Étiquette : Franco Fortini


  • Franco Fortini | Il presente




    A il sole dentre l acqua
    Ph., G.AdC





    IL PRESENTE



    Guardo le acque e le canne
    di un braccio di fiume e il sole
    dentro l’acqua.

    Guardavo, ero ma sono.
    La melma si asciuga fra le radici.
    Il mio verbo è al presente.
    Questo mondo residuo d’incendi
    vuole esistere.
                             Insetti tendono
    trappole lunghe millenni.
    Le effimere sfumano. Si sfanno
    impresse nel dolce vento d’Arcadia.
    Attraversa il fiume una barca.
    E’ un servo del vescovo Baudo.
    Va tra la paglia d’una capanna
    sfogliata sotto molte lune.
    Detto la mia legge ironica
    alle foglie che ronzano, al trasvolo
    nervoso del drago-cervo.
    Confido alle canne false eterne
    la grande strategia da Yenan allo Hopei.
    Seguo il segno che una mano armata incide
    sulla scorza del pino
    e prepara il fuoco dell’ambra dove starò visibile.






    B sur l ecorce du pin
    Ph., G.AdC





    LE PRÉSENT



    Je regarde les eaux et les cannes
    d’un bras de fleuve et le soleil
    dans l’eau.

    Je regardais, j’étais mais je suis.
    La vase sèche entre les racines.
    Mon verbe est au présent.
    Ce monde, reste d’incendies,
    veut exister.
                          Des insectes tendent
    des pièges longs comme des millénaires.
    Les éphémères se dissipent. Se défont
    gravés dans le doux vent d’Arcadie.
    Une barque traverse le fleuve.
    C’est un serf de l’évêque Baudus.1
    Il franchit la paille d’une cabane
    effritée sous maintes lunes.
    Je dicte ma loi ironique
    aux feuilles qui bourdonnent, au vol
    nerveux du dragon-volant.
    Je confie aux cannes fausses éternelles
    la grande stratégie du Yenan jusqu’à l’Hopeï. 2
    Je lis le signe qu’une main armée grave
    sur l’écorce du pin,
    elle prépare le feu de l’ambre où je resterai visible.




    1.Baudus : évêque imaginaire du Moyen Âge.
    2. Marche des armées révolutionnaires chinoises de Yenan à Pékin (1936).



    Franco Fortini, Ce mur (1962-1972) [Questo muro, Mondadori, Milano, 1973], in Une fois pour toutes*, Poésie 1938-1985, éditions fédérop, 1986, pp. 78-79. Poème traduit de l’italien par Bernard Simeone.




    * Note d’AP : recueil composé de Una volta per sempre, 1938-1973, Einaudi, Torino, 1978 et de Paesaggio con serpente, 1973-1983, Einaudi, Torino, 1984, et de trois inédits.






    FRANCO FORTINI

    Vignette FRANCO FORTINI
    Source



        D’origine juive par son père, Franco Fortini ― Franco Lattes de son vrai nom, Fortini étant le patronyme de sa mère, de religion catholique ―, naît à Florence le 10 septembre 1917. Diplômé en droit et en lettres, il travaille dans le département publicitaire d’Olivetti à Milan de 1949 à 1953. Il devient par la suite conseiller éditorial d’Einaudi à Turin, puis enseigne dans diverses écoles supérieures avant d’occuper, à partir de 1971, une chaire d’Histoire de la critique littéraire à l’Université de Sienne. Il participe à l’élaboration de nombreuses revues parmi lesquelles Il Politecnico ― en collaboration avec Elio Vittorini ―, la revue européenne Arguments ― en collaboration avec Edgar Morin et Roland Barthes ―, Officina, Quaderni piacentini, Ragionamenti et Paragone. Il écrit également dans divers quotidiens de la presse italienne. Fortini est aussi reconnu comme traducteur de Proust, Eluard, Brecht (que Fortini a été le premier à traduire), Goethe, Flaubert, Gide et Simone Weil.
        Franco Fortini est mort à Milan le 28 novembre 1994.

