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  • Edoardo Sanguineti, Laborintus II



    Edoardo Sanguineti  Laborintus II
    Source







    LABORINTUS II
    (estratto)




    proprium opus humani generis totaliter accepti
    est actuare semper totam potentiam intellectus possibilis:
    per prius ad speculandum
    et secundario propter hoc ad operandum
    per suam extensionem
    et quia quemadmodum est in parte sic est in toto
    et in homine particulari contingit
    quod sedendo et quiescendo
    prudentia et sapientia
    ipse perficitur
    patet quod genus humanum
    in quiete sive tranquillitate pacis
    ad proprium suum opus
    quod fere divinum est
    iuxta illud «minuisti eum paulo minus ab angelis»
    liberrime atque facillime se habet
    unde manifestum est quod pax universalis
    est optimum eorum que ad nostram beatitudinem ordinantur
    hinc est quod pastoribus de sursum sonuit
    non divitiae non voluptates non honores non longitudo vitae non sanitas non robur non pulchritudo
    sed pax






    LABORINTUS II
    (extrait)




    l’œuvre propre du genre humain pris dans son ensemble
    est de transformer sans cesse en acte toute la puissance possible de l’intellect :
    en premier lieu pour spéculer
    et en deuxième lieu opérer en conséquence
    pour son extension
    et puisqu’il en va ainsi du tout comme de ses parties
    et qu’il advient à l’homme particulier
    qui sait s’asseoir et se reposer
    de s’accomplir lui-même
    par prudence et sagesse
    il est clair que le genre humain
    dans le repos c’est-à-dire tranquillité de la paix
    trouve très librement et facilement
    à se donner à son œuvre propre
    laquelle est presque divine
    selon la parole « à peine le fis-tu moindre que les anges »
    d’où il est évident que la paix universelle
    est la meilleure des choses ordonnées pour notre béatitude
    d’où vient que des hauteurs retentit aux bergers
    non pas richesse ni voluptés ni honneurs ni longueur de vie ni santé ni force ni beauté
    mais paix



    Edoardo Sanguineti, Laborintus II, Revue littéraire L’Ours Blanc, n° 6, éditions Héros-Limite, 1205 Genève, mars 2015, pp. 14-15. Traduction française de Vincent Barras.




    _____________

    NOTE DU TRADUCTEUR (extrait) : le poème Laborintus II est constitué d’un montage complexe de passages tirés de l’Ancien et du Nouveau Testament, des Étymologies d’Isidore de Séville, de la Vita Nova, du Banquet, du traité De la Monarchie et de l’Enfer de Dante, de commentaires médiévaux sur la Divine Comédie de Benvenuto da Imola et de Pietro Alighieri, fils de Dante, des Cantos d’Ezra Pound, des Four Quartets de Thomas S. Eliot, mêlant ces fragments composés en des langues diverses à des extraits de ses propres recueils Laborintus (1954) et Purgatorio de l’Inferno (1963) ainsi qu’à des parties originales.

    Loin d’être un simple collage de citations, un banal syncrétisme, ce poème impose le principe d’un décalage et d’une confrontation généralisée : entre les différentes langues utilisées, entre l’emploi du latin, langue « morte » et « liturgique », et celui des langues vivantes, entre la langue de Dante et l’italien contemporain, entre les blocs sémantiques juxtaposés avec leurs inflexions contradictoires, entre les niveaux phonétique et typographique. En résulte une écriture âpre et tendue, instrument organisateur du discours poétique à l’énergie éruptive et chaotique, une écriture servie, qui plus est, par la disposition typographique rigoureuse, entendue comme une prosodie spatiale.






    Ours blanc 2




    EDOARDO SANGUINETI


    EDOARDO SANGUINETI
    Image, G.AdC




    ■ Edoardo Sanguineti
    sur Terres de femmes


    Ballade des femmes
    Corollaire (lecture de Marie Fabre)
    [ma come siamo, poi, noi ?] (extrait de Corollaire)
    je t’explore, ma chair
    Wirrwarr
    18 mai 2010 | Mort d’Edoardo Sanguineti




    ■ Voir | écouter aussi ▼


    → (sur le site de Jacques Demierre)
    Edoardo Sanguineti | Luciano Berio, Laborintus II (interview de Vincent Barras & Jacques Demierre + concert du mardi 15 janvier 2013 par Vincent Barras & Jacques Demierre, Ensemble Contrechamps, Ensemble Séquence)
    → (sur le site Luciano Berio)
    Laborintus II (note de Luciano Berio)
    → (sur YouTube)
    Edoardo Sanguineti | Luciano Berio, Laborintus II (concert du 30 septembre 2009 à la Cité de la Musique)
    une bio-bibliographie d’Edoardo Sanguineti sur le site du cipM (centre international de poésie Marseille)
    → (sur YouTube) une interview d’Edoardo Sanguineti (Source : Feltrinelli editore)





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  • Rose Ausländer | Janvier




    JANVIER



    Janvier
    Le nouvel an

    Dans mon cœur
    Tombe la neige

    Sur ta joue
    Fleurissent des roses

    Le cheval de bois de notre enfance
    Est une luge
    Sur le chemin glacé
    Menant en Sibérie
    Où poussent des bonhommes de neige
    Enfantés par l’esprit de l’hiver

    Retournons
    Avec l’esprit de l’hiver
    Dans le nouvel an




    Rose Ausländer, Pays maternel [Mutterland, 1978], éditions Héros-Limite, Genève, 2015, page 32. Traduction de l’allemand par Edmond Verroul.






