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  • Luis Alberto de Cuenca | El albatros de Coleridge







    EL ALBATROS
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    EL ALBATROS DE COLERIDGE


    A José Ángel Valente. In memoriam


    Sólo el mar, y esta sed inextinguible,
    y un montón de cadáveres a bordo,
    y la ausencia de Dios.
    No sé por qué
    me tienen que pasar a mí estas cosas.
    Verdad es que di muerte a aquel albatros
    que me quería y al que yo adoraba,
    el albatros de nieve que venía
    a comer en mi mano y a contarme
    historias de gigantes primigenios
    y de diosas de trenzas de esmeraldas;
    pero es habitual que acabe uno
    matando lo que ama (Wilde lo dijo).
    Verdad es que he pecado gravemente
    contra ti, atiborrándome de libros
    y poniéndome ciego de experiencias
    ajenas, a través de la lectura,
    que me han dado las claves de tu odio;
    pero eso ocurre cuando juntas agua
    y aceite, o cuando metes en el baño
    al dragón y a San Jorge, o cuando intentas
    que dos locos furiosos no se peguen.
    Verdad es, sobre todo, que estoy solo
    en este mar de risa innumerable
    que se burla de mí y me zarandea
    a su placer, como si fuera el Dios
    que se fue y que castiga mis pecados
    por persona interpuesta. Verdad es
    que el albatros de Coleridge me quería
    y que yo lo maté.



    Luis Alberto de Cuenca, Sin miedo ni esperanza, Visor Libros, 2002, in Los mundos y los días, poesía 1970-2005, Visor Libros, Colección Visor de Poesía, 2012.







    Cuenca, los-mundos-y-los-dias








    L’ALBATROS DE COLERIDGE



    Rien que la mer, et cette soif inextinguible,
    et un tas de cadavres à bord,
    et l’absence de Dieu.
    Je ne sais pourquoi
    ces choses-là doivent m’arriver.
    Il est vrai que je donnai la mort à cet albatros
    qui m’aimait et que j’adorais,
    l’albatros de neige qui venait
    manger dans ma main me raconter
    des histoires de géants primitifs
    et de déesses aux tresses d’émeraudes.
    Mais c’est habituel que l’on finisse par
    tuer ce que l’on aime (Wilde le dit).
    Il est vrai que j’ai péché lourdement
    contre toi, me gavant de livres
    et devenant aveugle d’expériences
    étrangères, à travers la lecture,
    qui m’ont donné les clés de ta haine ;
    mais cela arrive lorsque tu mélanges l’eau
    et l’huile, ou que tu mets dans le bain
    le dragon de saint Georges, ou quand tu essaies
    que deux fous furieux ne se battent pas.
    Il est vrai, surtout, que je suis seul
    dans cette mer de rire innombrable
    qui se moque de moi et me secoue à son gré,
    comme si c’était le Dieu
    qui s’en est allé, qui châtie mes péchés
    par personne interposée. Il est vrai
    que l’albatros de Coleridge m’aimait
    et que je l’ai tué.



    Luis Alberto de Cuenca in « 25 poètes d’Espagne », Inuits dans la jungle, numéro I, Revue annuelle de poésie internationale, Le Castor Astral, juillet 2008, pp. 83-84.






    Inuits 1







    LUIS ALBERTO DE CUENCA


    Cuenca
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    Né le 29 décembre 1950 à Madrid, licencié en lettres classiques en 1973, Luis Alberto de Cuenca devient docteur ès-lettres classiques en 1976. Sa passion pour les livres lui a valu d’occuper de hauts postes, comme celui de directeur de l’Institut de Philologie (1992-1993), de directeur du département des publications du CSIC (Consejo Superior de Investigaciones Científicas, 1995-1996), de directeur de la Bibliothèque Nationale d’Espagne (1996-2000) et de Secrétaire d’État à la Culture sous le gouvernement Aznar (2000-2004). C’est un érudit traducteur d’Homère, d’Euripide, de Callimaque, de Charles Nodier et de Gérard de Nerval. En 1986, il obtient le Prix national de la critique pour son recueil poétique La caja de plata et, en 1987, le Prix national de traduction. Il est notamment l’auteur de Mitologías (2001), Sin miedo ni esperanza (2002), Vamos a ser felices y otros poemas de humor y deshumor (2003), El enemigo oculto (2003), El puente de la espada: poemas inéditos (2003), De amor y de amargura (2003), Diez poemas y cinco prosas (2004), Ahora y siempre (2004), Su nombre era el de todas las mujeres y otros poemas de amor y desamor (2005), La vida en llamas (2006) prix Ville de Melilla 2005, Los mundos y los días, poesía 1970-2005, 2012.



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur escritores.org)
    une bio-bibliographie (en espagnol) de Luis Alberto de Cuenca
    → (sur A media voz)
    une page sur Luis Alberto de Cuenca (comprenant de nombreux poèmes)





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