Étiquette : Michel Volkovitch


  • Katerina Anghelàki-Rooke | L’anorexie de l’existence



    Η ανορεξία της ύπαρξης



    Δεν πεινάω, δεν πονάω, δε βρωμάω
    ίσως κάπου βαθιά να υποφέρω και να μην το ξέρω
    κάνω πως γελάω
    δεν επιθυμώ το αδύνατο
    ούτε το δυνατό
    τα απαγορευμένα για μένα σώματα
    δε μου χορταίνουν τη ματιά.
    Τον ουρανό καμιά φορά
    κοιτάω με λαχτάρα
    την ώρα που ο ήλιος σβήνει τη λάμψη του
    κι ο γαλανός εραστής παραδίνεται
    στη γοητεία της νύχτας.
    Η μόνη μου συμμετοχή
    στο στροβίλισμα του κόσμου
    είναι η ανάσα μου που βγαίνει σταθερή.
    Αλλά νιώθω και μια άλλη
    παράξενη συμμετοχή∙
    αγωνία με πιάνει ξαφνικά
    για τον ανθρώπινο πόνο.
    Απλώνεται πάνω στη γη
    σαν τελετουργικό τραπεζομάντιλο
    που μουσκεμένο στο αίμα
    σκεπάζει μύθους και θεούς
    αιώνια αναγεννιέται
    και με τη ζωή ταυτίζεται.
    Ναι, τώρα θέλω να κλάψω
    αλλά στέρεψε ως και των δακρύων μου η πηγή.




    Κατερίνα Αγγελάκη-Ρουκ, Η ανορεξία της ύπαρξης, Ποιήματα, Εκδόσεις Καστανιώτη, 2011, pp. 9-10.





    Katerina Anghelàki-Rooke grec







    L’ANOREXIE DE L’EXISTENCE




    Je n’ai pas faim, pas mal, je sens bon
    si je souffre au fond de moi je n’en sais rien
    je fais semblant de rire
    je ne désire ni l’impossible
    ni le possible, les corps
    qui me sont interdits ne rassasient pas
    mon regard. Parfois je lève les yeux
    vers le ciel ardemment
    à l’heure où l’éclat du soleil s’efface
    et l’amant d’azur s’abandonne
    au charme de la nuit.
    Ma seule participation
    au tournoiement du monde
    est mon souffle régulier toujours.
    Mais je me sens participer
    d’une autre façon, étrange :
    soudain m’angoisse
    la souffrance humaine.
    Elle s’étend sur la terre
    telle une nappe rituelle
    trempée de sang
    qui recouvrant dieux et mythes
    renaît éternellement
    et s’identifie à la vie.
    Oui, je voudrais pleurer
    mais tout est sec, la source de mes larmes
    aussi.




    Katerina Anghelàki-Rooke, L’Anorexie de l’existence (2011) in La Chair beau désert, éditions Le miel des anges, 2018, page 131. Traduit du grec par Michel Volkovitch.





    Anghelaki-Rooke  La chair beau désert




    ΑΓΓΕΛΑΚΗ-ΡΟΥΚ ΚΑΤΕΡΙΝΑ (1939-2020)


    Angelaki NB
    Source




    ■ Katerina Anghelàki-Rooke
    sur Terres de femmes


    L’autre Pénélope (extrait de Beau désert, la chair)
    18e jour ou l’ordre nouveau des choses (extrait de Nature vide) [+ une notice bio-bibliographique]




    ■ Voir | écouter aussi ▼


    → (sur YouTube)
    Katerina Anghelàki -Rooke lit le poème « L’Anorexie de l’existence »






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  • Enlèvement d’une fille (chant populaire grec)



    ENLÈVEMENT D’UNE FILLE




    Hier il pleuvait très fort il faisait frais
    Un gars voit une fille devant chez ses parents
    la saisit et l’entraîne dans les vertes prairies
    Il ôte son gilet pour lui faire de l’ombre
    pour elle il sort de sa poche un biscuit

    —Mange ma blonde et bois oublie ce que tu laisses
    — Je n’oublie pas ma mère je tremble comme un jonc
    le jonc tremble à la bise je tremble de souffrance
    Je n’oublie pas mon père je fonds comme le sel
    le sel fond sous la pluie et je fonds de chagrin



    Le Voleur de baisers & autres chants d’amour, Chants populaires grecs traduits et présentés par Michel Volkovitch, Alidades, collection “Le Chant”, 2014, page 19.






