Étiquette : Michele Tortorici


  • Michele Tortorici | La cala di Zaccu





    Favignana
    Ph.© Greg Robbins
    Source







    LA CALA DI ZACCU



    L’odore dello scirocco si sente più forte davanti
    alla cala che noi chiamavamo di Zacco dal nome,
    o soprannome ― non ricordo ―, del vecchio che stava
    affacciato sul mare per ore e pareva
    non avere altri pensieri oltre a quello
    di guardare onde e spruzzi.


    Non è che lo scirocco faccia di per sé odore. Le alghe
    ― che altri venti ammucchiano
    in piccole dune dentro infossature
    qua e là ai bordi della cala: ed è il libeccio a farlo
    sopratutto ― le alghe, dico, al soffio caldo
    e un po’ fradicio dello scirocco più facilmente,
    e anche con più speditezza, si disfano
    come se avessero fretta
    di diventare, a quel soffio,
    acqua o comunque polvere che volentieri l’acqua
    accolga e che faccia
    mischiare alla sabbia
    poi sui fondali in attesa
    senza irrequietezza – per quello
    che si può vedere.


    Il fatto è che il soffio caldo
    e un po’ fradicio dello scirocco, quando si posa
    su queste alghe,
    sa di stanchezza, asseconda
    una certa rilassatezza, un desiderio – o pena ―
    di lasciarsi andare : qualcosa
    di molto vicino al volere finire.



    Michele Tortorici, Porto di giorni, 2008-2011, in Viaggio all’osteria della terra, Poesia, Manni editore, Collana Pretesti, 2012, pagina 24. Prefazione di Mario Lunetta.






    Michele Tortorici, Viaggio all’osteria della terra







    L’ANSE DE ZACCU



    L’odeur du sirocco est plus forte devant
    l’anse que nous appelions l’anse de Zaccu, du nom,
    ou du surnom ― je ne sais plus ―, du vieux qui se tenait
    des heures entières devant la mer et semblait
    n’avoir d’autre pensée que celle
    de contempler vagues et embruns.


    Ce n’est pas que le sirocco ait en lui-même une odeur. Les algues
    ― que d’autres vents amassent
    en petites dunes dans des creux
    çà et là au bord de l’anse : et c’est au libeccio qu’on les doit
    surtout ― les algues, dis-je, sous le souffle chaud
    et un peu putride du sirocco, se défont
    plus facilement et aussi plus rapidement,
    comme si, sous ce souffle,
    elles avaient hâte
    de se changer en eau
    ou, assurément, en poussière que l’eau
    reçoit volontiers et qu’elle pousse
    à se mélanger au sable
    puis sur les fonds en attente
    sans remous ― pour ce
    qu’il est possible d’en voir.


    Le fait est que le souffle chaud
    et un peu putride du sirocco, lorsqu’il se pose
    sur ces algues,
    sait la fatigue et favorise
    un certain relâchement, un désir ― ou chagrin ―
    de se laisser aller : quelque chose
    de très avoisinant de l’envie d’en finir.


    Traduction inédite d’Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli







    MICHELE TORTORICI


    Michele Tortorici
    Source



    ■ Michele Tortorici
    sur Terres de femmes

    Vicino al faro (+ notice bio-bibliographique rédigée par Danièle Robert)
    La Pensée prise au piège (un extrait du recueil éponyme)



    ■ Voir aussi ▼

    le site personnel de Michele Tortorici






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  • Michele Tortorici, La Pensée prise au piège



    Neppure rarefatte apparenze di una meta
    Ph., G.AdC




    LA MENTE IRRETITA


    Ho percorso solo con gli occhi quei confini
    delle nuvole che il sole orla di luce ma il pensiero
    non riesce a seguire perché sono sentieri che non hanno
    neppure rarefatte apparenze di una meta. Per questo
    li ho precorsi. Sarebbero ― lo so ― stati soltanto
    vagabondaggi dove, piuttosto che trovare,
    lasciare tracce appena di leggeri passi e non sarebbe
    servito a nulla abbondonare ciottoli bianchi
    per segnare il ritorno. Necessaria
    imprudenza, ma tornare ― si sa ― è un po’morire
    in una quiete che non sai volere.