    Rose Ausländer  Pays maternel





    ROSE AUSLÄNDER


    Rose Ausländer
    Source




    ■ Rose Ausländer
    sur Terres de femmes

    Après le Carnaval
    Augenblickslicht (extrait de Kreisen/Cercles)
    L’île derive (Je compte les étoiles de mes mots/Ich zähl die Sterne meiner Worte)
    Während ich Atem hole (extrait de Blinder Sommer/Été Aveugle)




    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur Esprits Nomades)
    la page consacrée à Rose Ausländer
    → (sur Lyrikline)
    plusieurs poèmes dits (en allemand) par Rose Ausländer
    → (sur le site des éditions éditions Héros-Limite)
    la fiche de l’éditeur sur Pays maternel de Rose Ausländer






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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Fabienne Raphoz | Géologie



    GÉOLOGIE




    je suis faite de la

    pierre de mon pays

    la rousseur du

    gypaète aussi

    .

    Fossile dit

    l’âge de la roche

    Nautile

    celui du temps

    .

    Niedecker dit

    dans tout fragment

    de tout ce qui vit

    reste de la pierre



    Fabienne Raphoz, « qu’es-tu pour le pays ? » in Blanche baleine, éditions Héros-Limite, Genève, 2017, page 46 [ouvrage disponible en librairie le 22 mars 2017].






    Raphoz Blanche Baleine






    FABIENNE RAPHOZ


    PORTRAIT DE FABIENNE RAPHOZ
    Image, G.AdC




    ■ Fabienne Raphoz
    sur Terres de femmes

    [Qui voit ?] (extrait de Terre sentinelle)
    « Leçons semblables aux oiseaux » (note de lecture d’AP sur Jeux d’oiseaux dans un ciel vide)
    Procellariiformes (extrait de Jeux d’oiseaux dans un ciel vide)
    Parce que l’oiseau (note de lecture d’AP)
    Terre sentinelle (note de lecture d’AP)





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  • Bartolo Cattafi, Mars et ses ides (extraits)



    CHI TI SQUADRÒ LA PIETRA



    Chi ti squadrò la pietra
    l’eresse
    l’imbiancò di calce
    alla porta ti mise
    un cane catenario
    alla finestra una fitta
    pianta di basilico
    ora fuori ti scaccia
    su tante strade ti manda
    le spalle ti percuote
    perché tu esca dal buio e dal vuoto
    della casa del cane della pianta.




    MARZO E LE SUE IDI



    Di tutto diffido
    del pugnale di bruto
    della tenera carne di cesare
    dello stesso destino
    che passi presto il tempo
    vengano alfine marzo e le sue idi.




    FALSE ACACIE



    Un blocco di false acacie
    diritte all’apparenza
    d’anima invece obliqua
    pescano in un mare d’ombra
    producono un verde di sott’acqua
    supporti d’usignoli e di silenzio
    tendono forti braccia
    diffondono qualcosa
    chiuso orto infinito
    bel serbatoio di ciò che non appare.



    Bartolo Cattafi, Marzo e le sue idi, 1972-1973, Arnoldo Mondadori editore, Collana Lo Specchio. I poeti del nostro tempo, 1977.






    Bartolo Cattafi, Marzo e le sue idi








    QUI T’ÉQUARRIT LA PIERRE



    Qui t’équarrit la pierre
    la dressa
    la passa à la chaux
    mit un chien enchaîné
    à ta porte
    sur ta fenêtre une plante
    touffue de basilic
    maintenant te chasse dehors
    t’envoie sur tant de routes
    frappe tes épaules
    afin que tu sortes de l’obscurité et du vide
    de la maison du chien de la plante.




    MARS ET SES IDES



    Je me méfie de tout
    du poignard de brutus
    de la chair tendre de césar
    du destin lui-même
    que passe vite le temps
    que viennent à la fin mars et ses ides.




    FAUX ACACIAS



    Un bloc de faux acacias
    droits en apparence
    d’âme au contraire oblique
    pêchent dans une mer d’ombre
    produisent un vert de sous l’eau
    des supports de rossignols et de silence
    tendent des bras solides
    défendent quelque chose
    potager clos infini
    beau réservoir de ce qui point n’apparaît.



    Bartolo Cattafi, Mars et ses ides, 1972-1973, éditions Héros-Limite, Genève, 2014, pages 10, 60, 115. Traduit de l’italien et postfacé par Philippe Di Meo.