    Alidades





    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions alidades)
    la page consacrée aux chants populaires grecs
    le site de Michel Volkovitch






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  • Kiki Dimoula | Temps allongé


    Comme un serment pi-tin-
    Ph., G.AdC








    ΑΝΑΣΚΕΛΟΣ ΧΡΟΝΟΣ



    Χαμομηλάϰι ϰαὶ γρασίδι
    στὰ μέσα ϰαὶ στὰ ἔξω χώματα
    χλόη χαιρετιστιϰὴ
    χρησμòς ἐξαπλώσεως
    πρασινομαντεία.
    Μεγάλη ἡ προσφορὰ τῆς ἀνανθίσεως
    ϰαὶ μοιάζει εὔϰολη ὑπόθεση
    τò τύλιγμα τῆς γύμνιας.
    Τί πανιϰò ἡ τόση ἄνθιση
    μή ϰαὶ δέν βρεῖ στὰ δέντρα θέση.
    Xαμομήλια, γρασίδι ϰι ἀγριολούλουδα
    ρηχή μαλαϰωσιὰ σὰν τοῦ βελούδου
    ϰαὶ τοῦ ὅρϰου — μὴν πατᾶτε τοὺς ὅρϰους.

    Тεράστια ϰύματα ἀγρῶν
    ἔρχονται ἀπò τὰ βάθη τῆς ὑπαίθρου
    βουλιάζουν ϰρινάϰια
    λεμονανθοὶ ἀναφαίνονται,
    μοναχοανθοί,
    παλμώδης διάπλους Ἀπριλίου.
    Τὸ ϰόϰϰινο τῆς παπαρούνας
    φάρος ποὺ ἀναβοσβήνει.
    Tεράστια ϰύματα ἀγρῶν
    ἔρχονται ἀπὸ τὰ πελάγη τῆς ὑπαίθρου.
    Κι ἀπò τὰ βάθη τοῦ ϰαιροῦ ἔρχονται
    ϰαὶ σϰᾶνε χαμομήλια, γρασίδι, μοναχοανθοὶ
    στὰ συρτάρια μου, ἀγριολούλουδα
    στ’ἀγριοσυρτάρια μου.
    Xαρὰ θεοῦ τὰ ϰλειδωμένα ἐϰεῖ μέσα πράγματα
    ἀνταλλαγμένα, ἀνταλλάγματα ϰι ἀλλαγμένα
    θυμητικῶν φτεροϰοπήματα
    σύρσιμο προσφωνήσεων ἐϰεῖ μέσα
    ψίθυροι ψίθυροι: ψιμύθια τῆς σιωπῆς
    τῆς ἀγριοσιωπῆς,
    μαῦρο βλαστάρι ἡ μελάνη
    τῶν γραμμένων, τῶν ξεγραμμένων, τῶν γραφτῶν
    τῶν ἀγριογραφτῶν.
    Χρονολογίες μαϰροπρόσωπες
    ποὺ νήστεψαν τò μέλλον ϰι ἅγιασαν
    πετᾶν τὰ ράσα τους
    ϰι ἀνθίζουν ἐγϰόσμιο ἀνάσϰελο χρόνο,
    χρόνο ἀγριολούλουδο
    ἀγριοσυρταριῶν.

    Τετράπαχο γρασίδι στὰ συρτάρια μου
    ρηχὴ μαλαϰωσιὰ σὰν τοῦ βελούδου
    καὶ τοῦ πατημένου ὅρϰου
    καὶ ρίχνει ϰάτι ξάπλες
    μὰ ϰάτι ξάπλες ἡ φωτογραφία σου.




