comme à être toujours sur la rive d’un jour.



    Dino Campana, Chants orphiques et autres poèmes, édition bilingue, Points, 2016, pp. 314-315. Poèmes choisis, présentés et traduits de l’italien par Irène Gayraud et Christophe Mileschi.






    Dino Campana, Chants orphiques




    DINO CAMPANA


    Dinocampana
    Source



    ■ Dino Campana
    sur Terres de femmes

    Pampa
    O, Sicilienne arrogante
    28 juillet 1916 | Lettre de Sibilla Aleramo à Dino Campana
    25 avril 1917 | Lettre de Sibilla Aleramo à Dino Campana



    ■ Voir aussi ▼

    le site officiel (en italien) de Dino Campana
    → (sur Letteratura italiana Einaudi)
    l’édition intégrale (en italien) des Canti orfici
    → (sur Google Livres)
    de longs extraits de l’édition bilingue (L’Âge d’homme) des Canti orfici
    Iris Llorca, Le voyage : un parcours initiatique dans l’écriture des Canti orfici (Journée d’Étude Poésie-Prose : Allers-Retours du 5 mars 2005. Université de la Sorbonne Nouvelle – Paris III)







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  • Gunvor Hofmo, Tout de la nuit est sans nom

    par Muriel Stuckel

    Gunvor Hofmo,
    Tout de la nuit est sans nom, édition bilingue,
    Collection « Pour une rivière de vitrail »,
    éditions Rafael de Surtis, 2009. Préface de Ole Karlsen.
    Traduit du norvégien par Pierre Grouix et Grete Kleppen.



    Lecture de Muriel Stuckel



    GUNVOR HOFMO, VOIX D’OMBRE ET DE NEIGE : UNE POÉTIQUE DU MURMURE




    « L’œuvre solitaire du poète
    ciselant la matière précieuse des mots
    est l’acte de débusquer un vis-à-vis. »


    Emmanuel Levinas





    La publication en 2009 de l’anthologie bilingue Tout de la nuit est sans nom (éditions Rafaël de Surtis) a eu le mérite de nous révéler la singularité d’une voix poétique de Norvège, celle de Gunvor Hofmo (1921-1995), une poète du Nord qui, selon Ole Karlsen (dans sa présentation de l’ouvrage), « peut se mesurer à des poètes tels que Georg Trakl, Nelly Sachs et Paul Celan ».

    Élaborant une poétique du murmure, cette œuvre nous touche par son refus de tout effet lyrique. Sous « l’éclat stellaire du deuil », une voix d’ombre, bouleversée par la disparition tragique de l’amie juive Ruth Maier, victime de la grande rafle en Norvège du 26 novembre 1942, s’énonce pour esquisser une dramaturgie de l’intime, dès le poème inaugural « Je veux rentrer » :

    Je veux revenir habiter parmi les hommes-

    tel un aveugle

    transpercé dans l’obscurité

    par l’éclat stellaire du deuil.

    (p. 15)

    Cet oxymore, où se redouble l’idée de lumière cosmique, succède au motif de l’ombre qui, par l’intercession de « l’aveugle transpercé dans l’obscurité », avoue sa force expressive : ne figure-t-il pas la poète constellée par le deuil, source véritable de sa création poétique ? D’autant plus après l’épreuve du silence douloureux qu’elle s’est infligé durant ses longues années d’enfermement, de 1955 à 1971.

    Or, quand elle formule le désir de « revenir habiter parmi les hommes- », le tiret qui crée un effet de suspension à la fin du vers laisse pressentir la mise à l’écart de sa voix poétique :

    mais je suis de l’autre côté, là où les brins d’herbe

    sont des cloches qui sonnent de deuil, d’attente amère.

    Je tiens la main d’un être humain,

    regarde dans les yeux d’un être humain,

    mais je suis de l’autre côté,

    là où l’être humain est une brume de solitude et d’angoisse.

    (p. 17)

    La mise à l’écart, la mise « de l’autre côté », se précise en des termes relevant bien d’une voix d’ombre :

    mais je suis un être humain jeté aux confins,

    et j’entends bruire le silence,

    j’entends crier le silence

    depuis des mondes plus profonds que celui-ci.

    (p. 17)

    Cette voix des profondeurs n’est pas sans révéler ses inflexions orphiques, à l’écoute du silence des confins que l’acte poétique seul pourra métamorphoser en murmure endeuillé :

    J’ai vu mon amie,

    l’unique, je l’ai vue

    partir pour la mort.

    Et depuis, les arbres sont en deuil,

    et depuis, la Mort a tiré

    mon corps, mon âme, ma voix

    dans l’océan du désespoir !

    (p. 25)

    La voix d’ombre et de deuil se fait voix de nuit, même si « la nuit n’est pas assez obscure », pouvant « exploser d’elle-même ». Elle culmine dans un poème dont le titre pose une équivalence métaphorique saisissante : « La nuit est un dieu. » Grâce au mot très doux d’« effleurement » qu’il comporte, on appréhende l’effet de sourdine qu’implique l’effacement de la voix énonciative Je : souvent la voix d’ombre s’inverse en voix de neige.

