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  • Jean-Claude Pirotte, À Saint-Léger | suis réfugié

    par Bernadette Engel-Roux

    Jean-Claude Pirotte, À Saint-Léger | suis réfugié,
    L’Arrière-Pays éd., juin 2014.



    Lecture de Bernadette Engel-Roux



    Le retour Pastel de Jean-Claude Pirotte 2008
    Source







    [« SI LES BUSARDS ET LES AUTOURS  |  N’ANNONÇAIENT PAS LA FIN DU JOUR »]



    Jean-Claude Pirotte, qui avait écrit dans Lire quelques chroniques sur des recueils édités par L’Arrière-Pays, leur a un jour proposé un petit livre, après les recueils de son ami Bertrand Degott, que L’Arrière-Pays avait aussi édités. Il a eu le temps d’en revoir les épreuves à l’hôpital mais n’aura pas vu le livre paru en juin. Il est mort quelques jours avant.

    À Saint-Léger | suis réfugié est donc son dernier recueil, accompagné, pour le tirage de tête, de quinze encres du poète, épuisé par la maladie.

    Sur la couverture, la disposition du titre en deux vers venus de l’un des poèmes, donne délicatement à entendre le rythme triste, sensible et léger que Pirotte reprend, souvent avec leur vocabulaire, aux poètes qu’il aime et auxquels il ressemble de loin : Rutebœuf et Villon, Rimbaud et Laforgue, frères en errance et en infortune, voués à la complainte et au testament, aux dits des ribauds et vagabonds, aux dits des plaies du monde et quelquefois des leurs, quand le corps geint trop. « Réfugié » à Saint-Léger où il se sait attendre la fin :


    je ne vivrai plus longtemps

    j’aimerais passer le temps

    à ne me prendre au sérieux

    jamais plus qu’un jour ou deux


    le poète regarde ce corps souffrant en choisissant cette relative distance qui évite l’apitoiement :


    Je me tiens à la fenêtre

    en attendant qu’un bel être

    fabuleux me fasse signe

    et d’un doigt clair me désigne

    pour le suivre pas à pas

    sur la terre et au-delà


    et en essayant de dire encore les instants de beauté, de grâce ou de répit que lui offre le monde,


    un poème d’après-midi…

    on dirait presque un paradis

    si le temps n’était pas mobile

    et ne traversait le jardin

    comme le merle à cet instant…

    si le temps n’était pas le temps…

    si le jour n’était pas à jour

    et pouvait faire demi-tour

    si les busards et les autours

    n’annonçaient pas la fin du jour


    Ainsi se pose la voix des mélancoliques subtils lorsqu’ils sont poètes, comme Henri Thomas (cité en exergue) ou Jacques Réda que Pirotte compte, avec Jammes, Follain ou Dhôtel et tant d’autres, dans sa grande famille poétique. Une voix aussi belle et juste, dont les nombreux recueils et livres ont été très bien édités, participant ainsi d’une reconnaissance publique, ponctuée de plusieurs prix et d’un colloque. On est heureux que L’Arrière-Pays ait recueilli les dernières pages du poète (né et mort à Namur, avec pourtant toute une vie de cavale), invitant ainsi de nouveaux lecteurs à découvrir l’œuvre de Cette âme perdue, familier du Promenoir magique et buveur d’imaginaire.



    Bernadette Engel-Roux
    D.R. Bernadette Engel-Roux
    pour Terres de femmes,
    juillet 2014







    Jean-Claude-Pirotte-A-Saint-Leger-suis-refugie




    JEAN-CLAUDE PIROTTE


    Pirotte portrait 2
    Ph. © Belga/AFP/Archives/
    Source





    ■ Jean-Claude Pirotte
    sur Terres de femmes


    [je me suis dégagé d’une ombre] (extrait de Je me transporte partout)
    la mère (poème extrait de Revermont)
    [le ciel au crépuscule] (extrait d’Une île ici)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur marincazaou – le jardin marin)
    une page consacrée à Jean-Claude Pirotte
    → (sur Esprits Nomades)
    une page consacrée à Jean-Claude Pirotte
    → (sur le site du Point)
    Jean-Claude Pirotte, enfant terrible des lettres belges




    ■ Autres notes de lecture de Bernadette Engel-Roux
    sur Terres de femmes


    Olivier Rolin, Extérieur monde
    José-Flore Tappy, Tombeau
    Jean-Loup Trassard, Causement





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