Étiquette : IV


  • Anne Seidel | Hygiene der angst II, III, IV



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    HYGIENE DER ANGST II


    hier: schoenheit ist am ernsthaftesten : grundlos.
    weißgefliest-aengstlich schweben kristalle ins meer hinaus,
    umspuelen reglose glaswaende die flocken

    hier: schoenheit ist am ernsthaftesten : grundlos,
    die weiße angst zu verhaengen, schneiend-schwarz
    erzittert und zerfaellt die erwartung der tiere



    HYGIÈNE DE LA PEUR II

    ici : la beauté est la plus sérieuse : sans raison.
    peureusement carrelés de blanc des cristaux flottent vers le large,
    les flocons baignent des parois de verre immobiles

    ici : la beauté est la plus sérieuse : sans raison,
    pour masquer la peur blanche, noires neigeuses
    tremblent et se décomposent les attentes des animaux






    HYGIENE DER ANGST III

    eingaenge, solovki, tiefschwarzes licht, signal der stadt.
    opalisierend, solovki, gesichter, laute endlosigkeiten,
    wenn alles einfiel, solovki, vielleicht, zuletzt zuckte es

    keine ausgaenge, solovki, tiefschwarzes licht, signal der stadt,
    augopal, solovki, gesichter, wenn nach lauter endlosigkeiten alles
    einfiel, solovki, vielleicht aug in auge



    HYGIÈNE DE LA PEUR III

    entrées, solovki, lumière d’un noir profond, signal de la ville.
    opalisant, solovki, visages, infinités à forte résonance,
    quand tout s’effondra, solovki, peut-être, pour finir cela tressaillit

    pas de sorties, solovki, lumière d’un noir profond, signal de la ville,
    opale de l’œil, solovki, visages, quand à force d’infinités tout
    s’effondra, solovki, peut-être les yeux dans les yeux






    HYGIENE DER ANGST IV

    schwarze spitzen, weiß linien, russland, so hilflos zieht
    stille ein, die namen getraenkt, ende der waelder,
    es fehlte immer eine hand, versunken im pelz

    schwarze spitzen, weiße linien, da warst du, so hilflos zog
    stille in dich ein, in namen und waelder,ferne,
    es fehlte immer eine hand, versunken im schnee, solovki



    HYGIÈNE DE LA PEUR IV

    pointes noires, lignes blanches, russie, désemparé s’installe
    le silence, les noms abreuvés, fin des forêts,
    il manquait toujours une main, engloutie dans la fourrure

    pointes noires, lignes blanches, tu étais là, désemparé s’installait
    le silence en toi, dans les noms et les forêts, lointains,
    il manquait toujours une main, engloutie dans la neige, solovki




    Anne Seidel, Khlebnikov pleure [Chlebnikov weint, Poetenladen, Leipzig, 2015], II, III, IV, éditions Unes, 2020, pp. 36-41. Traduit de l’allemand par Laurent Cassagnau.






    Anne Seidel  Khlebnikov pleure 2




    ANNE SEIDEL


    Anne Seidel Denim
    Source




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions Unes)
    la page de l’éditeur sur Khlebnikov pleure
    → (sur le site du Matricule des Anges)
    une lecture de Khlebnikov pleure par Emmanuelle Rodrigues





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  • [Prix Louise-Labé 2019] Anne Emmanuelle Volterra |

    [Aux fissures invisibles des façades…]



    [AUX FISSURES INVISIBLES DES FAÇADES…]




    Aux fissures invisibles des façades
    répondent des grincements de fêtes
    l’enivrement des rues et leurs cadavres malgré les rires
    Mais notre inquiétude
    dans les plaisirs et la mollesse des jours de congé
    leurs repas copieux, leurs siestes
    l’inquiétude qui tourmente ces jours heureux
    De grands jours
    de très grands jours sans couleur
    que ne gâchent que ces fissures
    que nous supposons aux façades
    et un sermon de Saint Augustin
    sur la vieillesse du monde



    ***



    Tant de promeneurs sur les boulevards
    en manteaux, en écharpes faites main
    de jolis gens chics qui se pressent aux fêtes
    malgré les vents contraires




    Anne Emmanuelle Volterra, « Histoire et tragédies », IV, Scènes d’Hiroshima, Éditions LansKine, 2018, page 26. Prix Louise-Labé 2019.






    Anne Emmanuelle Volterra  Scènes d'Hiroshima





    ______________________________
    NOTE d’AP : Anne Emmanuelle Volterra est lauréate du Prix Louise-Labé 2019 (décerné en 2020) pour Scènes d’Hiroshima.
    Ex aequo avec Béatrice Marchal pour Un jour enfin l’accès (éditions L’herbe qui tremble).




    ANNE EMMANUELLE VOLTERRA


    Anne Emmanuelle Volterra

    Anne Emmanuelle Volterra,
    23 novembre 2018,
    librairie Texture (75019 Paris)





    Anne Emmanuelle Volterra est née le 24 décembre 1980 à Fribourg (Suisse). Après avoir suivi des études de droit, elle travaille au ministère des Finances (Suisse), en charge de politique fiscale internationale. Elle vit à Zurich. Depuis 2015, elle publie régulièrement des poèmes en revues (Poésie/Première, Diérèse, Décharge, la Gazette de la Lucarne, Place de la Sorbonne, la Revue de Belles-Lettres). Elle est correspondante pour la Suisse de la revue Place de la Sorbonne. Scènes d’Hiroshima est son premier ouvrage de poésie.




