Étiquette : Guillevic


  • Georg Trakl | Hohenburg [traduction de Guillevic]





    HOHENBURG






    Es ist niemand im Haus. Herbst in Zimmern;
    Mondeshelle Sonate
    Und das Erwachen am Saum des dämmernden Walds.

    Immer denkst du das weiße Antlitz des Menschen
    Ferne dem Getümmel der Zeit;
    Über ein Träumendes neigt sich gerne grünes Gezweig,

    Kreuz und Abend;
    Umfängt den Tönenden mit purpurnen Armen sein Stern,
    Der zu unbewohnten Fenstern hinaufsteigt.

    Also zittert im Dunkel der Fremdling,
    Da er leise die Lider über ein Menschliches aufhebt,
    Das ferne ist; die Silberstimme des Windes im Hausflur.







    HOHENBURG





    Il n’y a personne dans la maison. Automne dans les chambres.
    Sonate en clair de lune.
    Et l’éveil à l’orée de la forêt crépusculaire.

    Toujours tu vois le visage blanc de l’homme
    Loin des tumultes du temps ;
    Sur ce qui rêve s’incline volontiers la ramure verte.

    Croix et soir ;
    Celui qui résonne est pris par les bras pourpres de son étoile
    Qui monte vers des fenêtres inhabitées.

    Ainsi tremble l’étranger dans la pénombre
    Quand doucement il lève ses paupières sur de l’humain
    Au loin ; voix argentine du vent dans le vestibule.




    Georg Trakl, Vingt poèmes traduits et présentés par Guillevic, éditions Obsidiane, 2016, pp. 40-41.






    Georg Trakl  Vingt poèmes




    GEORG  TRAKL


    Trakl01
    Knudd Odde
    Trakl (efter Dea), 2003
    Acrylique et huile sur papier,
    138 x 116 cm
    Source





    ■ Georg Trakl
    sur Terres de femmes

    3 février 1887 | Naissance de Georg Trakl
    [La rosée du printemps]




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de la revue temporel)
    « Une quête hallucinée de l’Absolu : regard sur la poésie de Trakl », par Jack Delavenne (26 septembre 2011)





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  • Guillevic | À Denise Le Dantec



    Blessure
    « Au commencement était la blessure »
    Ph., G.AdC








    À DENISE LE DANTEC




    Au commencement était la blessure
    Et la blessure n’a pas cessé.

    Dans le vent, dans la lumière océanique,
    Dans la nuit-tourbillon, dans la nuit-aux-aguets,
    Dans la rare ascension au presque bien-être,

    L’entourage
    Comme un ajonc universel
    Crie son besoin
    De partager la déchirure —

    Et pourtant la caresse
    D’un pétale de rose

    Inaccessible
    Et toujours présent.


    28/06/19801



    Guillevic, « Pour saluer quatre voix amies de femmes en poésie », in Ouvrir, Poèmes et proses, 1929-1996, Éditions Gallimard, Collection blanche, 2017, page 74. Édition établie et préfacée par Lucie Albertini-Guillevic. Postface de Monique Chefdor.



    ________________________________________
    1. Ce texte dédié a été écrit après la lecture des poèmes de Denise Le Dantec qui a publié une trentaine d’ouvrages dont Guillevic et la Bretagne, Éditions Blanc Silex, 2000.






    Guillevic  Ouvrir





    GUILLEVIC


    Guillevic dantec
    Source




    ■ Eugène Guillevic
    sur Terres de femmes


    5 août 1907 | Naissance d’Eugène Guillevic
    A
    Carnac, traduit en corse par Francescu-Micheli Durazzo
    Rites



    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions Gallimard)
    la fiche de l’éditeur sur Ouvrir d’Eugène Guillevic
    → (sur le site des éditions Gallimard)
    la préface d’Ouvrir d’Eugène Guillevic par Lucie Albertini-Guillevic (flipbook, PDF)