    Loin de souscrire au symbolisme hyperboréen de la neige plutôt convenu qui chercherait à lire Hofmo seulement comme une poète du Nord, on peut au contraire dégager les ressources signifiantes de cette métaphore pour saisir la singularité de son écriture poétique. Certes, on ne peut nier le symbolisme thématique de la voix de neige : elle émerge d’un paysage de l’entre-deux, entre l’automne et l’hiver, pour dire sa froidure intime, son cœur glacé d’effroi : « Le givre est déjà sous les mains des êtres humains, sous leurs pas ». Mais ne constituant pas toujours un motif concret ou étant seulement perceptible avec les « icebergs sous-marins qui dérivent dans la mer », la neige se présente aussi avec une double valeur d’abstraction et d’altérité, pour symboliser l’aspiration au renouvellement que suggère la blancheur paradoxale de la neige, à la fois virginale et génitrice :

    C’était une autre neige,

    une autre obscurité

    que dans cette nuit-là

    La neige accoucha de ton avenir

    […]

    Mais ensuite tu reconnus

    tout. Tous tes pas

    à travers le Monde

    résonnaient venus d’un enclos

    blanc de neige

    sous une lune qui voit.

    (p. 79)

    Dans le poème « Pas morts », où se proclame dès le titre le refus de la mort, la voix de neige résulte d’une métamorphose originale, subie par les mots eux-mêmes : des mots en neige, puis des mots en bouche, bouche qui aspire à une dimension cosmique, tissant des liens entre la terre et le ciel, pour apaiser sa soif de lumière et d’étoiles : la bouche même du poète au sens universel, ou la bouche de son double spéculaire, comme le suggère le jeu de l’interlocution ?

    Car la poésie de Gunvor Hofmo pose la question de la voix énonciative mise en scène de façon souvent problématique, oscillant entre l’affirmation d’un Je, l’apostrophe d’un Tu, la multiplication des Ils et l’effacement de toute personne, brouillant parfois le cheminement heuristique du lecteur.

    Si l’on relie deux poèmes qui se font écho, un véritable questionnement ontologique se formule : à la triple anaphore qui formule l’interrogation majeure de l’être dans « Suis-je ? » (p. 29) répond celle du dire dans « Testament pour une éternité », où les instances énonciatives entremêlent confusément un Je et un Tu pour réfléchir la scission du moi (p. 35).

    Mais le discours lyrique d’Hofmo élaborant souvent une mise en sourdine du Je, la voix poétique se fait également voix de neige. Cela nous amène à superposer au symbolisme thématique de la neige un symbolisme d’essence lyrique, désignant avec précision cette voix blanche qui s’énonce sans emphase, sans artifice, jusqu’à effacer ses propres notes, voire jusqu’à ensevelir ses propres traces.

    Ainsi le poème « Au sujet de “je” » ne comporte paradoxalement aucune occurrence de la première personne : la voix de neige, qui efface et ensevelit le Je qui la profère, se décrypte sous le subterfuge discret d’une triple tournure infinitive, au cœur du poème :

    Retentir, prendre soi-même forme

    dans les larmes perdues de Dieu,

    à mi-chemin entre agneau et vipère,

    laisser en vain le venin témoigner !

    (p. 21)

    Le lyrisme d’Hofmo propose des variations pour cette procédure d’étouffement du Je poétique, comme dans le poème éponyme « Tout de la nuit est sans nom », où la préposition de valeur privative prend tout son sens :

    Tout de la nuit est sans nom

    Calmes, heure après heure,

    les choses posent

    leur nom

    l’arbre et la pierre

    interprètent la voix de l’univers,

    perdent leur identité

    propre.

    (p. 83)

    À la privation du nom et à la perte de l’identité se conjugue une démarche interprétative qui prend valeur universelle : « la voix de l’univers » se substitue à celle discrète, effacée, blanche, de la poète, ne serait-ce que pour lui conférer de l’ampleur, lui permettre de résonner et de « chuchoter l’éternel », comme dans le poème « La bouche du soir », lui aussi dépourvu de Je.

    Cette voix de neige, à la fois blanche et universelle, sans effets lyriques appuyés mais reconnue de tous comme personnelle, se retrouve dans le poème qui traite symboliquement du motif immémorial des « Pyramides » :

    Patience ! dit le sable.

    Et les pyramides se dressent

    comme d’immenses cyprès

    comme d’éternelles nuques de dieux

    portant le poids du ciel.

    Le monde dont la pierre

    ressemble à celle de la lune

    Le monde dont la soif d’éternel

    Reflète les étoiles

    Les habite

    Et dans le sang des humains

    se confondent dieux et

    mortels.

