UN PETIT COULOIR
Un petit couloir de craie blanche
Sur le bord de l’eau bleue qui tremble
Et voici que je marche sans lanterne
Au-devant d’une table dans les étoiles
L’ombre épineuse y tremble et tourne
D’un grand rosier dans la lune lointaine
Et comme dans l’amour de l’âme et des fontaines
Rien ne s’explique plus qu’à grands signes d’eau pâle
Emportés par la nuit vers le mur bleu du fleuve
Amour il fallut que je découvre
Autre usage d’un ongle en ta tempe de craie
Âme profonde sur la blanche baie
Des prairies brumeuses tes yeux de source
Vers elles se tournèrent qu’il faut que je retrouve
Et moi sur la chaise des pervenches nocturnes
Je suis assis mains plates sur la table des herbes
L’eau passe bleue sous la barque qui s’use
Au loin roulent blancs les mondes jusqu’à se perdre.
Ph., G.AdC
Jean-Philippe Salabreuil, La Liberté des feuilles, Éditions Gallimard, Collection Le Chemin dirigée par Georges Lambrichs*, 1964 ; Orphée/La Différence, 1990, page 27. Présentation par Claude Michel Cluny.
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* NOTE d’AP : la collection Le Chemin (collection de littérature française de création et d’essais critiques au sein des éditions Gallimard) a été dirigée de 1959 à 1992 par Georges Lambrichs (1917-1992).