    ■ Denise Le Dantec
    sur Terres de femmes


    [Beau temps sur la planète] (extrait d’ENHEDUANNA)
    29 avril | Denise Le Dantec, L’Estran
    [« ceci est l’espace de la transparence »](poème extrait d’et je t’embrasse)
    Mémoire des dunes
    Mémoire des dunes (extrait de 7 Soleils & autres poèmes)
    [La Seine est verte] (extrait de La Seconde augmentée)
    La Seconde augmentée (lecture d’AP)
    [J’ai pris la perspective du rossignol](extrait de La Strophe d’après)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Où quand
    → (dans la Galerie Visages de femmes)
    le Portrait de Denise Le Dantec (+ un extrait de l’Encyclopédie poétique et raisonnée des herbes)





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  • Guillevic | A



    A
    Image, G.AdC






    A




    Vive l’absolu –

    Clame l’horloge
    qui ne marche pas.

    *


    Alambics
    Nous sommes.

    Voici des mots
    À près de cent degrés –

    Parfois.

    *


    Une anthologie
    Des abris rêvés
    Depuis la bactérie.

    *


    Être un arc
    Une arbalète,
    Pour les mots.

    *


    Les arcanes des mots :
    Un pléonasme.

    *


    Essayons de faire
    Que les mots
    Employés par nous

    Ne soient pas archaïques,
    Aussitôt.

    *


    Comment les archanges
    Se reconnaissent-ils
    Entre eux ?

    *


    Il y en a pour croire
    Qu’on joue du mot
    Avec un archet.

    *


    Trouvez-moi un mot
    Qui ne se prenne pas
    Pour un archétype.

    *


    Archicube, archichambellan,
    Archichancelier, archidiacre,
    Archiduc, archimandrite,
    Archimillionnaire, archiprêtre –

    Il y a des mots
    Qui vont avec l’allure
    De ces archi-là.

    *

    On parle de l’au-delà.
    On ne dit jamais
    Au-delà de quoi.

    *


    La planche
    Séparée de l’arbre

    Parle encore
    D’un avenir.

    *


    Avoir des mots.

    Avec qui ?
    Avec quoi ?

    *


    Azotobacter.

    Nom officiel
    D’une bactérie.

    *

    Le ciel bleu
    S’est forgé lui-même
    Le terme d’azur.




    Eugène Guillevic, Accorder, poèmes 1933-1996, Editions Gallimard, Collection blanche, 2013, pp.108-109-110-111. Édition établie et postfacée par Lucie Albertini-Guillevic.





    GUILLEVIC


    Guillevic_eugene
    Source



    ■ Eugène Guillevic
    sur Terres de femmes



    5 août 1907 | Naissance d’Eugène Guillevic
    À Denise Le Dantec
    Carnac, traduit en corse par Francescu-Micheli Durazzo
    Rites





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  • Guillevic, Carnac

    traduit en corse par Francescu-Micheli Durazzo

    «  Poésie d’un jour  »


    Carnac 2







    CARNAC



    Mer au bord du néant,
    Qui se mêle au néant,

    Pour mieux savoir le ciel,
    Les plages, les rochers,

    Pour mieux les recevoir.




    Femme vêtue de peau
    Qui façonnes nos mains,

    Sans la mer dans tes yeux,
    Sans ce goût de la mer que nous prenons en toi,

    Tu n’excéderais pas
    Le volume des chambres.



    La mer comme un néant
    Qui se voudrait la mer,

    Qui voudrait se donner
    Des attributs terrestres

    Et la force qu’elle a
    Par référence au vent.




    J’ai joué sur la pierre
    De mes regards et de mes doigts

    Et mêlées à la mer,
    S’en allant sur la mer,
    Revenant par la mer,

    J’ai cru à des réponses de la pierre.




    Ils ne sont pas tous dans la mer,
    Au bord de la mer,
    Les rochers.

    Mais ceux qui sont au loin,
    Égarés dans les terres,

    Ont un ennui plus bas,
    Presque au bord de l’aveu.




    Ne te fie pas au goémon: la mer
    Y a cherché refuge contre toi,
    Consistance et figure.

    Pourrait s’y dérouler
    Ce qu’enroula la mer.