    (p. 65)

    Effacer les traces du Je poétique grâce au recours à la troisième personne permet de refonder par le verbe l’architecture audacieuse des pyramides qui traverse les âges, miroir de ce « monde dont la soif d’éternel / Reflète les étoiles ». La voix de neige se fait alors discrètement cosmique, pour que « dans le sang des humains / se confondent dieux et / mortels. »

    Mais cet effacement ne permet-il pas de nouer voix d’ombre et voix de neige pour que s’élabore une poétique du murmure, à la fois discrète et intense, se situant entre le silence et le cri, se faisant incantatoire pour faire advenir un chant ontologiquement personnel ?

    Nulle imposture poétique, nul travestissement esthétique, nul déguisement rhétorique : la voix d’Hofmo nous touche par sa recherche d’authenticité, issue d’un entre-deux précaire, fragile, déchirée entre le silence de la douleur et le cri de la révolte : « De mille gorges j’ai parlé à travers la nuit » (p. 35). De même dans « D’une autre réalité » :

    On tombe malade à force d’appeler la réalité

    J’étais trop près des choses,

    à m’en brûler à travers elles

    (p. 17)

    Mais refusant de vibrer « comme un cri allant crescendo », la voix poétique d’Hofmo fait plutôt le choix musical de s’énoncer mezza voce. En harmonie profonde avec la thématique du murmure, elle s’affirme comme une voix de l’entre-deux, une mi-voix, qui entrelace douceur et douleur, comme dans « Les derniers mots », où le murmure se profère par les morts pour dire « trop tard, trop tard » (p. 27), ou dans « Hiver » où il se trouve indissolublement lié à la mort :

    Comme de la cendre, comme des ossements, tu resteras couché, devinant les nuits au-dessus de toi, les hautes maisons murmureront en toi, à jamais. (p. 47)

    Dans le poème consacré à « Vincent van Gogh », le murmure, négation du cri humain, se fait douceur harmonieuse :

    La nuit des ombres est passée

    les couloirs longs

    où les humains ne crient pas

    mais la solitude

    où la beauté du vase

    était encore un murmure

    d’harmonies

    non vécues.

    (p. 61)

    Murmure et solitude s’entremêlent aussi pour s’amplifier dans « Sans cesse murmurent des voix » où s’apprécie la richesse de la palette lexicale pour dire le murmure incessant entre le silence, le bruissement et la voix :

    Sans cesse murmurent des voix dans

    des rues vides d’êtres humains

    on dirait un bruissement de vent

    on dirait un bruissement de pluie

    les voix des humains pénétraient

    des façades, des trottoirs,

    des panneaux

    mais veulent retourner à

    l’humain

    et réclament en silence

    leur propre corps !

    (p. 87)

    Puis, comme dans le poème dédié au poète Henrik Wergeland qui évoque « les profondeurs murmurantes de l’univers » (p. 67), Hofmo associe étrangement le murmure à des instances qui le dépassent ou l’annihilent, comme l’universel ou l’éternel. Ainsi, dans le poème de clôture « La bouche du soir » :

    La bouche du soir se referme

    mais son murmure résonne

    dans les arbres, les rochers

    Elle chuchote l’éternel

    et la nuit qui vient

    où les éclairs, les uns après les autres,

    te montrent les images du Monde !

    (p. 101)

    La voix poétique vibre avec une tonalité véritablement mezza voce, pour restituer sans la compromettre la résonance universelle du murmure, à la fois végétale « dans les arbres » et minérale dans « les rochers ». Mais à cette dimension universelle se superpose l’évocation explicite de l’éternel, avec un jeu de variation lexicale nous faisant passer du nom « murmure » au verbe « chuchoter », pour l’adjoindre de façon oxymorique à « l’éternel ». Il s’agit là d’une belle trouvaille poétique, à même de symboliser toute l’intensité suggestive de la modalité mezza voce.

    Enfin, quand il est question dans « Invité sur la Terre » de « profondeur », d’« incessante création », du « défilé […] de millions d’années », la voix poétique emblématise tout cela par « un murmure neuf du néant », formule magnifique. Ne reflète-t-elle pas la poétique du murmure, parfaite conciliation symbolique de la voix d’ombre avec l’idée de « néant » et de la voix de neige avec l’idée de « neuf » ?

    Ainsi, par sa recherche d’authenticité, la poésie singulière d’Hofmo s’apprécie comme mise à l’épreuve du lyrisme convenu pour avouer sa modernité. Car si l’on compose avec ses plus belles trouvailles poétiques une constellation signifiante, ne peut-elle pas se définir comme « un murmure neuf du néant » désireux de nous dire « sous l’éclat stellaire du deuil », par-delà l’ombre et la neige : « sans un son ta voix atteindra chacun » ? Mieux encore : « À présent ton âme se faufile à travers l’éternel ».

    « Sans un son » ou plutôt avec un murmure mezza voce, sa voix si personnelle parvient bien à « se faufiler à travers l’éternel », à nous atteindre au plus profond par la justesse de sa lyre intime. Ce faisant, elle devient universelle, illustrant la définition que propose Emmanuel Levinas du poème : « Il va vers l’autre. Il espère le rejoindre délivré et vacant ».

