Étiquette : Les Carnets d’Eucharis


  • Martine Konorski | Un point ouvert (1)


    UN POINT OUVERT
    (extraits)





    Même
    les vitres opaques
    ne peuvent te cacher

    Pas de bruit      pas de vent
    une seule lumière
    seule lueur

    La sirène jette un cri
    bruit de bottes     plus de refuge
    dans l’escalier

    on siffle

    Dégringolent les familles
    pas de brèche      plus de souffles
    restent les hurlements

    Quelques perles éparses
    un mouchoir bleu brodé
    la chaussure d’un bébé

    Une étoile      sur le palier.




    Martine Konorski, « Un point ouvert » (extraits), Instant de Terres, in Les Carnets d’Eucharis, « Au pas du lavoir », « Portraits de poètes » [vol. 3], 2020, page 134. In « Un point ouvert », Instant de terres, L’Atelier du Grand Tétras, Collection Glyphes, 25210 Mont-de-Laval, 2020, page 99.





    Carnets d'Eucharis 3



    MARTINE KONORSKI


    Martine Konorski NB 2
    Ph. D.R. Pascal Therme
    Source





    ■ Martine Konorski
    sur Terres de femmes


    Instant de Terres (lecture de Marie-Hélène Prouteau)
    un autre poème extrait d’« Un point ouvert » (Instant de Terres)
    Bethani (lecture d’AP)
    [Les mots cognent] (extrait de Bethani)
    [Au versant de la pierre-écritoire] (extrait de Je te vois pâle… au loin)
    Verticale (extrait d’Une lumière s’accorde)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    [Vissée à la plante des pieds]




    ■ Voir aussi ▼


    → (dans la poéthèque du site du Printemps des poètes)
    une notice bio-bibliographique sur Martine Konorski
    le site de Martine Konorski





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  • Jean-Charles Vegliante | [La lente] [L’étourdie] [L’Africaine]



    [LA LENTE]



    Tu sens bien que le vert ne reviendra pas
    C’est un avril fichu, un autre printemps
    L’acharnement des mouettes fait frissonner
    La ville cède par des détails infimes…
    Il y a une carie dans le ciment
    On voit dans le net la honte d’une langue
    Chaque jour qui passe corrompt ses racines
    Il y a comme des radicelles pourpres
    Dans les yeux la fureur de sa propre fin
    Les fondations que l’on voulait oublier
    Les chevilles gonflées penchent vers la terre

    Elle cherche un mot où être tout entière.






    [L’ÉTOURDIE]



    Ma vue me trahit, je n’ai que mes petites
    choses, je ne suis plus qu’un arbre de veines,
    une « demeure vide » aux coups de boutoir
    des ans… Tu ne sais pas combien. Et j’aspire
    à tant de choses ! de nouvelles antennes,
    et puis je ne sais plus ce qu’on me voulait.
    Je ne veux presque rien mais rien ne remplit
    cette vacance, ce froid où je me perds.
    Les matins semblent voler avec les merles.
    Les soirs me crient : tu devrais chercher ailleurs,
    oublier ce qui t’a soutenue, rêvée…

    Lis : « perdre sa vie après les oiselets »…


    (Purgatoire, XXIII, 3)





    [L’AFRICAINE]



    Elle entre au fond de soi dans le noir du noir
    là où personne ne sait, n’ose affronter
    ce sifflement continu du vent d’en bas
    qui porte aussi les souffles de disparus
    chaque fois au bord de se faire comprendre
    mais trop tard, trop tard, le bruit assourdissant
    de sa vie la distrait une fois de plus.
    Elle a cru une fois qu’elle remontait
    le fleuve-mer, qu’elle avait le fil du rêve
    vers l’autre rive – mais rien jamais ne rend
    la question lancée comme dans l’eau d’un puits.

    Comme fond au noir un souvenir d’été.




    Jean-Charles Vegliante, Onze visites (et un post-scriptum) in Les Carnets d’Eucharis, Portraits de poètes #3, « Au pas du lavoir | Poésie & Prose», 2020, pp. 147 et 149.






    Eucharis 3 ter




    JEAN-CHARLES VEGLIANTE


    Jean-Charles Vegliante portrait
    Source




    ■ Jean-Charles Vegliante
    sur Terres de femmes


    [Un petit garçon passe] (extrait de Fragments de la chasse au trésor)
    Celle qui dort… (extrait des Oublies)
    Fenêtre (extrait de Trois cahiers avec une chanson)
    [Au fond de moi est un animal sauvage] (extrait d’Où nul ne veut se tenir)
    Où nul ne veut se tenir (lecture de Joëlle Gardes)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur Recours au Poème)
    une notice bio-bibliographique sur Jean-Charles Vegliante (+ 6 poèmes choisis)




    ■ Voir encore ▼

    le site Les Carnets d’Eucharis





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  • Rita R. Florit | Imus




    IMUS
    (extrait)





    Tu misuri la solitudine ti schermisci devii dagli specchi
    l’afflizione azzera i saperi non ti fai sviare dall’ombra, la perlustri,
    la porti addosso, ricevi il suo peso, la consistenza e l’inafferrabilità.
    Le bilanci. Poi prudentemente avanzi e da questa distanza
    inanimata ti sporgi.


