Étiquette : Piero Bigongiari


  • 27 août 1967 | Piero Bigongiari, Il fanciullo uscito dal mare

    Éphéméride culturelle à rebours
    « Poésie d’un jour »



    IL FANCIULLO USCITO DAL MARE



    Casa accesa nella luce continua
    su una penisola tra due acque
    che salgono verso la luna e scendono
    ai tuoi occhi bassi.


                                      I venti
    toccano accento di foglie sul muro,
    esclamano i sassi la meraviglia dei dirupi
    dove cupi uccelli si fanno notte a sera
    alti in ripari muschiosi e i pesci splendono
    guizzi rari di sole in piena notte.


    Ma un binario continua oltre Lunata nella memoria
    e in Lucca si attorce, chiocciola di una lumaca,
    se il bambino disceso alza gli occhi,
    guarda tra le fessure, intende uccelli,
    abissali e soffitti colmi di alate
    meduse.


                E’oltre la memoria, oltre
    il tuo passo incantato, il piede cresciuto
    per calpestare più terra e sfare
    il cerchio argenteo delle lumache.


    Sei uscito dal mare.
    Cancella le tracce, confondi le orme,
    uno sguardo enorme preme nella pupilla,
    cimosa sul visibile, l’operazione
    non è rimasta a mezzo, i numeri contano
    anche se non tornano, rimasti qua e là,
    pesci nella marea.


                                    Esci, scendi
    dal tram che torna indietro e di già inalbera
    la targa verso Pescia, la lumaca
    si guarda intorno viscida, non toccarla.



    27 agosto 1967







    L’ENFANT SORTI DE LA MER




    Maison illuminée dans la lumière continue
    sur une péninsule entre deux eaux
    qui montent vers la lune et descendent
    à tes yeux baissés.


                                      Les vents
    jouent des airs de feuilles sur le mur,
    les rochers crient la merveille des abrupts
    où de sombres oiseaux deviennent nuit au soir
    perchés dans des abris moussus et les poissons resplendissent
    rares éclairs de soleil en pleine nuit.


    Mais les rails continuent au-delà de Lunata dans la mémoire
    et s’enroulent dans Lucques, coquille d’escargot,
    si l’enfant descendu lève les yeux,
    regarde aux fissures, entend des oiseaux
    abyssaux s’abîmer parmi les persiennes
    entrouvertes et des plafonds couverts de méduses ailées.


                Il est au-delà de la mémoire, au-delà
    de ton pas enchanté, le pied qui a grandi
    pour fouler plus de terre et défaire
    le cercle argenté des escargots.


    Tu es sorti de la mer.
    Efface les traces, brouille les empreintes,
    un regard énorme fait pression dans la pupille,
    lisière sur le visible, l’opération
    n’est pas restée en plan, les nombres comptent
    même s’ils ne s’ajustent pas, restés çà et là,
    poissons dans la marée.


                                                Sors, descends
    du tram qui revient en arrière et déjà arbore
    la plaque vers Pescia, l’escargot
    regarde autour de lui visqueux, ne le touche pas.




    Piero Bigongiari [Antimateria, 1964-1971, Milano, Mondadori, 1972], Ni terre ni mer, Orphée/La Différence, 1994, pp. 28-31. Traduit de l’italien et présenté par Antoine Fongaro.





    PIERO BIGONGIARI


    BIGONGIARI



    ■ Piero Bigongiari
    sur Terres de femmes

    Pescia-Lucca
    Nice Pisa



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur enjambées fauves)
    plusieurs poèmes extraits de Ni terre ni mer
    → (sur Le Scriptorium)
    trois poèmes extraits des Remparts de Pistoia
    → (sur CristinaCampo.it)
    une bio-bibliographie de Piero Bigongiari + une sélection de poèmes





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  • Piero Bigongiari | Nice Pisa




    Les ombres  les plus longues
    Aquatinte numérique, G.AdC







    NICE PISA



    Il sole scioglie dai covoni le ombre
    più lunghe e più dorate per ghermirti,
    mia sera pisana, al grave odore
    dei tuoi grani mietuti… Io che attendo
    più nulla ormai, « Tu viens… » mormora appena
    sfiorandomi l’ignota adescatrice
    nizzarda, insiste « Viens… », quasi scandisse
    un altro tempo, mentre sulla baia
    degli Angeli candisce la maretta.

    Ma tu aspetta, tu aspetta, cuore grigio,
    se quest’empito è quello della morte
    le scintille dei fari non l’accendono.




    Piero Bigongiari, Stato di cose, terza parte, in Il Corvo bianco (1952-1954), Edizioni della Meridiana, Milano, 1955, p. 197.






    NICE PISE



    Le soleil détache des gerbes les ombres
    les plus longues et les plus dorées pour te saisir,
    ô mon soir pisan, à l’odeur lourde
    de tes blés moissonnés. Moi qui n’attends
    plus rien désormais, «Tu viens… » murmure à peine
    en me frôlant, la niçoise inconnue,
    tentatrice ; elle insiste : « Viens… », comme la scansion
    d’un autre temps, tandis que sur la baie
    des Anges, la houle cuit à feu doux.

    Mais attends, toi, attends, toi, cœur gris;
    si cet élan, c’est celui de la mort
    l’étincelle des phares ne l’allume pas.




    Piero Bigongiari, Cahiers du Sud n° 323, « La nouvelle poésie italienne », juin 1954, page 46. Traduit de l’italien par Georges Mounin.