    Nul doute qu’Hofmo sache encore « débusquer » en chacun de nous « un vis-à-vis » mais, bien sûr, grâce au talent conjugué de Grete Kleppen et de Pierre Grouix, excellents passeurs de poésie, « ciselant » eux aussi « la matière précieuse des mots », entre la Norvège et la France.



    Muriel Stuckel
    D.R. Texte Muriel Stuckel
    pour Terres de femmes





    ___________________
    NOTE d’AP : une version synthétique de cette note de lecture a paru dans la revue Europe n° 983, mars 2011, pp. 352-354.




    GUNVOR HOFMO


    Gunvor Hofmo




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Les hommes sans épaules)
    une notice bio-bibliographique sur Gunvor Hofmo
    → (sur Recours au Poème)
    Voix d’ombre voix de neige (suite de poèmes de Muriel Stuckel dédiés à Gunvor Hofmo)
    → (sur le site du Ceriel)
    une notice bibliographique sur Muriel Stuckel



    ■ Autres notes de lecture de Muriel Stuckel
    sur Terres de femmes

    Jacques Estager, Douceur
    Stéphane Sangral, Circonvolutions






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  • Tatiana Daniliyants | Dédicace



    ПОСВЯЩЕНИЕ




    Полюби, как то, что ты любишь:
    как камень, как лист, как ноябрь,
    как холоднь ый лист y хоподного дыхания,
    как оставленный на yтро глоток вина.
    Неyжели ты никогда не станень пной?
    Тoй чacтью мeня, что ты так любишь, как
    Песᴏк. Boлнy. Огᴏнь.







    DÉDICACE




    Aime comme ce que tu aimes :
    comme une pierre, une feuille, novembre,
    comme feuille froide au souffle froid,
    gorgée de vin laissée pour le lendemain.
    Se peut-il que tu ne deviennes jamais moi ?
    Cette part de moi que tu aimes comme
    Le sable. La vague. Le feu.




    Tatiana Daniliyants, Blanc | Белое [Moscou, 2006], édition bilingue, Éditions Alidades, Collection Petite bibliothèque russe, 2015, pp. 14-15. Poèmes traduits du russe par Irène Imart.






    TATIANA DANILIYANTS


    Tatiana
    Source



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Wikiwand)
    une fiche bio-bibliographique sur Tatiana Daniliyants
    → (sur le site des éditions Alidades)
    la fiche de l’éditeur sur Blanc / Белое de Tatiana Daniliyants





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  • Hart Crane | Passage



    PASSAGE



    Where the cedar leaf divides the sky
    I heard the sea.
    In sapphire arenas of the hills
    I was promised an improved infancy.

    Sulking, sanctioning the sun,
    My memory I left in a ravine,—
    Casual louse that tissues the buckwheat,
    Aprons rocks, congregates pears
    In moonlit bushels
    And wakens alleys with a hidden cough.

    Dangerously the summer burned
    (I had joined the entrainments of the wind).
    The shadows of boulders lengthened my back:
    In the bronze gongs of my cheeks
    The rain dried without odour.

    “It is not long, it is not long;
    See where the red and black
    Vine-stanchioned valleys—”: but the wind
    Died speaking through the ages that you know
    And bug, chimney-sooted heart of man!
    So was I turned about and back, much as your smoke
    Compiles a too well-known biography.

    The evening was a spear in the ravine
    That throve through very oak. And had I walked
    The dozen particular decimals of time?
    Touching an opening laurel, I found
    A thief beneath, my stolen book in hand.

    “Why are you back here—smiling an iron coffin?
    “To argue with the laurel,” I replied:
    “Am justified in transience, fleeing
    Under the constant wonder of your eyes—.”

    He closed the book. And from the Ptolemies
    Sand troughed us in a glittering, abyss.
    A serpent swam a vertex to the sun
    —On unpaced beaches leaned its tongue and drummed.
    What fountains did I hear? What icy speeches?
    Memory, committed to the page, had broke.






    PASSAGE



    Au point où la feuille de cèdre divise le ciel
    J’ai entendu la mer.
    Dans les arènes de saphir de ces collines
    Une meilleure enfance me fut promise.

    Boudeur, vivant sous la règle du soleil,
    Mes souvenirs, je les ai laissés dans un ravin, —
    Poux grossiers qui ourdissent l’avoine,
    Qui nappent les rocs, rassemblent les poires
    Par boisseaux au clair de lune,
    Et réveillent les allées d’une toux invisible.

    L’été brûlait dangereusement
    (Je m’étais enrôlé dans les exercices du vent).
    Les ombres des blocs m’ont étiré le dos :
    Dans les gongs de bronze de mes joues
    La pluie a séché sans laisser d’odeur.

    « Ce n’est pas long, ce n’est pas long ;
    Regarde là-bas, là où le rouge et noir
    Vignent à bâtons levés les vallées ! » : mais le vent
    Mourut, comme sa parole passait les générations que tu connais
    Et étreins, cheminée sous la suie, cœur d’homme !
    Ainsi me fit-on virer, revenir sur mes pas, tout à fait comme
    Votre fumée compile une biographie trop connue.