    Quei confini che la mente irretiscono
    sarebbero stati forse il luogo giusto
    dove innalzare la parola come un’insegna luminosa,
    alta. O forse ― chi lo sa ? ― potevano
    essere il faro di un approdo
    senza ancora, senza gemere di catene, ma pure
    ― sono certo ― senza navi.







    Ces confins qui prennent au pi-ge la pens-e
    Ph., G.AdC




    LA PENSÉE PRISE AU PIÈGE


    Je n’ai parcouru que des yeux ces confins
    des nuages que le soleil ourle de lumière mais que la pensée
    ne peut suivre parce que ce sont des sentiers qui n’ont
    même la lointaine apparence d’une destination.
    C’est pourquoi je les ai parcourus. Ce n’était ― je le sais ―
    que vagabondages où laisser, plutôt que trouver,
    des traces seulement de pas légers et il n’aurait
    servi à rien de semer des cailloux blancs
    pour s’assurer du retour. Nécessaire
    imprudence mais revenir ― on le sait ― c’est un peu mourir
    dans une quiétude que tu ne sais pas vouloir.

    Ces confins qui prennent au piège la pensée
    auraient peut-être été le lieu juste
    où élever la parole comme une enseigne lumineuse,
    haute. Ou peut-être, qui sait ? ― étaient-ils
    sans ancres, sans grincement de chaînes, mais cependant
    ― j’en suis sûr ― sans navires.



    Michele Tortorici, La Pensée prise au piège, éditions vagabonde, Marseille, 2010, pp. 78-79. Traduit de l’italien et présenté par Danièle Robert.





    ■ Michele Tortorici
    sur Terres de femmes

    Vicino al faro (+ notice bio-bibliographique rédigée par Danièle Robert)
    La cala di Zaccu (poème extrait de Viaggio all’osteria della terra. Traduit de l’italien par AP)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions vagabonde) la préface de La Pensée prise au piège, par Danièle Robert
    le site personnel de Michele Tortorici






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  • Michele Tortorici | Vicino al faro

    «  Poésie d’un jour  »
    choisie par Danièle Robert



    Tortorici





    VICINO AL FARO


    Attraversa il vento labirinti di nulla, muri bassi
    di pietre secche dove sali
    di mare e di terra si confondono. Ti sorprendi
    che l’immenso cammino dell’aria sotto il cielo
    possa tracciare così fini ricami sulle mille
    scabre schegge d’arenaria o inanellare
    danze su questa arsa isola che dedali
    di pazienti fatiche innalza. Vicino al faro
    si apre in bassi scogli la piana. Un’altra
    isola a occidente segna appena
    una pausa dello sguardo ma sai bene
    che al vento sottrae soltanto una nascosta
    rada con poche sbigottite barche. Al di là
    non sapresti se cercare
    altre isole ancora o altri mari ; altro da queste
    secche pietre che inutilmente chiudono
    ombre e forse qualche piccolo rettile
    guizzante e si lasciano ingannare
    dal vento che le accarezza e intanto
    le consuma ; altro da te come una provvisoria
    — ma profonda — conoscenza che l’animo investe
    con raffiche ineguali e passa, ma intanto
    ha trasformato ciò che sei, ciò che pensi.

    Ora vicino al faro si condensa
    una foschia che fa sentire
    acqua salata sulla pelle, che ti fa
    animale marino, che ti unisce
    a ciò che poco prima per un attimo
    ha attraversato la tua mente, che profonda
    te nel libero
    divenire di ogni cosa e ti dà senso.


    Michele Tortorici, La mente irretita, Manni Editori, San Cesario di Lecce, 2008, page 16.






    Faro favignana punta marsala
    Source






    PRÈS DU PHARE


    Le vent traverse des labyrinthes de néant, des murs bas
    de pierres sèches où les sels
    de la mer et de la terre se confondent. Tu es surpris
    que l’immense chemin de l’air sous le ciel
    puisse tracer de si fines broderies sur les mille
    éclats rugueux de grès ou nouer
    des danses sur cette île brûlée qui érige
    des dédales de patientes fatigues. Près du phare
    s’ouvre en bas des récifs la plaine. Une autre
    île à l’ouest marque à peine
    une pause du regard mais tu sais bien
    qu’elle ne fait que soustraire au vent une rade
    cachée et quelques barques affolées. Au-delà
    tu ne saurais s’il faut chercher encore
    d’autres îles ou d’autres mers ; autre chose que ces
    pierres sèches qui vainement enferment
    des ombres et peut-être quelque petit serpent
    frétillant, et se laissent abuser
    par le vent qui les caresse et en même temps
    les dévore ; autre chose que toi comme une provisoire
    — mais profonde — connaissance qui assaille l’esprit
    par rafales irrégulières et qui passe, mais en même temps
    a transformé ce que tu es, ce que tu penses.