    Bartolo Cattafi, Mars et ses ides





    BARTOLO  CATTAFI


    Bartolo cattafi (2)



    ■ Bartolo Cattafi
    sur Terres de femmes

    L’Alouette d’octobre (extraits)



    ■ Voir aussi ▼

    le site officiel de Bartolo Cattafi
    → (sur le site de Bartolo Cattafi)
    de nombreux poèmes extraits de Mars et ses ides (éditions Héros-Limite, 2014), traduits en français par Philippe Di Meo (+ la postface de Philippe Di Meo)[PDF]
    → (sur le site des éditions Héros-Limite)
    la fiche de l’éditeur sur Mars et ses ides
    → (sur Imperfetta Ellisse de Giacomo Cerrai)
    d’autres poèmes de Bartolo Cattafi
    → (sur La dimora del tempo sospeso)
    un article (en italien) de Giuseppe Panella : « I viaggi nella poesia di Bartolo Cattafi »
    (+ une notice bio-bibliographique)

    → (sur revestito.it)
    de nombreux poèmes de Bartolo Cattafi
    → (sur The Drunken Boat)
    une page sur Bartolo Cattafi (en anglais)





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  • Jean-Pierre Chambon, Tout venant

    par Sylvie Fabre G.

    Jean-Pierre Chambon, Tout venant
    éditions Héros-Limite, 2014.



    Lecture de Sylvie Fabre G.


    Le désir de l’envol
    Ph., G.AdC







    « …s’élancer en confiance
    dans l’air
    qui porte la lumière et les voix »




    Le monde est toujours cet insaisissable que nous tentons de déchiffrer par l’aiguisement de tous les sens, la force de la pensée et de l’imagination, le don du langage, mais nous savons que nous ne parviendrons qu’à en avoir une connaissance limitée et que le secret qu’il contient nous demeurera en partie scellé comme nous est en partie scellé celui des vivants et des morts qui l’habitent. Quelle parole alors peut s’exercer à éclaircir l’opacité ou « à creuser encore dans l’obscur », tout en espérant parler « une langue transparente… / qui nous ferait traverser le miroir / et dirait enfin le secret des choses » et « le mystère des êtres » ? Peut-être celle du poète dont « le projet prodigieux », écrit Jean-Pierre Chambon, est « à partir de l’inaliénable singulier / éveiller des voix inouïes / qui donneront pouvoir / de parler au pluriel ». Et c’est bien ce que lui-même réussit dans son dernier recueil, Tout venant, paru à l’automne 2014 aux éditions Héros-Limite.

    En une suite de poèmes courts, étonnamment profonds dans leur légèreté, le poète nous offre des instants de vie comme arrachés à la cécité ou à l’indifférence habituelle, bribes emmêlées de quotidien et de rêve, effleurements sensibles et verbaux de choses, de bêtes et de gens dont les gestes, les pensées et les sentiments, comme dérobés à la fuite du temps, sont rendus à une lumière. Nous invitant ainsi à ouvrir avec lui les yeux et les mots sur la réalité et ce qui la peuple, il nous en fait saisir finement les éclats précieux et éphémères, à travers par exemple l’évocation d’un arbre au printemps : « Le vieux cerisier au fond du jardin / a atteint aujourd’hui même / le degré extrême de la blancheur / attestant à nouveau l’oracle / énoncé par l’ermite zen Ryôkan / le monde / est devenu / un cerisier en fleurs », ou encore celle, récurrente et identificatrice dans sa poésie, d’un oiseau, le corbeau qui « soudain / apostrophe l’univers de sa voix gutturale / puis » qui « s’envole » et que « le ciel efface » pour enfin laisser place au « silence » qui « résorbe la plaie du temps ». Le regard de Jean-Pierre Chambon sur les règnes minéral, végétal, animal ou humain est d’abord attentif, souvent interrogatif mais toujours humble. Il attrape ensemble leur beauté rayonnante et leur obscurité, leurs fragilités et leurs souffrances. Passant, il ne prétend pas à l’interprétation définitive, il contemple surtout et écrit, espérant que le poème qui est « chance et patience » lèvera un voile, nous fera accéder à l’essentiel, car au cœur de sa toile n’a-t-il pas le pouvoir de retenir « ce qui viendra s’y prendre » et de tisser « le frêle réseau » qui nous réunit dans « la pénombre et le vent » ? Le peuplier qui époussète ses chaussures « du plumeau de son ombre », la femme dans la cuisine qui « renifle ses larmes en épluchant ses oignons / aux luisances de cuivre », l’homme que l’ambulance emporte dans le noir et qui « regarde défiler / les lumières de la ville », le poète ne nous donne pas les clefs de leur bienveillance, de leur chagrin ou de leur solitude mais il les capte avec humour ou compassion pour nous tendre un miroir et nous faire ressentir combien nous leur ressemblons, comme eux égarés « dans la forêt obscure » et pourtant avides de « miettes de lumière », de joie et de lien.

