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  • 30 décembre 2000 | Mort de Louis-René des Forêts

    Éphéméride culturelle à rebours



        Il y a vingt ans, le 30 décembre 2000, mourait à Paris Louis-René des Forêts.





        « Ne pas se regarder vieillir dans le miroir que nous tend la mort, non plus que la défier avec de grands mots, mais, s’il se peut, l’accueillir en silence comme sourit à sa mère un enfant au berceau ».


    Louis-René des Forêts, Pas à pas jusqu’au dernier, Mercure de France, 2001, posth.







    Louis-René des Forêts
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    DANS LE CERCLE FERMÉ DE TES DOUBLES PRUNELLES



    Dans le cercle fermé de tes doubles prunelles
    Où j’ai revu se défaire mon innocence première
    Apprends le secret que j’aurais longtemps cherché
    À moins de pister le temps jusqu’à la grève fabuleuse
    Où enfants que talonne aux grolles la gueuse prêtraille
    On dictait à nos jeudis pubères des jeux surannés.
    Mais deux ou trois, du jour où violant la règle ludique
    Au-delà des clos reverdis où rouler dans le seigle,
    Tout au creux du roc, au détour d’un déblai de pierrailles,
    Nous les vîmes, nos vieillardes, accroupies dans leur repaire
    Épelant au vent d’avril leurs cris rouillés de harpies
    De ce jour, tenaillés par un âpre désir d’épouvante
    Hors du champ prescrit chacun s’en allait dévaler les pentes
    Jusqu’où la falaise déclinante comme le pain s’effrite
    Là où, sous la rafale affamée des mouettes en maraude
    Verbeusement nous défiant à travers leurs mèches de sel
    Hoquetant à refouler dans leur gosier la chair pâteuse
    Elles festoyaient de raies et de raves, nos mégères troglodytes!
    L’antre d’abord coupé d’ombre quand nous autres à l’affût
    Pour couver de nos yeux d’aiglons l’apparition rituelle
    Et les voici trébuchantes comme de vieux sacs à poussière
    Hors du sanctuaire processionnant et roulant leur fût
    C’est la table de fortune à leurs agapes journalières
    Que pour jeter leurs reliefs en pâture aux poissons
    Elles s’en vont dresser à la lisière déferlante des eaux.
    Toutes de jacter dans la zizanie criarde de leur dialecte
    Les reins cassés par le rhume hivernal, attisant la braise…




    Louis-René des Forêts, Les Mégères de la mer, Mercure de France, 1967, pp. 12-13.







    NOTICE BIO-BIBLIOGRAPHIQUE


        Louis-René des Forêts est né à Paris le 28 janvier 1918. Il publie son premier roman, Les Mendiants, en 1943 (édition définitive en 1986). En 1946, publication du Bavard. En 1960, année où il entre au comité de lecture des Editions Gallimard et signe le « Manifeste des 121 », Louis-René des Forêts publie La Chambre des enfants (Prix des Critiques). En 1967, il fonde la revue L’Éphémère, avec Yves Bonnefoy, André du Bouchet, Paul Celan, Jacques Dupin, Michel Leiris et Gaétan Picon, et publie au Mercure de France Les Mégères de la mer ; en 1969 Voix et détours de la fiction aux éditions du Seuil (ouvrage réédité en 1985 chez Fata Morgana) ; en 1986 Poèmes de Samuel Wood (ouvrage réédité chez Fata Morgana en 1988) ; en 1987 Le Malheur au Lido, en 1993 Face à l’Immémorable et en 1997 Ostinato.




    LOUIS-RENÉ DES FORÊTS



    ■ Louis-René des Forêts
    sur Terres de femmes

    Tout cela qui fut
    Une voix venue d’ailleurs





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