Étiquette : Raymond Queneau


  • 21 février 1903 | Naissance de Raymond Queneau

    Éphéméride culturelle à rebours


    Le 21 février 1903 naît au Havre Raymond Queneau.






    Je tra-ais - travers les ondes mon petit tout petit chemin
    Image, G.AdC





    UN CHEMIN D’EAU



        Mon avenir est-il sur l’eau
    souventes fois me le demande
    Où est-il le temps des limandes
    où nageant comme un serpentin
    je traçais à travers les ondes
    mon petit tout petit chemin
    mais le crauler s’est assagi
    en restant sur la terre ferme
    marcher sur l’eau est difficile
    prendre le bateau bien banal
    l’Océan dans mon esprit
    engendre ici ces poésies
    Je marche le long du canal
    en regardant les chalands lents
    poursuivre leur chemin fatal
    vers le port de débarquement




    Raymond Queneau, Fendre les flots, 1969, in Courir les rues | Battre la campagne | Fendre les flots, Gallimard, Collection Poésie, 1981, page 316.





    RAYMOND QUENEAU


    VIGNETTE REMOND QUENEAU
    Source



    ■ Raymond Queneau
    sur Terres de femmes

    Raymond Queneau | Le songe végétal


    ■ Voir aussi ▼

    → (sur La République des Lettres)
    une page bio-bibliographique sur Raymond Queneau
    → (sur le site de la BnF)
    plusieurs pages sur Raymond Queneau




    Retour au répertoire de février 2011
    Retour à l’ index de l’éphéméride culturelle
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • 26 octobre 2007 | 26 octobre 1987 | Enrique Vila-Matas,
    Journal volubile

    Éphéméride culturelle à rebours



    Sur la plateforme du 24 -j-emprunte en permanence cette ligne-(2)
    Ph., G.AdC






    OCTOBRE




         . C’était en octobre, il y a exactement vingt ans. Je m’en souviens comme si c’était aujourd’hui. Nous étions le 26 et je suis monté dans le 24. J’ai noté la date sur le livre que j’ai acheté ce jour de 1987. Je croyais connaître son auteur, Raymond Queneau, mais je n’avais aucune idée de ce dont pouvait parler le livre. Le titre ne semblait pas très attirant, Exercices de style, mais les 99 fragments qui le composent sont, en fait, très amusants. C’est ce que j’ai découvert à peine étais-je monté dans le 24. Debout sur la plate-forme de l’autobus, j’ai commencé à voir avec un étonnement amusé en quoi consistent ces Exercices que je venais d’acheter. Et au fur et à mesure que je lisais, je les trouvais de plus en plus géniaux. On y raconte ― de 99 façons différentes ― une courte histoire. En vers, en prose, au présent… la longueur est variable, de 4 à 499 lignes. En développant un seul thème ― une anecdote insignifiante, une altercation dans un autobus et un trajet dans Paris ―, l’auteur enferme à double tour le lecteur dans chacune de ces 99 histoires et le séduit avec toutes sortes d’exercices de style et de jeux de mots.

         . Là, sur la plateforme de l’autobus, je me suis mis, ce jour-là, à rire et je crois même, à force, que j’ai failli me décrocher la mâchoire avec les 99 versions de l’histoire de Queneau (lire Que No, un nom heureux), une histoire qui, synthétisée, est aussi bête que cela : un matin, sur la plateforme arrière d’un autobus presque bondé de la ligne S, quelqu’un observe un jeune homme qui accuse un voyageur de l’avoir piétiné volontairement et arrête soudain de récriminer dès qu’il voit une place libre. Deux heures plus tard, on retrouve le jeune homme devant la gare Saint-Lazare en train de bavarder avec un ami qui lui conseille de mieux fermer son pardessus en faisant remonter le premier bouton par un tailleur compétent.
         Je me dis parfois que ce livre m’a impressionné au-delà du raisonnable peut-être parce que c’était la première fois que je lisais dans le 24 une histoire qui se déroulait dans un autobus.

         . Raymond Queneau publia son dernier roman dans la France de 68. Je ne sais pas si l’année était un bon choix, toujours est-il que Le Vol d’Icare parut pendant ces jours compliqués. C’est maintenant Elisenda Julibert qui le publie chez Marbot, une nouvelle petite maison d’édition de Barcelone. Il semblerait que de nouvelles maisons d’édition à vocation ― par bonheur ― littéraire naissent presque chaque jour parmi nous. C’est étonnant et il faut s’en réjouir.
         L’histoire de Queneau démarre à Paris, aux alentours de l’année 1895. Un écrivain qui s’appelle Hubert crée un personnage nommé Icare qui, alors qu’il n’a qu’une quinzaine de pages de vie, peut-être à cause de son penchant à voler octroyé par son nom, s’échappe, s’envole littéralement du livre. Hubert cherchera son personnage et, soupçonnant son collègue Surget de le lui avoir volé, fera appel aux services du détective Morcol. Étranger à tout cela, le malheureux Icare qui, n’ayant vécu que quinze pages, ne sait guère se conduire dans le monde, s’est réfugié dans une taverne où il boit de l’absinthe sans connaître les pouvoirs de la boisson. Dès lors, on va de surprise en surprise.
         J’ai commencé à le lire, hier, sur la plateforme du 24 (j’emprunte en permanence cette ligne) et, même si le récit de Queneau ne commence pas dans un autobus, je me suis remis à rire comme au bon vieux temps. Je n’ai interrompu ma lecture que pour descendre de l’autobus. Je suis timidement descendu du 24 au moment où Hubert fumait un Partagas devant ses feuilles blanches et buvait mélancoliquement un porto. J’ai fini à la maison ce livre qui, si on lui volait les pages 2 (Note à l’édition) et 300 aurait 299 pages ce qui aurait été parfait parce que j’aurais pu spéculer sérieusement sur l’influence du nombre 99 dans ma vie de passager permanent du 24.



    Enrique Vila-Matas, Journal volubile, Christian Bourgois Éditeur, 2009, pp. 194-195-196. Traduit de l’espagnol par André Gabastou.






    Retour au répertoire du numéro d’octobre 2009
    Retour à l’ index des auteurs
    Retour à l’ index de l’éphéméride culturelle

    » Retour Incipit de Terres de femmes