    Circulation entre le dehors et le dedans, surgissement, flottement, effacement, intermittences du jour et de la nuit, la vision émerveillée et mélancolique de la vie que nous livre Jean-Pierre Chambon dans ce recueil, si elle est concrète en son enracinement terrestre, n’en souligne pas moins combien nous ne sommes jamais entièrement au monde mais toujours un peu « à l’orée », au seuil du vécu et du rêvé, aux frontières de la vie et de la mort. La quête du poète prend le chemin du vagabondage, du Tout venant. Son errance est celle des situations, des pensées, des sentiments. L’incertitude des réponses, le désir de l’envol, le savoir de l’intervalle le traversent de part en part. Les petites lucioles, témoignant des présences, sont « dans la vacillation ». Celui qui les consigne, avant qu’elles ne s’éteignent, est un « poète fantôme », un exilé, un dormeur éveillé et ses pages, tout comme nos corps, sont voués « à la dispersion et à la poussière ». Il est significatif d’ailleurs que les thèmes du train et de la montagne, lieux de transformation permanente, comme celui des variations atmosphériques, soient très fréquents dans les poèmes. « Le monde extérieur / rincé à grande eau », au soleil ou « à la lueur de la lune » conserve ses glissements, ses étrangetés et ses métamorphoses, nos âmes aussi. Les vers nous amènent de par leur rythme et la puissance des synesthésies, de par le jeu des contiguïtés et des juxtapositions vers un mélange des temps, des espaces et des éléments : « Entrevue comme derrière la vitre / d’un aquarium / d’une grotte sous-marine / une grappe de visages / au teint verdâtre / quasi cadavérique / baigne dans la lueur gluante / d’un téléviseur ». Le réel ainsi décrit a bien des aspects inquiétants, le chien prend « un faciès de poisson », le pigeon se fait « moitié oiseau moitié enfant » et la mère pour l’enfant est « réduite par la fièvre / à des proportions lilliputiennes ». Jean-Pierre Chambon n’hésite pas à parler de « mondes parallèles » au cœur du nôtre ni à longer « la frontière de l’inexistence » quand « engagé épaule contre épaule avec la paroi » il « regarde le vide sans le voir ». Certains poèmes croisent des figures spectrales telles « des sapins encapuchonnées d’ombre […] en une lente procession pénitentielle » ou « un infirmier flottant dans un kimono phosphorescent / de samouraï » qui tire « par les cheveux la tête ravinée / brûlante / d’Antonin Artaud / dont les lèvres continuaient à vociférer / des litanies d’imprécations ». Vivants et morts font partie d’une « chaîne immatérielle » que la mémoire, le songe et la poésie rendent soudain palpable.

    Les 204 poèmes constituent pour moi une sorte de bréviaire où chacun peut trouver une nourriture sensible et méditative différente au fil des lectures et des jours. Le format du livre, et même l’illustration et la couleur de la couverture, qui jouent symboliquement sur la clôture et sur la ligne de fuite, sur le vide et sur le plein, nous y convient. Le glisser dans une poche, le poser sur un meuble, l’oublier et à un moment l’ouvrir ne peut manquer d’éclaircir notre quotidien. Car la parole de vie qui s’y entend prend en charge, je l’ai dit, l’amour et la douleur du monde, la conscience d’un mystère qui englobe tout. Elle est écrite à échelle d’hommes, d’animaux, d’éléments et de choses dont elle tente de rendre la diversité, voix et actes, bruits et couleurs. L’auteur n’oublie rien des limites de la langue, ni des injustices, des violences et de la finitude qu’elle ne peut guérir. Dans les poèmes, sous « le masque des mots », se rencontrent pourtant le mendiant, la victime des guerres, le malade et le mort, tout comme les vivants plus heureux ou plus nantis du présent ou du passé. La poésie de Jean-Pierre Chambon ne prétend à nul message, mais elle fait du bien au lecteur par son attention à tout ce qui existe. En tressant la beauté de la nature et celle de l’art comme dans les tableaux de Bonnard évoqués dans un des premiers poèmes, elle nous rappelle le merci.

    Car le monde ne tient peut-être que par ces gestes qui sauvent, et comme « une femme tend le secours d’une brindille / à un papillon empêtré / dans le reflet des nuages », le poète nous tend le secours de ses mots pour nous rendre à nous-mêmes, à « la matière / flottante de nos vies imparfaites » et pourtant uniques, à leur vérité de pauvreté et de grandeur, « nœud du grand mystère » sur lequel se referme Tout venant.


    Sylvie Fabre G.
    D.R. Texte Sylvie Fabre G.






    Jean-Pierre Chambon, Tout venant, Héros-Limite, 2014.





    JEAN-PIERRE CHAMBON


    Jean-Pierre Chambon  en vignette
    Source




    ■ Jean-Pierre Chambon
    sur Terres de femmes


    [À partir de l’inaliénable singulier] (extrait de Tout venant)
    Des lecteurs (extrait)
    Des lecteurs (lecture d’AP)
    L’Écorce terrestre (lecture de Cécile A. Holdban)
    L’Écorce terrestre (lecture d’AP)
    [Je touche le grain du silence] (extrait de L’Écorce terrestre)
    [Fleurs dans la fleur]
    Noir de mouches (extrait)
    Détour par la Chine intérieure (poème extrait du Petit Livre amer)
    Le Petit Livre amer (lecture de Sylvie Fabre G.)
    Fragments d’un règne (poème extrait du Roi errant)
    [Sur le papier la lumière](extrait de Sur un poème d’André du Bouchet)
    Un écart de conscience, II (extrait)
    Zélia (lecture d’Isabelle Lévesque)
    L’invention de l’écriture (extrait de Zélia)
    Jean-Pierre Chambon | Michaël Glück, Une motte de terre (lecture de Sylvie Fabre G.)
    Jean-Pierre Chambon | Michaël Glück, Une motte de terre (extraits)
    Jean-Pierre Chambon | Marc Negri, Fleuve sans bords (lecture d’AP)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur Images de la poésie)
    une lecture de Tout venant par Laurent Albarracin
    → (sur le site des éditions L’Amourier)
    une bio-bibliographie de Jean-Pierre Chambon




    ■ Autres lectures de Sylvie Fabre G.
    sur Terres de femmes


    Caroline Boidé, Les Impurs
    Jean-Pierre Chambon, Le Petit Livre amer
    Jean-Pierre Chambon | Michaël Glück, Une motte de terre
    Patricia Cottron-Daubigné, Visage roman
    Pierre Dhainaut, Après
    Ludovic Degroote, Un petit viol, Un autre petit viol
    Alain Freixe, Vers les riveraines
    Luce Guilbaud, Demain l’instant du large
    Emmanuel Merle, Ici en exil
    Emmanuel Merle & Thierry Renard, La Chance d’un autre jour, Conversation
    Angèle Paoli, Lauzes
    Pierre Péju, Enfance obscure
    Pierre Péju, L’État du ciel
    Pierre Péju, L’Œil de la nuit
    Didier Pobel, Un beau soir l’avenir
    Erwann Rougé, Passerelle, Carnet de mer
    Fabio Scotto, La Peau de l’eau
    Roselyne Sibille, Entre les braises
    Une terre commune, deux voyages (Tourbe d’Emmanuel Merle et La Pierre à 3 visages de François Rannou)





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    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Jean-Pierre Chambon | [À partir de l’inaliénable singulier]



    [À PARTIR DE L’INALIÉNABLE SINGULIER]



    À partir de l’inaliénable singulier
    éveiller des voix inouïes
    qui donneront pouvoir
    de parler au pluriel
    tel est le rêve
    le projet prodigieux
    dont se nourrit le désir d’écrire



    Jean-Pierre Chambon, Tout venant, éditions Héros-Limite, 2014, page 181. Dessin de couverture de Colette Grand.






    Jean-Pierre Chambon, Tout venant, Héros-Limite, 2014.






    JEAN-PIERRE CHAMBON


    Jean-Pierre Chambon  en vignette
    Source




    ■ Jean-Pierre Chambon
    sur Terres de femmes


    Des lecteurs (extrait)
    Des lecteurs (lecture d’AP)
    L’Écorce terrestre (lecture de Cécile A. Holdban)
    L’Écorce terrestre (lecture d’AP)
    [Je touche le grain du silence] (extrait de L’Écorce terrestre)
    Tout venant (lecture de Sylvie Fabre G.)
    Détour par la Chine intérieure (poème extrait du Petit Livre amer)
    Le Petit Livre amer (lecture de Sylvie Fabre G.)
    [Fleurs dans la fleur]
    Noir de mouches (extrait)
    [Sur le papier la lumière](extrait de Sur un poème d’André du Bouchet)
    Un écart de conscience, II (extrait)
    Zélia (lecture d’Isabelle Lévesque)
    L’invention de l’écriture (extrait de Zélia)
    Jean-Pierre Chambon | Marc Negri, Fleuve sans bords (lecture d’AP)
    Fragments d’un règne (poème extrait du Roi errant)
    Jean-Pierre Chambon | Michaël Glück, Une motte de terre (lecture de Sylvie Fabre G.)
    Jean-Pierre Chambon | Michaël Glück, Une motte de terre (extraits)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur Images de la poésie)
    une lecture de Tout venant par Laurent Albarracin





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  • Fabienne Raphoz, Terre sentinelle

    par Angèle Paoli

    Fabienne Raphoz, Terre sentinelle,
    Éditions Héros-Limite, janvier 2014.