    Le soir était une lance portée dans le ravin,
    Forte à fendre le chêne. Aurais-je donc passé
    Les décimales singulières que le temps compte par douzaines ?
    Au contact d’un laurier qui s’ouvrait, je tombai
    Sur un voleur tapi, qui tenait mon livre dérobé.

    « Pourquoi reviens-tu ici — avec un cercueil de fer pour tout sourire ?
    — C’est pour me quereller avec le laurier », répondis-je :
    Suis bien en droit d’être éphémère, si c’est pour fuir
    La stupeur constante de ton regard —. »

    Il referma le livre. Et, des Ptolémées
    Le sable nous siphonna dans un abîme étincelant.
    Un serpent fit sa nage de vortex vers le soleil
    — Apposa sur des plages vierges sa langue, et tambourina.
    Quelles fontaines ai-je ouïes ? quels discours glacés ?
    Le souvenir, une fois couché sur la page, s’est rompu.



    Hart Crane, Bâtiments blancs, in L’Œuvre poétique, édition bilingue, Arfuyen, Collection Neige, volume 31, 2015, pp. 64-65-66-67. Traduit de l’américain par Hoa Hôï Vuong.






    Hart Crane




    HART  CRANE


    Crane
    Source



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions Arfuyen)
    une notice bio-bibliographique sur Hart Crane
    → (sur le site des éditions Arfuyen)
    la fiche de l’éditeur sur L’Œuvre poétique de Hart Crane






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  • Ingeborg Bachmann | Schatten Rosen Schatten




    Ingeborg Bachmann Guidu
    Image, G.AdC






    SCHATTEN ROSEN SCHATTEN




    Unter einem fremden Himmel
    Schatten Rosen
    Schatten
    auf einer fremden Erde
    zwischen Rosen und Schatten
    in einem fremden Wasser
    mein Schatten






    OMBRES ROSES OMBRES




    Sous un ciel étranger
    ombres roses
    ombres
    sur une terre étrangère
    entre roses et ombres
    dans une eau étrangère
    mon ombre



    Ingeborg Bachmann, Invocation de la Grande Ourse (1956) in Toute personne qui tombe a des ailes (poèmes 1942-1967), édition bilingue, Éditions Gallimard, Collection Poésie/Gallimard, 2015, pp. 358-359. Édition, introduction et traduction de l’allemand (Autriche) par Françoise Rétif.






    Bachmann ailes





    INGEBORG BACHMANN


    Ingeborg Bachmann.jpg 2
    D’après photo © Picture Alliance/Rue des Archives



    ■ Ingeborg Bachmann
    sur Terres de femmes

    Lettres à Felician (lecture d’AP)
    20 juillet 1945 | Ingeborg Bachmann : lettre à Felician
    17 octobre 1973 | Mort d’Ingeborg Bachmann



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions Gallimard)
    la fiche de l’éditeur sur Toute personne qui tombe a des ailes
    → (sur La République des livres de Pierre Assouline)
    Ingeborg Bachmann, une poésie qui ne se résigne pas






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  • Barbara Pogačnik | Thèbes




    TEBE




    Tomaž, rdeče sonce na tleh,
    mlade mušice proti rdečemu soncu na
    modrih oblakih, travnik in zidek objeta v enem
    samem tankem
    steblu svobodnega. Živali preidejo
    v rastline in človek
    preide v rastline in in rastline preidejo
    v predmete in predmeti preidejo v dih,
    in dih preide v dim in postane tempelj
    oblik, ki jih zdaj lahko izdihamo,
    soba postane smer; upor se izmika črti,
    usta jedo, ko so rdeče rože v vencih
    in ko ljudi obsijejo raznobarvni oblaki.
    Navezanost postane negibna noga, čudež stopala
    je na tem svetu in vzdržimo v kubizmu, v razgretem
    srednjem veku, kjer se konji smejijo,
    ljudje grizejo drug drugega
    po glavi, in duh božji je v potoku
    in še danes pljuva.
    Daj nam danes naš vsakdanji smeh in
    obpusti nam naše počasne roke, Miró
    besed.






    Mirò des motsPh., G.AdC







    THÈBES

    En hommage à Tomaž Šalamun



    Tomaž, le soleil rouge par terre,
    des jeunes moucherons vers le soleil rouge sur
    les nuages bleus, le pré et le mur du jardin main dans la main,
    étreints dans une seule tige frêle
    de celui qui est libre. Les animaux passent
    en végétaux et l’homme
    passe en végétaux et les objets passent en souffle,
    et le souffle passe en fumée pour devenir le temple
    des formes que nous pouvons à présent expirer.
    La chambre devient direction, la résistance fuit
    la ligne droite, la bouche mange, les fleurs rouges sont en corolles,
    les nuages de différentes couleurs éclairent les gens.
    L’attache devient une jambe qui ne peut bouger, le miracle du pied est dans le monde, on réussit à tenir le coup du cubisme, le coup du moyen âge échauffé où les chevaux rient, et où
    les hommes se mordent la tête
    l’un l’autre, et l’esprit saint est dans le ruisseau,
    à cracher tout autour jusqu’à nos jours.
    Donne-nous aujourd’hui notre rire de ce jour et
    pardonne-nous nos mains si lentes, le Mirò
    des mots.