    Eugène Guillevic, Carnac, Éditions Gallimard, Collection blanche, 1961, pp. 7-8-9-10-11-12.







    CARNAC



    Mari in taddu di nudda,
    Chì s’abbulighja à a nudda,

    Da sapè meddu u celi,
    I marini ed i scodda,

    Da riceva li meddu.




    Donna vistuta à a peddi
    Chì ci forma i mani,

    Senza u mari in l’ochja,
    Senzu u muscu di mari chì no’ piddemu in tè,

    Ùn tracuddarii micca
    U volumu di i stanzi.




    Mari quant’è una nudda
    Chì vurria essa u mari,

    Chì vurria da sè
    Attributa tarrani

    È quidda forza a soia
    Pà rapportu à u ventu.




    Aghju ghjucatu annant’à a petra
    Cun i sguardi ed i dita.

    È aghju meschju u mari,
    Bughendu annant’à u mari,
    Bulendu subra u mari,

    Aghju cretu ch’iddi fussini i risposti di a petra.




    Ùn si ni stani tutti indrint’à u mari
    O in taddu di mari,
    I scodda.

    Quiddi chì sò luntani,
    Smarsi in mez’ad i terri,

    T’ani una noia bassa,
    Quasi in orlu di labbri.




    Ùn ti fidà di l’alga: u mari
    Contr’à sè stessu ci s’hè trovu agrottu,
    Cunsistenza è figura.

    Ci si pudaria sbucinà
    Ciò chì lu mari imbucinò.




    Eugène Guillevic, Carnac, traduction inédite de François–Michel Durazzo.
    D.R. Texte Francescu-Micheli Durazzo






    ________________________________________
    NOTE d’AP :



    Source



         François-Michel Durazzo, professeur agrégé de lettres classiques, poète de langue corse et traducteur spécialisé dans toutes les langues romanes, m’a tout récemment fait parvenir la traduction qu’il a faite en langue corse des quarante premières pages-strophes du poème Carnac, d’Eugène Guillevic. À l’extrait (les six premières pages-strophes) que j’ai sélectionné ci-dessus, je joins ci-dessous l’avant-propos en langue corse qui accompagnait cette traduction. J’adresse à François-Michel Durazzo tous mes remerciements pour ce bel hommage à Eugène Guillevic et à son épouse Lucia Albertini
    .




    Guillevic da Aiacciu à Carnac



         Eugène Guillevic viaghja à traversu à a midità di u seculu scorsu cù una boci unica. Ghjunghji quandu u surrialisimu t’hà piddatu a suprana è imponi a materia, a rialità pagna, micca quidda di l’imaghjinariu, ma a tarra, u sintimu quasi panteistu di a tuttalità sacra chì ci campa in centru. Senza furia, trapanighja u silenziu, pocu è pocu lu sculpisci, da Terraqué (1946) sin’à a morti in u 1997. Di l’omu natu in Carnac in u 1907, paisaghju stantaratu in a mimoria zitiddesca, sapemu chì mezu da scodda à mari, bosca à machja, stantari à stazzoni, li hè fermu impressu nant’à u marmaruculu u sintimu fundiu di l’itarnità, ghjuntu in a cuntimplazioni di l’uceanu brittonu chì ni licca i scodda è mughja n’u ventu. In quidda tarra sacra di fini di lu mondu, i maestri minavani à i sgaiuffa quand’in iscola li scappaia calchì parolla brittona. À Guillevic ùn li fù imparata issa lingua materna, a sintia è basta, masimu quandu i ghjinitori ùn vuliani chì i fiddoli capissini. A famidda era povara, u babbu era ciandarmu è ci vulia à sfrancisà da pudè finiscia un ghjornu issa vita galiriana. Di issi tempa duri, Guillevic rammenta in Vivre en Poésie i stundi di libartà in paesi incù i pochi ziteddi chì parlaiani francesu, i petri, l’arba è a filetta. S’inveni di i funtani di granitu; in taddu di strada, cù i so cruci, pieni ad alghi ed à catedda.