    Lecture d’Angèle Paoli



    Joan Miro L'Oiseau Solaire  (Fondation Miro  Barcelone)
    Ph., G.AdC








    « MIDI / JE REJOINS / L’ÉLÉGIE / DU JE / COMMUN »




    Après Jeux d’oiseaux dans un ciel vide, Fabienne Raphoz publie Terre sentinelle, à nouveau aux éditions Héros-Limite. Les « tampons » d’abeilles (ou de mouches) en jaune et violine (un seul tampon violine pour treize jaunes) qui papillonnent en couverture (sur la première et la quatrième), augurent d’emblée d’un voyage au cœur de la Nature. Et pour qui aime la nature et « tous les animaux de la terre » qu’elle nous offre, le plaisir du voyage est assuré. Un voyage léger, aérien. Ponctué, dans le feuilletage du livre, de taches, de bulles, de pointillés de constellations, d’ébauches d’alvéoles. Mais aussi de traits et de ponctuations d’oiseaux. Le serpent d’un cours d’eau ondule sur une page — tous les dessins sont d’Ianna Andreadis — tandis que quelques clichés miniatures en noir et blanc font leur apparition sur d’autres pages. L’ombre chinoise d’une tête caprine — une antilope bleue&nbsp— clôt le recueil dont le contenu se répartit en onze chapitres aux titres parfois mystérieux. Ur / Mozambique / Arva / Luco. À la fin de l’ouvrage, une nomenclature où sont énumérés les noms des animaux cités dans l’ouvrage, de A à Z. D’abeille à zèbre. Sans oublier l’eurycère de Prévost, l’hippotrague bleu, le maki catta… Et la vanga sittelle, un oiseau « fabuleux ». Terre sentinelle veille. À la protection des espèces, à l’évolution des formes, à leur diversité infinie. Immense. Terre de richesse, terre de calligrammes.

    Sur la page, la mise en espace varie. Les poèmes, minimalistes et souvent éclatés, appellent la respiration. Les grands blancs qui aèrent la page sont là pour cela. Certains poèmes suivent les ondulations capricieuses de l’Arve. Dont l’Ypsilon du bassin de déjection dessine son empreinte féminine au fond de la vallée. Le flux des mots — leur déboulement sur la page — mime les éboulis. À l’arrivée, l’Arve se prend au jeu du miroir :


    « et si

    schistes

    gypses

    cargneules

    moraines


    tous

    les

    é

    bou

    lis

    bou

    lent

    dans le lit

    d’Ar

        V

         a »



    La disposition des textes dans la page — alternance ou/et juxtapositions de poèmes et de proses —, leur typographie, s’adaptent à la forme que prend le discours : définitions (cluse, castor, torrent…), proverbes, contes populaires, extraits de traités géographiques, études, citations…

    Ainsi, au bas de la page 58, trouve-t-on, en corps de note, la définition du mot cœlacanthe :



    « Cœlacanthe sp., Latimeria sp.,
    Poissons à nageoires charnues
    (Sarcoptérygiens)
    Cœlacanthiformes, Latimeriidae »



    Et, à l’identique, page 59, en vis-à-vis de la définition du mot cœlacanthe, celle du dragon des mers :



    « Dragon des mers commun, Phyllopteryx
    taeniolatus,

    Poissons à nageoires rayonnées (Actinop-
    térigiens), Syngnathiformes, Syngnathidésés »



    Intitulée « L’évolution des formes s’étend à la couleur », la troisième section de l’ouvrage propose — en bas de chaque page — le nom d’un énigmatique animal ainsi que sa définition. Un peu plus loin, dans la même section, des listes tout aussi mystérieuses composent la page : « Proposition pour une nouvelle classification des syrphes vespichromes et / ou vespiformes ». Syrphe ? Mouche de la famille des syrphidés, de l’ordre des diptères, me dit le Petit Larousse. Suivent trois séries de listes de noms latins.


    Vespichrome / vespiforme. Il y a de l’abeille dans l’air. Cela se confirme avec le texte intitulé « Éloges », qui annonce l’existence de 35 noms français d’espèces d’abeilles. Elles ont un nom à faire rêver, les abeilles : « Mélipone des Mayas » (serait-ce elle qui aurait inspiré à Nisan Takahashi le dessin animé Maya l’abeille ?) / Mélipone des Kayapos / Mélipone des Isaias… Et l’on découvre, non sans un étonnement amusé, qu’il existe aussi, côté mâle, toute une Tribu Bombini, dans laquelle se cachent un Bourdon de Charlus, un Bourdon de Chaucer, un Bourdon de Jünger… Mais aussi un Bombus humilis d’Emily (Dickinson ? Que fait donc ici la poète de Amherst au milieu de tous ces mâles, invertis ou non ? Nous ne le saurons pas !)


    Ainsi, poètes et écrivains ont-ils chacun leur abeille :



    « abeille coucou de Virgile… / …de Michelet / …de Maeterlinck / …de Valéry »



    Pourquoi tout cela me rend-il euphorique ? Je l’ignore, à vrai dire ; sinon que ce savant effeuillage d’insectes, d’animaux en tous genres, accompagnés de tout leur complexe appareillage de familles, de genres, de sous-genres… et d’hommes de lettres, a quelque chose de totalement jubilatoire.


    Ailleurs, d’autres listes créent sur les pages toute une géographie de noms propres. La Terre veille sur ses habitants, veille sur les lieux qu’ils peuplent. Terre sentinelle livre de multiples définitions, les unes extraites d’un Précis de Géomorphologie, les autres d’une Revue de Géographie alpine, mais également de guides et de précis portant sur la Haute-Savoie :



    « Une étymologie :


    L’ARVE, affluent du Rhône est ordinairement noté Arva.