    [è buio ineludibile il ritrarsi non-luogo zona franca riposo dove il nemico non avanza.]




    Tu mesures la solitude tu te protèges tu évites les miroirs
    l’affliction ramène à zéro les savoirs tu ne dévies pas de l’ombre, tu l’explores,
    tu l’endosses, tu en reçois le poids, la consistance et l’insaisissabilité.
    Tu les soupèses. Puis prudemment tu avances et depuis cette distance
    inanimée tu te penches.


    [se retrouver non-lieu zone franche repos où l’ennemi n’avance pas est une obscurité inéluctable.]





    […]





    Trovare la terra, percorrere, segnare, cingere, creare vincoli
    eppure essere liberi nell’unico pensiero: la terra, mentre Ishtar
    Gravida, grava un giogo d’amore che annotta il pensiero,
    l’incatena a se stesso.




    Trouver la terre, parcourir, noter, ceindre, créer des liens
    et pourtant être libre dans l’unique souci : la terre, tandis qu’Ishtar
    Gravide fait peser un joug d’amour qui assombrit la pensée,
    l’enchaîne à elle-même.





    Rita R. Florit, « Imus », Nyctalopia, La Camera Verde, Roma, 2018, pag. 9, 13, in Les Carnets d’Eucharis, Sur les routes du monde #2, 2019, pp. 167, 168. Traduction inédite en français d’Angèle Paoli.






    Eucharis 2019






    RITA R. FLORIT


    Rita r. florit
    Ph. © Giorgio Bevignani




    ■ Rita R. Florit
    sur Terres de femmes

    D’effimero oblio
    I giorni accatoni
    Passo nel fuoco (note de lecture d’AP)
    [Strazio il mio verso] (extrait de Passo nel fuoco)
    → (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
    Varchi del rosso
    → (dans la galerie Visages de femmes de Terres de femmes)
    le Portrait de Rita R. Florit (+ un extrait de Lezioni inevitabili)





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  • Nancy Cunard | [See now these berries dark]



    [SEE NOW THESE BERRIES DARK]




    See now these berries dark along the hedge
    Hard as black withered blood drawn long ago
    Whose sap is frozen dry; a windy sedge
    Hides field from ashen field, pale lapwings go
    Whining above the heath, and floods are out
    Over the meadows clasped in frigid lace
    Of wintry avenues, ringed and fenced about –
    His life is a place like this, just such a place.
    For him no house, but only empty halls
    To fill with strangers’ voices and short grace
    Of passing laughter, while the shadows’ lace
    Creeps from the fire along dismantled walls,
    Uncertain tapestry of altering moods—
    Only the sunset’s hour, the solitudes
    Of sea and sky, the rain come with the spring;
    Dark winds that gnarl the olive trees, and moan
    Against the shuttered brain that thrills alone
    Each night more racked by its adventuring.




    Nancy Cunard, Parallax [printed and published by Leonard and Virginia Woolf’s Hogarth Press, London, 1925. First edition].






    Nancy Cunard  Parallax







    [VOYEZ CES BAIES SOMBRES]




    Voyez ces baies sombres le long de la haie,
    Dures comme du vieux sang noir tiré il y a longtemps,
    À la sève gelée desséchée ; le carex agité par le vent
    Cache la terre du champ couleur de cendre, de pâles vanneaux
    Survolent la lande en geignant, et l’eau inonde
    Les prairies corsetées dans une dentelle glaciale
    D’avenues hivernales, entourées, clôturées—
    Sa vie ressemble à cela, précisément à cet endroit-là.
    Pour lui, pas de maisons, juste des salles vides
    À remplir avec des voix étrangères, et la grâce éphémère
    D’un éclat de rire, tandis que la dentelle des ombres
    Surgies du feu se répand sur les murs effondrés,
    Tapisserie hasardeuse d’humeurs changeantes—
    Rien que l’heure du couchant, les solitudes
    De la mer et du ciel, la pluie qu’apporte le printemps ;
    Des vents sombres qui nouent les oliviers, et heurtent
    En gémissant les volets du cerveau qui tressaille,
    Chaque soir plus taraudé par les risques auxquels il s’expose.



    Nancy Cunard, Parallaxe, suivie de poèmes extraits de Hors-la-loi et Sublunaire, Les Nouvelles Éditions Jean-Michel Place, Collection Or-la-loi, octobre 2016, page 39. Traduction de Dorothée Zumstein. In Les Carnets d’Eucharis, mars 2018, page 82.