    Janvier 2015



    Barbara Pogačnik, in Et même quand le soleil [poèmes de Milan Dekleva, Maja Vidmar, Barbara Pogačnik, Uroš Zupan, Tomaž Šalamun], LUD Literatura & Éditions Éoliennes, Ljubljana/Bastia, 2015, pp. 74-75. Édition bilingue. Poème traduit du slovène par Stéphane Bouquet, Guillaume Métayer et l’auteur.






    Et-meme-quand-le-soleil






    BARBARA   POGAČNIK


    Barbara Pogacnik
    Source



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Levure Littéraire)
    plusieurs poèmes de Barbara Pogačnik
    → (sur Recours au poème)
    une notice bio-bibliographique sur Barbara Pogačnik (+ cinq poèmes)
    → (sur Terres de femmes)
    Tomaž Šalamun | Va



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  • Pier Paolo Pasolini | [Ma io parlo… del mondo]



    Les premières marques d’une vieillesse féroce
    Source






    [MA IO PARLO… DEL MONDO]



    Ma io parlo… del mondo ― e dovrei,
    invece ― parlare dell’Italia, e anzi,
    di una Italia, di quella di cui sei,

    con me, destinatario dei miei versi, figlio:
    fisica storia in cui ti circostanzi.
    L’ho chiamato « innocente », il mondo, io,

    io, in quanto cieco, figlio martoriato.
    Ma se guardo intorno questi avanzi
    d’una storia che da secoli ha dato

    soltanto servi… questa Apparizione
    in cui la realtà non ha altro indizio
    che la sua brutale ripetizione…

    che scena… espressionistica! Penso a un giudizio
    subìto senza senso… le toghe… le tristi autorità del Sud…
    dietro i visi dei giudici ― in cui il vizio

    è un vizio di dolore, che denuda
    ambienti miserandi ― non si leggeva che impotenza
    a uscire da un’oscura realtà di parentele, da una cruda

    moralità, da una provinciale inesperienza…
    Quelle fronti da Teatro dell’Arte,
    quei poveri occhi di obbedienti onagri

    intestarditi, quelle orecchie basse,
    quelle parole che per mascherare
    il vuoto si gonfiavano a recitare una parte

    di paterna minaccia, di indignazione floreale!
    Ah, io non so odiare: e so quindi che non posso
    descriverli con la ferocia necessaria

    alla poesia. Dirò solo con pietà di quella faccia
    di calabrese, con le forme del bambino
    e del teschio, che parlava dialettale

    con gli umili, scolastico coi grandi.
    Che ascoltava attento, umano,
    e intanto, negli ineffati e nefandi

    fori interiori, covava il suo piano
    di timido che il timore fa spietato.
    Ai lati, altre due faccie ben riconoscibili,

    faccie che per strada, in un bar affollato,
    sono le faccie deboli, poco sane,
    di precoci invecchiati, di malati

    di fegato: di borghesi il cui pane
    certo non sa di sale, non ignobili, no,
    non prive affatto di sembianze umane

    nel pungente nero degli occhi, nel pallore
    delle fronti martoriate dalla prima
    feroce anzianità… Un quarto inviato del Signore

    ― certo ammogliato, certo protetto da un giro
    di rispettabili colleghi nella sua città
    di provincia ― rappreso in un sospiro

    di malato nei visceri o nel cuore ―
    se ne stava in un banco isolato: come sta
    chi si prepara a un premeditato disamore.

    E davanti a questi, il campione: colui che ha
    venduto l’anima al diavolo, in carne e ossa.

    […]



    Pier Paolo Pasolini, La realtà in Poesie in forma di rosa, Garzanti Editore, 1964, 1976.






    [MAIS JE PARLE… DU MONDE]



    Mais je parle… du monde — et je devrais
    plutôt — parler de l’Italie, et même
    d’une certaine Italie, de celle dont tu es,

    avec moi, destinataire de mes vers, le fils :
    histoire physique dans laquelle tu te circonscris.
    Je t’ai appelé « innocent », le monde, moi,

    Moi, en tant qu’aveugle, fils martyrisé.
    Mais si je regarde autour ces restes
    d’une histoire qui depuis des siècles n’a donné

    que des esclaves… cette Apparition
    où la réalité n’a pas d’autre indice
    que sa brutale répétition…

    quelle scène expressionniste ! Je pense à un jugement
    subi, privé de sens… les toges… les tristes autorités du Sud…
    derrière les visages des juges — dont le vice

    est un vice de douleur, qui dénude
    des milieux misérables — ne se lisait qu’impuissance
    à sortir d’une obscure réalité de parentés, d’une crue

    moralité, d’une provinciale inexpérience…
    Ces fronts de Commedia dell’Arte,
    ces pauvres yeux d’onagres obéissants

    entêtés, ces oreilles basses,
    ces mots qui pour masquer
    le vide s’enflaient pour jouer un rôle

    de menace paternelle, d’indignation Art nouveau !
    Ah, je ne sais pas haïr : et je sais donc que je ne peux pas
    les décrire avec la férocité nécessaire

