Étiquette : Nausicaa


  • Nausicaa au miroir


    NAUSICAA AU MIROIR




    Nausicaa, confie-moi ton rêve
    Ph., G.AdC






    Nausicaa,

    couchée dans ton lit d’asphodèles       nid et nœud
    tu tresses       silencieuse
    les lierres enchenillés au chèvrefeuille

    [quel adjectif autre que ― virile viride ―
    pour dire la fémin-îlité d’une image
    d’une phrase d’un style d’une offrande
    d’un rêve à la mue printanière]

    fougères volubiles enroulées aux tiges roides
    et ton sexe noué       suave végétale       au tronc qui t’accueille
    lascive      tu enlaces de tes bras de tes cuisses
    le membre herbu de l’arbre échoué sur la plage
    et tu danses      nue      la fière sarabande apprise de tes aïeules

    ― ronde boucle portée à tes lubies de lune
    pierre exacte dressée dans ses eaux ―

    Nausicaa, fille d’Arété,

    tu brûles tes encens
    dans le chant qui t’immole
    bruyère de soleil déployée à ta couche
    et voilà que jadis te revient en mémoire
    toi qui jamais ne rêves du rêve qui te rêve

    qui es-tu ― hypomée douce de hasard ―
    qui chante dans sa source
    innocente du fiel et du miel de tendresse

    un oiseau d’eau ― talève sultane calandrelle cendrée ―
    déroule quelques notes flûtées
    grains d’ellébores en chapelet
    de pluie de gouttes de rosée

    Nausicaa, fille d’Alcinoos,

    tu rêves tu défais
    les boutons cuivrés de la veste bleu roi
    qu’il t’a laissée en souvenir de lui
    tu les roules entre tes doigts
    les fais reluire aux voiles d’eau de ta tunique
    ils brillent ronds et lourds pareils aux nectarines de tes seins

    une autre fauvette       hypolaïs bavarde      lance ses trilles ― arbre touffu ―
    tu guettes hors de ta couche d’asphodèles
    la venue du printemps ― féminité de l’air qui glisse sur ta joue ―
    la solitude de ce jour point ne te pèse
    elle te prend dans ses mots filaments
    étirements fluides à même la peau du ciel

    ― crocus mauves en corolles à foison au revers des talus ―

    on se croise on se salue
    veste jetée en travers de l’épaule
    échanges de peu de     esquisses de

    Nausicaa,

    confie-moi ton rêve
    le bateau qui s’éloigne
    vers quelle tempête cingle-t-il
    et ce sourire d’elle qui t’effleure
    pourquoi vient-il te visiter
    est-elle morte est-elle vive
    pareille à l’eau qui ne se peut saisir
    musique fraîche au vallon
    qui rythme sa cascade sur la mousse

    Nausicaa,

    te voilà à la source claire
    penchée sur la vasque ― eaux limpides au miroir ―
    tu te berces de songes
    et t’enivres aux volutes de son rire
    foisonnement de perles à l’émail de ta bouche

    Nausicaa,

    je te lis
    dans ton ombre
    et me mire
    ― en tes secrètes
    évasions

    Vestale du désir.


    Angèle Paoli
    D.R. Texte angèlepaoli




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