    Nancy Cunard  Parallaxe






    NANCY CUNARD



    Nancy Cunard portrait
    Source




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur CCP, Cahier critique de poésie)
    une note de lecture de Patrice Corbin sur Parallaxe




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    le site des Carnets d’Eucharis



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  • Mary-Laure Zoss | [butés à l’arrière]



    [BUTÉS À L’ARRIÈRE]
    (extrait)




    « Les simples n’ont ni femme ni enfant. Ils puisent et donnent ailleurs. Ce qui les nourrit, personne ne le voit. »
    Jeanne Benameur, Reliques, p. 77.




    d’où on part, rasant les murs au fond de soi ; d’un parquet, d’une pingre lumière par doigts d’enfants creusée, fourgonnée ; aucun feu derrière ; du vide et on y va ; plusieurs, le sommes-nous ? à passer — ça aiderait — du plus loin qu’on peut de son nom ; dès que dehors, sur les pavés de la cour et aux genoux froides meurtrissures, nous oblige à pencher, le ciel, à songer sourd, étouffe cru par le haut des arbres ; d’une fenêtre l’infirme, au troisième elle fait signe, nous pareil ; mais les murs donnent rien ici, on grandit pas ; des frères, ils sont, leur parler où, chacun dans son angle ? là-bas, quand on y retourne, on se bande les yeux pour mieux voir ; par où entrer, pour l’heure on n’en sait rien, fichtre rien







    Pelle mecanique 800
    Ph., G.AdC






    maintenant par-dessus le ravin se lèvent des hordes hivernales, brouillard épanché, repu de l’arrière des cabanes — regardez, une s’éclaire dedans ; du chantier ferment tantôt les grilles, des ombres les tirent, casquées de jaune à la tombée ; confins ramenés près, si près, quand s’éteint l’ampoule intermittente de la pelleteuse ; à quelques mètres, d’autres battent la semelle sur le goudron ; s’envoient des châtaignes, une patate brûlante, nous on y va pas, on reste autour, ou on recule vers les containers ; ça évite, voyez-vous, de faire mauvais figure quand on s’amène la trouille au ventre




    Mary-Laure Zoss, « [butés à l’arrière] », in La Traverse du Tigre (hors-série des Carnets d’Eucharis), « Poésie suisse romande » (anthologie), février 2017, pp. 94-95.






    Traverse du Tigre




    MARY-LAURE ZOSS


    Mary-laure-zoss
    Source




    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site de Cheyne éditeur)
    une notice bio-bibliographique sur Mary-Laure Zoss
    → (sur le site de la Fondation Leenaards)
    une notice bio-bibliographique sur Mary-Laure Zoss
    → (sur Recours au poème)
    une lecture d’Au soleil, haine rouée (Cheyne éditeur, 2014) de Mary-Laure Zoss
    → (sur le site des éditions fario)
    la fiche de l’éditeur sur Ceux-là qu’on maudit (2016) de Mary-Laure Zoss
    → (sur Terres de femmes)
    un autre poème issu de l’anthologie de la poésie suisse romande La Traverse du Tigre : Claire Genoux | Dans les voilures du soir [extrait]
    le site des Carnets d’Eucharis





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  • Claire Genoux | Dans les voilures du soir [extrait]



    DANS LES VOILURES DU SOIR
    (extrait)




    Longtemps je demeurerai sur ta tombe
    cette enfant endormie
    à la bouche balancée entre les ombres
    cette enfant blanche
    avec rien d’autre qu’un corps
    comme un vent qui passe
    sous les lunes mouillées




    À ta lèvre
    le suspens des nuits
    et quelque chose — qui sait —
    qui palpite en diastole et systole




    Je te cherche dans le profond des trous
    dans la tourbe qui s’effrite
    tout un troupeau d’os est en marche
    et frappe les bouches qui tombent
    les fleuves clairs de dessous la terre




    Je choisis des boucles et des colliers
    de quoi couvrir ton front
    appelé si haut
    de quoi remplir ton monde
    de sources enfermées




    […]




    La nuit des adieux
    quelque chose se transvase
    de tendu et de plein comme des cercles
    des noms étranges sont prononcés
    et j’écris
    pendant que tu t’éloignes
    de la rive chaude du monde.




    […]



    Claire Genoux, « Dans les voilures du soir », in La Traverse du Tigre, numéro hors-série de la revue Les Carnets d’Eucharis, « Poésie suisse romande », 2017, pp. 43-44.






    Traverse du Tigre






    CLAIRE  GENOUX


    Genoux 2
    Ph. Bastien Genoux
    © Horst Tappe / CH- 1820 Montreux
    Source





    ■ Voir aussi ▼

    → (sur viceversa littérature.ch)
    une notice bio-bibliographique sur Claire Genoux
    → (sur Terres de femmes)
    un autre poème issu de l’anthologie de la poésie suisse romande La Traverse du Tigre : Mary-Laure Zoss | [butés à l’arrière]





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