Étiquette : Jules Laforgue


  • Dimanche 13 novembre [1881] | Jules Laforgue, Dans la rue

    Éphéméride culturelle à rebours




    DANS LA RUE




    C’était le trottoir avec ses arbres rabougris.
    Des mâles égrillards, des femelles enceintes,
    Un orgue inconsolable ululant ses complaintes,
    Les fiacres, les journaux, la réclame et les cris.

    Et devant les cafés où des hommes flétris
    D’un œil vide et muet contemplaient leurs absinthes
    Le troupeau des catins défile lèvres peintes
    Tarifant leurs appas de macabres houris.

    Et la Terre toujours s’enfonce aux steppes vastes,
    Toujours, et dans mille ans Paris ne sera plus
    Qu’un désert où viendront des troupeaux inconnus,

    Pourtant vous rêverez toujours, étoiles chastes,
    Et toi tu seras loin alors, terrestre îlot
    Toujours roulant, toujours poussant ton vieux sanglot.


    Dimanche 13 novembre.




    Jules Laforgue, Autres Complaintes in Les Complaintes et les premiers poèmes [Gallimard, 1970], Collection Poésie/Gallimard, 1979, page 308. Édition établie par Pascal Pia.







    Jules Laforgue  Les Complaintes 2





    JULES LAFORGUE


    Laforgue
    Emile Laforgue, Portrait de Jules Laforgue,
    Bibliothèque nationale de France, Paris




    ■ Jules Laforgue
    sur Terres de femmes

    16 août 1860 | Naissance de Jules Laforgue
    Résignation





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  • Jules Laforgue | Résignation




    RÉSIGNATION



    Parasite insensé d’une obscure planète,
    Dans l’infini tonnant d’éternelles clameurs,
    Sur un point inconnu j’apparais et je meurs,
    Et je veux qu’aussitôt tout le sache, et s’arrête !

    Je veux que pour un cri perdu dans la tempête
    Les océans soudain sèchent leurs flots hurleurs,
    Et que pour apporter sur ma tombe des fleurs,
    Les soleils en troupeaux accourent de leur Fête !

    Pauvre cœur insensé ! brise-toi, tu n’es rien.
    Et bien d’autres sont morts dont le cœur fut le tien,
    Et la terre elle-même ira dans le silence.

    Tout est dur et sans cœur et plus puissant que toi.
    Souffre, aime, attends toujours et […..] danse
    Sans même demander l’universel Pourquoi.



    Jules Laforgue, Premiers poèmes, in Les Complaintes et les premiers poèmes [Éditions Gallimard, 1970], Collection Poésie/Gallimard, 1979, page 223. Édition établie par Pascal Pia.






    Jules Laforgue  Les Complaintes 2





    JULES LAFORGUE


    Laforgue
    Emile Laforgue, Portrait de Jules Laforgue,
    Bibliothèque nationale de France, Paris




    ■ Jules Laforgue
    sur Terres de femmes

    16 août 1860 | Naissance de Jules Laforgue
    Dimanche 13 novembre [1881] | Jules Laforgue, Dans la rue



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  • 16 août 1860 | Naissance de Jules Laforgue

    Éphéméride culturelle à rebours



    Le 16 août 1860 naît à Montevideo, en Uruguay, Jules Laforgue.




    Arrivé en France en 1866, Laforgue fait ses études à Tarbes, ville d’origine de Charles Laforgue, père de Jules. Puis à Paris, au lycée Condorcet. Sa fréquentation, au quartier Latin, des soirées des Hydropathes, lui permet de se lier avec un groupe de poètes, des chansonniers et des musiciens. Parmi eux, Paul Bourget, qui l’encourage à poursuivre ses compositions poétiques. Jules Laforgue commence à publier dans La Vie moderne. En 1881, Paul Bourget obtient pour son protégé désargenté le poste de lecteur auprès de l’impératrice d’Allemagne Augusta qu’il accompagne dans ses déplacements. Le jeune poète occupe ce poste de 1881 à 1885.

    Athée et fortement influencé dans sa culture philosophique par Schopenhauer, Jules Laforgue nourrit pour l’amour physique un sentiment d’horreur encore accentué par la fragilité de sa santé. À sa mort prématurée à l’âge de vingt-sept ans, le 20 août 1887, Laforgue laisse une œuvre originale qui se démarque des courants de son temps.

    En 1885 paraissent les Complaintes, dédiées à Paul Bourget. Viennent ensuite, en 1886, Le Sanglot de la terre et L’Imitation de Notre-Dame la Lune. En 1887 sont publiés à titre posthume les contes philosophiques des Moralités légendaires.

    Le poème « Crépuscule de dimanche d’été » a été publié pour la première fois en 1903, dans le tome II des Œuvres complètes de Laforgue, au Mercure de France.







    CRÉPUSCULE DE DIMANCHE D’ÉTÉ



    Une belle journée. Un calme crépuscule
    ………………………………………………………..
    Rentrent, sans se douter que tout est ridicule,
    Et frottant du mouchoir leurs beaux souliers poudreux.

    Ô banale rancœur de notre farce humaine !
    Aujourd’hui, jour de fête et gaieté des faubourgs,
    Demain le dur travail, pour toute la semaine.
    Puis fête, puis travail, fête… travail… toujours.

    Par l’azur tendre et fin tournoient les hirondelles
    Dont je traduis pour moi les mille petits cris.
    Et peu à peu je songe aux choses éternelles,
    Au-dessus des rumeurs qui montent de Paris.

    Oh ! tout là-bas, là-bas… par la nuit du mystère,
    Où donc es-tu, depuis tant d’astres, à présent…
    Ô fleuve chaotique, ô Nébuleuse-mère,
    Dont sortit le Soleil, notre père puissant ?

    Où sont tous les soleils qui sur ta longue route
    Bondirent, radieux, de tes flancs jamais las ?
    Ah ! ces frères du nôtre, ils sont heureux sans doute
    Et nous ont oubliés, ou ne nous savent pas.

    Comme nous sommes seuls, pourtant, sur notre terre,
    Avec notre infini, nos misères, nos dieux,
    Abandonnés de tout, sans amour et sans père,
    Seuls dans l’affolement universel des Cieux !




    Jules Laforgue, Premiers Poèmes in Les Complaintes et les premiers poèmes, éditions Gallimard (1970), Collection Poésie/Gallimard, 1979, pp. 306-307. Édition établie par Pascal Pia.






    Jules Laforgue  Les Complaintes 2





    JULES LAFORGUE


    Laforgue
    Emile Laforgue, Portrait de Jules Laforgue,
    Bibliothèque nationale de France, Paris




    ■ Jules Laforgue
    sur Terres de femmes

    Résignation
    Dimanche 13 novembre [1881] | Jules Laforgue, Dans la rue





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