    Arva serait un nom préromain voire préceltique, on lui donne

    la signification d’eau courante.


    D’après Adolphe Cros, Étymologie des noms de lieux de la Savoie, Chambéry, 1935. »



    Et l’Arve de décliner, dans la section intitulée « de la gnature d’Arva » (« de la naissance d’Arva » ? mais aussi aphérèse de « signature » ?), toutes les formes de sa présence.


    Certains des ouvrages cités remontent à 1914. D’autres, plus loin encore dans le temps. Dix ans avant la Révolution Française. Comme ce récit de voyage, signé Horace-Ferdinand de Saussure. Alpiniste et naturaliste, ce contemporain de Jean-Jacques Rousseau, ancêtre du linguiste suisse de même patronyme Ferdinand de Saussure, est l’auteur de Voyages dans les Alpes, précédés d’un essai sur l’histoire naturelle des environs de Genève (1779). C’est que Fabienne Raphoz, ornithologue et érudite, connaît sa Haute-Savoie jusqu’au bout des phalanges. Autant dire à la perfection. Et rien, dans son approche, n’échappe à sa vigilance et à son savoir. Tout l’intéresse. Tout la passionne. Et voilà que la lectrice attentive se prend dans les rets de ce savoir et s’immerge dans la lecture des notices, notules, extraits, définitions et autres textes en écho avec la poésie.


    Et la poésie dans tout cela justement ? Elle est bien là, nonchalante dans la page, qui rebondit d’un mot à l’autre, creuse ses silences, dessine ses espaces. Et revêt toutes sortes de morphologies. Elle apparaît en filigrane, discrètement, à travers les noms des poètes qui se glissent parfois au détour d’une page. Ainsi du poète espagnol José Ángel Valente, dont le questionnement continue d’interroger la poète Fabienne Raphoz :



    « What killed the dinosaurs? se demande — en anglais

    dans le texte — José Ángel Valente — poète

    dans son Paysage — avec des oiseaux

    jaunes ?


    Qu’est-ce que j’entends ?


    La question, l’adresse, puis au-delà de l’adresse,

    la question. »



    Puis, en réponse, en page de droite, isolé en tête de page, cet aphorisme :



    « La variation propose le milieu dispose »




    Nicolas Pesquès (l’exergue extrait de La Face nord de Juliau, cinq mais aussi le vers « L’alouette cerf-volant dévida son plain-chant »), Philippe Beck (Poésies didactiques), Stéphane Bouquet (Amours suivants), tous poètes contemporains proches de Fabienne Raphoz, signent à tour de rôle leur présence. Mais aussi André du Bouchet, Eugène Guillevic, George Oppen, Cole Swensen, Robert Duncan. Et aussi des peintres. Yves Klein et Caspar David Friedrich.


    Au commencement, il y a la passion de la poète pour l’évolution. Et, de même qu’il y a chez Nicolas Pesquès l’obsession de cerner le « jaune de Juliau », il y a chez Fabienne Raphoz l’obsession de dire la couleur du monde. Celle du bleu qui domine dans la nature en évolution. Le bleu des rémiges des oiseaux, celui des astérides et des vélelles, celui de la mer et des forêts :



    « Bleu fait mâle

    demoiselle oiseau


    qu’encoeure l’or

    des filles


    au fil furtif

    à force



    d’éternité »



    ou encore, pour évoquer le cnidaire pélagique Velella vellela, ces filaments de bleu :



    « Bleu flotte

    médusé


    en colonie

    singulière




    œuvre vive

    de verre

    soufflé »



    De qui d’autre parle-t-elle ? s’interroge le lecteur. Sinon d’elle-même à travers les passions qui l’animent ? Et si elle parle d’Arva, n’est-ce pas d’elle (ou de sa naissance) qu’elle parle ? Même si, suivant le sillon creusé par le poète André du Bouchet, Fabienne Raphoz écrit, dans la section intitulée « de la gnature d’Arva » :



    « j’écris aussi loin que possible de moi »



    Et pourtant, pourtant poursuit-elle :



    « et pourtant
    parlant partant




    d’elle




    ne parle
    que de moi
    — fleuve

    Arva; »



    Trois pages plus loin, la poète confie :



    « j’écris le mot SOURCE
    pour que surgisse en moi
    la naissance d’Arva »



    et le fleuve, dès lors, entre passerelles et ponts, « divague à son gré » sur la page, jusqu’à l’ultime Ypsilon du torrent. S’ouvre alors la neuvième section du recueil : « Luco ». Quatre pages à peine. La poète y énonce ce qu’elle n’est pas. Naturaliste. Sous forme de répétition anaphorique, elle énumère, tout ce qu’elle a connu :



    « j’ai connu la garenne de Saint-Martin-des-Champs

    et les lapins aux cul-blanc

    j’ai connu la mare aux têtards

    et les métamorphoses… »



    et, actualisant son propos, annonce/énonce :