    à la poésie. Je parlerai seulement avec pitié de ce visage
    de Calabrais, avec les formes de l’enfant
    et de la tête de mort, qui parlait en dialecte

    avec les humbles, dans un style scolaire avec les grands.
    Qui écoutait avec attention et humanité,
    et en même temps, dans les fors intérieurs

    tacites et indicibles, couvait son plan
    de timoré que la peur rend impitoyable.
    À ses côtés, deux autres visages bien reconnaissables,

    visages qui dans la rue, dans un bar plein de monde,
    sont les visages faibles, malsains,
    de vieux avant l’heure, de malades

    du foie : de bourgeois dont le pain
    n’a certes pas le goût de sel, pas ignobles, non,
    pas entièrement privés d’un semblant d’humanité,

    dans le noir transperçant des yeux, dans la pâleur
    des fronts martyrisés par les premières
    marques d’une vieillesse féroce… Un quatrième envoyé du Seigneur

    — évidemment marié, évidemment protégé par une clique
    de collègues respectables dans sa ville
    de province — figé dans un soupir

    de malade de digestion et de cœur —
    se tenait isolé sur un banc : comme quelqu’un
    qui se prépare à un désamour prémédité.

    Et devant eux, le champion : celui qui a
    vendu son âme au diable, en chair et en os.

    […]



    Pier Paolo Pasolini, La réalité (extrait) in Poésie en forme de rose, édition bilingue, Rivages poche | Petite Bibliothèque, 2015, pp. 124-125-126-127-128-129. Traduit de l’italien, annoté et préfacé par René de Ceccatty.





    Pier Paolo rose 2






    PIER  PAOLO  PASOLINI


    Pasolini
    Source



    ■ Pier Paolo Pasolini
    sur Terres de femmes

    5 mars 1922 | Naissance de Pier Paolo Pasolini
    22 septembre 1962 | Sortie de Mamma Roma (Pier Paolo Pasolini)
    2 novembre 1975 | Mort de Pier Paolo Pasolini
    Al principe
    A na fruta (+ bio-bibliographie)
    El cuòr su l’aqua
    Le chant des cloches
    Pier Paolo, le poète assassiné
    La Rage (extraits)



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  • Tennessee Williams | The island is memorable to us


    Tennessee Williams collage
    Collage, G.AdC







    THE ISLAND IS MEMORABLE TO US



    The island is memorable to us
    as the change of a mirror
    or an underground river.

    The island loses in going.
    it appears to be still.
    Half of it, now, is in shadow,

    and yet it increases in going,
    memorable as the moon’s changes.
    It makes unnoticed advances

    With an appearance of yielding;
    it slips through the fingers,
    a stone with a milky luster…

    No, you cannot hold it, it
    twists like a woman! Its nights
    are memorable to us: the black

    rope-straining goat’s golden-
    eyed gaze at our passings,
    the leghorn rooster, white

    as a bare body’s twisting, the cross
    enclosed by the cipher, the night
    enclosed by the rose…

    Oh, heavy our flow
    compared to the weight of an island!
    For we are the anchored, the island

    a constant white gliding!



    Tennessee Williams, In the Winter of Cities, A New Directions Books, 1956, 1964 ; The University of the South, 1984, 1992.






    Tennessee Williams, In the Winter of Cities,







    L’ÎLE NOUS RESTE EN MÉMOIRE



    L’île nous reste en mémoire
    comme le changement sur un miroir
    ou une rivière souterraine.

    L’île se perd en allant.
    Elle semble être tranquille.
    Une moitié à présent dans l’ombre

    et pourtant elle augmente en allant,
    aussi mémorable que les phases de la lune.
    Elle fait des avances inaperçues

    avec un semblant d’abandon ;
    elle glisse entre les doigts,
    une pierre au lustre laiteux…

    Non, tu ne peux la tenir, elle
    se tortille comme une femme !
    ses nuits nous restent en mémoire : les yeux

    d’or de la chèvre noire tirant sur sa
    corde nous fixent quand nous passons,
    le coq leghorn, blanc

    comme un corps se tortillant, la croix
    incluse dans un code secret, la nuit
    incluse dans la rose…

    Oh, le poids de nos flots
    comparé à celui d’une île !
    Car nous sommes ancrés, l’île

    un constant et blanc glissement !



    Tennessee Williams, Dans l’hiver des villes, Seghers, Collection Poésie d’abord, 2015, pp. 210-211-212-213. Édition bilingue. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Jacques Demarcq.