    Κική Δημουλά, Το τελευταίο σώμα μου, Ποιητική Συλλογή, ἐκδόσεις Κείμενα, Ἀθήνα, 1981.






    TEMPS ALLONGÉ



    Herbe et camomille
    sur la terre du dedans du dehors
    verdure salutatoire
    oracle qui étale
    prophétie verte.
    Une offre de choix cette refloraison
    et cela paraît facile
    d’envelopper la nudité.
    Quelle panique cette poussée de fleurs
    pour se trouver une place dans les arbres.
    Herbe, camomille, fleurs sauvages
    douceur sans profondeur comme du velours
    ou un serment — ne pas piétiner.

    D’énormes vagues de prairies
    arrivent des campagnes profondes
    les lis plongent
    les fleurs de citronnier réapparaissent,
    fleurs uniques,
    vibrante traversée d’Avril.
    Le rouge des coquelicots
    phare qui clignote.
    D’énormes vagues de prairies
    arrivent du large des campagnes.
    Arrivent aussi des profondeurs du temps
    herbe, camomille et fleurs uniques pour éclore
    dans mes tiroirs, fleurs sauvages
    dans mes tiroirs sauvages.
    Une merveille les choses enfermées là-dedans
    échangées, à échanger, changées
    battements d’ailes de mémoire
    apostrophes là-dedans traînantes
    chuchotis chuchotements : masques du silence
    du silence sauvage,
    et pousse noire de l’encre
    des écrits, des désécrits, des réécrits
    des écrits sauvages.
    Des chronologies à longue figure
    jeûneuses d’avenir devenues saintes
    jettent la bure aux orties
    et font fleurir un temps profane allongé,
    temps fleur sauvage
    des tiroirs sauvages.

    Herbe grasse dans mes tiroirs
    douceur sans profondeur comme du velours
    ou comme un serment piétiné
    et je vois qui se délasse et se prélasse
    ta photo.




    Kiki Dimoula, Mon dernier corps, Arfuyen, 2010, pp. 75-77. Traduit du grec par Michel Volkovitch.





    Kiki Dimoula Arfuyen




    __________________________________
    Note d’AP : ce poème a aussi été choisi par Eglal Errera pour l’anthologie Les Poètes de la Méditerranée (pp. 36-39), publiée en novembre 2010 par Poésie/Gallimard et Culturesfrance avec le soutien de Marseille Provence 2013 et du Conseil Culturel de l’Union pour la Méditerranée.





    KIKI DIMOULA (1931-2020)


    Kiki_dimoula-2
    Source





    ■ Kiki Dimoula
    sur Terres de femmes


    Autoconservation (poème extrait du Peu du monde)
    La pierre périphrase (autre poème extrait du Peu du monde)




    ■ Voir | écouter aussi ▼


    → (sur le site des éditions Arfuyen)
    les pages consacrées à Kiki Dimoula
    → (sur le site de Michel Volkovitch)
    d’autres poèmes de Kiki Dimoula
    → (sur Poetry International)
    dix poèmes de Kiki Dimoula
    → (sur Exigence : Littérature)
    un article de Françoise Urban-Menninger sur Mon dernier corps de Kiki Dimoula
    → (sur Lumière des jours, le blog de Jacques Ancet)
    un article de Jacques Ancet (« Tristesse de fond ») sur la poésie de Kiki Dimoula
    → (sur YouTube)
    Kiki Dimoula lisant Φωτογραφία 1948. Pour lire la traduction cliquer ICI
    → (sur le site du Σπουδαστήριο Νέου Ελληνισμού/Center for Neo-Hellenic Studies)
    trois poèmes de Kiki Dimoula (dont Ο πληθυντικός αριθμός) dits par elle-même
    → (sur YouTube)
    Ο πληθυντικός αριθμός, de Kiki Dimoula, dit et interprété par Τάνια Τσανακλίδου. Pour lire la traduction, cliquer ICI
    → (sur books.google.fr)
    Anthologie de Kiki Dimoula, par Eurydice Trichon-Milsani



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