         À i dodici anni di u fiddolu crisciutu trà i stantari celtichi, u babbu fù trasfiritu dopu à a prima guerra in Ferrette (Alsazia). Altra tarra, altra lingua. Guillevic imparò, in issa tarra francata da pocu di l’Imperu tadescu, l’alimanicu cun i novi cumpagni, mentri chì u francesu firmaia a lingua di scola, una lingua chì li paria sacra, ghjeratica, riservata à l’impiigati è à u sapè. Rammenta chì in iscola dui cosi erani proibiti “parlà brittonu è sputà in tarra,” dui piccati chì dicini assa’ u disprezzu d’una volta. È v’eccu chì i puisii imparati à menti li palisavani un’antra lingua: “u ghjeraticu inde u ghjeraticu. Fù ciò chì mi piacì. […] C’era una lingua vulgari è una lingua da la ghjenti di tonu, u fiori di a sucità. […] È al di là di issu francesu, c’era un’antra lingua, quidda di u puemu. Mi li parsi chì incù una curdetta si facia un fil di farru. […] U versu era una lingua tesa chì ùn si pudia cambià. Una cosa solida. Com’è a petra. Sempri mi piacì a petra. Trà petra è versu, c’era una leia.” Tamanti sforza da ammaistrà la, issa lingua biniditta, chì t’avia da essa un ghjornu a lingua di a litaratura, dopu a lingua di u pani. Più di una volta dissi u pueta chì u francesu sempri li fù stranieru, è chì sinu à a so morti aprì u so Larousse da rileghja u sensu ghjustu di i parolli più semplici: pierre, chanter, aimer…

         Podarsi chì sighi pocu utuli à traducia puisia francesa in corsu! Ma in stu casu quì si tratta di l’iniziu di una puisia scritta in Aiacciu circa u 1960, chì si chjama propriu Carnac, u paesi natali. V’eccu u nosciu pueta chì fighjula u nosciu Miditarraniu, è da u so balconu aiaccinu senti com’iddu tracodda ad empia u volumu di a stanza d’albergu. A prima discrizzioni è propriu quidda di u mari nustrali, un mari universali chì pocu è pocu ammenta l’uceanu brittonu. Com’è dici dinò u stessu Guillevic, in issu chjama è rispondi incù Lucia Albertini, a moglia corsa: “crergu chì u paisaghju internu di u pueta hè filigranatu da i ricorda di zitiddina, parchì hè propiu u locu induva li si palesa u mondu, è ancu quì ebbi i so primi rapporta faciuli, strani o incuriusiti incù a lingua, i parolli.”

         Più in là di quist’incruciu pueticu trà petri è mari, venta è tarri, stantari brittoni o corsi, diriu chì u sguardu di u pueta hè sempri internu, leghji è rileghji u mondu cù l’ochja di a zitidddina, di i primi spirienzi. Ad un trattu affacca in mezu à issa discrizzioni u visu di u prima amori, quiddu di una zitedda brittona morta à l’ità di sedici anni. In a cuntimplazioni di u mari, quant’è u visu di a diletta Marie-Clothilde, ci hè issu viaghju in u sintimu d’infinitu, di cummunioni incù a tutalità chì porsi u nosciu mari à u gran pueta.

         À a so cara Lucia, iddu dicia aspissu “u to mari hè un lavu”. È soca a noscia calma chjamava in stu pettu brittonu u ricordu di u marosu, di u so impulsu viulentu è uceanicu. È sì in mezu à u ricordu chjuccutu di l’uceanu, stu palimspestu ci purghjessi u nosciu mari latinu? In sti versa si riflettani dui mari, dui tarri smimuriati, dui monda stantarati, dui ribbali uccidentali volti à punenti, cusì vicini, cusì luntani in un dialogu chì rinova tramindui.


    Francescu-Micheli Durazzo





    GUILLEVIC


    Guillevic_eugene
    Source



    ■ Eugène Guillevic
    sur Terres de femmes

    5 août 1907 | Naissance d’Eugène Guillevic
    A
    À Denise Le Dantec
    Rites




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