    Maintenant près du phare se condense
    une brume qui rend sensible
    l’eau salée sur la peau, qui fait de toi
    un animal marin, qui t’unit
    à ce qui juste avant, pour un instant,
    a traversé ton esprit, qui te plonge
    dans le libre
    devenir de toute chose et te donne un sens.


    Michele Tortorici, La Pensée prise au piège, éditions vagabonde, 2010, pp. 25-27. Traduction de Danièle Robert.




    ________________________________________________
    NOTE d’AP : début juin 2009 a paru, dans la revue semestrielle marseillaise Il particolare, n° 19/20, une importante anthologie (dix poèmes) du recueil La mente irretita [La Pensée prise au piège] de Michele Tortorici. Dans une traduction de Danièle Robert (voir à ce sujet la recension de Ronald Klapka sur le site de la revue Sitaudis, et le site de Michele Tortorici). La version française (édition bilingue) de La Pensée prise au piège a paru aux éditions vagabonde (13001 Marseille) fin septembre 2010. Traduction et préface de Danièle Robert.






    Copertina-La-Pensee1







    NOTICE BIO-BIBLIOGRAPHIQUE (rédigée par Danièle Robert)


         Né à Trapani (Sicile) en 1947, Michele Tortorici a d’abord enseigné les lettres dans le secondaire. Il a dirigé et co-écrit une Histoire de la littérature italienne (Storia della letteratura italiana nell’orizzonte europeo) en 1993 ainsi que de nombreux articles et essais sur la littérature, l’art et la culture. Il travaille actuellement à Rome où il s’occupe plus particulièrement de logique hypertextuelle et des moyens de communication numériques.

         Son premier recueil de poèmes, La mente irretita (La Pensée prise au piège) a paru aux éditions Manni en 2008 (trad. fr., éd. Vagabonde, septembre 2010) ; il regroupe des textes écrits entre 2002 et 2007, dont l’ensemble se déploie selon trois thèmes directeurs : d’abord La vita dell’isola, évocation de Favignana, la principale des îles Égades situées à l’ouest de la Sicile ; c’est là le berceau familial. À l’opposé, l’évocation par fragments et en touches discrètes de certaines villes qui comptent beaucoup pour lui, à des titres divers : Bologne, Turin, Gênes, La Spezia, Venise, New York : Fermate di città. Entre les deux, un ensemble de rêveries, de souvenirs, de réflexions mettant parfois en scène des êtres ou des objets qui forment la trame de sa vie : Come ogni giorno.

         En mai 2009 a été publié aux éditions Campanotto un nouveau recueil de quatre poèmes intitulé : I Segnalibri di Berlino – Berliner Lesezeichen, avec une traduction allemande de Giangaleazzo Bettoni. En 2010, Versi inutili e altre inutilità chez Edicit, et en 2012, Viaggio all’osteria della terra chez Manni Editori.

         La musique de Michele Tortorici saisit le lecteur dans une infinie douceur, l’enveloppe, l’entraîne dans ses rythmes, ses ruptures, ses vagabondages joyeux ou mélancoliques, la pureté de son phrasé. Profondeur de la réflexion, poésie de l’intime qui donne à penser avec retenue, élégance et délicatesse. Un mot magnifique de la langue italienne résume l’ensemble de ces qualités : Morbidezza.






    ■ Michele Tortorici
    sur Terres de femmes

    La Pensée prise au piège (un extrait du recueil éponyme)
    La cala di Zaccu (poème extrait de Viaggio all’osteria della terra. Traduit de l’italien par AP)



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions vagabonde)
    la préface de La Pensée prise au piège, par Danièle Robert
    le site personnel de Michele Tortorici
    → (sur Terres de femmes)
    Ovide, Héroïdes, Lettre de Didon à Énée (extrait de la traduction des Héroïdes par Danièle Robert)





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