    ■ Anne Emmanuelle Volterra
    sur Terres de femmes


    Scènes d’Hiroshima (lecture d’AP)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions LansKine)
    la fiche de l’éditeur sur Scènes d’Hiroshima






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  • Fabrizio Bajec | Le chant des tortues



    LE CHANT DES TORTUES



    (sur une photo de ma mère)



    Je t’offre en ce poème
    une tortue des Galápagos
    énorme animal nourri de gentillesse
    que tu vis morte sur une plage asiatique
    Force est de croire qu’elle dut se battre
    et faire saigner ses lèvres sous l’emprise d’un requin
    qui lui faucha les pattes et une partie de la tête
    Maintenant je t’imagine descendre avec elle
    dans les abysses de la mer indienne
    toutes deux pareillement heureuses
    de savoir le soleil vous suivre
    et s’infiltrer dans l’eau plus lourde
    Jocelyne joyeuse petite fille
    une autre tortue t’attendait moins grande
    c’est ma descendante lorsqu’elle dresse le cou
    pour donner à entendre si fort
    la langue des émotions




    Fabrizio Bajec, « IV. Le bonheur familial », in La Collaboration, Librairie Éditions Tituli, Collection Poésie, Paris, 2018, page 82.






    Fabrizio Bajec  La Collaboration





    FABRIZIO BAJEC


    Fabrizio Bajec
    Source




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site personnel de Fabrizio Bajec)
    une notice bio-bibliographique sur Fabrizio Bajec





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  • Fernando Pessoa | [Ce soir l’orage a roulé]



    [CE SOIR L’ORAGE A ROULÉ]




    Ce soir l’orage a roulé,
    Tombant sur des versants du ciel
    Comme un énorme bloc de pierre…

    Comme si quelqu’un du haut d’une fenêtre
    Secouait une nappe,
    Et que les miettes tombant toutes ensemble,
    Faisaient un certain bruit dans leur chute ;
    La pluie crépitait par terre
    Obscurcissant les chemins…

    Tandis que les éclairs ébranlaient l’espace
    Et secouaient l’air
    Comme une grande tête qui dirait non,
    Je ne sais pas pourquoi — je n’avais pas peur —
    Je me suis mis à prier sainte Barbe
    Comme si j’étais la vieille tante de quelqu’un…

    Mais c’est qu’à prier sainte Barbe
    Je me suis senti encore plus simple
    Que je ne pensais l’être…
    Je me sentais familial et casanier
    Ayant passé ma vie
    À écouter tranquillement ma bouilloire ;
    Au côté de parents plus âgés que moi
    Comme si c’était pour moi une façon de fleurir…

    Je me sentais quelqu’un qui pouvait croire en sainte Barbe…
    Ah, pouvoir croire en sainte Barbe !

    (Qui croit en sainte Barbe,
    Pensera que c’est quelqu’un de visible
    Sinon que peut-il penser d’elle ?)

    (Quel artifice ! Que savent
    Les fleurs, les arbres et les troupeaux
    De sainte Barbe ?… Une branche d’arbre,
    Si elle pensait, ne pourrait jamais
    Construire ni des saints ni des anges…
    Elle pourrait penser que le Soleil
    Éclaire et que le tonnerre
    Est un vacarme soudain
    Qui naît avec la lumière.
    Ah, comme les hommes les plus simples
    Paraissent malades, confus et stupides
    Face à la lumineuse simplicité
    Et à la force d’exister
    Des arbres et des plantes !)

    Et moi, pensant à tout cela,
    Je me retrouvais moins heureux une fois de plus…
    Sombre, mélancolique et malade
    Comme un jour où l’orage a menacé
    Sans jamais venir, même la nuit tombée…


    mars 1914




    Fernando Pessoa, Le Gardeur de troupeaux, IV, poème d’Alberto Caeiro, avec des variantes inédites, Éditions Unes, 2018, s.f. Nouvelle traduction du portugais par Jean-Louis Giovannoni, Rémy Hourcade et Fabienne Vallin.






    Fernando Pessoa  Le Gardeur de troupeaux




    FERNANDO PESSOA




    Vignette Pessoa
    Vignette de Almada Negreiros
    (D.R. éditions Unes)





    ■ Fernando Pessoa
    sur Terres de femmes

    [Hommes de barre !] (extrait d’Ode maritime)
    Sous un ciel bas et sombre
    Ulysse
    13 juin 1888 | Naissance de Fernando Pessoa
    13 juin 1930
    14 septembre 1931
    29 janvier 1932
    11 juin 1932
    26 mars 1934 | Fernando Pessoa, Les Îles Fortunées



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions Unes)
    la fiche de l’éditeur sur la nouvelle traduction du Gardeur de troupeaux de Fernando Pessoa





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