    NOTE D’AP : ce poème (qui m’a été aimablement transmis par André Ughetto) est le premier poème de Piero Bigongiari à avoir été traduit en français et publié en France. Ce numéro des Cahiers du Sud consacré à « la nouvelle poésie italienne » comprenait aussi des poèmes de Giuseppe Ungaretti, Umberto Saba, Eugenio Montale, Salvatore Quasimodo, Leonardo Sinisgalli, Roberto Rebora, Giorgio Caproni, Vittorio Sereni, Giorgio Bassani, Mario Luzi, Sandro Penna, Mario Tobino, Alfonso Gatto, Attilio Bertolucci, Aldo Borlenghi et Alessandro Parronchi, présentés par Carlo Bo et Georges Mounin.
         Par ailleurs, le linguiste Georges Mounin (1910-1993) fut le professeur qui me donna mon premier cours – mais aussi mon premier cours de sémiologie – en année de licence sur les bancs de l’Université d’Aix-en-Provence.






    PIERO BIGONGIARI



    ■ Piero Bigongiari
    sur Terres de femmes

    Pescia-Lucca
    27 août 1967 | Piero Bigongiari, Il fanciullo uscito dal mare



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur enjambées fauves)
    plusieurs poèmes extraits de Ni terre ni mer
    → (sur Le Scriptorium)
    trois poèmes extraits des Remparts de Pistoia de Piero Bigongiari
    → (sur CristinaCampo.it)
    une bio-bibliographie de Piero Bigongiari + une sélection de poèmes
    → (sur YouTube)
    rencontre entre les poètes Piero Bigongiari et Maria Luisa Spaziani (3 mars 1989)






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  • Piero Bigongiari | Pescia-Lucca




    Dans tes ciels si doux, Toscane
    Aquatinte numérique, G.AdC






    PESCIA-LUCCA


    Ho vissuto
    nelle città più dolci della terra
    come una rondine passeggera.
    Lucca era
    un nido difficile tra le vigne
    impolverate in fondo a bianche strade,
    donde sarebbe traboccata
    con ali troppo folli
    pe’ tuoi cieli molli, Toscana,
    antica giovinezza.
    Malcerta ebbrezza, malcerta infanzia
    lungo le case di Lunata
    sfiorate in tram accanto al guidatore,
    la morte è questa
    occhiata fissa ai tuoi cortili
    che una dice sorpresa
    facendosi solecchio dalla soglia :
    è nata primavera,
    sono tornate le rondini.

    22-25 aprile 1956


    Piero Bigongiari, Le Mura di Pistoia, 1955-1958, Mondadori, 1989, pp. 28-29.






    PESCIA-LUCQUES


    J’ai vécu
    dans les villes les plus douces de la terre
    comme une hirondelle passagère.
    Lucques était
    un nid inaccessible parmi les vignes
    empoussiérées au bout de routes blanches,
    d’où devait jaillir
    avec des vols trop fous
    dans tes ciels si doux, Toscane,
    l’antique jeunesse.
    Ivresse mal assurée, enfance mal dissimulée
    le long des maisons de Lunata
    que je frôlais en tram près du conducteur,
    la mort est ce
    regard fixé sur tes enclos
    et une femme dit, surprise,
    abritant ses yeux du soleil, sur le seuil :
    le printemps est éclos,
    et l’hirondelle est de retour.


    Piero Bigongiari, Les Remparts de Pistoia, in Ni terre ni mer, Orphée La Différence, 1994, pp. 114-115. Traduit de l’italien et présenté par Antoine Fongaro.



    ___________________
    NOTE d’AP : cette traduction a été publiée pour la première fois dans le volume collectif Prisma, Obsidiane, 1986, pp. 183-184. Ci-dessous la traduction de ce poème par Philippe Jaccottet (Éditions de la revue SUD, Collection SUD-Poésie, Marseille, 1988, page 39 ; nouvelle édition : La Différence « Le Fleuve et l’écho », 1994, page 43. Poèmes traduits de l’italien par Philippe Jaccottet et André Ughetto).






    PESCIA-LUCQUES


    J’aurai vécu
    dans les plus douces villes de la terre
    comme une hirondelle de passage.
    Lucques, c’était
    un nid peu accessible entre les vignes
    poussiéreuses, au bout de routes blanches
    d’où allait déboucher
    à coups d’ailes trop fous
    pour tes ciels tendres, Toscane,
    une ancienne jeunesse.
    Ivresse mal assurée, enfance mal cachée
    qui longe en tram, auprès du conducteur,
    les files de maisons de Lunata,
    la mort
    est ce regard fixé sur tes cours
    où de son seuil, surprise,
    la main sur les yeux, quelqu’un dit :
    c’est le printemps,
    les hirondelles sont de retour.





    PIERO BIGONGIARI


    BIGONGIARI



         Piero Bigongiari, né à Navacchio (Province de Pise) le 15 octobre 1914, mort à Florence le 7 octobre 1997, toscan, exact contemporain de Mario Luzi, appartient comme lui à cette génération de poètes italiens que l’on qualifie encore, d’une manière si peu appropriée, d’« hermétistes florentins ». Car tout l’œuvre de Piero Bigongiari, des Mura di Pistoia (1958) aux dernières pages de Il silenzio del poema (1997), s’emplit du clair écho et des reflets sensibles du monde, du flux et du reflux du temps, d’une allégeance à la pérennité de la Terre et de la conscience de la fugacité de l’être : chaque jour, « j’attends le gage de mon jour futur » (d’après une note d’Antoine Fongaro).




    ■ Piero Bigongiari
    sur Terres de femmes

    Nice Pisa
    27 août 1967 | Piero Bigongiari, Il fanciullo uscito dal mare



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur enjambées fauves)
    plusieurs poèmes extraits de Ni terre ni mer
    → (sur Le Scriptorium)
    trois poèmes extraits des Remparts de Pistoia
    → (sur CristinaCampo.it)
    une bio-bibliographie de Piero Bigongiari + une sélection de poèmes






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