    « aujourd’hui onze mars je voudrais faire savoir


    que le magnolia explose
    que la canne couve
    que le troglodyte se découvre
    que les jonquilles s’ouvrent
    que les fleurs de crocus se fanent
    que le pigeon mort flotte
    que le colombin tient la garde
    que les abeilles abeillent »



    Mais la neige met fin soudain, à la fois à l’énumération et au processus de vie / de mort



    « et la terre
    Sentinelle


    s’interrompt. »



    Au commencement de l’écriture, il y a ce souci récurrent d’éloigner le « je » de la page. Une détermination de la même famille que celle qui dicte ces vers à Stéphane Bouquet, dans son recueil Amours suivants :



    « j’aime bien les mouches et tous les insectes qui ne sont pas

             tenaillés par le désir

         de dire je dans l’espèce. Imagine un monde sans première

                  personne où tout

       commencerait avec toi et avec ils. Bourdon abeille libellule

                  grillon éphémère »



    Et la poète de reprendre en écho, dans l’ultime section du recueil, « L’intimité du monde » (dont les vers de Bouquet sont l’exergue) :



    « oublie je
    écoute le grillon
    sous la pluie
    écoute les merles
    qui sont cinq


    oublie je


    offre »



    Pourtant, c’est bien dans « L’intimité du monde » que le poème prend son envol, délesté de toutes les balises du savoir qui jalonnent le recueil. L’interrogation est au cœur des mots pour peser ce que le poème peut dire :



    « dire le nom des choses
    et quelque chose
    se dénoue »



    Parfois le sentiment des limites se fait terriblement sentir et, avec elles, celui de l’incapacité à dire :



    « (d’ici)
    est-ce que le poème
    peut dire
    le secret

    — du grenier ?
    est-ce que la question

    — qui précède
    est toujours
    le poème ? »



    Ainsi, il y a des plaies que ni le merle ni le loriot ne parviennent à cautériser. Peut-être, certains jours, le chant des oiseaux et les mots du poème — leur accord provisoire —, permettent-ils de dépasser la peur et la « tristesse simple » / « de ce qui est perdu ». Le « je » retrouve alors droit de cité sur la page :



    .




    midi

    je rejoins

    l’élégie

    du je

    commun




    .





    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli






    Fabienne Raphoz, Terre sentinelle, Éditions Héros-Limite, 2014.





    FABIENNE RAPHOZ


    PORTRAIT DE FABIENNE RAPHOZ
    Image, G.AdC



    ■ Fabienne Raphoz
    sur Terres de femmes


    [Qui voit ?] (extrait de Terre sentinelle)
    Géologie (extrait de Blanche baleine)
    « Leçons semblables aux oiseaux » (note de lecture d’AP sur Jeux d’oiseaux dans un ciel vide)
    Procellariiformes (extrait de Jeux d’oiseaux dans un ciel vide)
    Parce que l’oiseau (note de lecture d’AP)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de BLDD, Belles Lettres Diffusion Distribution)
    <une fiche sur Terre sentinelle [PDF]





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  • Fabienne Raphoz | [Qui voit ?] [Terre sentinelle]





    Loriot --- vers les débris du bleu
    Image, G.AdC








    [QUI VOIT ?]





    Qui voit ?

        pas moi


    le chant

    précède                        l’oiseau








    Celui des steppes sourit plus jaune que le Ravisseur ; l’Émeraudine & l’Améthystine
    font la jungle & le ciel ; la Tambourette le nuage & le sous-bois ; la Masquée l’Afrique
    & l’Arabie ; le Bateleur rythme le tout ; aigles & colombes aiglent & colombent indeed





    ciel sol

    itude

    de vents contraints

    l’empaillade a vécu

    vivra

    paisible le bras

    fleuve d’une mère

    quand rynchée rit des rives

    et piété décryptée

    dans le viseur

    sans visée


    qu’un oujda







    L’alouette cerf-volante dévida son plain-chant

    un bourdon-relais flappe ici du vexille

    quand coucou foliocole haut l’acacia





    la jungle agglutine

    — encore un peu —

    l’à-pic

    loriot                       s’émeraude

    en tête

    plus grave

    vers les débris

    du bleu






    Fabienne Raphoz, « Je parle Mozambique » in Terre sentinelle, Éditions
    Héros-Limite, Genève, 2014, pp. 65-66-67.






    Fabienne Raphoz, Terre sentinelle, Éditions Héros-Limite, 2014.





    FABIENNE RAPHOZ


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    ■ Fabienne Raphoz
    sur Terres de femmes

    Géologie (extrait de Blanche baleine)
    « Leçons semblables aux oiseaux » (note de lecture d’AP sur Jeux d’oiseaux dans un ciel vide)
    Procellariiformes (extrait de Jeux d’oiseaux dans un ciel vide)
    Parce que l’oiseau (note de lecture d’AP)
    Terre sentinelle (note de lecture d’AP)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de BLDD, Belles Lettres Diffusion Distribution)
    <une fiche sur Terre sentinelle [PDF]





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