Hortense Flexner | The Island

« Poésie d’un jour »

Topique : Insularité


Sutton Island nb
Source






THE ISLAND



This multiple isle,
Peeled to its granite at the water line,
Descending now
By inches to the sea,
Marked for possession by the ruin of salt,
Still holds its own.


And still to its sides we cling
In summer’s rarity;
Strengthen our homes of match-sticks
With our love;
Replace the spongy plank,
The loosening nail,
And plan return,
Savoring the end.


An end ― no end;
Farewell ― not going.
For we have learned, as creatures of the woods,
To be most still;
Unseen, to see;
In the deep silence, hear;
Until our lives,
Inhaling sun and freshness, are as one
With sea-birds nesting near the waves,
Ants among ground pine,
Red squirrels eating cones
In an old porch chair ―


And we are numbered with the seasonal tribes
That sleep, or flee, or die,
But will return.



Hortense Flexner, Poems for Sutton Island, in Poems, The Now & Then Press, New York, 1961.







ÎLE



Cette île multiple,
Pelée jusqu’au granit à la ligne de marée haute,
Glissant incessamment vers la mer,
Marquée pour la destruction par le sel,
Résiste encore.


Et nous nous accrochons encore à ses flancs,
Durant le bref été,
Renforçant avec amour nos cahutes,
Remplaçant la planche pourrie,
Le clou qui branle.
Nous comptons revenir ;
Nous savourons la fin d’une saison.


Fin sans fin,
Adieu sans départ.


Car nous avons appris comme les bêtes des bois
À nous tenir cois,
À voir sans être vus,
À entendre dans le grand silence,
Jusqu’à ce que nos vies,
Inhalant le sel et l’air frais,
Ne fassent qu’un avec celles des oiseaux de mer nichés près des vagues,
Des fourmis parmi les aiguilles de pin,
Des bruns écureuils grignotant un cône
Dans un vieux fauteuil sous le porche.


Et nous prenons place parmi les tribus saisonnières
Qui dorment, ou s’en vont, ou meurent,
Mais qui reviennent.



Hortense Flexner, Poèmes écrits pour Sutton, in Marguerite Yourcenar, Présentation critique d’Hortense Flexner, suivie d’un choix de Poèmes, édition bilingue, Éditions Gallimard, 1969, pp. 90-91-92-93. Traduit de l’américain par Marguerite Yourcenar.






Flexner





■ Voir aussi ▼

→ (sur MSL [Maine State Library])
une notice bio-bibliographique (en anglais) sur Hortense Flexner
→ (sur le site de l’Université de Louisville)
une bio-bibliographie (en anglais) d’Hortense Flexner)




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Commentaires

  1. Avatar de christiane
    christiane

    Je comprends que Marguerite Yourcenar ait ressenti un coup de foudre pour la poésie d’Hortense Flexner, qu’elle ait eu envie de traduire et de préfacer cette oeuvre. L’île de Sutton, où H. F. venait chaque été, était proche de « Petite Plaisance« , la maison blanche de l’île des Monts Déserts, toute de bois, dans le Maine, où M. Y. résida, entre deux voyages, près de quarante années avec sa compagne, Grace Frick.
    Elles partagent le même goût pour le silence et la beauté sauvage et subversive des lieux, comme ce poème l’exhale à chaque mot.
    L’écriture les unissait par une solide amitié. Contact avec le sacré, une nature quasi inviolée, austère, sauvage : la mer, le ciel, les arbres, les rochers, les fleurs sauvages, les bêtes, les migrations d’oiseaux, le vent… Lieux romantiques de contemplation, de paix, de marche et de silence…. Des terres de femmes… et d’écriture.

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