         Franco Fortini est l’auteur d’une œuvre importante qui comporte des récits, des essais et de nombreux recueils poétiques : Foglio di via e altri versi (1946), Una facile allegoria (1954), Poesia e errore 1938-1957 (1959), Una volta per sempre (1963 ; rééd. 1978), L’ospite ingrato, testi e note per versi ironici (1966), Questo muro 1962-1972 (1973), Il ladro di ciliege e altre versioni di poesia (1982), Paesaggio con serpente 1973-1983 (1984).



    ■ Voir aussi ▼

    L’ospite ingrato, rivista on line del Centro Studi Franco Fortini
    → (dans Les Carnets d’Eucharis de Nathalie Riera)
    d’autres poèmes extraits du recueil ci-dessus
    le site des éditions fédérop
    → (sur wikipedia.it)
    le très riche article (en italien) consacré à Franco Fortini

    Retour au répertoire d’avril 2011
    Retour à l’ index des auteurs
    Retour à l’ index de la catégorie Péninsule (littérature et poésie italiennes)



    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Vittorio Sereni | Je traduisais Char, IV


    Discours de haies
    Ph., G.AdC






    IV


    VILLAGGIO VERTICALE


    Fresco di un passaggio recente
    al dubbio di un disguido
    risponde il villaggio verticale:
    con discorsi di siepi
    vaneggianti tra setole e velluti
    scricchiolii di porte
    appena schiuse rimpalli
    d’echi gibigianne cucù.

    Sul costone di fronte
    un taglio di luce tra le rupi fa
    di quattro sassi un’ acropoli.
    E’ a un’ora di marcia
    al sole dell’altra provincia
    la forma desiderata.




    IV


    VILLAGE VERTICAL


    Frais d’un récent passage
    au doute d’une fausse route
    répond le village vertical :
    par des discours de haies
    délirantes entre crins et velours
    grincements de portes
    à peine entrouvertes renvois
    d’échos mirages coucous.

    Sur l’arête d’en face
    une entaille de lumière entre les rochers fait
    des quatre cailloux une acropole.
    À une heure de marche
    au soleil de l’autre contrée :
    la forme désirée.



    Vittorio Sereni, « Je traduisais Char », IV, Étoile variable, Verdier, Collection « Terra d’altri », 1987, pp. 120-121. Édition bilingue. Traduction de Philippe Renard et de Bernard Simeone. Préface de Franco Fortini.

        « Comme toute vraie poésie, celle de Sereni dit deux vérités. La première, psychologique et historique, édifie un protagoniste, un réseau de rapports, une fabula. La seconde dit quelque chose qui dépasse l’organisme littéraire, organe de sa phonation. Dans sa première vérité, la voix que nous nommons Sereni témoigne d’événements profonds et de tensions tout au long d’un demi-siècle d’histoire d’une nation tragique, l’Italie, mal comprise par l’Europe ; et elle le fait avec des mots guère différents de ceux employés par les auteurs des générations précédente (comme Montale) ou suivante (comme Pasolini). Dans sa seconde vérité, au contraire, sous des apparences urbaines et quotidiennes, elle annonce un au-delà de la poésie : dans cette voix ― pas du tout étrange, voire « normale » ― triomphe la mort. Contrairement à son contemporain Luzi ou à son cadet Zanzotto, Sereni n’assigne à la poésie aucune mission salvatrice. »

    Franco Fortini, « La plage et la sibylle », préface (extrait), in Vittorio Sereni, id. supra, pp. 7-8.





    VITTORIO SERENI


    VITTORIO SERENI




    ■ Vittorio Sereni
    sur Terres de femmes

    A Venezia con Biasion (autre poème extrait de Étoile variable)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions Verdier) la fiche de l’éditeur sur Étoile variable (+ extraits de presse)



    Retour au répertoire du numéro de janvier 2010
    Retour à l’index de la catégorie Péninsule (littérature et poésie italiennes)
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes