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  • Kimberly Blaeser | Manoominike-giizis


    Résister en dansant







    MANOOMINIKE-GIIZIS





    Ricing moon
    when poling arms groan
    like autumn winds through white pine.
    Old rhythms find the hands
    bend and pound the rice,
    rice kernels falling
    falling onto wooden ribs
    canoe bottoms filling with memories —
    new mocassins dance the rice
    huffs of spirit wind lift and carry the chaff
    blown like tired histories
    from birchbark winnowing baskets.
    Now numbered
    by pounds, seasons, or generations
    lean slivers of parched grain
    settle brown and rich
    tasting of northern lakes
    of centuries.







    MANOOMINIKE-GIIZIS



    Lune du riz*
    quand les bras poussant sur les perches gémissent
    pareils aux vents d’automne dans les pins blancs.
    Des rythmes anciens trouvent les mains,
    courbent et battent le riz,
    les grains tombent
    tombent sur des côtes en bois
    au fond des canoés qui se remplissent de souvenirs —
    des mocassins neufs dansent le riz
    les soupirs de l’esprit vent lèvent et portent la balle
    soufflée comme des histoires fatiguées
    depuis des paniers d’écorce de bouleau.
    Maintenant numérotés
    en grammes, saisons, ou générations
    de maigres éclats de grains séchés
    s’installent bruns et riches
    ayant le goût des lacs du nord
    le goût des siècles.




    Kimberly Blaeser, « Manoominike-giizis » [« II. Hunger for Balance », Copper Yearning, Holy Cow Press, Duluth, Minnesota, 2019, p. 45], in Résister en dansant | Ikwe-Niimi : Dancing Resistance, édition bilingue, éditions des Lisières, Nyons, 2020, pp. 36-37. Traduit de l’anglais (États-Unis) par Béatrice Machet.



    _____________
    * Les Indiens ne divisaient pas l’année en mois mais en lunes. Le nom de chaque lune était donné en fonction d’un événement marquant se déroulant pendant cet intervalle de 28 jours.






    Résister en dansant 3




    KIMBERLY BLAESER


    Kim-blaeser-homepage
    Source




    ■ Voir aussi ▼


    le site de Kimberly Blaeser
    → (sur Terre à ciel)
    une lecture de Résister en dansant par Jean Palomba





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  • Iboshi Hokuto | [Ouvrant les journaux]




    Iboshi extrait







    [OUVRANT LES JOURNAUX]




    Ouvrant les journaux
    lorsque je lis un article
    sur les Aïnous,
    surgissent à chaque fois
    des pensées qui me tourmentent


    Il n’existe plus

    de pureté aïnoue

    à l’heure d’aujourd’hui

    Je regretterai toujours

    les villages d’autrefois


    En souhaitant vivre
    mais également mourir
    comme un Aïnou
    le cœur attristé je peins
    les motifs chers à mon peuple


    Reprenez courage

    ô mes frères aïnous

    Il faut souhaiter

    De grandir et prospérer

    Sur la terre comme au ciel


    Voilà que la nuit
    déjà s’est bien avancée
    Soudain malgré moi
    songeant à mes compagnons
    je me mets à sangloter



    Iboshi Hokuto | 違星北, poète aïnou (1901-1929), Chant de l’étoile du nord, carnet, édition bilingue français/japonais, Éditions des Lisières, Collection Aphyllante, 26110 Nyons, décembre 2018, pp. 36-37. Traduction et adaptation Fumi Tsukahara et Patrick Blanche. Préface de Gérald Peloux.






    Iboshi Hokuto  Chant de l'étoile du nord




    _________________________________

    Note de l’éditeur : première traduction française d’un poète aïnou, le Carnet d’Iboshi Hokuto est le témoignage poétique d’une lutte pour la reconnaissance d’un peuple. Premiers habitants de l’île d’Hokkaïdo annexée au Japon en 1869, les Aïnous (terme signifiant « les hommes », « les êtres humains ») ont dû attendre 2008 pour que l’État japonais reconnaisse leur statut d’autochtones. Avec beaucoup d’humour et parfois d’amertume, celui que l’on appela le Takuboku des Aïnous nous conte à travers ses tankas (133) et quelques haïkus (21), les vicissitudes de sa vie et de son peuple. Refusant la soumission à la langue et à la culture dominantes, Iboshi Hokuto fera de sa courte vie un appel à la dignité et œuvre de résistance.





    IBOSHI HOKUTO


    Iboshi Hokuto




    Né en 1901, Iboshi Hokuto fait partie des pionniers (avec Batchelor Yaeko et Moritake Takeichi) d’une littérature moderne aïnoue en langue japonaise. Auteur de poésie, d’essais, de contes et d’un journal, il vivra de petits boulots et luttera jusqu’à sa mort en 1929 pour la dignité de son peuple.




    ■ Voir aussi ▼

    le site des éditions des Lisières





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