Georges Guillain | Que ce lieu pour rester

«  Poésie d’un jour  »





TU FUIS L'ÉTROITE NOMENCLATURE DES CHOSES DU PASSÉ
Ph., G.AdC






QUE CE LIEU POUR RESTER

                       (EXTRAIT)



Finalement
tu réduis tout
à presque rien

rien cette poudre qui reste
sur les doigts

ce grand savoir dressant dans ton cerveau
ses murs de cave

tu as
de moins en moins besoin
de ce gros projecteur des livres
de coller à la lumière enfin tranquille de cet arbre

sans nom sans âge

le poids voulu d’une forêt
le brun verdâtre de ses fruits

tu fuis
l’étroite nomenclature des choses du passé
dont tu ne cherches pas à fixer les lignes chiffonnées

rapetasser
tout l’être épars

pour en sentir juste l’approche
impalpable sans mots

*

Ainsi
tu n’auras pas à dire

qui tu es

à préciser
qui te manquait ce jour-là à cette heure

tu n’auras pas à dire
s’il s’agissait d’une soirée pluvieuse
où tu avais trop bu

si tu lisais sans voir un poète chinois …

tu n’as plus de mémoire pour ces choses
qui se mêlent pourtant en toi comme toutes les autres

qui font parfois semblant de te connaître
et puis t’éclairent

au fond

sont ta lanterne sourde

[…]


Georges Guillain, Avec la Terre, au bout, Atelier La Feugraie, 2011, pp. 87-88.





LA VIE N'A PLUS ASSEZ DE VIE
Ph., G.AdC





GEORGES GUILLAIN


Georges Guillain  portrait





■ Georges Guillain
sur Terres de femmes

[Il n’y a pas de poésie descriptive] (extrait de Compris dans le paysage)
six août | Georges Guillain, Compris dans le paysage
[Novembrer tout y revient patauger] (autre extrait d’Avec la terre, au bout)
[Voilà que tu es devenu poreux] (autre extrait d’Avec la terre, au bout)
Tant que nous sommes (extrait d’Un bouquet pour les morts)
[Voilà] (extrait de Parmi tout ce qui renverse)




■ Voir aussi ▼

→ (dans la poéthèque du site du Printemps des Poètes)
une fiche bio-bibliographique sur Georges Guillain





Retour au répertoire du numéro de janvier 2009
Retour à l’ index des auteurs


» Retour Incipit de Terres de femmes

Commentaires

  1. Avatar de semaphore

    Je le lis comme cherchant à y découvrir l’énigme que je sens sourdre en lui ;
    Comme un oracle reçu en plein coeur.
    Merci, Angèle, pour ce texte et tous ceux par vos soins offerts à nos regards,
    à notre inextinguible soif de cet au-delà des mots,
    dont ils se font les passeurs, les bateliers.
    Je souligne ici la fin de cet extrait,
    le faire résonner en moi, à nouveau :
    « le cœur est une roue tournant trop vite sur la route
    la vie après qu’elle est passée
    la vie
    n’a plus assez
    de vie »

  2. Avatar de Christiane
    Christiane

    Il y a une telle discrétion dans ce poème, un tel bon sens qui naît des cinq sens, un sens de la vie comme elle va, cailloux de la route, bruit des pas sur la route, soupir sur la route. Mots de silex et de marcheur solidaire des cailloux sur la route, du bruit des pas sur la route, bruit du silence des mots sur la route…

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *