Claude Ber | Sinon la transparence

«  Poésie d’un jour  »


Mer_cnotaphe_et_nos_prisons_de_plex
Ph. angèlepaoli







Recensement 4 (État des mers)


La mer parle. Et se tait. Dans le silence de la mer des bavards révèlent ce qui n’existe à haute voix qu’aux époques de grand courage. Papotis de surface et clabaudements. 11 août dix heures trente une mer chaude soulève son pelage. Elle dodeline des replis de toison. La mer respire dans le poil sombre de la mer, roulant son ventre contre ses fonds. 5 septembre dix-sept heures une mer végétale couche son herbe sous la pluie, mer forestière à longue branches de mélèze coupé. Elle torsade son lierre et pose sur la plage ses pales pattues de nénuphar. 21 janvier trois heures : une mer bise râpe son dos de pierre ponce. Mer anthracite coulée à pic en dedans de la mer. 18 mai douze heures dix la mer éponge dans ses pores. C’est une mer muqueuse qui se pourlèche à coups de vagues charnues. La mer lampe la mer comme un biscuit trempé et clapote dans sa bouche. 13 juillet n’importe quelle heure : mer lisse et plate et simplement relayée de traits. Elle se lave d’oubli ou de mémoire. Mer cénotaphe et nos prisons de plexiglas.



Claude Ber, Sinon la transparence, éditions de l’Amandier, 2008, page 106.




CLAUDE BER


Claude-BER  ©-Adrienne-Arth NB
Ph.© Adrienne Arth
Source




■ Claude Ber
sur Terres de femmes


Épître Langue Louve (note de lecture d’AP)
Il y a des choses que non (note de lecture d’AP)
In memoriam (extrait d’Épître Langue Louve)
La mort n’est jamais comme (note de lecture d’AP)
Je dis mer (extrait de La mort n’est jamais comme)
[Toujours la langue veut dire] (extrait du recueil Il y a des choses que non)
Vues de vaches (note de lecture d’AP)
Claude Ber, Pierre Dubrunquez, L’Inachevé de soi (note de lecture d’AP)
→ (dans l’anthologie poétique Terres de femmes)
le miel à la bouche




■ Voir aussi ▼


le site de l’écrivain Claude Ber





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Commentaires

  1. Avatar de Christiane
    Christiane

    La mer de Claude Ber est une femme voluptueuse offerte à la jouissance d’une langue charnue et juteuse comme un fruit défendu. Elle est étrangère aux grands orages meurtriers d’Hugo, à celle mystique de Chateaubriand, à celle effrayante de Poe, à celle culbutant le « bateau ivre » de Rimbaud ou au tombeau des marins de Loti.
    Au long de ces notes de voyageuse Une femme rencontre son double sensuel et invente son corps pour des noces d’écriture…

  2. Avatar de Pascale
    Pascale

    Que c’est inventif ! Que c’est beau.

  3. Avatar de Guidu

    Incommensurable_____

    interminable rhapsodie tendue sur le vide
    vertige simultané d’obsessions récurrentes
    sur l’horizon factice de l’avenir supposé
    la mer à cet endroit s’abîmait de magnificence
    récusant les présages des prophètes de l’infini
    il fallut bien admettre que l’abstraction proférée au front des marins signifiait l’universelle condition des humains

    Amicizia
    Guidu___
    Ps : c’est ce que j’ai vu dans votre belle photographie, chère Angèle

  4. Avatar de Alistrid
    Alistrid

    Je me laisse bercer.
    Angèle et Christiane, je vous embrasse.
    Je n’ajoute rien. Nul besoin.
    Ce sourire de Claude m’invite à sourire aussi.
    ;o)

  5. Avatar de Christiane
    Christiane

    J’aime beaucoup ces chemins qui divergent entre Guidu-photo et Claude Ber-poème. Ce sont deux voies (voix) de Terres de Femmes auxquelles vous êtes profondément accordée. Je trouve des instants de pure beauté dans l’alliance des « Rouges de Chine » entre vos deux espaces de création. Aujourd’hui, ce noir et blanc incisif vous est morsure de sel…

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