Étiquette : Stéphane Bouquet


  • Stéphane Bouquet | Preuves du monde


    PREUVES DU MONDE
    (extrait)





    La pluie a lieu. La mer a lieu. Le vent.

    La lande a lieu : sol spongieux
    mousses et bruyères roussies
    & à l’improviste troupeaux
    de moutons-béliers
    à millions de crottes rondes. Le phare
    au bout lointain de la lande a lieu

    parmi les herbes ou parmi les algues
    près des menhirs
    penchés dans la direction du couchant
    : dans la famille
    des dieux gaulois du ciel je demande
    l’organisateur des orgies.

    Cernunnos il semble s’appeler

    : sors de l’eau

    ta senteur de savon

    kiwi-mangue tahitise-moi

    avec n’importe quelle

    preuve que tu es une porosité

    de plus pour me servir

    de monoï aloé vera

    huile de macadamia

    algue spécialement séchée

    sel régénérateur

    ou autre facilitateur de vie.

    La douche a lieu. Mais ensuite
    il nous fallut sortir couverts
    vu que la météo marine
    annonçait avis de grand frais

    Les lapins ont lieu. Les faisans. Le tôlier
    zingueur a lieu. Le vent plus fort. Le soleil
    éblouissant.

    Ce qui manque, c’est
    une immensité de plage en nous
    où accueillir ce qui débarque

    non d’ailleurs :

    la plage existe

    le port

    mais pas le monde-marée

    à giga coefficient d’automne

    tiré par la lune d’équinoxe

    pour monter jusqu’au bout de nous

    et nous avaler dans sa baleine bonté.



    Stéphane Bouquet, « Une trilogie », Le Fait de vivre, éditions Champ Vallon, 2021, pp. 37-38.






    Lefaitdevivre




    STÉPHANE BOUQUET


    Stéphane Bouquet 2
    Source





    Stéphane Bouquet
    sur Terres de femmes


    East Side Story (poème extrait des Amours suivants)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions Champ Vallon)
    une page sur Stéphane Bouquet





    Retour au répertoire du numéro de mars 2021
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Peter Gizzi | Scratch Ticket



    SCRATCH TICKET




    Confetti in April
    Confetti in May

    This was the last party
    the animal sun asleep

    O stymie dewy surprising thing
    Leaf, you have arrived again

    The web is on the vine
    and the cricket clicks

    If the blue toned arc
    inside the vender’s luck

    If time itself doubled back
    and unwound the string

    How is it this afternoon
    being wide be also crystal —

    the total vista bright
    Let this and that begin

    O wind remember the tune
    Bird, enough of your trill





    Peter Gizzi, The Outernationale, Wesleyan University Press, Middletown, CT 06459, 2007, pp. 17-18.







    Gizzi couv








    AU GRATTAGE




    Confetti en avril
    Confetti en mai

    C’était la dernière fête
    le sommeil du soleil animal

    Ô chose mouillée trouée surprise
    Feuille, te revoilà

    La toile est sur la vigne
    et le criquet clique

    Si l’arc aux tons bleus
    dans la chance du vendeur

    Si le temps lui-même faisant demi-tour
    et déroulant sa corde

    Comment se fait-il que cet après-midi
    bien qu’immense soit aussi cristallin —

    la perspective totale et lumineuse
    Que ceci et cela commencent

    Ô vent souviens-toi de la musique
    Oiseau, ça suffit tes trilles





    Peter Gizzi, L’Externationale, Éditions Corti, Série américaine, 2013, pp. 25-26. Traduction de Stéphane Bouquet.






    Peter Gizzi  L'Externationale




    PETER GIZZI


    Peter Gizzi_NewBioImage_Credit-ElizabethWillis
    Ph. D.R. Elizabeth Willis
    Source





    ■ Peter Gizzi
    sur Terres de femmes


    Bolshevescent (autre poème extrait de The Outernationale)




    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur poets.org)
    une notice bio-bibliographique sur Peter Gizzi
    → (sur YouTube)
    une lecture par Peter Gizzi de huit poèmes extraits de The Outernationale et leur traduction en français (sauf le dernier) par Stéphane Bouquet (“Une panique qui peut encore me tomber dessus”, 1.2.3.4.5 + “Spectre sans titre d’Amherst” + “Un jardin occidental” + “L’Externationale”) [gale­rie éof, 15, rue Saint-Fiacre – 75002 Paris | 29 mai 2012]






    Retour au répertoire du numéro de juin 2019
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Barbara Pogačnik | Thèbes




    TEBE




    Tomaž, rdeče sonce na tleh,
    mlade mušice proti rdečemu soncu na
    modrih oblakih, travnik in zidek objeta v enem
    samem tankem
    steblu svobodnega. Živali preidejo
    v rastline in človek
    preide v rastline in in rastline preidejo
    v predmete in predmeti preidejo v dih,
    in dih preide v dim in postane tempelj
    oblik, ki jih zdaj lahko izdihamo,
    soba postane smer; upor se izmika črti,
    usta jedo, ko so rdeče rože v vencih
    in ko ljudi obsijejo raznobarvni oblaki.
    Navezanost postane negibna noga, čudež stopala
    je na tem svetu in vzdržimo v kubizmu, v razgretem
    srednjem veku, kjer se konji smejijo,
    ljudje grizejo drug drugega
    po glavi, in duh božji je v potoku
    in še danes pljuva.
    Daj nam danes naš vsakdanji smeh in
    obpusti nam naše počasne roke, Miró
    besed.






    Mirò des motsPh., G.AdC







    THÈBES

    En hommage à Tomaž Šalamun



    Tomaž, le soleil rouge par terre,
    des jeunes moucherons vers le soleil rouge sur
    les nuages bleus, le pré et le mur du jardin main dans la main,
    étreints dans une seule tige frêle
    de celui qui est libre. Les animaux passent
    en végétaux et l’homme
    passe en végétaux et les objets passent en souffle,
    et le souffle passe en fumée pour devenir le temple
    des formes que nous pouvons à présent expirer.
    La chambre devient direction, la résistance fuit
    la ligne droite, la bouche mange, les fleurs rouges sont en corolles,
    les nuages de différentes couleurs éclairent les gens.
    L’attache devient une jambe qui ne peut bouger, le miracle du pied est dans le monde, on réussit à tenir le coup du cubisme, le coup du moyen âge échauffé où les chevaux rient, et où
    les hommes se mordent la tête
    l’un l’autre, et l’esprit saint est dans le ruisseau,
    à cracher tout autour jusqu’à nos jours.
    Donne-nous aujourd’hui notre rire de ce jour et
    pardonne-nous nos mains si lentes, le Mirò
    des mots.

    Janvier 2015



    Barbara Pogačnik, in Et même quand le soleil [poèmes de Milan Dekleva, Maja Vidmar, Barbara Pogačnik, Uroš Zupan, Tomaž Šalamun], LUD Literatura & Éditions Éoliennes, Ljubljana/Bastia, 2015, pp. 74-75. Édition bilingue. Poème traduit du slovène par Stéphane Bouquet, Guillaume Métayer et l’auteur.






    Et-meme-quand-le-soleil






    BARBARA   POGAČNIK


    Barbara Pogacnik
    Source



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur Levure Littéraire)
    plusieurs poèmes de Barbara Pogačnik
    → (sur Recours au poème)
    une notice bio-bibliographique sur Barbara Pogačnik (+ cinq poèmes)
    → (sur Terres de femmes)
    Tomaž Šalamun | Va



    Retour au répertoire du numéro de juillet 2015
    Retour à l’ index des auteurs


    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Andrea Inglese | [In questa poesia sono senza sguardo]



    DANS CE POÈME JE SUIS SANS REGARD]
    Ph., G.AdC







    [IN QUESTA POESIA SONO SENZA SGUARDO]




    In questa poesia
    sono senza sguardo
    eppure completo il foglio e lo firmo
    riesco a rispondere al telefono
    sono senza cervello ma corro all’uscita
    sono perfettamente in orario
    anche dentro il garage faccio spazio
    uso tutto il mio corpo
    i passanti mi guardano con approvazione
    completamente privo dello sguardo
    prendo l’ascensore e seguo una donna
    mi lascio presentare al responsabile
    gli stringo la mano senza cervello
    lui mi guarda contento




    Andrea Inglese, La grande anitra, Edizioni Oedipus, Collana Megamicri, Napoli, 2013.








    [DANS CE POÈME JE SUIS SANS REGARD]




    Dans ce poème
    je suis sans regard
    pourtant je complète la feuille et signe
    réussis à répondre au téléphone
    je suis sans cerveau mais je cours vers la sortie
    parfaitement ponctuel
    même dans le garage je fais de l’espace
    utilisant tout mon corps
    les passants me regardent avec approbation
    complètement privé de regard
    je prends l’ascenseur et poursuis une femme
    me laisse présenter au responsable
    je lui serre la main sans cerveau
    il me regarde content




    Andrea Inglese, Mes cahiers de poèmes in Lettres à la Réinsertion Culturelle du Chômeur, Éditions Nous, Collection disparate, 2013, page 76. Traduit de l’italien par Stéphane Bouquet.






    Andrea Inglese, Lettres à la Réinsertion Culturelle du Chômeur
    ANDREA INGLESE


    Andrea Inglese

    Source



    ■ Voir aussi ▼

    → (sur le site des éditions Nous) la fiche de l’éditeur sur Andrea Inglese
    → (sur remue.net)
    Andrea Inglese | Colonne d’aveugles





    Retour au répertoire du numéro de décembre 2013
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Stéphane Bouquet | East Side Story




    Vespa
    Source







    EAST SIDE STORY (extrait)



    2 jours avant la fin nous roulons
    1h en scooter, il est 1h du matin, je m’accroche à son ventre, j’ai

    glissé les mains
    sous son blouson et tee-shirt pour lui caresser la respiration et ne

    pas tomber
    dans virages et collines, où allons-nous, surprise, be not afraid,

    brise un peu froide
    malgré le réconfort de son dos. Nous sommes dans des bains de

    soufre jaune
    et chaud. L’employé indique doigt indifférent les salles rivées,

    cabine 13, sol
    inondé, nous nus et les affaires aux étagères, l’eau sourd paraît-il

    directement
    par robinet interposé des déesses de l’immortalité. Il rit, il dit, si

    on s’embrassait
    à fond dans la vapeur d’anciens lavis d’ici, il m’apprend à

    distinguer
    le mouvement song de sa langue dans ma bouche, le mouvement

    tang de sa langue
    dans ma bouche, ses dents frisent dangereusement la poésie de

    renaissance occidentale :
    petit gravier d’ivoire qu’il a plein la bouche, choselettes cachées

    sous le coussin
    des lèvres, il est 4 h du matin, je bâille et demain je travaille mais

    il faut rester
    plus longtemps pour survivre à encore plus d’années, chaque

    baiser profondément
    pensé dans le très peu de jours de nous deux. La brume aussi

    est tombée sur les
    collines du retour, la pluie aussi tombait sur le scooter. Il veut

    que je conduise pour
    à son tour se coucher sur mon dos et se reposer lui aussi dans la

    zone de certitude
    provisoire mais la route est mouillée, le brouillard nous encercle,

    je n’ai jamais
    conduit de scooter, je ne veux pas que tout finisse déjà dans la

    mort. Il dit
    I don’t really believe, à son âge, à la mort mais moi si et en fait

    assez pour deux.



    Stéphane Bouquet, “East Side Story” in Les Amours suivants, éditions Champ Vallon, Collection recueil, 2013, pp. 56-57.






    Stéphane Bouquet, Les Amours suivants, Champ Vallon, 2013.




    STEPHANE BOUQUET


    Stéphane Bouquet vignette






    Stéphane Bouquet
    sur Terres de femmes


    Preuves du monde (poème extrait du Fait de vivre)




    ■ Voir aussi ▼


    → (sur le site des éditions Champ Vallon)
    une page sur Stéphane Bouquet





    Retour au répertoire du numéro de septembre 2013
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes


  • Peter Gizzi | Bolshevescent





    Profondeur de champ - distance de netteté existant avant et après le sujet sur lequel on fait la mise au point.
    Source






    BOLSHEVESCENT




    You stand far from the crowd, adjacent to power.
    You consider the edge as well as the frame.
    You consider beauty, depth of field, lighting
    to understand the field, the crowd.
    Late into the day, the atmosphere explodes
    and revolution, well, revolution is everything.
    You begin to see for the first time
    everything is just like the last thing
    only its opposite and only for a moment.
    When a revolution completes its orbit
    the objects return only different
    for having stayed the same throughout.
    To continue is not what you imagined.
    But what you imagined was to change
    and so you have and so has the crowd.




    Peter Gizzi, The Outernationale, Wesleyan University Press, Middletown, CT 06459, 2007, page 79.







    Gizzi couv








    BOLCHEVESCENT




    Tu te tiens loin de la foule, à la lisière du pouvoir.
    Tu considères le bord autant que le cadre.
    Tu considères la beauté, la profondeur de champ, l’éclairage
    pour comprendre le champ, la foule.
    Tard dans le jour, l’atmosphère explose
    et la révolution, eh bien, la révolution est tout.
    Tu commences à voir pour la première fois
    chaque chose est comme la dernière chose
    seulement c’est son contraire et seulement pour un instant.
    Quand une révolution accomplit son orbite
    les objets reviennent mais seulement différents
    d’être restés les mêmes tout du long.
    Continuer n’est pas ce que tu imaginais.
    Mais ce que tu imaginais c’était de changer
    et voilà tu l’as fait, et la foule aussi.




    Peter Gizzi, L’Externationale, Éditions Corti, Série américaine, 2013, page 82. Traduction de Stéphane Bouquet.






    Peter Gizzi  L'Externationale




    PETER GIZZI


    Pour  vignette peter gizzi
    Source




    ■ Peter Gizzi
    sur Terres de femmes


    Scratch Ticket (autre poème extrait de The Outernationale)




    ■ Voir | écouter aussi ▼

    → (sur poets.org)
    le poème “Bolshevescent” dit par Peter Gizzi (+ une notice bio-bibliographique)
    → (sur YouTube)
    une lecture par Peter Gizzi de huit poèmes extraits de The Outernationale et leur traduction en français (sauf le dernier) par Stéphane Bouquet (“Une panique qui peut encore me tomber dessus”, 1.2.3.4.5 + “Spectre sans titre d’Amherst” + “Un jardin occidental” + “L’Externationale”) [gale­rie éof, 15, rue Saint-Fiacre – 75002 Paris | 29 mai 2012]







    Retour au répertoire du numéro d’avril 2013
    Retour à l’ index des auteurs

    » Retour Incipit de Terres de femmes