    Williams Seghers




    __________________________________
    NOTE : Dans l’hiver des villes est un recueil de poèmes qui date de 1956. Pierre Seghers l’avait fait paraître en français en 1960 mais expurgé de 48 textes. Les voici disponibles dans une édition complète et entièrement retraduite par Jacques Demarcq. Tennessee Williams n’a publié que deux recueils de poèmes, celui-ci étant le premier, le second Androgyne, mon Amour, a été publié en 1977.





    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions Seghers)
    la fiche de l’éditeur consacrée à Dans l’hiver des villes de Tennessee Williams
    → (sur Terres de femmes)
    29 mars 1951 | Oscar de la meilleure actrice décerné à Vivien Leigh






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  • Pier Paolo Pasolini | Al principe



    AL PRINCIPE



    Se torna il sole, se discende la sera,

    se la notte ha un sapore di notti future,
    se un pomeriggio di pioggia sembra tornare

    da tempi troppo amati e mai avuti del tutto,
    io non sono più felice, né di goderne né di soffrirne:

    non sento più, davanti a me, tutta la vita…
    Per essere poeti, bisogna avere molto tempo:

    ore e ore di solitudine sono il solo modo
    perché si formi qualcosa, che è forza, abbandono,

    vizio, libertà, per dare stile al caos.
    Io tempo ormai ne ho poco: per colpa della morte

    che viene avanti, al tramonto della gioventù.
    Ma per colpa anche di questo nostro mondo umano,

    che ai poveri toglie il pane, ai poeti la pace.

    1958






    AU PRINCE



    Si le soleil revient, si le soir descend

    si la nuit a un goût de nuits à venir,
    si un après-midi pluvieux semble revenir

    d’époques trop aimées et jamais entièrement obtenues,
    je ne suis plus heureux, ni d’en jouir ni d’en souffrir ;

    je ne sens plus, devant moi, la vie entière…
    Pour être poètes, il faut avoir beaucoup de temps ;

    des heures et des heures de solitude sont la seule
    façon pour que quelque chose se forme, force,

    abandon, vice, liberté, pour donner un style au chaos.
    Moi je n’ai plus guère de temps : à cause de la mort

    qui approche, au crépuscule de la jeunesse.
    Mais à cause aussi de notre monde humain,

    qui vole le pain aux pauvres et la paix aux poètes.

    1958




    Pier Paolo Pasolini, Umiliato e offeso (1958), in La Persécution, édition bilingue, Inédit, Éditions Points, Collection Points Poésie, 2014, pp. 78-79. Poèmes choisis, présentés et traduits de l’italien par René de Ceccatty.







    Pasolini La Persécution





    PIER PAOLO PASOLINI


    Pasolini
    Source



    ■ Pier Paolo Pasolini
    sur Terres de femmes

    5 mars 1922 | Naissance de Pier Paolo Pasolini
    22 septembre 1962 | Sortie de Mamma Roma (Pier Paolo Pasolini)
    2 novembre 1975 | Mort de Pier Paolo Pasolini
    A na fruta (+ bio-bibliographie)
    Le chant des cloches
    El cuòr su l’aqua
    [Ma io parlo… del mondo] (extrait de Poésie en forme de rose)
    Pier Paolo, le poète assassiné
    La Rage (extraits)






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  • Olav H. Hauge | Nous ne voguons pas sur la même mer



    ME SIGLER IKKJE SAME HAVET



    Me sigler ikkje same havet,
    endå det ser so ut.
    Grovt timber og jarn på dekk,
    sand og sement i romet,
    djupt ligg eg, seint sig eg,
    stampar i broddsjø,
    uler i skodde.
    Du sigler i ein papir båt,
    og draumen ber det blå seglet,
    so linn er vinden, so var er bylgja.







    NOUS NE VOGUONS PAS SUR LA MÊME MER



    Nous ne voguons pas sur la même mer,
    trompeuses sont les apparences.
    Ferrailles et grumes sur le pont,
    sable et ciment dans mes soutes,
    je m’enfonce, je suis lent,
    je foule les vagues houleuses,
    je hulule dans la brume.
    Toi tu vogues sur un bateau de papier,
    ta voile bleue gonflée de rêves,
    si tiède le vent, délicate la vague.




    Olav H. Hauge, Bateau de papier, édition bilingue, Éditions érès, Collection PO&PSY dirigée par Danièle Faugeras et Pascale Janot, Toulouse, 2014, s.f. Sélection de 28 poèmes établie et traduite du norvégien par Anne-Marie Soulier. Photographie de Sandrine Cnudde.







    Olav H. Hauge, Bateau de papier






    OLAV H. HAUGE


    Olav_h_hauge
    Ph. Jan Kløvstad, Samlaget
    Source



    ■ Olav H. Hauge
    sur Terres de femmes

    Bashô
    Le pays bleu



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions érès)
    une fiche sur Bateau de papier
    → (sur Ici et là, le site de la Maison de la Poésie de Saint-Quentin-en-Yvelines)
    une lecture de Bateau de papier par Hervé Martin
    → (sur Recours au poème)
    une lecture de Bateau de papier par Andreea Lemnaru





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